AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
3,73

sur 681 notes
Irène et Gary, mariés depuis 30 ans, vivent en Alaska, au bord du lac Skilak. Un choix de vie qui s'est fait il y a 10 ans, pour se rapprocher d'un idéal de communion avec la nature. Pourtant, c'est une autre vie que le couple s'est construit. Gary s'est perdu dans bon nombre de projets inaboutis. Irène lui a donné 2 enfants, désormais adultes : Rhoda et Mark. Aujourd'hui, à l'heure de la retraite, Gary est pourtant décidé à mener la vie qu'il a toujours rêvé. Ils vont désormais vivre dans une cabane en bois sur une île isolée, au coeur de la nature. Il entraîne dès lors sa femme dans la construction de leur future habitation et s'acharne sur ce projet quelque peu utopique, de manière un peu égoïste et sans être vraiment préparé. Irène, dont le mal-être ne cesse de grandir, voit surtout dans cette entreprise une tentative de Gary de se séparer d'elle et se prête bien malgré elle au projet pour sauver son mariage.

Après le formidable Sukkwan Island, voici le génial Désolations ! Si ce dernier prend place lui aussi dans les paysages tourmentés de l'Alaska, David Vann fait preuve de renouvellement tout en y replaçant avec succès ses propres obsessions.
On y retrouve une famille dont l'auteur prend plaisir à décortiquer les sentiments, les peurs, les espoirs, la folie même.
Gary construit sa cabane envers et contre tout. Malgré le temps. Malgré sa femme. Malgré les problèmes qui ne manquent pas de se présenter faute de préparation suffisante. Son obstination est peu compréhensible, il donne l'impression de fuir quelque chose, de se prouver quelque chose, qu'il est capable d'aller au bout de sa volonté. Seul compte ce but qu'il s'est fixé, alternative à tous ses autres projets précédents qui n'aboutirent jamais.
Irène est hantée par le suicide de sa mère, dont elle a découvert le corps pendu lorsqu'elle était enfant. Elle semble être une femme résignée qui s'accroche désespérément à son mari, qui ne le contredit pas par peur de le perdre. Depuis qu'elle s'est lancé dans la construction de la cabane, des migraines atroces viennent l'assaillir et aucun médicament ne semble faire effet.
A leurs côtés, il y a pourtant leur fille Rhoda qui leur rend visite régulièrement, qui s'inquiète de leur absence, qui voit la détérioration de leur relation. Rhoda vit avec Jim, un dentiste fortuné qui lui offre tout le confort nécessaire. Mais sa relation avec lui ne la satisfait pas complètement. Jim semble de pas s'impliquer totalement. le mariage dont il parle reste un projet lointain. Son frère Mark vit avec Karen et continue de mener une vie insouciante : kart avec les copains, fumette entre amis. le sort de sa famille lui importe peu et il reste en retrait de tout ce qui la concerne.
Dès le début, la tension est palpable. le couple Gary / Irène communique avec violence, s'envoie des piques régulières et réagit avec susceptibilité. Même le silence entre eux semble synonyme de reproches. Les maux de tête d'Irène ne font qu'accentuer la pression et Gary semble y prêter peu d'attention. Alors que Rhoda s'interroge de plus en plus sur sa vie avec Jim, ce dernier se laisse séduire par Monique, une amie de Mark venue passer quelques jours chez eux en compagnie de son petit ami Carl. La jeune femme est peu farouche et prête à utiliser ses charmes pour obtenir quelques faveurs sans débourser un centime.
Vous l'aurez compris, cette famille, ces différents couples sont tous au bord de la rupture, de la faille. La tension que l'on ressent dès l'entrée en matière du roman ne fera que s'accentuer. Et le drame ne peut être bien loin avec David Vann.

David Vann nous offre ici un roman encore plus abouti que son précédent. C'est à un véritable drame psychologique auquel nous allons assister. Les personnages sont tous extrêmement détaillés, leur propre individualité, leur propre peur ou espoir. Leur propre voix aussi : l'auteur utilise 7 narrateurs différents et le procédé nous permet de pénétrer leur inconscient encore plus profondément. Pourtant le trait commun de tous, c'est une certaine peur de la solitude. Gary semble fuir les hommes, Irène craint l'abandon de son mari à l'image de celui de sa mère, Rhoda semble se satisfaire d'une relation bancale pour éviter un célibat peu enviable, Mark s'enferme dans son insouciance pour mieux se protéger des autres, Carl très amoureux refuse de voir la trahison de Monique. La solitude semble être la situation ultime à éviter à tout prix. Quitte à faire des compromissions, à trahir ses proches ou même trahir ses propres aspirations.
Le mariage ou le couple est vu, non pas comme une alliance amoureuse, mais plutôt comme un rempart à la solitude. Et c'est un constat très amer qui ressort du mariage à l'issu du roman.

