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EAN : 9782818505816
232 pages
Fayard (16/01/2019)
4.09/5   135 notes
Résumé :
« La dette publique est un danger pour les générations futures », « La France n’a pas fait de réformes depuis plus de trente ans », « Notre modèle social est inefficace », « Le Code du travail empêche les entreprises d’embaucher », « Une autre politique économique, c’est finir comme le Venezuela » ; telles sont les affirmations ressassées en boucle depuis plus de trente ans par une petite élite bien à l’abri de ce qu’elle prétend nécessaire d’infliger au ... >Voir plus
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Thomas Porcher est docteur en économie et membre du groupe des économistes atterrés. Son Traité d'économie hérétique est un excellent livre pas trop difficile à lire et qui répond, point par point, à tous les diktats formulés à longueur de journée sur les médias par les économistes « orthodoxes » qui ne font que se tromper, sont incapables d'anticiper les crises et surtout précipitent les peuples et les pays pauvres vers plus de pauvreté et d'insécurité.
Les économistes « orthodoxes » prétendent qu'ils ne font pas d'idéologie, ce qui est naturellement absurde car l'économie est « un rapport de force par des moyens détournés ». La base de l'économie concerne la production de richesse et sa répartition. La manière dont cette répartition s'opère est éminemment idéologique puisqu'il s'agit de justifier pourquoi certains ont droit à une plus grosse part que d'autres. Ainsi, tous les économistes et tous les journaux spécialisés en économie font, de fait, de la politique.
Si deux économistes, tous deux « Prix Nobel » d'économie, tels que Joseph E. Stiglitz et Jean Tirole disent, à propos de l'Union Européenne, exactement l'inverse l'un de l'autre, il serait souhaitable de savoir raison garder et de ne pas considérer l'économie comme une science exacte et « objective », contrairement à ce que prétendent Cahuc et Zylberberg qui ont fait paraître en 2016 un essai intitulé : le négationnisme économique. Et comment s'en débarrasser. En effet, Stiglitz observe que l'Union Européenne a creusé les inégalités et que les pays faibles le sont devenus encore plus tandis que les pays forts se sont renforcés. Tirole -a contrario- soutient que l'Union Européenne a réduit les inégalités de revenus. Il n'y a donc pas de « consensus scientifique », pas de « vérité » et pas de « certitudes » en matière d'économie. Par ailleurs, les politiques qui émanent du consensus de Washington (1989) et dont s'inspirent le FMI et la Banque Mondiale ont eu des effets désastreux sur les populations les plus pauvres. La Chine et la Corée du Sud qui n'ont pas appliqué les recommandations de ce consensus ont réussi à sortir du sous-développement, ce que n'ont pas réussi les pays qui les ont appliquées.….C'est la preuve que les économistes ne cessent de se fourvoyer mais que jamais ils n'ont à payer le « coût de leurs erreurs » alors que leurs erreurs ont des conséquences gravissimes sur les populations les plus fragiles de la planète.
En fait, actuellement le courant de pensée dominant est occupé par les économistes néo-classiques alors que dans les années 60, c'est plutôt la logique keynésienne qui dominait avec une place importante consacrée à l'Etat (protecteur et investisseur) ainsi qu'à une meilleure redistribution des richesses.
Le courant néo-classique tend à décrédibiliser les rapports de force entre classes sociales en se focalisant sur les comportements individuels et sur le « marché ». du point de vue des comportements individuels les néo-classiques considèrent que les individus ont des choix à faire (études plus ou moins longues, ratio entre travail et loisirs) et que leur destin n'est que la conséquence des bons (ou moins bons) choix qu'ils auront fait. Mais il n'est tenu aucun compte du fait que ces choix sont pipés par les origines sociales des individus ! Dans ce courant de pensée, « le chômage est donc le résultat d'un choix individuel et volontaire entre loisir et travail ». La conséquence de ce mode de pensée est naturellement le mépris qui entoure le traitement des chômeurs, forcément soupçonnés de paresse et de fraude.
Pourtant, le chômage est la conséquence des politiques choisies depuis bon nombre d'années et tendant à privilégier la résorption du déficit plutôt que l'investissement.
Ainsi, la France a opéré de nombreuses réformes pour assurer la flexibilité du marché du travail. Or, deux chercheuses de la Sorbonne, Muriel Pucci et Julie Valentin (2008) ont effectué une recherche sur le lien entre flexibilité du marché du travail et baisse du chômage et montré l'absence de consensus sur cette question ! On constate par exemple que des pays comme le Royaume-Uni qui ont flexibilisé le marché du travail au maximum (contrat de zéro heure par exemple) ont certes de meilleures statistiques concernant le chômage mais les emplois très précaires ne permettent pas aux populations de vivre décemment et le Brexit du 24 juin 2016 est la conséquence de ce marché du travail trop peu protecteur accompagné de services publics dégradés. Même observation sur les « jobs act » en Italie, véritable « catastrophe sociale » qui, pour faire sortir 500 000 chômeurs des quotas a vu des cinquantenaires travailler quelques heures par semaine ou devenir « stagiaires ». La flexibilité du marché du travail n'a qu'une seule conséquence, c'est la baisse des droits des salariés. Et l'augmentation des revenus du patronnat et surtout des actionnaires !
