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Françoise Nagel (Traducteur)
EAN : 9782809702279
296 pages
Editions Picquier (06/01/2011)
4.28/5   120 notes
Résumé :
Une fois de plus, Xinran nous emmène au coeur de la vie des femmes chinoises étudiantes, femmes d'affaires, sages-femmes, paysannes toutes hantées par des souvenirs qui ont marqué leur vie d une empreinte indélébile. Que ce soit à cause de la politique de l'enfant unique, de traditions séculaires destructrices ou de terribles nécessités économiques, des femmes ont été contraintes de donner leurs filles en adoption, d'autres ont dû les abandonner dans la rue, aux po... >Voir plus
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« Pourquoi ma mère n'a-t-elle pas voulu de moi ? » se demandent les enfants abandonnés.

Journaliste radio en Chine de 1989 à 1995, Xinran a écrit ce livre pour les filles chinoises qui ont été adoptées en Occident, et pour leurs familles adoptives. Elles doivent savoir ce qu'ont subi les mères, dans quelles circonstances elles ont dû se séparer de leurs bébés. Ce texte rend également hommage aux petites filles « arrangées » (comprenez « tuées ») à la naissance.
En ville, à la campagne, dans différentes régions du pays, l'auteur a recueilli des témoignages de filles adoptées, de mères contraintes à abandonner leurs enfants, et de femmes ayant travaillé dans des orphelinats chinois.

Les cas présentés sont multiples, complexes, mais tous ces abandons et infanticides résultent de la politique de l'enfant unique mise en place à partir de 1989, d'un manque d'information (y compris chez les jeunes générations) sur la sexualité et la contraception, et bien sûr de traditions ancestrales conjuguées à la pauvreté : « Vous ne pouvez pas ne pas 'arranger' [tuer] les bébés filles, sauf si vous ne mettez au monde que des garçons. La famille de votre mari ne vous le pardonnerait jamais. Ils vous mèneraient la vie dure ! Ils vous battraient, et vous n'auriez jamais assez à manger ! »

Comme dans ses autres ouvrages (que je n'ai pas encore lus), Xinran nous instruit sur la société chinoise, ou plutôt les sociétés chinoises : entre le quotidien en ville depuis les années 90 où les exigences professionnelles sévères limitent le temps à consacrer aux enfants, et la vie dans les campagnes les plus 'reculées' où perdurent pauvreté et traditionalisme.

Un recueil bouleversant et passionnant qui montre la souffrance indélébile de ces mères qui ont perdu une/des fille(s).
Ce « pont » (sic) entre les parents chinois biologiques et les occidentaux - enfants adoptés et familles adoptantes - existe également sous forme d'une association créée par l'auteur : http://www.mothersbridge.org/ .
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Dans les années 90, mais aussi avant et après, la Chine est un triste et révoltant grenier à petites orphelines. Traditions cruelles, arriérées et inhumaines, ou politique de l'enfant unique, ou encore ignorance des jeunes filles face aux risques de tomber enceinte, les raisons sont multiples mais le résultat final est toujours tragiquement subi par les bébés filles.
La dévalorisation du sexe féminin est ancrée depuis des millénaires et c'est pourtant d'une femme que l'on attend le devoir sacré de donner naissance à un garçon, un héritier mâle !
Plus les villages sont pauvres, moins les filles ont de chance de pousser leur premier cri ou si la pitié amène à ne pas aller jusqu'à leur ôter la vie, elles seront abandonnées, peu importe où, parfois dans le froid hivernal qui peut être rapidement fatal pour un nourrisson. Dans les campagnes, tuer les filles allait de soi.
Meurtries, les mères et les filles le sont, victimes et impuissantes à faire entendre leur amour maternel ou leur droit de vivre près de leur mère biologique. C'est pour atteindre et apaiser, si possible, les coeurs de toutes ces petites filles adoptées dans le monde entier que Xinran va au-delà de sa propre douleur et nous évoque ces récits tragiques. Ces histoires, dramatiques, bouleversantes, crient la profonde détresse ressentie par ces mères contraintes par de multiples forces non défendables à abandonner leur enfant.

Tourmentée, l'auteure l'est aussi en nous dévoilant une autre forme d'absence maternelle qui la hante depuis sa naissance. Alors qu'elle n'a pas été abandonnée, elle vit avec le désir inassouvi d'être serrée dans les bras de sa mère. Cette douleur enfouie la décide, après des années, à prendre la plume pour tenter de donner quelques images du profond chagrin éprouvé par toutes ces mères naturelles qu'elle a rencontrées à travers la Chine. Ces fragments de coeurs brisés disent aux petites chinoises combien elles sont aimées, malgré tout.