Désolations est un livre véritablement désenchanté qui s'attache à montrer le côté sombre en chacun de nous.
La terre d'Alaska, synonyme de pureté originelle, de retour à un état de nature simple et harmonieux, s'avère ici le miroir réfléchissant de leur propre lâcheté. Vu sous un jour menaçant, elle n'est pas l'antre hospitalière que l'on veut bien nous faire croire. Elle ne fait qu'accentuer ou souligner nos propres sentiments, bons ou mauvais.
Il sera aussi ici question d'héritage et de transmission. POur Irène, l'histoire se répète inlassablement, de générations en générations. Elle tente de mettre en garde sa fille contre l'illusion confortable du mariage, elle veut briser le cycle des déceptions. Mais pour Rhoda, ce n'est que l'expression désespérée d'une femme malheureuse dans son propre couple.

Désolations se révèle véritablement un roman puissant et déchirant qui vous emmène au coeur de l'âme humaine et vous retourne par un final extrêmement fort qui, s'il ne m'a pas étonné, m'a complètement pris au dépourvu.On y retrouve les thèmes de l'auteur : la famille, le manque de communication entre ses membres, la solitude, la folie, le suicide et la mort. Des obsessions que David Vann réussit à transcender ici avec brio pour donner un roman universel sur la désillusion des hommes.

Un roman indispensable !
Lien : http://legrenierdechoco.over..
Commenter  J’apprécie          160
L'an dernier, je me souviens, j'avais laissé David Vann sur Sukkwan Island (l'histoire terrible d'un homme et de son fils, tentant de survivre dans une cabane perdue sur une île d'Alaska). Superbe et glaçant.
Cette année - ô surprise ! - je le retrouve sur Caribou Island*, avec l'histoire terrible d'un couple de cinquantenaires, tentant de survivre dans une cabane perdue sur une île d'Alaska.

À ce stade vous craignez l'arnaque, vous vous dites que le bonhomme manque un peu d'imagination...
Eh bien détrompez-vous : quand il s'agit de plonger son lecteur dans l'horreur et de soumettre ses personnages aux pires tourments, de placer les uns comme les autres dans des conditions de détresse psychologique toujours plus extrêmes, David Vann n'est jamais en panne d'inspiration !

À nouveau il choisit un cadre grandiose - celui des immensités glacées du grand Nord, des lacs gelés et de leurs îlots carrément inhospitaliers - pour nous proposer un roman sombre et perturbant, qui cette fois met en scène non seulement un binôme d'aventuriers en perdition, mais également certains membres de leur famille eux aussi soumis aux pires Désolations (d'où le pluriel du titre, sans doute...)
En effet, si la tragédie se noue principalement autour de Gary et d'Irène, isolés et en bien mauvaise posture sur Caribou Island, leurs enfants Rhoda et Mark ne sont pas en reste, ainsi d'ailleurs que leurs amis Carl et Monique, ou même que Jim, le compagnon de Rhoda. Tous vont connaître leur lot de misères et de désillusions.

David Vann n'a décidément pas son pareil pour raconter ces vies ratées, pour décrire ces projets qui capotent, ces vertigineuses spirales d'échecs...
Il sonde les âmes malades de ses personnages avec une acuité qui confine au sadisme, et le mouvement brownien d'idées noires qu'il entretient sous leurs crânes les fait invariablement sombrer dans la folie la plus absolue.

Les descriptions des grands espaces sauvages (magnifiques !) sont entrecoupées de dialogues tendus, incisifs, au moyen desquels les protagonistes du drame dévoilent des personnalités complexes et torturées.
Les couples (Irène/Gary, Rhoda/Jim, Monique/Carl) sont particulièrement malmenés, et la vision du mariage développée par l'auteur ("union mal assortie dès le départ, quelque chose qui avait amoindri leurs existences", "déni graduel de ce que l'on désirait, mort prématurée de l'être et des possibilités, fin trop hâtive de la vie") est parfaitement déprimante.

