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EAN : 9782021406610
528 pages
Seuil (20/08/2020)
3.45/5   38 notes
Résumé :
Muni d'un carnet, d'une paire de ciseaux et de son smartphone, Antonio Muñoz Molina marche dans Paris, New York, Madrid, Lisbonne. Au fil de ses pérégrinations, des silhouettes surgissent tandis que d'autres s'esquivent et, soudain, au détour d'une ruelle, apparaissent Baudelaire, Edgar Allan Poe ou Fernando Pessoa.

Les pages s'écoulent au rythme de la vie, tel un immense collage de tout ce que le promeneur voit et entend : affiches, prospectus, bruit... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (11) Voir plus Ajouter une critique
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Un andar solitario entre la gente, le dernier roman d'Antonio Muñoz Molina m'a laissée sur le bas-côté de la route. Dire que j'ai peiné à le terminer serait un euphémisme et je suis bien triste de ne pas être aussi enthousiaste que la majorité de ses lecteurs.
Le narrateur, un peu dépressif, se promène dans les rues de Madrid, de New-York, de Paris, et nous livre ses observations. Au cours de ses déambulations, surgissent des hommes, des noms, des bruits, des bribes de conversations, des pensées, des interrogations, des collages, des slogans publicitaires. Comme d'illustres prédécesseurs, Baudelaire, Walter Benjamin, Federico Garcia Lorca, Antonio Muñoz Molina est le piéton qui témoigne et partage ses observations sur la ville, sur les nouveaux modes de vie et de consommation, sur la beauté et la laideur de notre monde.
Si j'ai eu beaucoup de mal à terminer ce roman (qui n'en est pas un) de 494 pages, ce n'est pas à cause de la structure fragmentaire car j‘adore son ouvrage Séfarad, qui est un de mes livres préférés. Le narrateur de Un andar solitario entre la gente m'a laissée de glace, les slogans publicitaires, les injonctions des réseaux sociaux, les collages, la manifestation intempestive de la modernité m'ont fatiguée (était-ce le but de cette oeuvre?). Le seul élément qui m'aura poussée à terminer cette lecture harassante et finalement pour moi inconsistante est l'érudition d'Antonio Muñoz Molina et son amour pour les romanciers tels Quincey, Pessoa, Whitman. Finalement je me suis sentie très seule dans cette longue déambulation au milieu d'inconnus.
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Ce promeneur est sans doute l'auteur lui-même, qui se balade, explore, les paysages urbains, à Madrid, Paris, New-York... Mais il semble régulièrement croiser le chemin, suivre, entrapercevoir, une silhouette qui se dérobe, qui disparaît lorsqu'il pense l'avoir retrouvée, d'un homme qui comme lui parcourt la ville, récupère des prospectus, catalogues, affiches etc ; essaie de classifier, de garder trace de la vie telle qu'elle est, telle qu'elle se transforme, telle qu'elle va disparaître sans doute en un cycle de plus en plus rapide de transformations. Une sorte de double, de négatif, de l'écrivain lui-même peut-être.

Mais il y a aussi tous les promeneurs illustres qui les ont précédés. de grands artistes, comme De Quincey, Wilde, Baudelaire, Joyce, Benjamin, Poe...Poe qui écrivit une nouvelle intitulée L'homme des foules, dans laquelle le narrateur, observant les passants se trouve attiré par un homme qu'il va suivre, et avec qui il n'arrivera pas à établir le contact, un peu comme Antonio Muñoz Molina n'arrive pas vraiment à communiquer avec l'homme qui apparaît régulièrement, et dans divers lieux, qu'il parcourt. Les artistes évoqués par l'auteur sont des génies acculés, méconnus par leurs contemporains, démolis par des drogues, par la misères, par le rejet de leurs oeuvres ou de leurs personnes. Et qui eux aussi arpentent les rues, tentent de saisir avec leurs yeux aiguisés l'esprit de leur temps, les ambiances, les décors, les passants. Comme Benjamin qui aura rassemblé un gigantesque matériel en vue d'un ouvrage monumental, le livre des passages, qui ne sera jamais véritablement écrit, qui va se résumer à de la documentation, des morceaux, des projets... Une sorte de splendide ruine de ce qui aurait pu être un magnifique monument. Mais le destin tragique de Benjamin, qui l'a transformé en exilé misérable, tentant de survivre tant bien que mal grâce à quelques travaux alimentaires, ne lui permettra pas de donner corps à son projet jusqu'à la fin prématurée de sa vie.