Le leitmotiv des économistes « orthodoxes », la preuve de leur « sérieux » est leur mantra récurrent : « il faut faire baisser la dépense publique ». Or, la dépense publique, c'est le financement de l'école, des universités, de la santé de l'armée et la police, de la justice, des retraites ou des aides pour les plus démunis… La dépense publique est donc considérée uniquement du point de vue de son coût et jamais du point de vue de son utilité. Or, cette dépense publique est toujours « dramatisée » de telle sorte que l'opinion publique soit convaincue qu'il et effectivement nécessaire de la réduire. Ainsi, les calculs qui servent à la mesurer (57% du PIB) laissent sous-entendre qu'elle capte une part de richesse plus importante que le secteur privé, ce qui est faux. D'autre part, cette mesure ne signifie pas grand-chose. Par exemple, certains pays, comme l'Allemagne ont une dépense publique plus faible que la France (44% du PIB) parce que leurs retraites sont majoritairement par capitalisation et facultatives alors qu'en France elles sont par répartition et obligatoires. La conséquence en est que la dépense publique est moindre en Allemagne mais que les retraités allemands sont plus pauvres que les retraités français. La dépense publique correspond donc à un choix de société du point de vue de la protection de ses habitants. La dépense publique se finance par l'impôt et par conséquent les services sont financés par l'ensemble de la population, ce qui n'est pas le cas partout. Ainsi, aux Etats-Unis, le système de santé est privé, plus cher et totalement inégalitaire. Il faudrait donc toujours rappeler que la dépense publique comporte des aspects bénéfiques pour la population voire même pour les entreprises qui profitent de nombreux services publics ! Par ailleurs, pèsent sur la dépense publique les « cadeaux » faits aux entreprises comme le CICE (2013) et le CIR (Crédit Impôt Recherche : 2006).
La question de la « dette » est aussi une obsession des économistes « orthodoxes ». Or qu'est-ce qu'une dette si l'on ne tient pas compte du patrimoine (crédit) qui l'accompagne ? D'autre part, d'où vient donc cette dette si fortement augmentée depuis la crise de 2007 ? N'a-t-on pas renfloué des banques en même temps qu'il a fallu supporter les fortes baisses d'activité économique qui ont diminué les rentrées budgétaires, du fait de la crise. Ne parlons pas du chômage qui réduit les rentrées et accroît le déficit ! Mais ne nous leurrons pas, la dette sert d'épouvantail lorsque l'on veut modifier les règles ; en revanche, personne ne parle plus de la « dette » lorsqu'il s'agit de diminuer les impôts des plus riches. Ainsi, le coût des baisses de la fiscalité aux plus aisés « se chiffre à 100 milliards entre 2000 et 2010 ». Par ailleurs, « les 457 niches fiscales vont faire perdre près de 100 milliards de recette à l'Etat en 2018, bien plus que le déficit que l'on s'acharne à rembourser avec des politiques d'austérité »….sans parler de la suppression de l'ISF sur les placements financiers qui coûte 3.5 milliards d'euros par an. Ce sont donc les choix politiques qui font baisser les recettes et creuser les déficits que l'on va rattraper en saccageant le « modèle social » qui protège surtout les plus faibles. On augmente ainsi les inégalités -ce qui, contrairement à la théorie du « ruissellement » qui voudrait que les riches fassent profiter toute la société de leurs richesse, pèse sur la croissance économique. Mais les investissements publics pour rénover notre service public sont prohibés par les traités européens car « la Commission Européenne a volontairement organisé la dérégulation de l'économie en n'imposant pas de socle social et fiscal commun aux différents pays de l'Union , laissant s'installer une concurrence entre vingt-huit modèles sociaux ». A force de laisser les services publics se dégrader du fait de politiques publiques pratiquant l'austérité, on finit par préparer l'opinion publique à leur suppression. Pourtant, notre « modèle social » est nécessaire et bénéfique pour le plus grand nombre, le critiquer n'a qu'un but : le livrer au secteur privé.
Sur le plan de la protection de l'environnement, tout le monde s'accorde à dire qu'il faut changer notre consommation (plus modérée et surtout plus « locale »), se tourner vers des modes de production d'énergie renouvelable et non polluante afin de juguler le réchauffement climatique. Tout le monde est d'accord, mais personne ne fait rien ! Pourtant, c'est une politique « volontariste » qui serait indispensable.