Sur l'île, alors que Gary s'obstine à bâtir la cabane de ses rêves malgré les conditions climatiques hostiles et en dépit d'un manque évident de compétences et de préparation, Irène est soudainement victime d'un mal mystérieux qui se manifeste par des crises de migraine fulgurantes.
Cela n'arrange en rien ses tendances paranoïaques, et très vite le lecteur comprend que l'expédition est promise au désastre. Il devine/redoute l'anéantissement final, mais le choc n'en est pas moins violent quand survient la catastrophe.

Alors c'est vrai, les points communs avec Sukkwan Island sont multiples mais cela n'atténue en rien la force dévastatrice de ce roman, toujours aussi dérangeant, toujours aussi bien ficelé.
On regrettera quand même quelques petites longueurs (surtout quand s'accumulent les détails techniques et répétitifs concernant la construction de la cabane) et quelques séquences un peu confuses (pouvait-il en être autrement, au moment où la folie submerge les digues de la raison ?)
L'essentiel est ailleurs, dans cette éprouvante mise à nue des êtres, dans cette exploration méthodique et assez perturbante de leurs "enclaves de désespoir".

Un roman d'impasses et de débâcles, pas franchement rigolo (euphémisme) mais terriblement efficace.
Après l'inoubliable Sukkwan Island, deuxième déflagration..
Jusqu'où Vann ira-t-il ?


- - - - - - - - - -
*le titre du roman, dans sa version originale
Commenter  J’apprécie          142
Je suis partagée au moment d'écrire ce retour,

Après l'excellent Sukkwan Island, et le très touchant Aquarium, je lis Désolations.
Le titre est simple mais tout à la fois.
La désolation du couple, de la vie, ... Si tous les bouquions pouvaient porter un titre aussi évocateur de leur contenu...

Comme dans son premier roman, la sensation de gêne, de tensions malsaines m'a suivie toute la lecture.

J'étais crispée et j'attendais un dénouement, peut-être, sans doute pas heureux mais que cette tension s'en aille.

Cela m'a manqué, je ne l'ai pas aimé comme le premier mais j'en lirai d'autres quand même car l'auteur est une perle et ses romans aussi!
Commenter  J’apprécie          142
« On peut choisir ceux avec qui l'on va passer sa vie, mais on ne peut pas choisir ce qu'ils deviendront »

Et si on se construisait une cabane sur l'île de Caribou Island ?

On y verrait des terres sauvages à perte de vue, aucune âme humaine à des kilomètres à la ronde, après une longue descente en canoë dans les eaux troubles de l'Alaska. On affronterait chaque jour des rafales glaciales de vent et de poudreuse, des sentiers à baliser dont les tempêtes de neige auraient effacé les traces de la veille. le temps que les travaux de la cabane se terminent… se ter-mi-nent…….

Gary en avait rêvé de ce projet. Il s'était mis en tête de construire cette cabane à partir de rien. Elle serait son refuge, comme un reflet de l'homme, qui fait écho à une image de soi déformée à travers le prisme d'une nature désemparée. Elle serait sa tanière, son obsession, comme un grand mensonge sur lequel on s'appuie pour éviter de regarder en face ce monde qui nous échappe. Pour faire semblant que les choses vont beaucoup mieux ailleurs que chez soi…

Alors, tu viens avec moi sur Caribou Island ? Bon, ce ne sera peut-être pas si idyllique qu'on l'avait imaginé. Mais on sera ensemble et puis, qu'est-ce qu'on à perdre pour tenter de sauver notre couple déjà en péril?

« Ce qu'elle voulait, c'était qu'il s'allonge à ses côtés. Tous les deux sur la plage. Ils abandonneraient, lâcheraient la corde, laisseraient dériver le bateau au loin, oublieraient la cabane, oublieraient tout ce qui avait cloché au fil des ans, rentreraient chez eux, se réchaufferaient et recommenceraient de zéro. »

La cinquantaine avancée, Gary n'avait jamais su prendre soin de personne d'autre que de lui-même. Une vie entière à fuir et rêver, à se dire que sa vie aurait pu être autrement, ailleurs. Que des remises en questions et des regrets, des apitoiements, une quête constante de distractions pour meubler les heures. Mais l'égoïsme est-il un motif suffisant pour foutre en l'air la vie de ceux qui nous sont proches ? Pire encore, comment t'as fait Gary pour ne pas voir à quel point Irène était devenue amère, broyait du noir? Qu'elle ingurgitait du Tramadol pour soulager ses migraines comme on bouffe des Smarties? Tu ne voyais donc pas que chaque rondin qu'elle transportait chaque jour était aussi lourd sur ses épaules que le poids des années qui ravage à force de lutter? Tu étais bien trop obnubilé par ton projet de foutue cabane! Mais attends Gary, la vengeance est douce au coeur de l'indien…

