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Citations de Rachilde (171)


Ils riaient tous les deux, mais ils s'unissaient de plus en plus dans une pensée commune : la destruction de leur sexe.
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... L'honnête épouse, au moment où elle se livre à son honnête époux, est dans la même position que la prostituée au moment où elle se livre à son amant.
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Le jeune docteur causant dans l’embrasure d’une croisée avec un vieil ami de la maison disait, montrant Raoule : - Un cas spécial, monsieur. Quelques années encore, et cette jolie créature que vous chérissez trop, à mon avis, aura, sans les aimer jamais, connu autant d’hommes qu’il y a de pater et d’ave au rosaire de sa tante. Pas de milieu ! Ou nonne ou monstre ! Le sein de Dieu ou celui de la volupté ! Il vaudrait peut-être mieux l’enfermer dans un couvent puisque nous enfermons les hystériques à la Salpêtrière ! Elle ne connait pas le vice, mais elle l’invente !
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Rampant pour atteindre le damas qui se drapait, en hauteur sur un fauteuil, comme vraiment une Alpe inaccessible et radieuse, Paul le tira du bas à pleine poigne, le fit choir, et l’étoffe, se cassant, s’effondrant, eut un bruit doux, un jurement de bête frêle qu’on étrangle, se tordit, sous les nerveuses mains du jeune homme, en chose vivante qui se plaindrait.
— Ah ! conviens, Jane, que cela est d’une splendeur inouïe !
Paul, à genoux sur l’étoffe qu’il froissait, sans songer qu’on devait en faire une robe pour sa maîtresse, la contemplait, s’abîmant dans sa blancheur de roses blanches où se diluait un insaisissable reflet de chair. Il porta cette soierie à ses lèvres, la baisa et la mordit, avce de singuliers transports.
— Paul ? Qu’est-ce que tu fais ? cria Jane épouvantée.
— Laisse !... Tu ne comprends rien à la volupté, toi ! Cela, vois-tu, c’est de la beauté artificielle, mais c’est réellement, suprêmement beau. Toute beauté naturelle a une tare. Il n’y a pas de teint de femme, d’épiderme de gorge ou d’épaule qui puisse me donner une pareille sensation au toucher. C’est un bien petit absolu, c’en est un, cependant. Et cela crie, entends-tu, cela proteste et s’affole comme une créature douée d’âme. Vraiment, cette étoffe a peur de mes caresses. Elle se sait belle et ne veut pas qu’on la pollue. Est-ce étrange que, vous autres femmes, vous aimiez cela pour vous en parer, alors que nous, nous aimons peut-être cela sur vous, sans vous voir… De l’étoffe ?... Regarde ! deux caresses l’ont faite personne vivante et frémissante. Je l’ai si bien emplie de ma volonté que la reine est entrée dans cette jupe de reine !
En deux gestes savants, à la fois gestes de sculpteur et gestes d’amoureux, Paul avait creusé et arrondi la mollesse du damas, le serrant au milieu comme une taille et le déroulant de chaque côté comme une robe longue à plus bouffants…
— Paul, supplia Jane Monvel, finis donc !
¬— Chère illusion d’une illusion, murmura Paul ne l’écoutant plus et se berçant dans la soie, forme vague de l’impératrice qui est mieux que l’impératrice, apparence de femme mille fois meilleure que la femme, très pure courtisane dont les froids enlacements donnent le vertige à la courtisane, amante des amantes qui n’as pas de bouche pour dire leurs noms et qui les appelle de si loin, traîtresse qui fuis les doigts et les envenime, peau de panthère blanche qui aurait l’odeur de la neige si la neige pouvait embaumer, je t’adore…
— Relève-toi, Paul, ordonna Jane scandalisée, je te défends de te moquer ainsi de moi, devant moi ! Où as-tu l’esprit, mon Dieu ?
Elle pleurait, et, n’essayant pas de retenir ses larmes, elle les laissait couler de ses joues, toutes pourpres de révolte, sur l’étoffe immaculée dans laquelle lui se pâmait, oubliant complètement sa présence humaine.
— Non, c’est ignoble ! déclara-t-elle se cachant la face.
Pris au piège qu’il s’était tendu, Paul sombra jusqu’au spasme en pleine illusion, et la superbe soierie eut comme un râle sourd. Jane sanglotait éperdument.
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 Rachilde
Il n'y a pas de mauvais mariage, il n'y a que de mauvais époux.
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Extrait de "Fin de siècle"

Grande bataille au Théâtre d'Art. Lutte homérique entre symbolistes et naturalistes. Une étude vigoureuse de Chirac a été huée par les symbolistes, qui avaient écouté religieusement une très curieuse pièce de Rachilde, Madame la Mort. On s'est flanqué des gifles et des coups de poing. Les mystiques symbolistes, si hautains, si dédaigneux, en théorie du moins, sont-ils donc capables de manifestations bruyantes et passionnées ? d'en venir aux vulgaires râclées, pour imposer leur littérature ?