Le « libre échange » théorie initiée par Adam Smith au 18ème siècle et David Ricardo au 19ème est le crédo des économistes « orthodoxes ». Or, le libre –échange est « un jeu inégal de domination ». « Les grandes multinationales sont les grandes gagnantes du libre-échange qui peuvent désormais produire là où le coût de la main-d'oeuvre est le moins cher, vendre là où il y a du pouvoir d'achat et payer leurs impôts là où la fiscalité est la plus faible ». La conséquence en est l'appauvrissement des pays les plus pauvres qui ne peuvent pas rivaliser du point de vue des technologies et qui n'ont que leurs matières premières à échanger, matières premières dont les prix fluctuent sur les marchés , ce qui les asservit. Les traités de libre-échange (voire CETA et TAFTA) n'auront comme conséquence que la casse des droits du travail. Leur prochaine cible est la question des « normes ». Derrière l'euphémisme d' « ajustement », on trouve tout naturellement l'alignement sur les normes les moins contraignantes et les plus favorables aux grandes entreprises au détriment de la santé des habitants et de l'environnement des pays pour lesquels on aura diminué les exigences. Ce qui se prépare en douce, c'est aussi l'établissement d'un tribunal supranational qui arbitrera les conflits entre les Etats et les entreprises comme ce fut le cas de la firme fabricante de cigarettes Philp Morris qui a attaqué les gouvernements de l'Uruguay et de l'Australie car ces pays avaient mis en place des politiques de santé anti-tabac !
En conclusion, il faut se débarrasser de la pensée économique dominante qui détruit des vies et retrouver une économie protectrice et égalitaire. Il faut essayer « de peser dans le rapport de force en questionnant, en exigeant, en débattant et en n'acceptant plus comme parole d'évangile une soi-disant vérité économique ».
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Un condensé impolitiquement correct d'invitations à réfléchir ! Thomas PORCHER, économiste patenté, signe chez Fayard, un appréciable essai invitant le public, les étudiants, les électeurs et les politiques dignes de ce nom à réfléchir sur les fausses bonnes idées, les certitudes et la pensée unique que déversent trop souvent les tenants d'une politique libérale qui creuse chaque jour un peu plus le fossé entre les riches, minoritaires mais ayant tout à dire, et les pauvres, majoritaires à qui on assène obstinément un discours culpabilisant au nom d'une dette publique, d'une croissance à relancer ou d'un modèle social à raboter sans cesse parce que trop coûteux (pour qui?), voire à faire disparaître.
En matière de gestion économique comme ailleurs, il est toujours bon de se poser la double question de qui parle et au nom de quelle autorité. Avec ses nombreuses publications internationales, sa maîtrise comme docteur en économie à l'université Paris I Panthéon-Sorbonne et son statut de professeur associé à la Paris School of Business, Thomas PORCHER peut être considéré comme ayant droit à une parole, même divergente.
Son invitation est simple, ouvrir un débat quant à la gestion politique de l'économie de nos pays d'Europe, gestion trop souvent sclérosée par la pensée unique ambiante. En quelques coups de plume et coups de gueule, cet économiste, membre des Économistes atterrés, nous invite à refuser le discours ambiant du libéralisme débridé et la pensée unique qui n'accepte aucune remise en cause, aucune objection tant elle est faussement présentée comme la seule scientifiquement prouvée et raisonnable ! Choisir toute autre voie serait, nous répète-t-on sans arrêt, serait un choix calamiteux et lourdement chargé de notre seule responsabilité quant à l'héritage que nous avons à transmettre à nos enfants ! Faux, s'insurge l'auteur. Et de le démontrer au travers d'un texte d'une limpidité à portée de tous, texte qui restaure la nécessité de poser des choix humains avant d'avaliser, sans comprendre, ceux que le libéralisme prône aux seuls bénéfices de ceux qui n'ont pas besoin d'un modèle social comme le nôtre.
Avec des prises de positions extrêmement bien référencées, Thomas PORCHER nous ouvre à l'histoire de l'Economie, à ses choix qui, en fait, sont loin d'être le fruit d'un consensus entre économistes et qui, le plus souvent, sont argumentés par des gens qui ne peuvent se prévaloir que de bien peu, si pas du tout, de formation et de reconnaissance de la part du monde des économistes scientifiques reconnus.
A qui profite le crime ? Question fondamentale à se poser lorsqu'on nous impose une vision de la chose publique qui détricote la responsabilité de l'Etat au profit des intérêts privés de ceux qui 'lobbyisent' nos décideurs politiques en permanence !
Ce ‘Traité d'économie hérétique', sous-titré ‘En finir avec le discours dominant' est un régal, un appel à la résilience, une invitation à ne plus accepter les paris truqués d'un pseudo-monde d'économistes assujettis au Capital !
Soif d'avenir ? Ouvrez le débat, sortez du discours manipulateur des profiteurs !
Un énorme merci à NetGalley et aux éditions Fayard qui m'ont donné de découvrir cet essai, qu'à mon tour, je m'empresse de vous inviter à ouvrir !
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Thomas Porcher est un économiste clairement ancré à gauche, membre des Economistes atterrés, un collectif d'économistes “qui ne se résignent pas à la domination de l'orthodoxie néo-libérale” comme ils l'affirment eux-même sur leur site.

