Ce n'est pas le recueil le plus connu de
Verlaine, mais c'est sûrement un de ceux que j'ai préférés, pour la liberté des thèmes et pour sa tonalité personnelle, voire intime. Les
Fêtes galantes présentent de jolies pièces, mais désincarnés, ce ne sont pas les amours du Poète, mais des fantaisies imaginaires. Ici,
Verlaine évoque ses propres souffrances - plusieurs
poèmes sont d'ailleurs écrits du fond de sa prison. Ce n'est pas encore le temps du repentir et du retour vers l'épouse légitime et vers la religion, mais plutôt celui des souvenirs, ceux des voyages londonien et belge, des vapeurs d'alcool et de la vie de
bohème avec la pauvreté mais aussi la liberté, et surtout de
Rimbaud. Sa présence est partout dans le recueil, même si son nom n'est jamais prononcé. Il incarne la jeunesse, la fête et ses excès, le voyage éperdu, lui, "l'homme aux semelles de vent", le péché et l'art, la passion et l'érotisme. C'est le superbe poème "Laeti et errabundi", "Gais et vagabonds", mais aussi dans la description de Ganymède par exemple.
C'est donc un recueil sur le désir et sur le plaisir, et là où les
Fêtes galantes n'étaient que sensuelles, là, le ton est érotique. L'homosexualité masculine est donc célébrée, mais aussi, ce qui est plus rare dans la littérature du XIXème siècle, l'homosexualité féminine, vue non comme une curiosité ou une dépravation -
Balzac,
Zola, Dumas... mais comme une union des corps, qui permet le plaisir - et elles en prennent ces jeunes filles !
Je ne suis pas sûre d'avoir vraiment compris le titre, mais pourrait-il renvoyer justement à cette union des corps dans un lit ?