Bottom.

(La seconde moitié du livre regroupe dans un appendice des chroniques parues dans la presse.)
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Satan est l'hôte secret du cœur de la femme.

(Dédicace)
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- Si mon amoureux avait soif et qu'il m'ordonnât d'exprimer l'eau pure des yeux de mon nouveau-né, j'obéirais !
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Il admirait sa robe de deuil, toujours la même, ayant fini par prendre tellement sa forme qu'il la voyait toute nue et toute en peau noire comme un être qui sortirait d'un incendie.
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Une fois dans la rue, il hâta le pas, comme poursuivi... et, en effet, une phrase de Madeleine le poursuivait, s'attachant en succion de ventouse à sa chair :
"... La peur est le commencement du surnaturel."
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Derrière lui, le long de sa colonne vertébrale, montait ce regard pesant, tenace, empli de sortilège ; il lui mordait la nuque, s'enfonçait en ses plus sensibles fibres, lui dévorait la cervelle. Cette douleur imaginaire devint, un instant, tellement atroce qu'il fut sur le point de se retourner, de lui crier des injures.
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C'était l'éternelle déception de la fille instruite, coquette, fière, qui se voit sombrer au milieu de la mare boueuse de la médiocrité. Barbote, ma princesse, avec les oies, les canards, les grenouilles et le limon fétide remué depuis des siècles par les mêmes balourds ! On y trouve des heures de désolations aiguës où l'on voudrait s'achever, se noyer, mais il ne se présente guère l'occasion d'une belle catastrophe ; la mare n'est pas assez profonde pour vous permettre le drame.
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- Voyons, voyons, ma bonne, fit-il, posant sa serviette remplie de papiers inutiles dans un coin de leur salle à manger, qu'est-ce qu'il y a encore ? On t'entend de la rue !
- Il y a, il y a que mademoiselle ta fille descend de sa chambre juste pour trouver le couvert mis. Elle n'a pas préparé les radis et on va sans doute les manger en botte, comme l'éléphant du Jardin des plantes !
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- Tenez, là, Monsieur le Bibliothécaire ! Vous voyez bien cette gueuse d'araignée sous l'aisselle d'Aménophis ? Je vous demande un peu où ça va fabriquer ses sales besognes, ces bêtes-là. Ça ne respecte rien !... Puisque vous êtes le plus maigre... faufilez-vous, moi, j'ai mon ventre, j'ai trop peur d'écraser la momie.
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Sous un dais de mousseline indienne, une soie de Brousse aux nuances irisées, changeantes, tantôt d'un bleu sombre constellé d'astres roux, un amas de coussins bariolés et des satins pâles formaient le lit.
Cela ressemblait davantage à un grand œuf, un œuf de laque blanche tout plein de friandises joyeusement colorées et papillotées de dentelles.
En face du lit se dressait, sortant d'un pouf de cygne, un divan circulaire entièrement revêtu de ce miraculeux duvet, un Eros noir, une antique statue de marbre, verdie aux contours, sans doutes restée fort longtemps exposée aux morsures du vent et aux larmes de la pluie. Cet Eros avait dû, jadis, tenir un arc de métal, mais son bras droit, replié à la hauteur des yeux, n'exhibait plus qu'un moignon, la main était partie avec la corde tendue, et le bras gauche manquait totalement. L'enfant, à la fois lamentable et farouche, faisait resplendir des prunelles d'émeraudes serties en deux camées blancs et il ouvrait, grands, au milieu de sa face de nègre féroce, des yeux d'une réelle existence divine.

Page 68 (troisième description de la chambre d'Eliante)
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Il y avait un lion dormant sur ses deux pattes croisées, ses paupières noires baissées, qui devait être terrible, vu au crépuscule, car il ne paraissait vraiment qu'endormi. Des armes se croisaient au-dessus ou au-dessous de ces têtes mortes, des armes sauvages, curieuses.
Par terre un tapis de Smyre rouge, d'un rouge groseille, vineux, aux dessins violâtres, presque noirs, étalait une mare de sang ou de vendange qu'on foulait avec une certaine appréhension des rejaillissement possibles.
Et des meubles noirs, tout étincelants de ferrures ouvragées, d'incrustations d'or ou de nacre,, rutilaient dans l'ombre des angles ou des draperies.
Des colonnes d'ébène cerclées de bronze, d'argent, de bracelets de marbre, portaient des idoles bizarres, depuis le traditionnel bouddha, levant deux inflexibles doigts, jusqu'au dieu-serpent des Océaniens, branchu et touffu comme un arbre.