Engagé politiquement, Thomas Porcher est notamment connu pour avoir co-fondé Place Publique avec Raphaël Glucksmann, avant de quitter le mouvement quand celui-ci s'est joint au Parti Socialiste pour les élections européennes de mai 2019.

Je connaissais un peu Thomas Porcher pour l'avoir entendu s'exprimer dans quelques médias mais je n'avais jamais lu autant de ses livres. Celui-ci, Traité d'économie hérétique, paru en 2017, m'attendait pourtant dans ma pile à lire depuis quelque temps.

" « La dette publique est un danger pour les générations futures », « La France n'a pas fait de réformes depuis plus de trente ans », « Notre modèle social est inefficace », « le Code du travail empêche les entreprises d'embaucher », « Une autre politique économique, c'est finir comme le Venezuela » ; telles sont les affirmations ressassées en boucle depuis plus de trente ans par une petite élite bien à l'abri de ce qu'elle prétend nécessaire d'infliger au reste de la population pour sauver la France.

Ces idées ont tellement pénétré les esprits qu'elles ne semblent plus pouvoir faire l'objet du moindre débat. C'est justement l'objet de ce livre : regagner la bataille des idées, refuser ce qui peut paraître du bon sens, tordre le cou à ces prétendues « vérités économiques ».

Savez-vous qu'il y a eu plus de 165 réformes relatives au marché du travail depuis 2000 en France ? Que nous avons déjà connu une dette publique représentant 200 % du PIB ? Que plus de la moitié de la dépense publique profite au secteur privé ?

Dans ce traité d'économie hérétique, Thomas Porcher nous offre une contre-argumentation précieuse pour ne plus accepter comme une fatalité ce que nous propose le discours dominant. "

Tout d'abord, je dois vous rassurer : ce livre est très accessible et ne nécessite pas de posséder une connaissance préalable de l'économie. L'auteur prend le temps d'expliquer de façon claire les concepts qui le nécessitent. Il présente également brièvement les théories économiques qu'il évoque dans son propos. Moi qui n'y connais pas grand chose en économie, j'ai très bien compris les explications de Thomas Porcher.