David Vann a un don, celui de nous entraîner si habilement dans l'atmosphère suffocante de ses histoires qu'on en ressort le souffle court. C'est oppressant, c'est noir, c'est même à la rigueur insupportable par moments, mais il nous le rend avec une telle intelligence de coeur et de sentiments qu'il nous fait presqu'oublier jusqu'où les limites de l'âme humaine sont capables d'aller quand elles se trouvent en rupture avec la réalité. Aussi, je pense que l'oppression qu'on ressent en abordant ses romans - et qui en font sa force aussi - nous vient, au-delà de l'atmosphère dérangeante, de ses personnages plus vrais que nature qu'on ne voudrait pas imaginer aussi « malsains » - pour certains - et qui pourtant ne reflètent qu'une société en mal de vivre, avec ses individus en marge. L'auteur a lui-même eu à affronter de près, étant très jeune, le suicide de bon nombre de membres de sa famille, défi qui le rend forcément aujourd'hui sensible aux revers de la santé mentale.

Dans Désolations, tout comme dans Sukkwan Island, on retrouve des histoires de relations familiales dysfonctionnelles. Des histoires aussi de personnages asociaux, d'isolement, de solitude, de vide, de mal de vivre, de coups puissants et impardonnables. Et plus particulièrement dans celui-ci, de relations de couple et fraternelles conflictuelles, de tricheries, de rancoeurs, de méchancetés, de chantage et de coups bas. Une panoplie de sentiments aigres, que je vous conseille de lire en des temps joyeux…

Un immense coup de coeur !

« le froid s'insinua entre ses vêtements malgré son allure rapide, alors il se mit à courir à petites foulées, ses bottes émettant un bruit sourd. Unique âme solitaire sur cette route, les étoiles et l'absence de lune. L'Alaska, une immensité imperturbable qui s'étendait sur des milliers de kilomètres dans toutes les directions. »
Lien : http://www.lamarreedesmots.c..
Commenter  J’apprécie          140
Si je pouvais me permettre, en toute humilité, de donner un petit conseil à quelqu'un qui serait tenté de lire « Désolations», je dirais ceci : si ton esprit est parfois traversé d'idées noires, si les relations avec autrui sont pour toi plutôt compliquées, si au boulot c'est pas la joie, si ton couple bat de l'aile, bref, si cela ne va globalement pas très fort dans ta vie et dans ta tête, sincèrement, pour ton propre équilibre déjà plutôt précaire, évite ce livre, rabats toi plutôt sur quelque chose de plus léger en termes de lecture, ou regarde « la grande vadrouille». Sans quoi, tu pourrais passer d'un mal-être passager à une franche dépression…

A titre personnel, j'ai renoncé à lire David Vann après ce second ouvrage : trop de noirceur, pas le moindre petit rayon de soleil, un sentiment d'oppression, de suffocation à la lecture, l'impression d'une longue dérive vers un drame inexorable…

Je ne me permets pas de juger ici de la qualité du roman ou de son auteur, j'avais même plutôt apprécié « Sukkwan Island », en dépit de son déroulé tragique. Mais cette noirceur qui pouvait encore passer à la lecture d'un premier roman, ne passe plus à la lecture du second : je crois en fait que, tout simplement, les histoires écrites par David Vann ne correspondent pas à ce que je recherche dans la littérature.
Commenter  J’apprécie          140
Des personnages qui refusent aveuglément de voir que la réalité de leur vie est une impasse et un paysage, l'Alaska, dont on ressent intensément la beauté sauvage, sont le cadre de ce roman. Bien sûr, la fin est prévisible, mais cette sensation de chute irrésistible fait aussi l'intérêt du texte. Cette fin très sombre est à l'image de la vision que l'auteur nous propose du mariage. L'ensemble est bien écrit et se lit facilement avec beaucoup de plaisir.
Commenter  J’apprécie          140
Après Sukkwan Island prix médicis etranger 2010, et qui contrairement à d'autres, m'avait peu emballé, j'ai lu ce second roman de David Vann publié en France, et qui a de nombreuses thématiques en commun avec sa première oeuvre, même si le décor a changé. Ici, on est en Alaska, et comme dans son premier roman, le livre prone l'isolement et le retour à la nature. le roman regorge de pages qui vante les louanges de la nature, entre le froid, le vent et les scènes de pèche au saumon. et l'on ressent fortement la lumière de ce décor, tant la présence de la lumière est primordiable dans ce récit. Mais contrairement à Suukwan Island, ce n'est plus la relation filiale qui est abordée, mais la relation de couple, mais dans son angle le plus sombre et le plus sombre et psychotique qui soit. Des personnages aussi torturés et sauvages que le décor dans lequel ils vivent, et si le style est impeccable , on peut rester un peu hermétique à cette froideur généralisée, ce qui a été mon cas. Décidement, je n'ai pas de chance avec cet auteur!!!
Commenter  J’apprécie          140
Une telle désolation exsude à la lecture de ce roman .... que l'on s'en trouve au final ... ragaillardi ou presque, ce qui semble incongru, certes, mais trop, c'est trop !

