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EAN : 9782080507945
140 pages
Flammarion (08/01/1992)
4/5   2 notes
Résumé :
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Quelque chose relève de la tragédie dans ce recueil de sept textes de Jules Romains datés de novembre 1933 à décembre 1934, les cinq premiers publiés, le sixième prononcé à la Sorbonne, et le dernier transcrivant un entretien journalistique. « Il se met en marche », avait écrit Giraudoux à propos du destin dans « La guerre de Troie n'aura pas lieu »... qui aura lieu malgré les efforts du couple Andromaque-Hector. Les convictions de Jules Romains l'incitent à agir pour sauvegarder la paix : « je m'inquiète peu de paraître en l'espèce outrecuidant ou ridicule. Je me suis juré, il y a quinze ans, que je ferais tout ce que je pourrais, en toute circonstance, que je mettrais en oeuvre les forces dont je disposerais, si infimes, dussent-elles être, pour contribuer à empêcher une nouvelle guerre ». Oui mais sera-ce suffisant pour désactiver les tensions nées de la question de la Sarre, occupée légalement par la France sous l'égide de la Société des Nations et pourtant réclamée par l'Allemagne ? Romains veut le croire. Français, il cherche à inspirer la politique de son pays et à rassurer l'opinion publique.

Aux français d'agir : « [Hitler] nous la fera sûrement [la guerre], si nous nous colportons en toute circonstance comme des gens qui, par toutes leurs démarches et attitudes même irréfléchies, ne laissent au partenaire d'autre issue visible que la guerre ». Il faut éviter « de mettre le feu aux poudres », car « c'est l'histoire d'un incendie dans le premier quart d'heure. Au bout du premier quart d'heure, personne ne peut se vanter d'être assez fort pour le limiter ». Cela peut se faire par une politique extérieure mesurée : ne pas « encercler » l'Allemagne par une alliance avec la Russie ; en parlant sans « mauvaise grâce » à l'occasion d'une « conversation large et définitive » : « nous venons définitivement régler toutes les questions qui divisent l'Allemagne et la France. Nous savons que c'est très difficile. Mais nous savons aussi qu'il n'y a rien d'impossible dans l'histoire pour des hommes qui ont la foi et la volonté » ; en tâchant de ne pas « maintenir [l'Allemagne] indéfiniment dans un état d'infériorité et d'humiliation » ; en adoptant une posture amicale : « dites-vous que ce sont des gens bien disposés, des amis de demain que vous avez en face de vous » ; en prenant conscience des différences culturelles : « la bonne foi allemande est pour ainsi dire de nature féodale » là où les français agissent en « juristes mesquins, […] avoués retors » ; en reconnaissant « les avances [des allemands] qui leur coûtait beaucoup » ; en encourageant nos voisins à saisir les « occasions exceptionnelles, de démontrer [leur] bonne volonté et [leur] bonne foi » ; et en se gardant de penser avec trop de constance que l'Allemagne « va se comporter d‘une manière abominable, contraire à toutes les lois de l'humanité et de la générosité  ».

La population s'inquiète, à tort : « A Carcassonne, les dames de la bourgeoisie m'ont confié : « Entre nous, les femmes, qui avons un mari ou un fils mobilisable, notre principal sujet de conversation est devenu : de quelle classe est votre mari, votre fils ? » Je vous vois sourire. Et en effet, quand on entend les premières confidences de cette sorte, on a envie de sourire. ». D'ailleurs, l'auteur a accès a des informateurs renseignés : « M. Rosenberg, M. Goebbels m'ont déclaré […] », « j'ai assisté à la diffusion des discours de Goeggels et de Hitler », « mon ami François Poncet ». Les déclarations et témoignages de ces sommités portent à l'optimisme. Il ne fait aucun doute qu'il ne faille compter sur la « loyauté », la « bonne foi », les « braves gens », le « courage », « les hommes de bonnes volontés », toutes ces postures « psychologiques » qui sont de nature à maintenir la paix.

Mais la clairvoyance de l'auteur trahit son volontarisme : « beaucoup des conditions d'une catastrophe sont réunies », le « génie [d'Hilter] est encore douteux », sa « chute personnelle est peu probable », « l'Allemagne […] semble parfaitement passive. Son maître lui dirait : « Va te jeter dans la mer », on a l'impression qu'elle irait se jeter dans la mer ». S'il y a une guerre, « personne ne la gagnera et nous périrons tous », ce sera « l'effondrement de l'Europe occidentale ». Contre cette sombre perspective, il faut « dresser un barrage tant qu'il en est encore temps ». D'ailleurs, ces douze mois de fin 33 à fin 34 s'achèvent positivement : un plébiscite est organisé dans la Sarre qui revient pacifiquement à l'Allemagne. « Nous n'aurons pas la guerre au sujet de la Sarre » peut-il conclure. Oui. Mais « la cause profonde subsiste […] la cause profonde renaîtra ». Il faut donc rester vigilant, continuer d'appliquer une méthode « météorologique […] remise à jour chaque matin », éviter d'adopter des postures rigides et dogmatiques.