Ce sont ces passages, dans lesquels Antonio Muñoz Molina évoquent ses illustres prédécesseurs, qui m'ont le plus passionné. Il réussit à créer des personnages, à communiquer sa passion pour leurs oeuvres, à nous donner la sensation de partager leurs destinées, même si pour ce faire il procède parfois à des schématisations des vies véritables de certains d'entre eux. Mais peu importe, il fait flamboyer le destin des divins miséreux créant des merveilles dont d'autres tireront des profits après leurs morts. Certains de ces passages m'ont rappelé les volumes du Manifeste incertain de Frédéric Pajak, en particulier ceux qui évoquent Walter Benjamin. D'autant plus qu'Antonio Muñoz Molinain insère dans son livre, des images, photos ou reproductions de tableaux, moins nombreux certes que les dessins dont Pajak illustre ses livres. Il y aussi de très beaux paragraphes consacrés à l'auteur lui-même, à la femme qu'il aime, à son déménagement etc. J'ai en revanche trouvé un peu trop long parfois et par moments répétitifs, les passages décrivant le monde contemporains, les publicités, décors, atteintes à la planète etc. Globalement, je pense que ce beau livre aurait encore gagné à être un petit peu plus ramassé.

Mais peu importe. J'ai aimé déambuler avec Antonio Muñoz Molina dans les villes qu'il traverse, l'entendre me parler de tous ces artistes, et évoquer ce qu'il aime et ce qui le dérange, de manière libre, sans hâte, à son rythme. Un voyage à recommencer dans d'autres livres de l'auteur.
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« En tout temps, on a fait ce qu'il y avait à faire avec les matériaux qu'on avait à portée de main et, désormais, ce sont les déchets, la ferraille, les détritus que l'on trouve le plus. Vous devrez donc vous en servir pour écrire le poème, qui sera peut-être très long et nécessitera beaucoup de matière première, mais il n'y a aucun risque qu'elle s'épuise. Bien au contraire : plus le temps passe et plus cette richesse s'accumule, de grandes cordillères, des Everest de déchets qui deviennent plus hauts à chaque minute qui passe, des dépotoirs de mots, des décharges de la taille d'océans, d'ailleurs les océans eux-mêmes sont une gigantesque décharge, des courants marins d'ordures qu'on verra de l'espace comme les tempêtes et les tornades. Ce poème exigera une longue immersion, peut-être toute une vie. Celle de la personne qui l'écrira et de la personne qui le lira. Il sera probablement anonyme et accumulatif, un dépôt et un assemblage de matériaux beaucoup plus anciens, comme les poèmes homériques. Et il ne devra contenir aucun vers, aucune phrase, aucun mot qui serait une invention personnelle de son ou de ses auteurs, si tant est qu'on puisse employer ce mot dans ce cas de figure. »

Ce livre inclassable mais puissamment littéraire, nous l'avons entre les mains et le lisons. L'auteur y utilise en effet des textes issus d'injonctions publicitaires, des collages graphiques qui reflètent parfaitement la très grande folie et les innombrables contradictions de nos sociétés marchandes basées sur l'accumulation, de déchets comme de capitaux.

La forme est visiblement éclatée et pourtant substantielle. Chaque courte séquence débute par une formule publicitaire ou un titre de fait-divers. Des dessins de l'auteur, des collages, rompent régulièrement la lecture.
L'auteur vit une période de crise personnelle. C'est l'année des attentats de Nice, de la folie Pokémon-Go. Seules ses longues déambulations dans de grandes villes l'apaisent et lui fournissent de la matière pour ce livre en construction. Il documente ses errances grâce à son smartphone (sons et images) mais a toujours avec lui un cartable-sac à dos qui contient aussi des cahiers et crayons à papier (il en est maniaque).