Le livre est décomposé en 13 chapitres qui traitent chacun d'un sujet, toujours sous le même angle : dénoncer les fausses évidences de l'orthodoxe néo-libérale actuelle, expliquer pourquoi ces théories sont défendues par les « élites » qui y trouvent évidemment leur intérêt (et leurs intérêts), et rétablir une part de vérité à partir d'éléments factuels.

Que ce soient le mythe de la réussite individuelle, les assouplissements successifs du Code du Travail, la dépense et la dette publiques, la financiarisation des entreprises et de l'économie, la casse du modèle social, l'hypocrisie face à la crise climatique, le modèle économique de l'Union Européenne, ou le libre-échange, Thomas Porcher s'attaque à toutes les idées préconçues et présente une vision qui permet de débattre, à contre-courant des tenants du TINA (There Is No Alternative).

Thomas Porcher rappelle à plusieurs reprises que contrairement à ce que le courant de pensée libéral tente d'imposer dans nos esprits, et comme l'expliquait naguère le regretté Bernard Maris, l'économie n'est pas une science exacte. Il s'agitd'une une science humaine, au même titre que l'Histoire par exemple, et de fait sujette aux idéologies. le libéralisme, qui se présente comme la seule alternative, n'est qu'une idéologie parmi d'autres, contrairement à ce que ses défenseurs veulent nous faire croire en se cachant derrière le masque du « pragmatisme ».

Thomas Porcher nous invite donc à nous interroger et à questionner les motivations de ceux qui nous dirigent. Les principes d'auto-défense énoncés par l'auteur dans sa conclusion constituent à mes yeux un parfait résumé du livre, appelant à faire preuve de sens critique face aux évidences et au soi-disant bon sens, et à remettre en cause ce qui est souvent présenté comme des vérités économiques incontestables.

C'est une lecture que je conseille à celles et ceux qui s'interrogent sur notre modèle économique et n'acceptent pas le discours omniprésent dans les médias, qui peut s'apparenter à une pensée unique en matière économique, et donc politique.
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Affutez vos arguments et combattez la pensée unique dans l'économie lorsqu'elle nous mène droit dans le mur. J'ai apprécié le raisonnement de Thomas Porcher, malgré quelques baisses de régime par ci par là.

Notes de lecture :
Ne croyez pas les technocrates lorsqu'ils prétendent que la dette est insoutenable. « le but est d'offrir des pans entiers de l'Etat [ ] à quelques grands groupes privés qui seraient bien heureux de profiter de ces marchés juteux ». P 223

Ne croyez pas les technocrates lorsqu'ils déclarent que le libre-échange mène à la convergence et fait diminuer la pauvreté. « Ils y a des gagnants et des perdants. [ ] Les seuls gagnants sont les multinationales qui optimisent leur profits en produisant là où le coût de la main d'oeuvre est le moins cher [ ] et en payant leurs impôts là où la fiscalité est la plus faible. [ ] Les pays pauvres, en se spécialisant, se sont enfermés dans le sous-développement ». P228

Combattez les mensonges des hommes politiques qui disent que la construction européenne favorise l'harmonie. En fait, elle « met en concurrence des modèles sociales et fiscales des différents pays ». P173. La politique économique de l'Allemagne (l'austérité) a été imposée à toute l'Europe. « La conséquence de cette politique est la montée de l'extrême droite ».

Ne vous laissez pas intimider par ceux qui prétendent qu'un chômeur est le seul responsable de son échec. La réussite ou l'échec dépendent d'un ensemble de facteurs. le discours dominant culpabilise les chômeurs et détourne l'attention de vrais problèmes.

L'auteur nous rappelle à plusieurs reprises que l'économie n'est pas une science exacte. L'histoire montre que ce qui paraît inconcevable aujourd'hui peut s'avérer légitime à un autre moment.