L'émotion monte au fil des récits.
- Jeunesse ignorant les conséquences de l'amour, une jeune fille sera à jamais meurtrie par son passé.
- Dans une région très pauvre, dans un pays où les coutumes sont multiples et tragiquement absurdes, une petite fille ne sera pas un enfant. Elle ne représente qu'une bouche inutile à nourrir qui ne peut brûler l'encens sur l'autel des ancêtres. Elle n'apporte pas de terres supplémentaires à cultiver et finit donc…je ne désire même pas l'écrire tellement c'est effroyable.
- Que dire sur l'histoire de la sage-femme qui doit mettre au monde des héritiers mâles ? Son salaire en dépend. Son concours était également requis lorsqu'on ne pouvait pas remercier les esprits d'avoir offert un garçon pour perpétuer la lignée.
- Et ce quai de gare qui laisse apparaître une petite fille en train de former une orchidée avec ses petits doigts ? L'envie de courir la chercher et la serrer dans ses bras.
La secousse émotionnelle continuera avec les orphelinats dont aucunes archives ne seront jamais consultables car inexistantes jusqu'aux années 90. C'était d'ailleurs davantage des mouroirs pour bébés, sans moyens, sans habits, sans nourriture adéquate. L'ouverture à l'Occident a contribué à leur amélioration en vue des adoptions internationales. Mais les difficultés rencontrées par l'auteure pour obtenir des informations à ce sujet montrent la volonté du gouvernement de passer sous silence tous renseignements sur les adoptions. Elle se heurte à la prudence et la peur des personnes travaillant dans les orphelinats. La critique des agissements de l'État n'est pas de mise en Chine !

Xinran développe toutes les circonstances qui lui ont permis de collecter ces confidences si intimes, si bouleversantes, si personnelles et parfois si honteuses. Bien ancrées dans le réel, elles ne sont que plus effroyables. le chagrin de donner naissance à des filles transperce. La souffrance aigüe de la séparation, l'ignorance totale du devenir de leurs bébés témoignent des réalités de ces abandons. C'est un poids, comme des milliers d'enclumes. Il y a aussi l'abomination de condamner ces mères, sous prétexte qu'elles n'ont pas d'instruction, à ne rien éprouver lorsqu'on les prive de leurs filles.

Ébranlée, bouleversée, écoeurée. Comment ne pas faire le parallèle avec les petites filles qui sont venues au monde, à la même époque, chez nous ?
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Quel livre puissant ! Comment ne pas être touchée et profondément émue à l'issue de la lecture de ce livre !
J'avais déjà lu « Chinoises » et je n'en étais pas sortie indemne . Xinran nous racontait, au travers de son ancien parcours de journaliste en Chine, ce qu'elle a vécu quand elle animait une émission radio intitulée « Mots sur la brise nocturne, ». Cette émission donnait la parole aux femmes et Xinran a pu ainsi recueillir des témoignages qui m'ont permis de mesurer réellement la condition des femmes chinoises.
A la suite de la rédaction de Chinoises, Xinran, toujours sur la foi des nombreux témoignages qu'elle a recueillis a cette fois ci abordé le terrible destin de milliers de petites filles chinoises.
Car dans cette société ou le patriarcat est encore bien présent, lors de la fin du vingtième siècle, avec la politique de l'enfant unique, l'avenir de nombreux bébés filles est bien sombre.
Ce livre a été écrit pour toutes ces petites filles qui ont été adoptées en Occident, pour qu'elles comprennent le pourquoi et le comment…
Edifiant et terrible à la fois….