Un étrange homme apparait régulièrement, possiblement une hallucination qui le hante. Antonio Muñoz Molina met aussi et surtout ses pas dans ceux d'illustres prédécesseurs, eux-aussi « déambulateurs chroniques », aux vies marquées par la misère et les addictions (Thomas de Quincey, Edgar Allan Poe, Baudelaire, Walter Benjamin…). C'est à mon sens ce qui unifie tous ces textes qui sinon pourraient sembler décousus.

Rarement j'ai autant éprouvé ce sentiment, pourtant recherché par beaucoup de lecteurs, que ce livre s'adressait directement à moi, en dépit du contexte totalement étranger à ma propre existence. Il culmine notamment avec une traversée haletante de Manhattan jusqu'au Bronx, sur les traces d'Edgar Allan Poe.

J'ai pris tout mon temps pour cette lecture, réticent à la quitter. Et Je vais m'intéresser de plus près à cet auteur !
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Pardon, estimado señor Muñoz Molina, mais vous auriez pu nous épargner cet ouvrage : plus de 500 pages d'un verbiage aussi inutile !
Je vous cite :
« le sol vibre à l'approche du train. Ne pas monter ni descendre après le signal sonore. Je regarde les visages des gens et prête attention aux voix. Je suis tout ouïe. Je me place près de quelqu'un qui parle au téléphone dans le wagon, presque tout le monde regarde avec concentration l'écran de son portable »
Ou encore, environ 300 pages après:
« Des publicités fixées avec de la colle, du ruban adhésif et même du sparadrap sont placardées sur toutes la surface des réverbères et des poteaux des feux de signalisation. Achète votre voiture. Jeune fille bolivienne propose ses services pour s'occuper de personnes âgées et effectuer tout type de travaux domestiques. Transports et déménagements. Achète Or. Achète Argent. Serruriers de confiance. Pose de fenêtres. Peintre espagnol»
Non, sans blague, pourquoi diable, estimado señor, perdre votre temps à écrire (et faire perdre ensuite le nôtre à les lire !) des centaines de pages de sornettes de la sorte, dignes du pire des écrivains en herbe ?
Vous avez avoué, je le sais pour l'avoir lu dans un entretien que vous aviez accordé au Nouvel Observateur, que l'écriture de cet opus vous avait permis de sortir d'une période difficile de dépression. C'est très bien. Il est bien connu de tous l'effet cathartique, thérapeutique que l'écriture peut revêtir pour tout un chacun. Hélas, il me semble qu'aucun viatique ne puisse en lui-même être forcément gage d'une bonne littérature!
Ce que votre éditeur nous présente en quatrième de couverture comme étant le registre de vos pérégrinations dans des villes aussi emblématiques que New York, Lisbonne, Madrid, Paris, ayant abouti à un véritable «éloge érudit d'une flânerie» m'a peut-être fait croire, à tort, que cette lecture pourrait constituer un bon moyen de faire connaissance à la fois avec vous et avec votre plume. Je m'attendais secrètement à retrouver le plaisir des délicieuses divagations que j'avais éprouvé en lisant G.W. Sebald ou chez le Rousseau des « Rêveries du Promeneur Solitaire ». Quelle déception, je n'ai retrouvé rien de tout cela !
D'ailleurs où êtes-vous exactement, estimado señor Muñoz Molina, derrière cet amas d'impressions que vous acceptez sans discrimination de transcrire, souvent sans queue ni tête, de ces bouts de descriptions de tout et de n'importe quoi, de cet immense collage d'informations de toutes sortes qui ne cesse de se disloquer sans direction précise ? Mû par la tentation de « tout écrire », auriez-vous pu, au fond, faire une place à vous-même de manière claire, ou en tout cas suffisamment cohérente pour qu'on puisse vous y reconnaître ? J'ai eu l'impression que vous n'y êtes pas, vous-aussi, qu'en tant que fantôme, à l'instar de ces nombreux auteurs (Baudelaire, Pessoa, Poe...), toutes ces silhouettes que vous glissez dans les décors que vous traversez et dont on se demande la plupart du temps ce qu'elles peuvent bien fabriquer là...