Pour finir, je reviens à la dette avec un extrait :
« Lorsque nous avions une dette proche de 200% du PIB en 1945, nous avons réussi à l'abaisser au niveau du 30% du PIB en cinq ans. Comment ? En baissant la dépense publique comme c'est le cas aujourd'hui ? [ ] Non, la dette a été résorbée en utilisant l'inflation, en instaurant un impôt exceptionnel sur le capital privé, notamment les hauts patrimoines, et en la restructurant, c'est-à-dire en négociant avec les banques ». P102. Sur ce paragraphe, l'auteur renvoie à un ouvrage de Piketty, Aux urnes, citoyens (2016).
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Membre des Économistes Atterrés, collectif qui propose d'autres approches économiques, bien éloignées de la doxa actuelle de l'ultra-capitalisme et de l'hyper-mondialisation, et docteur en économie, Thomas Porcher nous présente, dans son bref Traité d'économie hérétique, cette doxa, comment elle s'est installée progressivement, et comment il est bien difficile de la contrer en avançant d'autres idées, considérées alors comme « hérétiques », utopistes, en somme irréalisables.

Après avoir rappelé ce qu'est l'économie, puis en quoi c'est à chacun de faire preuve d'esprit critique face aux théories économiques, sont analysés ce que sont en train de devenir divers pans fondamentaux de l'économie française, et plus encore mondiale, encore davantage poussés dans leurs retranchements depuis l'élection d'Emmanuel Macron en 2017 : l'idée de réussite individuelle ; le modèle social français ; le marché du travail ; le rapport à la dette publique ; le changement climatique ; l'Europe ; les traités de libre-échange. Sont à la suite proposés des » principes d'autodéfense contre la pensée dominante » qui rappellent qu'il est encore possible de vivre dans un monde plus juste, plus humain, car moins gouverné par la finance et les profits.

