D'après ce que j'ai compris au fil du texte, "
Plumes d'Ange" est paru probablement sous forme d'épisodes, ce qui donne à ce livre un format à mi-chemin entre le journal intime rédigé au quotidien et le roman.
Cette lecture m'a laissée... perplexe. Je n'avais pas compris à quel point ce roman n'allait pas en être un. C'est plutôt une "autobiographie en miroir" puisque le personnage central n'est pas l'auteur mais son père, tel qu'il l'a perçu lui, et tel qu'il ressent sa vie.
Ce livre est en effet un hommage à Ange Zaffran, le père de
Martin Winckler (
Marc Zaffran de son vrai nom), voire même un hommage à toute sa famille. Nous voyons défiler au fil de ces chapitres la famille Zaffran, son origine, celle de son nom, les aïeux de M. Winckler, ses conjoints, ses enfants, ... et cela m'a gênée. Cela a certainement apporté énormément à l'auteur qui semble s'être libéré de tout cela, mais en tant que lectrice je me suis sentie voyeuse de la vie de ces personnes.
Quant à cette sensation de perplexité évoquée plus haut, elle repose sur différents éléments :
Au fil des pages on rencontre quelques moments de grâce. Certains passages sont très émouvants, on sent tout l'amour de
Martin Winckler pour son père qui était un homme si humain. Au sens "respectueux des autres", "bon", "accueillant", mais aussi au sens "il a parfois fait des erreurs, dit des choses blessantes, n'était pas parfait", ... en cela ce récit a été agréable et réconfortant à lire.
L'atmosphère de paradis perdu liée à l'Algérie est également très prenante et fait flotter sur ce récit une nostalgie douce-amère, mélange de chagrin et d'amour quant à la perte de la terre ancestrale de la famille Zaffran.
Hélas j'ai également ressenti de grands moments d'ennui, par exemple durant les longues énumérations de documents, de membres de la famille, de liens de parenté, ...
Ennui qui s'est également transformé par moments en frustration, par exemple quand à la toute fin le fameux secret de famille évoqué en quatrième de couverture est tout simplement rejeté dans l'ombre, sans qu'on sache le fin mot de l'histoire. Pourquoi en parler autant si ce n'est finalement que pour en dire que par respect pour les personnes impliquées M. Winckler n'en dira pas plus ? Non pas que je veuille à tout prix en savoir encore plus sur sa famille, mais je trouve ça assez malhonnête comme procédé.
J'ai ainsi plus d'une fois pensé à abandonner cette lecture, cependant j'ai tellement aimé "
Le Choeur des Femmes" que j'ai laissé sa chance à "
Plumes d'Ange". En outre le style est relativement fluide et les chapitres sont en règle générale assez courts, il est donc assez aisé de continuer à progresser dans ce livre, même si on éprouve trop souvent peu de plaisir à parcourir ce "petit" pavé de 600 pages.
Pour terminer sur ce qui m'a gênée, M. Winckler a fait une thérapie de type analytique et cela se sent fortement. Son texte est ainsi émaillé de citations de ses anciens écrits ou bien de récits familiaux avec des commentaires du genre "ça veut tout dire" ou bien "c'est seulement maintenant que je me rends compte du sens caché de ce mot/cette phrase"... le problème c'est que personnellement je n'ai rien vu du tout. Vouloir interpréter votre propre pensée est déjà compliqué, interpréter la pensée d'une autre personne sans clefs éminemment personnelles est impossible... et passer sa lecture à se demander ce sous-entend l'auteur est assez agaçant.
En conclusion... je ne recommanderai pas ce livre. Malgré l'impression que j'ai donné je ne l'ai pas détesté, mais pas non plus aimé. Il est bien rédigé, le style est agréable, mais cela n'est tout simplement pas fait pour moi. :)