« Tout écrire », voyons, señor Muñoz Molina, quelle ambition, quel rêve insensé pour un écrivain !
Qui veut tout, dit la sagesse populaire, risque de n'obtenir rien ...
Pardonnez-moi, estimado señor, mais j'ai abandonné votre livre en cours de route et je dois vous avouer que je l'ai refermé un peu en colère. Toutefois, croyez-moi, je ne suis pas quelqu'un de rancunier, et surtout je n'aime pas proférer des jugements hâtifs ou définitifs. J'essaierai, je vous le promets, de lire plus tard un de vos vrais romans. Pour cela, et pour me départir de cette première mauvaise impression, je compte aussi sur les billets et les éventuels conseils des lecteurs si nombreux, il me semble, qui apprécient votre oeuvre. Là, il me faut néanmoins un peu de temps avant de réessayer.
Bien à vous !
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Il m'a fallu un mois pour venir à bout de ce livre, non pas parce qu'il est aussi mauvais que ça, au contraire, j'ai passé un moment que je dirai agréable avec, mais il m'a manqué de l'enthousiasme, de véritables mobile pour pouvoir m'acharner sur ma lecture. Comme le titre l'indique, l'ossature de l'intrigue le regard de notre narrateur, autrement dit, ce sont des observations d'un promeneur solitaire. En effet, Un promeneur solitaire dans la foule nous ressort la préoccupation première est de soigner son image autant pour la publicité que pour les hommes...
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critiques presse (5)
LePoint
10 novembre 2020
[Une] somptueuse déambulation urbaine et littéraire.
Lire la critique sur le site : LePoint
LaCroix
09 novembre 2020
Écrivain de la mémoire, de l’exil et des retrouvailles, Antonio Muñoz Molina nous transporte vers la polyphonie des villes avec un récit du monde contemporain.
Lire la critique sur le site : LaCroix
LeMonde
12 octobre 2020
Mots de passe. De Madrid à New York, où il a vécu, l'écrivain espagnol cultive un art de la déambulation poétique. Dans son nouveau livre, « Un promeneur solitaire dans la foule », il sonde la désolation et le fracas des villes du XXIe siècle.
Lire la critique sur le site : LeMonde
Liberation
28 septembre 2020
Le promeneur Antonio Muñoz Molina rend compte du monde contemporain à travers choses vues, pubs, réminiscences littéraires.
Lire la critique sur le site : Liberation
LeFigaro
17 septembre 2020
De New York à Paris en passant par Madrid et Lisbonne, une singulière balade buissonnière.
Lire la critique sur le site : LeFigaro
Citations et extraits (22) Voir plus Ajouter une citation
Je sors dans la rue à la tombée de la nuit. C’est le couchant tardif du premier soir de l’été. J’entends la rumeur de forêt des arbres et du lierre dans les jardins du quartier. J’entends des voix de gens invisibles qui dînent en plein air de l’autre côté de murs couronnés de plantes grimpantes ou de seringats, séparés de la rue par des rangées de cyprès de l’Arizona. Le ciel est bleu marine dans sa partie la plus haute et bleu clair à l’horizon, où se découpent les silhouettes des toits et des cheminées comme un diorama de fausse nuit en Technicolor. Je ne veux rien savoir du monde. Je ne veux m’informer de rien d’autre que ce qui parvient à mes oreilles et ce que voient mes yeux en ce moment même. La rue est plongée dans un tel silence que je peux entendre mes pas. Le vacarme du trafic paraît très lointain. J’entends dans la faible brise le bruissement des feuilles d’un figuier et le lent remous de houle à la cime d’un grand platane. J’entends le sifflement des hirondelles qui fendent l’air de leurs acrobaties vertigineuses. L’une d’elles a effleuré si proprement l’eau d’un étang en chassant un insecte qu’elle n’a pas provoqué la moindre ondulation. J’entends les claquements de l’écholocalisation des chauves-souris. Bien plus de vibrations que ne peuvent en capter mes grossières oreilles humaines ébranlent simultanément l’air à cet instant. L’air traversé par un dense réseau de signaux radio transmettant toutes les conversations