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EAN : 9782260007128
140 pages
Julliard (01/09/1971)
3.65/5   30 notes
Résumé :
Le Prix Nobel de littérature a attiré l'attention du monde entier sur l'oeuvre de Soljenitsyne. Ses grands romans ont reçu un accueil unanime et enthousiaste. Nous avons réuni dans ce recueil des petits textes moins connus qui avaient paru dans différentes revues, ou journaux, et avaient été repris dans un Cahier de L'Herne et aux éditions Julliard. Par le souffle et par le ton, ces petites pièces diffèrent des grandes fresques polyphoniques que sont Le pavillon des... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (8) Voir plus Ajouter une critique
Alexandre Soljenitsyne nous a accoutumé aux longs et intimidants pavés, comme L'archipel du goulag et le pavillon des cancéreux. Eh bien, il a réussi à me surprendre avec ce court recueil d'à peine cent pages. Mais il y a plus. Passé la surprise de la brièveté inhabituelle, il y a le style qui est diamétralement à l'opposé de ses autres écrits très réalistes. D'abord, des études et miniatures très, très succinctes (parfois seulement d'une page) mais ô combien jolies. Rarement l'évocation d'un mignon petit animal, d'un arbre ou d'un paysage couché sur papier ne m'a autant inspiré. J'ai découvert à son auteur des élans poétiques insoupçonnés.

Puis vient la nouvelle éponyme, Zacharie l'Escarcelle. C'est à la fois un portrait et… je ne saurais trop dire quoi. Dans tous les cas, je l'ai trouvé bien réussie. Lors d'une randonnée à la campagne, des amis tombent sur cet homme, un gardien, à l'air mi-paysan mi-brigand. Cet homme veille autant qu'il le peut sur quelques arpents de terre oubliés de tous, le Champ-des-Bécasses. Ce site d'une bataille historique que les Russes ont gagné sur les Hordes contient entre autres un mémorail vandalisé et une église dévastée et remplie de graffitis. C'est un peu triste, nostalgique.

Pourquoi j'aime cette nouvelle ? Il y a le portrait de ce vieil homme, fier, probablement un vétéran d'une guerre quelconque, qui prend sa tâche très sérieux malgré la décrépitude des lieux qui auraient dû inspirer le respect. La narration, qui fait des bonds dans le passé (presque comme la réminescence de vieux souvenirs), rend à ces lieux leur gloire d'antan, avec les hauts faits d'armes des Russes des siècles précédents. Un certain hommage aux héros de la Seconde guerre mondiale ? Et il y a ces extraits de poèmes d'Alexandre Blok, parsemés ici et là, qui ajoutent à la beauté et è la majesté des lieux. Tellement que l'écriture de Soljenitsyne s'en trouve, selon moi, elle-même embellie.

Les deux dernières nouvelles, d'environ vingt ou trente pages chacunes, m'ont un peu moins plu. Elles sont écrites dans un style assez semblable mais leur sujet m'a moins intéressé alors elles me sont peu restées en mémoire : des blessés dans un hôpital et une procession qui tourne mal. N'empêche, pour des écrits de jeunesse, c'est tout de même assez réussi. Belle petite découverte!
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Habitué aux longues fresques du « Pavillon des cancéreux » et du « Premier cercle », je me suis retrouvé face à un style totalement différent ici. La première partie du livre est consacrée aux « études et miniatures », série de très courts textes d'une page ou deux seulement : respiration tranquille sous un pommier, caneton qui s'émancipe de sa mère, une petite branche d'orme qui pousse sur un morceau de tronc débité, ...

La deuxième partie comprend trois nouvelles un peu plus longue : un vieux garde d'un endroit aujourd'hui oublié par tous, un malade qui arrive péniblement à l'hôpital pour y mourir et qui se fait refouler parce qu'arrivé après les heures d'admission et une procession religieuse dans un village qui a en grande partie déserté la religion.

L'occasion de découvrir Soljenitsyne dans un style très poétique et contemplatif peu habituel. Il exprime aussi dans ce recueil sa peur ou sa tristesse de voir la religion peu à peu abandonnée et vidée de toute substance. Ces textes viennent compléter le portrait qu'on se fait de l'auteur avec ses grands succès littéraires.
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« Zacharie l'escarcelle » est le plus long texte de ce recueil qui comprend également trois autres parties : « Etudes et miniatures », « La main droite », « La procession de Pâques ».