Challenge ABC 2023/2024
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Le dernier livre de Xinran, Messages de mères inconnues, m'a littéralement fait dresser les cheveux sur la tête… !
Dans les années 80, Xinran, journaliste radio en Chine a recueilli des récits de femmes : à défaut de pouvoir véritablement enquêter, elle a écouté la détresse de femmes rongées par le chagrin et le remords, de mères qui jamais n'ont pu oublier…
10 témoignages de femmes, 10 récits qui dénoncent un sujet tabou, le sort fait aux femmes, aux filles et jusqu'aux bébés filles en Chine. Résultat conjoint du poids de traditions surannées et de politiques sociales et économiques désastreuses, les petites filles chinoises sont condamnées bien avant leur naissance : l'abandon, la vente ou, à l'instar de chatons surnuméraires, la pure et simple suppression, voilà ce qui attendait un bébé fille qui avait le malheur de naître dans la campagne chinoise, voire dans les grandes villes.
C'était dans les années 80 mais cela perdure encore dans les campagnes reculées car bien entendu, il est évident qu'on ne peut changer en 10 ans les habitudes millénaires d'une nation qui a toujours considéré qu'une fille ne vaut que pour le fils qu'elle engendrera…
Xinran, avec une extraordinaire empathie, écoute ces mères qui souffrent depuis des années de s'être d'une façon ou une autre, séparé de leur fille sous la pression familiale et économique, et qui, amputées d'une partie d'elles-mêmes, lui confient leur souffrance et leur désespoir.
Un livre poignant mais également assez ahurissant pour nous, européennes, qui avons eu le privilège de naître de naître au 20e siècle en Occident.
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Grâce à Chinoises, on découvre la condition des femmes en Chine. Aujourd'hui, je continue ma découverte de l'auteure Xinran avec Messages de mères inconnues. Au pays de l'enfant unique, être une femme est difficile mais être une mère l'est d'autant plus. "Toute femme qui a enfanté a ressenti de la douleur, mais les mères qui ont donné naissance à des filles ont en plus le coeur meurtri".

De la même façon que dans son précédent récit, Messages de mères inconnues enchaîne les témoignages souvent agrémentés de commentaires personnels mais très pertinents de la part de l'auteur. On y découvre des femmes de tous horizons (paysannes, étudiantes, femmes d'affaires, sage-femme, employé d'orphelinat) qui ont pour des raisons diverses (pressions sociales, loi de l'enfant unique, pauvreté...) dû abandonner (et même parfois tués) leurs propres filles, souvent à peine nées.