En soi, ce Traité d'économie hérétique est très intéressant, car il reprend de manière synthétique et efficace des points qui font justement controverse, pour mieux les analyser, et ensuite proposer une autre façon de les traiter. de plus, il est écrit de manière à rendre vraiment accessibles des théories économiques qui pourraient ne pas l'être de prime abord : il est une bonne introduction aux alternatives économiques qui existent actuellement en France de nos jours, et qui méritent d'avoir un peu plus de visibilité dans le champ médiatique – même si Thomas Porcher fait justement partie des économistes avec un discours autre qui parviennent à prendre de plus en plus souvent la parole pour les présenter au public -. Personnellement, je n'ai pas découvert grand chose que je ne connaissais déjà dans ce traité, m'intéressant depuis fort longtemps au sujet, mais il peut être éclairant pour un néophyte qui veut avoir un autre regard sur le monde qui l'entoure, pour se faire justement son propre point de vue, et ainsi pouvoir faire preuve d'esprit critique.
Lien : https://lartetletreblog.com/..
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Citations et extraits (63) Voir plus Ajouter une citation
"Notre réflexion est contrainte par le cadre du raisonnable; vouloir en sortir, c'est devenir utopiste. Mais fixer un cadre de réflexion en dehors duquel il est impossible de débattre n'est-il pas la meilleure façon de dominer les esprits?" p. 15
"L'histoire économique montre pourtant que les frontières de ce cadre peuvent bouger, qu'elles ne sont pas déterminées objectivement mais qu'elles dépendent des rapports de force en vigueur. [...] Au cœur de la science économique, il existe un entremêlement de discours contradictoires, de sorte que les questions économiques n'admettent jamais une seule réponse."
p. 43
"Emmanuel Macron n'a jamais eu à se justifier de ses erreurs et a été élu président de la République. Quelqu'un lui a-t-il demandé pourquoi, alors qu'il a été un conseiller du président si présent et un ministre de l’Économie tellement dynamique, les chiffres du chômage ont continué à augmenter? [...] Interroger un ancien conseiller et ministre de l’Économie sur son bilan semble anormal. A l'inverse, dire à un chômeur qu'il doit se prendre en main, faire preuve de bonne foi, accepter des offres d'emploi qui ne correspondent pas à ses qualifications... semble relever du bon sens." p. 69
"Si vous n'adhérez pas au projet qu'on vous propose, la seule alternative est la suivante: soit vous n'avez pas compris ce dont il s'agit, et il suffit alors de vous expliquer plus longuement la réforme pour que vous soyez convaincus, soit vous avez tout à fait saisi les enjeux, mais vous n'êtes pas d'accord, alors vs vs comportez en enfant gâté." p. 79
"Personne pour rappeler que la dépense publique ne tombe pas dans un trou noir, mais finance l'éducation, les hôpitaux, la police, la justice, les retraites ou les prestations chômage." p. 93
"Dans les faits, il n'y a rien de plus stupide que de comparer la dette d'un pays à la dette d'un ménage (un pays ne meurt pas et ne peut être saisi). Il n'y a rien de plus idiot que de se focaliser sur la dette sans prendre en compte le patrimoine (surtout si le patrimoine est plus élevé que la dette.) p. 122
"sur le premier argument, de la fuite des riches, les chiffres de l'administration fiscale montrent que les départs sont de l'ordre de 800 par an et les retours de 300, soit un solde de départs nets de 500 ménages (0.2 assujettis à l'ISF) pour un manque à gagner moyen s'élevant à 170 millions d'euros par an pour les finances publiques. C'est donc pour éviter de perdre 170 millions par an que le gouvernement a décidé d'exonérer une partie de l'ISF et de perdre 3.5 milliards d'euros par an!"
p. 139
"au-delà d'un certain niveau de consommation d'énergie, le bien-être n'augmente plus (ce qui signifie que la consommation d'énergie supplémentaire devient superflue). Pourtant, un certain nombre de pays sont au-dessus de ce seuil comme les États-Unis, le Japon, la Suède ou l'Australie. Ces pays pourraient donc réduire leur consommation sans affecter leur qualité de vie. Il n'est donc plus question de nécessité mais de choix."
p. 152
" des pays se sont spécialisés dans des biens à l'export pour satisfaire la demande extérieure (principalement des pays riches) plutôt que de satisfaire leur demande intérieure; [...] des populations extrêmement pauvres, ont vu leur situation se dégrader [...] Le FMI .. est une instance autoritaire visant à imposer une logique libérale qui sert principalement aux intérêts des pays riches." p. 194
"Désormais, n'importe quelle loi ou n'importe quel choix politique peut être perçu comme une entrave à l'investissement de l'entreprise et faire l'objet d'une contestation devant les tribunaux. Avec ce type de mécanisme, les intérêts commerciaux se trouvent juridiquement placés au-dessus des préférences des nations."p. 212
"les limites du cadre de réflexion économique ne sont pas déterminées de manière objective et [...] elles peuvent donc, par définition, bouger. La sécurité sociale ou les congés payés étaient des mesures qui, en leur temps, pouvaient paraître en dehors du cadre autorisé de réflexion. Et s'ils ont vu le jour, c'est justement parce que certains ont repoussé les limites du débat." p. 219
"les pays pauvres, en se spécialisant, se sont enfermés dans le sous-développement. Les seuls véritables gagnants du libre-échange sont les multinationales qui peuvent optimiser leurs profits." p. 228
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Ce que ne vous dirons jamais les représentants du MEDEF ou autres experts libéraux, c'est que des cadeaux fiscaux qu'ils ont défendus comme le crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE) -mis en place en 2013 puis remplacé par un allègement de cotisations sociales patronales depuis l'élection d'Emmanuel Macron - et le crédit d'impôt recherche (CIR) - entré en vigueur en 2006 - sont considérés comme des subventions et donc augmentent la dépense publique! Donc oui, il faut baisser la dépense publique quand il s'agit de service public, jamais quand il s'agit de subventions offertes aux entreprises.
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Au départ, l'Union européenne fut tiraillée entre deux voies : l'une plus interventionniste et l'autre plus confiante dans le marché. Lors des négociations concernant le marché unique au début des années 1980, l'European round table - un puissant lobby du patronat - était divisé sur la voie à suivre. Une partie de ses membres défendait l'idée que le marché unique devait être un espace de concurrence, l'autre partie prônait qu'il fallait créer des champions européens en les protégeant, au départ, de la concurrence mondiale (type Airbus mais élargi à tous les champs : énergie, transports, etc.). C'est Jacques Delors, président de la Commission européenne (et socialiste), qui, au milieu des années 1980, fera pencher la balance en faveur de la concurrence.
Dès lors, la dynamique libérale va s'enclencher fortement avec la création du marché unique, la libre circulation des biens, des services et des personnes, la monnaie unique et enfin l'ouverture du marché européen aux échanges mondiaux. L'Union européenne est ainsi devenue la zone au monde la moins couverte par des tarifs douaniers. Gangrénée par les lobbies, elle ne sera qu'un bouclier de verre face à la financiarisation de l'économie, la spéculation, la malbouffe ou la pollution. L'Union européenne, plutôt que de protéger ses citoyens des effets délétères de la mondialisation, en est devenue la principale courroie de transmission.