Gary veut construire sa cabane dans Caribou Island, une île du lac Skilak au pied d'un glacier en Alaska. Il y tient, c'est le rêve de sa vie ! Irène, elle, trouve cela absurde, mais en bonne épouse s'apprête à aider son mari du mieux qu'elle peut, sans rien dire, tout en trouvant sa manière d'agir parfaitement irrationnelle ! alors elle développe d'abominables migraines qui l'abrutissent et lui enlèvent tout sommeil et toute joie de vivre.
"On peut choisir ceux avec qui l'on va passer sa vie, mais on ne peut pas choisir ce qu'ils deviendront" pense Irène, désabusée.
La cabane de Gary c'est "l'incarnation physique de l'esprit humain" selon lui, mais on ne parvient à la perfection qu'en suivant la voie exacte à laquelle on est destiné et non en rêvant d'impossible, la cabane représentant la matérialisation de cet impossible.

Ceci est le roman du vide, du désespoir du non-accompli, des rêves fous que l'on traîne de tout temps au fond de soi et qui s'évanouissent dans la conscience de sa propre médiocrité, de son incapacité à réaliser quoi que ce soit, dans l'impossibilité de donner une autre forme à la vie.
Une cabane de guingois, mal foutue comme les existences fracassées.
L'injustice ! Les vieilles haines recuites qui explosent soudainement en un maelström de violence verbale opposant le "monstre" et "la vieille salope hargneuse".

Un climat oppressant et irrespirable tout comme la nature impitoyable et sauvage de cet Alaska, terre de désolation, où l'automne, le froid et la neige s'invitent en plein mois d'août, au mitan du court été arctique.
"Ceux qui ne trouvaient pas leur place ailleurs venaient ici, et s'ils ne s'ancraient nulle part en Alaska, ils basculaient dans l'océan. Ces villes minuscules dans l'espace immense, ces enclaves de désespoir."

L'auteur, lui-même né dans une île au large de l'Alaska, s'y entend pour imprégner le lecteur de cette aridité, cette âpreté d'une existence vouée au néant, ce monde impossible, trop plat, trop vide.
Il s'y entend également pour démonter impitoyablement les mécanismes complexes qui forment le fonctionnement d'un couple, cet agencement subtil de personnalités différentes, destinées par l'amour à s'accorder, mais qui, au fil du temps, voient s'effilocher et disparaître tout ce qui faisait le suc de leur entente.
Quelle désolation que les vieux couples !
Et le lecteur de sombrer peu à peu, tout comme les protagonistes, dans une détresse sans fond ...
Un bon conseil, lecteur dépressif, n'ouvre surtout pas ce livre !
Commenter  J’apprécie          130
De nouveau, David Vann a écrit sur l'Alaska et, cette fois, nous allons suivre plusieurs personnages : Gary et Irene, un couple qui vivent ensemble depuis trente ans et qui ont eu deux enfants, Rhoda et Mark, aujourd'hui adultes, sont en train de construire une cabane sur une petite île, Caribou Island. Irene n'en a pas vraiment envie, mais va quand même suivre son mari, malgré les étranges maux de têtes insupportables qui l'assaillent ; Rhoda, leur fille, en couple avec le dentiste Jim, aspire à se marier et à avoir la vie dont elle a toujours rêvée, va assister au conflit entre ses parents ; Mark, leur fils, est beaucoup plus détaché et mène sa vie avec sa compagne, Karen. Nous allons également faire la connaissance de deux de leurs amis, Carl et Monique, un jeune couple.