Xinran nous propose encore une fois un récit très intéressant et enrichissant. Messages de mères inconnues nous fait découvrir une facette de la Chine que l'on connait très peu. Ce récit peut répondre aux questions que l'on se pose concernant la fameuse loi de l'enfant unique souvent mal comprise en France.
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Citations et extraits (53) Voir plus Ajouter une citation
Quand j'étais jeune, je passais toutes mes journées à travailler avec les enfants [à l'orphelinat], mais je n'éprouvais rien de particulier. Ensuite, quand les temps sont devenus plus difficiles, je n'ai pas eu le loisir de réfléchir ; c'était déjà bien assez dur de trouver de quoi manger et dormir. C'est seulement lorsque la vie est redevenue normale que je me suis rendu compte à quel point chaque petit balluchon qui accompagnait un bébé était rempli de l'amour de sa mère ! Les mères laissaient des petits souvenirs avec leur nourrisson. Mais je crois qu'aucun des endroits où j'ai travaillé ne les conservait. Comme tout le reste, ils étaient jetés à la poubelle. [...]
Il y avait toutes sortes de petits souvenirs ! Même des mots. Quelques-unes des mères avaient écrit de longues lettres déchirantes sur les vêtements de leur bébé. D'autres avaient brodé des trucs, ou cousu de petites croix ou des X sur le tissu. Les plus pauvres formaient une empreinte digitale avec leur sang ! Certains bébés avaient l'air d'être arrivés sans rien - jusqu'à ce qu'on examine leurs petits ongles de plus près et qu'on y remarque une croix ou un X tracé dessus. Peut-être que les parents étaient trop malheureux et que leur situation étaient trop difficile pour qu'ils puissent faire autre chose - mais ne se rendaient-ils pas compte que les ongles du bébé allaient pousser et qu'on les couperait ?
(p. 209-211)
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En 1989, je me rendis pour la première fois dans une région très pauvre sur la rive nord du cours moyen du fleuve Jaune. Tandis que j'interviewais les paysans du coin, une femme âgée d'une trentaine d'années, remorquant trois enfants dans son sillage, me demanda :
- Vous avez déjà 'arrangé' un bébé fille ?
Je crus tout d'abord que sa question avait quelque chose à voir avec la garde d'enfants ou les tâches ménagères...
- Que dites-vous ? 'Arranger' un bébé fille ? Mais qu'est-ce que ça peut bien vouloir dire ?
Je pensais avoir une fois de plus mal compris l'accent local.
- Vous ne savez même pas comment 'arranger' un bébé fille... et vous êtes une femme ?
Elle paraissait aussi perplexe que je l'étais moi-même.
- Si vous ne savez pas ça, alors qu'est-ce que vous faites quand votre bébé est une fille ? Vous le faites faire par quelqu'un d'autre, ou quoi ?
- Je... euh... je n'ai pas de fille, répondis-je.
Je ne comprenais toujours pas.
- 'Arranger' un bébé fille veut dire s'en débarrasser à la naissance, m'expliqua obligeamment le policier qui m'accompagnait.
- Quoi ? Tuer une petite fille ! Mais pourquoi ?
A présent, je nageais en pleine confusion.
- Vous ne pouvez pas ne pas 'arranger' les bébés filles, sauf si vous ne mettez au monde que des garçons. La famille de votre mari ne vous le pardonnerait jamais. Ils vous mèneraient la vie dure ! Ils vous battraient, et vous n'auriez jamais assez à manger !
(p. 67-68)
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Je me ruai dans le service des urgences de l’hôpital, directement au guichet des enregistrements. L'infirmière des enregistrements m’arrêta :
– Excusez-moi, c'est votre bébé ? Vous avez son permis de naissance ? Sans permis de naissance, on ne peut pas le soigner.
– Je suis désolée, je ne savais pas. Je viens juste de la trouver devant des toilettes publiques. Regardez, elle est bleue de froid. Je voudrais qu'un médecin l'examine et sauve cette pauvre petite.
Je soulevai le bébé contre la vitre pour le montrer à l’infirmière, espérant ainsi éveiller son instinct maternel.
– Je regrette, mais sans permis de naissance, nous ne pouvons pas l'inscrire. Et si l’enfant n'est pas inscrite, aucun médecin n’acceptera de la soigner. Ils reçoivent des primes en fonction du nombre de patients inscrits.
Visiblement, le petit paquet emmailloté que je brandissais sous son nez ne lui faisait aucun effet.
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- Choisissez un caillou et ouvrez le. Vous comprendrez !
Je ramassai le caillou et le cassai en deux en me servant d'une pierre plus grosse. Mais je ne trouvai aucune réponse à l'intérieur.
-Pourquoi un caillou est-il rond ? demanda-t-elle, visiblement agacée que je sois si obtuse.
- Il a été poli par le temps et l'eau c'est ça ? avançai-je avec hésitation.
-Et l'intérieur, est ce que l'eau pénètre à l'intérieur ? c'est là qu'est la femme.
Et après m'avoir jeté cette dernière remarque, elle s'en retourna.
Alors je compris ; une femme est comme un caillou poli et arrondi par l' eau et le temps. Son apparence extérieure a été modifiée par le destin que la vie lui a infligé, mais aucune eau ne peut altérer le cœur d'une femme ni son instinct maternel.
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A la fin des années 1980, alors que je faisais mes débuts comme animatrice de radio, je trouvais difficile d'obtenir de quelqu'un qu'il me confie ce qu'il pensait vraiment au cours d'une interview. Certaines personnes avaient trop peur d'être punies pour ce qu'elles diraient. D'autres ne savaient tout simplement pas quoi exprimer car personne ne les avaient jamais écoutées auparavant. Quelques unes acceptaient de parler, mais seulement en termes très généraux ; elles ne révélaient pas leurs sentiments personnels, parce qu'on ne leur avait jamais appris à les comprendre. Comme j'avais grandi au sein de la même société que mes auditeurs, je ne savais plus à quel saint me vouer.
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Videos de Xinran (2) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de  Xinran
Comme la majorité des adolescent.e.s de son âge, Xinxin est fille unique. La raison ? La politique de l'enfant unique en Chine, qui - de 1979 à 2015 - a contraint les couples chinois à n'avoir qu'un seul enfant, en sanctionnant financièrement de façon très dure les couples en ayant plusieurs. Mais voilà que - maintenant que cette politique n'a plus cours - sa meilleure amie, Xia, lui apprend qu'elle va être grande sœur. Pour Xinxin, cette révélation va avoir l'effet d'un électrochoc : elle aussi, elle le sait, elle le sent, veut être une sœur. Elle va alors découvrir qu'un lourd secret pèse sur sa famille...
Comme moi, vous avez probablement entendu parler de la politique de l'enfant unique en Chine, mais avez-vous vraiment idée des conséquences de cette politique dans ce pays, tout au long de 26 années de naissances uniques ? Non ?Je vous explique tout ça !
+ Lire la suite
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