Il n'est donc pas étonnant qu'en 2006, suivant cette idéologie, l'Union européenne mette en place une stratégie nommée "Global-Europe : Competing in the World" visant à signer des accords de libre-échange de nouvelle génération avec ses principaux partenaires commerciaux. Le terme "nouvelle génération" signifie que ces accords traitent des obstacles du commerce derrière les frontières, c'est-à-dire sur les normes établies à l'intérieur d'un pays, contrairement aux anciens traités qui se focalisaient sur les barrières douanières. Or, les normes peuvent être différentes d'un pays à un autre et elles représentent des obstacles ; le but est d'harmoniser ces normes afin qu'il n'y ait plus aucune (ou quasiment) entrave à la libre circulation des biens et des services. C'est dans le cadre de cette stratégie que s'inscrivent les fameux traités transatlantiques avec les Etats-Unis et le Canada dénommés TAFTA et CETA... (p.204-206)
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Les prétendus défenseurs de l'Europe ------ aiment mettre en avant le modèle allemand , il est vrai que l'Allemagne a un excédent budgétaire , que sa dette est revenue à son niveau de 2005 et qu'elle a un excédent commercial ----c'est aussi le pays où les inégalités ont le plus progressé entre 2000 et 2010 , le taux de pauvreté y a augmenté de 54 % en dix ans , le taux de travailleurs pauvres a doublé , les personnes cumulant deux emplois ont augmenté de 80,7 %et le nombre de retraités pauvres de 30 % . Enfin le manque d'investissement de l'Etat a engendré une dégradation des infrastructures publiques . L'Allemagne est en fait un pays riche ---- avec beaucoup de pauvres .
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A l'extrême opposé de la réussite, l'échec est également individualisé. La question du chômage serait à rechercher dans le comportement de l'individu qu'il faudrait mieux inciter (en diminuant les prestations chômage), puis mieux canaliser (en lui interdisant de refuser plus de deux offres d'emploi) et, enfin, davantage former (pour satisfaire les secteurs en pleine croissance, peu importe si le chômeur aspire à faire autre chose). Cette individualisation de la question du chômage est encore à chercher dans la représentation théorique qu'en fait l'économie. Le courant dominant (les néo-classiques) nous explique qu'un individu effectue un arbitrage entre travail et loisir en fonction du salaire proposé par le marché du travail. S'il juge le salaire satisfaisant, alors il accepte de sacrifier sont temps de loisir pour travailler. Inversement, si le salaire ne lui convient pas, il choisit le loisir et devient un "chômeur volontaire". Dans ce courant de pensée, le chômage est donc le résultat d'un choix individuel et volontaire entre loisir et travail.
Mais derrière la théorie se cache, en réalité, une volonté de diffuser des valeurs d'ordre moral. Il y aurait d'un côté des "travailleurs courageux" qui acceptent un salaire faible et, de l'autre, des "fainéants" qui, au même salaire, préfèrent le loisir. La légitimation de l'individu comme responsable de son destin et la stigmatisation du chômeur qui en découle ont trouvé leur source dans cette représentation de l'économie. Le traitement de la question du chômage dans l'économie mainstream cache en réalité un biais moral reprochant aux chômeurs d'être paresseux. Il faut donc les inciter à le devenir moins en les punissant et en les contraignant. [...]
Pourtant, cette représentation du chômeur ne tient pas. Sauf à considérer qu'il y a des périodes d'épidémies de paresse qui sont tombées, comme par hasard, en 1929 et 2008, les années des deux plus importantes crises économiques. [...]
Ceux qui connaissent ou ont connu le chômage dans leur vie savent que ces théories sont fumeuses et que le chômage n'est pas le résultat d'un choix individuel, mais le plus souvent une situation subie. Et la politique économique en est souvent le premier responsable (p.66-68)
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