MAGNIFIQUE ! Tout commence par la musique pure des « chuchotements lourds de sens » pour finir par mes poèmes préférés « Les musées vous diront », une chevauchée de fantaisies en présence physique des oeuvres d'art.
« Quand la nature fuit à toutes jambes
Je me jette dans les cieux sans nuages
Du haut de ce pont des âges
Et le temps caché dans mes vers tremble »
Je relève cette première citations. Et plus je pénètre dans ce livre de
Thierry Noiret plus je sens que nos quêtes sont jumelles. Cette écriture me remplit de bonheur comme une rencontre, comme si nous nous étions croisés sur un pont. Mais ce n'est ni une passerelle parisienne, ni un ponceau vénitien, ni un géant enjambant le Saint-Laurent : c'est le Pont des Âges et c'est une autre dimension !
J'ai appris dans la présentation de l'auteur sur sa page Babelio qu'il considère les années de 2006 à 2013 comme son ère de Peinture. C'est un abandon provisoire de l'écriture pour abreuver la page blanche de formes et de couleurs. Il achève alors de nombreux tableaux et donne quelques expositions. Sur la couverture de cet opuscule est placée une de ses oeuvres : « Croisée des chemins » qui m'a immédiatement captivée et incitée à l'acquisition des poésies. Dans ma tête puis sur Internet, j'ai cherché des écrivains qui ont produit également des tableaux, vu mon intérêt particulier pour cet art. J'ai trouvé des noms aux quatre coins de l'horizon tels que
Victor Hugo,
Jean Cocteau,
Henri Michaux,
Jack Kerouac,
Hermann Hesse,
Günter Grass,
Charles Bukowski,
Henry Miller,
William S. Burroughs,
Edward Estlin Cummings,
Tennessee Williams,
Alain Yvars... Avec
Pablo Picasso ou
Oskar Kokoschka c'est plutôt l'inverse car leurs écrits sont aujourd'hui éclipsés par leur peinture. J'ai donc envie de continuer cette liste avec notre ami
Thierry Noiret !
La première partie de ce recueil est une révélation pour mon odorat aiguisé de grande olfactive tant les descriptions et les évocations me motivent ! D'ailleurs j'ai posté quelques extraits avant de formuler ce billet émerveillé. Et pourtant l'auteur presque s'excuse pour ces « oeuvres de jeunesse »…
Au centre de cette moisson poétique se trouve « LE BANC », « vers pour une improbable tragédie », qui représente un dialogue incisif entre le Poète (P) et l'Actrice (A), le Rêve et la Réalité. En voici un petit bout pour goûter :
« P :
Je pose ma main sur tes yeux
Nous voilà enfermés
Dans les plus beaux déserts
A :
Où flottent
Poussières et récits
Histoire du monde qui recommence
Poussée par de trop vieux vents
Par des cortèges trop faux »
Je me confonds en citations ! Vive l'Abstraction ! En voici la dernière :
« Portrait de Greta, d'après
Henri Matisse.
Femme de cuivre, bleue de cuivre, si tremblante lumière habillée de ciel couchant. Masque ou modelé de pâleur lunaire.
Corps translucide de nuit d'hiver qui tombe en patients pétales, tombe en regards pudiques. »