« Etudes et miniatures », qui ouvre ce recueil est constitué d'une série de petits textes, sortes de poésies en prose sur des thèmes aussi variés que « La respiration », « le caneton », « Un orage en montagne »… on évoque Tourgueniev

« Zacharie l'escarcelle » est le récit d'une sortie à vélo. Destination ? Un des hauts lieux de l'histoire russe : le mamelon entre le fleuve Don et la rivière Nepriadva où, en 1380, le grand Prince de Moscou mit en déroute l'armée mongole. Un carnage d'une nuit qui laissa 200 000 morts sur le terrain au petit matin. Sur le site, un mémorial à l'abandon… Ce sera l'occasion pour les randonneurs de rencontrer Zacharie, l'inutile gardien des lieux, crasseux et fort en gueule… Mais n'est pas là l'âme russe ?

« La main droite » : un relégué est admis dans une maison de santé à l'article de la mort. La guérison est proche quand arrive un vétéran du détachement de la Révolution Mondiale qui s'illustra lors de combats sanglants en 1921. L'homme est mourant, mais la réceptionniste de bureau des entrées refuse le l'accepter : les horaires d'admission sont passés…

« La procession de Pâques ». On attend la procession de Pâques à l'église patriarcale de Pérédelkino… Quelques fauteurs de troubles éméchés quelques miliciens…une bousculade …une bien étrange procession pascale avec transistor, cigarettes et bonnets enfoncés sur les têtes, mais quoi, « on est dehors et le droit de ne pas croire en Dieu est garanti par la constitution ».

Un petit recueil qui contraste singulièrement avec les « grandes oeuvres » d'Alexandre Soljenitsyne, au moins par la longueur. Quant au style, il reste somptueux…