Cette méthode fonctionnera-t-elle à nouveau ? Au-delà de la mesure de son efficacité, c'est vers une autre compréhension que nous guide l'écrivain. Valéry avait écrit : « tout s'est senti périr ». Romains, lui, ne veut pas croire à la fatalité. Ce qu'il nous enseigne par le témoignage de son activisme au cours de cette tragédie réelle, c'est que le sens de l'humain est de s'élever contre l'inévitable et de réaffirmer continuellement sa foi en l'humanité, même quand elle s'effondre.
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Citations et extraits (14) Voir plus Ajouter une citation
Couple au sens courant. Couple mal assorti, si vous voulez [...] Couple malgré lui, soit. Mais aucun des deux partenaires n'y changera rien. Ce n'est ni la France ni l'Allemagne qui ont décidé de cohabiter sur la même presqu'île, sur ce bout d'Europe qui n'est ni très grand ni très logeable [...]
Couple dont les querelles retentissent sur l'Europe entière, et le monde entier, et sans l'apaisement duquel l'Europe ne retrouvera pas la paix.
Pour ceux qu'incommodent cette image - et ils ont tort, et d'abord de n'y voir qu'une image, car il y a bien dans l'histoire franco-allemande, dans le drame séculaire de ces deux peuples, dans les attirances et les haines, également ardentes, qu'ils éprouvent d'âge en âge l'un pour l'autre, et surtout du côté allemand, quelque chose de sexuel, quelque chose qui semble une transposition du sexuel dans le collectif - donc pour ceux-là, contentons-nous de prendre le mot couple au sens qu'il offre en physique et en mécanique. Le problème France-Allemagne, s'il est un problème de vie et de passion, est aussi un problème d'agencement de forces. Un problème de psychologue, mais aussi un problème d'ingénieur.
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Une France qui rayonnerait aujourd'hui de confiance en elle-même et envers les autres, de bonne conscience, de générosité tranquille ; qui au lieu de parler toujours de sécurité et de mendier des pactes, parlerait d'amitié et d'entr'aide, serait inattaquable. Elle est la seule à pouvoir jouer ce rôle magnifique et si conforme à ses intérêts. L'étonnement des meilleurs, à travers le monde, est qu'elle semble avoir renoncé à le jouer.
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Avec l'argent dépensé dans la dernière guerre, on aurait pu faire cadeau à chaque famille des Etats-Unis, du Canada, de l'Australie, de la Grande-Bretagne, de la France, de la Belgique, de l'Allemagne et de la Russie, d'une maison valant soixante-deux mille cinq cents francs actuels, entourée d'un terrain de deux hectares, et contenant trente mille francs de mobilier. Et il serait resté assez d'argent pour doter chaque agglomération de vingt mille familles d'un hôpital, d'une université et de plusieurs écoles, en assurant le salaire des médecins, des infirmiers, des professeurs et des instituteurs.
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Quelqu'un me disait, il y a deux jours - un homme mêlé de très près au réalités politiques internationales, qui les manie quotidiennement : - "De toute façon, et même dans la pire hypothèse, l'Europe se fera. L'unité européenne, au moins l'unité occidentale, sera accomplie. Mais elle a deux façons possibles de se faire : ou bien il y aura une destruction totale de ce qui existe, et c'est sur des débris, c'est entre des poignées de survivants qu'une Europe misérable et exsangue s'efforcera de se reconstituer ; ou bien les Européens auront la sagesse de fonder l'Europe avant le désastre."
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M. Laval en particulier me paraît être un homme plein de sang-froid, qui ne s'embarrasse pas de vues théoriques, et qui certes ne demande qu'à s'instruire plus à fond des problèmes, qu'à connaître leurs phases antérieures, leur dossier, mais qui n'a pour les traditions diplomatiques en elles-mêmes aucun respect superstitieux. Conditions éminemment favorable pour voir clair dans ce qui se passe et pour construire l'avenir prochain.
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Vidéo de Jules Romains
Dans l'Allemagne exsangue et tumultueuse des années 1920, le Bauhaus est plus qu'une école d'art. C'est une promesse. Une communauté dont le but est de mettre en forme l'idée de l'Homme nouveau. En 1926, l'école s'installe à Dessau. Dans le grand bâtiment de verre et d'acier, Clara, Holger et Théo se rencontrent, créant une sorte de Jules et Jim. À Berlin, toute proche, le temps s'assombrit. Les convictions artistiques ou politiques ne sont pas les seuls facteurs qui décident du cours d'une vie. Ce sont aussi, entre rêves d'Amérique et désirs de Russie, d'autres raisons et déraisons. Lorsque l'école sera prise dans les vents contraires de l'Histoire, les étudiants feront leurs propres choix. À qui, à quoi rester fidèle, lorsqu'il faut continuer ?
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