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EAN : 9782714308702
224 pages
José Corti (09/03/2004)
4/5   5 notes
Résumé :
Trois personnages, deux hommes, une femme, se retrouvent somnambuliquement, soir après soir, dans un bar. Soustraits à la routine immémoriale du rythme biologique, ils ne dorment plus. Ils sont passés du côté des fantômes, traversant les nuits sur le qui-vive et les jours au jugé. Charlie, le barman manipulateur, Erda, la maîtresse paradoxale d'un amant qui dort toujours, et le narrateur, errant pendant la journée dans Paris sous le coup d'une confusion mentale qui ... >Voir plus
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Citations et extraits (3) Ajouter une citation
Je suis insomniaque. Cette disposition, née d’un désordre physiologique, m’a donné une sorte d’irritabilité, doublée d’une lucidité seconde grâce à laquelle je déchiffre rapidement des significations habituellement cachées aux gens qui dorment bien. Je marche au café et aux intuitions. Mon cœur tient par ces deux ressorts, et s’il lui arrive parfois de taper fort jusqu’à exacerber la conscience de ma fatigue, il me laisse le plus souvent tranquille. Il est vrai que ce sont les yeux qui paient le plus fort tribut à mes insomnies. De vraies pelotes d’aiguilles noyées dans un brouillard d’éternel petit matin. Au début, je les essuyais souvent ; j’y ai renoncé, car les frottements continuels rougissaient mes paupières. Les larmes, si elles évitent le dessèchement de la cornée, troublent la vision première des choses, la plus évidente et la plus stable, au profit d’une vision seconde que l’on peut qualifier d’artificielle, si l’on aime la facilité. Je ne l’aime pas, comme tous les insomniaques. C’est sans doute pour cette raison que nous traversons les nuits sur le qui-vive et les jours au jugé. Pour dormir, il ne faut pas compliquer l’existence. Tous ces corps qui dorment à trois heures du matin, enveloppés de silence… Les yeux ouverts, je les imagine, non sans agacement. Cette immense inconscience sur la ville, croirait-on que je la sens peser sur moi, parfois, comme une menace ? Le monde est un défi continuel pour l’insomniaque. Là où les hommes ordinaires se glissent comme naturellement, je ne vois qu’empêchements, énigmes et provocations.
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Je faisais la queue devant un cinéma. Il était dix heures du soir. Le ciel était sombre, avec quelques colorations mauves au-dessus des immeubles. Je n’avais pas dormi depuis deux jours. Je pensais calmer le scintillement incessant qui me brouillait la vue par la confrontation forcée avec un défilement d’images dont l’effet hallucinatoire m’aurait mis dans un état de semi-somnolence qui valait peut-être le sommeil. Tout à coup, un vent chaud inhabituel en cette saison se mit à souffler. Il soulevait des nuages de poussière qui frappaient les visages en semblant les couvrir d’une sorte de voile hébété. Deux chats qui se disputaient une rognure s’arrêtèrent pour me regarder. La rue était silencieuse. Je consultai ma montre : vingt-deux heures sept. Les spectateurs de la séance précédente n’étaient pas encore sortis. Et nous, nous attendions, en formant une file bien rangée. Devant moi, un couple n’arrêtait pas de se quereller. À cause du vent qui soufflait de plus en plus fort, je ne comprenais pas ce que l’homme et la femme disaient, mais en observant leurs lèvres, je vis qu’ils parlaient en même temps. Cela n’aurait pas suffi à me mettre la puce à l’oreille si une bizarrerie d’atmosphère ne m’avait pas intrigué. Je fis deux pas latéraux : aussitôt, la file se referma sur le vide que j’avais laissé.
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On se trompe si l’on croit que le dérèglement insomniaque fait pénétrer l’esprit dans un monde plus beau et plus riche que celui, routinier, dans lequel les gens œuvrent après une bonne nuit de sommeil. Le monde de l’insomniaque serait plutôt plus pauvre, comme la charpente par rapport à la construction qu’elle soutient, comme le squelette sous le poids des muscles et de la chair. Il faut pouvoir comprendre ce que signifie voir quand le corps est à bout. J’en fis, il y a quelques années déjà, une première expérience, évidemment énigmatique car, si elle possède un sens, celui-ci semble perdu dans son apparente étrangeté.
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