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Ce Recueil contient des études et miniatures et trois nouvelles. Zacharie l'escarcelle nouvelle écrite en 1965 et la main droite en 1960.
Les premiers textes sont très courts ils sont empreints de poésie et de lyrisme. Ce sont des récits symboliques, banaux dans leurs thèmes, qui chantent la beauté de la Volga, de la Russie. Des récits où germent l'amour de la vie et de la nature : Soljenitsyne nous parle de liberté, de la fragilité de la vie, de la mort, de la beauté : « les Russes de cette époque, après l'eau manifestaient, en second lieu une prédilection pour la beauté. » il chante la gloire et la beauté des paysages, de Saint Petersbourg mais il s'interroge sur les souffrances endurées pour sa construction : « est-ce que tout cela aussi sera oublié tout à fait ? Est-ce que tout cela aussi donnera la même beauté éternelle et achevée ?
Soljenitsyne est passionnée de sa terre natale, c'est aussi un homme courageux, un humaniste ; dans le récit « La main droite » il se porte au secours des plus démunis, lui qui le premier a dénoncé l'horreur des goulags, il est l'écrivain et le poète des victimes du régime totalitaire, et c'est lui qui a écrit : « Un homme est heureux tant qu'il décide de l'être, et nul ne peut l'en empêcher ».
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Les nouvelles et récits courts, et ils sont relativement nombreux, sont les textes que je préfère chez Soljénitsyne : on y voit tout ce qui fait de lui un très grand écrivain, son style remarquable.
Dans ce recueil on trouve trois nouvelles et des «Etudes et miniatures» qui sont d'une brièveté inhabituelle, moins d'une page, sortes de poèmes en prose sur des thèmes très variés : une promenade en forêt, la recherche de la tombe d'un poète, une pause sous un pommier, la vie d'un caneton, une pousse bien vivante sur un morceau d'orme débité, … cela nous parle de la beauté de la nature, de liberté, de la fragilité de la vie…
Suivent trois nouvelles un peu plus longues :
* la nouvelle éponyme, Zacharie l'escarcelle, portrait d'un gardien croisé au détour d'une balade à la campagne, qui prend son rôle très au sérieux tout en ressemblant tant à un paysan qu'à un brigand et qui veille comme il peut sur un lieu historique oublié de tous, le Champ-des-Bécasses, site d'une bataille que les Russes ont gagné sur les Hordes Tatares, au mémorial vandalisé et à l'église ravagée et pleine de graffitis. L'atmosphère est nostalgique, mélancolique. Ce site est effectivement pour les Russes un site aussi important au moins qu'Alésia pour nous. Sauf qu'Alésia, ça remonte à – 52 et que le Champ-des-Bécasses c'est une bataille de 1380. On peut remarquer que malgré l'état piteux des lieux, il y a bel et bien un gardien. La narration fait des sauts dans le passé, se remémorant de hauts faits d'armes des siècles passés.
*La main droite : un hôpital avec un blessé prêt à sortir, guéri, arrive péniblement, comme il peut, un autre blessé, vieux vétéran de la guerre civile de 1921, il est mourant et se fait refouler parce qu'arrivé après les heures d'admission, ...
* La procession de Pâques (en Russie c'est Pâques et non Noël qui est la fête religieuse principale) : une procession à l'église du village de Pérédelkino (c'est très près de Moscou et beaucoup d'écrivains connus y ont une datcha). Quelques fauteurs de troubles éméchés, quelques miliciens, de la bousculade, la procession est perturbé, mais quoi, « on est dehors et le droit de ne pas croire en Dieu est garanti par la constitution ». Avec le recul on peut noter que Soljénitsyne est gêné par l'attitude des gens, attitude qui ne nous choque pas tant que ça, et ne souligne pas ce qui est probablement bien plus important, que les miliciens relèvent probablement l'identité des croyants. Mais bon, il faut savoir que la plupart des nouvelles de Soljénitsyne, même si elles n'ont fait l'objet d'aucune édition sous forme de livre du temps de l'URSS, ont été autorisées et publiées dans une revue très lue (Novy Mir). C'est à partir de 1963 et surtout de 1966 (ère Brejnev) que Soljénitsyne s'est retrouvé interdit, refusé de toute publication. C'est là que s'est forgé son style.
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Citations et extraits (14) Voir plus Ajouter une citation
En parcourant les chemins de la Russie moyenne, on comprend peu à peu ce qui rend le paysage russe si apaisant.
Ce sont nos églises. Escaladant les coteaux, grimpant sur les collines, s’avançant, princesses blanches et rouges, vers les larges fleuves, dressant leurs clochers sveltes, fuselés et multiformes au-dessus d’un quotidien de paille et de volige, elles se font signe de loin, de très loin et, jaillies de villages dispersés, les uns aux autres invisibles, elles montent vers le ciel unique. Où que vous mènent vos vagabondages … pointe toujours quelque petit clocher …
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Je jetai dans le feu un rondin pourri, sans m'aviser qu'à l'intérieur il était habité par une fourmilière.
Le rondin crépita, les fourmis se ruèrent au-dehors et, au désespoir, se mirent à courir dans tous les sens. Elles sillonnaient la partie supérieure de la bûche puis se recroquevillaient, dévorées par les flammes. J'attrapai le rondin et le fit rouler sur le côté. Maintenant les fourmis, en grand nombre, échappaient à la mort, fuyant sur le sable, sur les aiguilles de pin.
Mais, chose étrange, elles ne s'éloignaient pas du feu.
À peine leur frayeur surmontée, elles faisaient demi-tour, tournoyaient un moment, puis une force mystérieuse les tirait en arrière, vers la Patrie abandonnée, et nombreuses étaient celles qui escaladaient à nouveau le rondin ardent, le parcouraient en tous sens et y mouraient.
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Cette terre et cette herbe, cette lune et ces parages perdus étaient les mêmes qu'en 1380. Dans la réserve, les siècles s'étaient arrêtés et, en errant par le champ que la nuit recouvrait, on pouvait tout évoquer, feux de camps, noirs troupeaux de chevaux, et entendre du côté de la Nepriadva les cygnes chantés par Blok.
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[L]e vrai goût de la vie, on ne le trouve pas dans les grandes choses, mais dans les petites. Il est dans la démarche mal assurée du convalescent aux jambes flageolantes. Dans la respiration prudente de celui qui a peur du poignard de la douleur dans sa poitrine. Dans la simple pomme de terre que le gel a épargnée et qui surnage dans ta soupe.
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p 29 Au lever du soleil, trente jeunes débouchèrent en courant dans la clairière, se répartirent en s'espaçant, tous face au soleil, et ils commencèrent à se baisser, à fléchir sur leurs jambes, à s'incliner, à se prosterner, à étendre les bras, à lever les bras, à s'agenouiller et à se renverser en arrière... et ainsi pendant un quart d'heure.
De loin, on pouvait se figurer qu'ils priaient.
Personne à notre époque, ne s'étonne que l'homme chaque jour serve patiemment et attentivement son corps.
Mais nous serions offensé si, de la même manière il servait son esprit.
Non, se n'était pas une prière. C'était le quart d'heure de culture physique.
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Vidéo de Alexandre Soljenitsyne
Histoire de la conception, du parcours...jusqu'en France en 1968 du livre . Nombreux témoignages de personnalités en France et aussi en URSS.
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