Rhoda et Jim sont des personnages qui vous sont connus, si vous avez lu Sukkwan Island et j'étais glacée en m'apercevant de ça. Par ailleurs, je vous recommande chaudement ce livre, c'est un des meilleurs livres que j'ai lus jusqu'à présent. Ceci dit, malgré quelques points communs, Désolations est très différent de Sukkwan Island. Ici, David Vann se concentre sur la dissection des liens qui unissent les différents personnages, bien que l'affrontement entre l'homme et la nature et la solitude restent des thèmes importants également dans ce roman. Il nous conte ce que le temps qui passe et le manque de communication peut créer dans un couple.

Encore une fois, l'auteur nous livre un roman très sombre, avec une plume des plus séduisantes. J'ai redécouvert l'Alaska, souvent décrit comme un rêve et se révélant être un paysage hostile, imprévisible, voire dangereux. Je n'ai pas eu le coup de foudre comme avec Sukkwan Island, mais je dois dire que j'ai été envoutée par ce récit, lu en deux jours, et que c'est tout de même un coup de coeur.
Lien : http://anais-lemillefeuilles..
Commenter  J’apprécie          130
Vais-je oser ? Me mettrais-je à dos la quantité de lecteurs de David Vann depuis son formidable succès de Sukkwan Island ? Bon, je me lance : je n'ai pas aimé ! C'est lent, c'est long, c'est prévisible ! Ouf ! Voilà, c'est dit. Maintenant je pars en courant (je suis un grand sportif) de peur de recevoir des cailloux. .................................................................................................................................

Voilà, c'est bon ? Je peux revenir ? Vous avez bien vidé vos mains et jeté les projectiles qu'il vous restait ? Sûr ? pas un qui traîne encore ici ou là ?

J'argumente : j'ai eu beaucoup de mal à entrer dans ce livre et pourtant j'avais un a priori très positif eu égard au roman précédent de l'auteur, qui malgré des longueurs, là aussi m'avait emballé. Las, je retrouve ici, en encore plus fort ce que je n'avais pas aimé dans l'autre. L'intrigue de départ est peu ou prou la même et le déroulement pareil. le paysage est ressemblant : j'aime bien lorsque les auteurs se renouvellent, mais là ce n'est pas le cas.

J'ai été vraiment agacé par les les questionnements des personnages : toujours les mêmes tout au long des 300 pages ; ils n'évoluent quasiment pas, sauf dans les toutes dernières pages ; c'est redondant et longuet. Il a fallu des décennies à Irene pour comprendre, moi, en 100 pages j'avais compris qu'on tournait en rond. Pareil pour Rhoda et Jim qui se tournent l'un autour de l'autre : nous marions-nous ? Pourrais-je être infidèle ?

J'aime bien la lenteur et les paysages dans mes lectures, mais il faut que le style de l'auteur m'accroche, que j'aie du plaisir à lire ses phrases, l'enchaînement de ses mots. J'ai toujours du mal à parler style littéraire avec des ouvrages traduits, ce qui est de l'auteur, ce qui est de la traductrice (Laura Derajinski) et d'autant plus pour David Vann que son écriture n'a rien d'extraordinaire. Pas désagréable, certes non, mais point exceptionnelle non plus, avec même ça et là des phrases bizarres comme celle ci que j'ai repérée, celle du milieu : "Elle était la plus belle femme qu'il fréquenterait jamais. Elle était certain (sic). Il n'y aurait jamais rien de mieux et il avait pourtant encore la moitié de son existence devant lui." (p.167)

Je suis un peu dur, sûrement, mais ma déception est la mesure de ce que j'attendais de ce livre. Je l'ai fini en diagonale, vite fait pour tenter de ne rien rater, mais pour ce qui est du raté, je pense que c'est David Vann qui a commencé !
Lien : http://www.lyvres.over-blog...
Commenter  J’apprécie          130




Lecteurs (1326) Voir plus



Quiz Voir plus

Désolations de David Vann

Comment est morte la mère d'Irène ?

noyée dans le lac
pendue à un chevron
tombée dans les escaliers
blessée par rame à feu

15 questions
10 lecteurs ont répondu
Thème : Désolations de David VannCréer un quiz sur ce livre

{* *}