sur les téléphones portables qui ont cours en ce moment dans la ville. Je veux être tout ouïe et tout yeux, comme l’Argos de la mythologie, un corps humain bulbeux couvert de globes oculaires et de paupières qui s’ouvrent et se ferment, ou d’yeux sans paupières semblables à ceux de la porte de Carmen Calvo. Je pourrais être un super-héros de Marvel : Eyeman, l’Homme-Yeux, un monstre de film de science-fiction des années 1950. Je pourrais être un quelconque inconnu et l’Homme Invisible, plutôt celui du film de James Whale que du roman de H. G. Wells. C’est dans le film qu’est la poésie.
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Ces derniers jours, il y a eu pour toute chose une horloge, un chronomètre pressant. Chaque chose est un sablier qui marque le temps parce que son contenu ou sa taille diminue, une horloge de shampoing dans la douche, une horloge de gel indiquant la fin de ces mois, de cette retraite, de ma vie dans cette ville. Le pot de miel dont chaque matin je me suis servi [...] est presque vide. Il n'y a plus de calendrier aux cases numérotées à marquer d'une croix. Mais peu importe, car tous ces objets sont des horloges. [...] Il y a une horloge, une clepsydre de mots qui se déverse sur le papier depuis ma main et la pointe du crayon lorsque j'écris. Quand je marchais seul dans la ville pendant des heures, les jambes étaient les aiguilles de l'horloge qui mesure le temps grâce au rythme binaire de mes pas. En milieu d'après-midi, au milieu de la nuit, les bruits métalliques du chauffage dans les tuyaux et les radiateurs étaient une autre horloge, de même que l'air qui remplit les poumons et en ressort un moment plus tard dans un sifflement doux avant d'y pénétrer de nouveau. Les grains de graphite du crayon étaient les grains de sable de l'horloge de l'écriture.
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James Joyce affirme que les faits à venir projettent une ombre anticipée sur le présent. Le passé qui aurait pu survenir imprimé une ombre similaire sur les événements postérieurs. Cet espace-temps conjecturel est peuplé de fantômes dont les visages flous apparaissent derrière une tenture et traversent incognito les lieux où ils auraient pu vivre.
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Il aspire, sans doute plus par indolence que pour toute autre raison, à l'exigeante connaissance du faire sans rien faire. Moins tu salis, moins tu auras à nettoyer ou moins tu obligeras les autres à le faire à ta place. En se douchant, il a veille à ne pas utiliser trop de gel, de shampoing ou d'eau.
Il a nettoyé les miettes sur la table, ouvert la fenêtre derrière laquelle le jour s'est presque levé et laissé entrer dans la chambre l'air froid un peu humide de la fin de l'hiver. À chaque fois qu'il sort, il essaie de visualiser les choses telles que les verrait un autre pendant son absence; ce que pourrait voir ou trouver quelqu'un s'il ne revenait jamais. Il découvrirait des empreintes, mais aucun déchet. Il pourrait s'installer chez lui aussi confortablement que les voyageurs des contes, qui arrivent dans une maison au milieu de la forêt et constatent que les lieux sont déserts, mais que tout est disposé pour les accueillir. Il ne veut briller que par son absence.
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Tous les papiers qui jonchent le sol, les mégots, les prospectus, les verres en plastique, les publicités pour des massages pour acheter de l'or ou des voitures, tout cela s'agite, mêlé aux feuilles sèches, dans de brèves turbulences, feuilles d'arbres, plastique, papiers, détritus, les gouttes éparses d'une pluie invisible et rapide tombent comme des aiguilles sur le visage, traversent la chemise d'été, ruissellent sur les pare-brise sales des voitures garées là depuis très longtemps, transforment en pulpe de papier les publicités restées des jours prisonnières sous les balais des essuie-glaces.
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