Page 68 (description de la chambre d'Eliante)
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Cette chambre, vaste et sombre, avait un air de temple.
Les fenêtres donnant sur le jardin, étaient au nombre de trois, jaunes et ovales comme des pierres précieuses, des topazes taillées à facettes larges comme des vitres, elles ne donnaient point de jour, mais du soleil, qu'il y eût ou qu'il n'y eût pas dehors, une espèce de soleil trouble mêlé d'une fumée d'incendie.
Sur les murs de longues peaux de bêtes pendaient, encadrées par des bandes claires de drap d'or, une étoffe épaisse moitié soie, moitié métal, qui lançait des rayons aigus dans les fourrures et les lustrait d'un reflet flambant. Lions et panthères, ours bruns et ours noirs, alternaient, présentant chacun leur tête au centre du panneau, des têtes bien mortes, aux yeux clos, aux gueules fermées, ne perdant pas leur expression naturelle à montrer les horribles crocs artificiels des descentes de lit pour rastaquouères.

Page 67
(début de la description de la chambre d'Eliante)
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Un soir, je vins guetter en compagnie de mon ancien. Nous fumions nos pipes sous la pluie, n’échangeant point nos pensées, car nous n’en possédions guère de nouvelles. Il ruminait son alphabet, probablement; moi, je comptais les jours à tirer avant la prochaine sortie de ce purgatoire. L’eau du ciel nous ruisselait dans le dos, sur les bottes, imbibait nos habits comme des éponges; on en avalait des pintes malgré soi rien qu’à sucer son tuyau de pipe, la fumée bleue se transformait en buée grise, on fumait de la pluie, quoi !
La lumière du phare tout flambant neuf, remis au point par une grosse provision d’huile, se changeait en une espèce de vapeur jaune, sulfureuse, assez semblable à la lueur des locomotives pénétrant, panaches rabattus, sous un tunnel. Les lames moutonnant dans cette lueur diffuse prenaient des tons de bitume, et ce n’était pas drôle.
Moins drôle encore fut l’épave qui nous arriva, portée de rouleaux en rouleaux d’encre, toute livide au milieu de ce crépuscule maudit.
– Une tête ! Patron… Là, du côté de la « Baleine »… Un noyé, patron !
– Laisse venir ! qu’il répondit tranquillement.
Je sentis que l’eau de l’averse me coulait plus fort dans le dos.
C’était un homme; presque assis sur la mer, une ceinture de sauvetage le maintenait flottant. Il allait en chemise, la poitrine gonflée, gras à crever, le front en arrière, les cheveux collés, ses yeux morts regardant encore très fixement quelque chose au loin, sa bouche grande ouverte continuant à pousser le cri qui ne sortait plus… Celui-là était fini depuis huit jours, car il montrait des tâches de moisi sur la peau, l’air comme truffé.
Il passa, tourna, valsa, nous salua bien honnêtement, et tout en évitant notre harpon, il fila, « ventre à la mer ».
– Ils sont avancés ! que murmura Barnabas bourrant une autre pipe.
Puis il vint une tonne, mais elle se fendit contre la première dalle et s’abîma.
Ensuite, il vint des cordages, un bout de mât, des boîtes de conserves. Nous en prîmes une où il y avait des mots anglais. C’était des haricots verts (je savais un peu ces mots).
Et un autre noyé; celui-là, un marin étendu tout habillé sur une table, le front caché dans ses bras. On aurait juré qu’il dormait.
Je rentrai un moment au phare pour inscrire… les passants. Quand je me ramenai vers le vieux, je poussai un cri d’épouvante. Il en passait une bande, des hommes qui se nouaient les uns aux autres, un radeau de corps morts, des tas de jeunes hommes, une sorte de pensionnat de gens tous habillés pareils, pressés, tourbillonnés, une foule de nageurs allant vers la terre, car, vraiment, c’était bien l’heure de rentrer.
Le dernier traînait sa tête au bout d’un filin rouge qui lui sortait du cou.
Je restai là planté, la gorge serrée, le harpon tendu.
– Mais qu’est-ce que nous pouvons y faire, nom de Dieu, qu’est-ce que nous y pouvons ? que je répétais, ne sachant plus ce que je disais.
– Rien ! Y sont tous remontés du fond, excepté celui de la ceinture, répliqua le vieux philosophiquement. Oh !… Ils en ont tous, des ceintures, ça les aide à mieux se sentir crever ! Quand on coule à pic, c’est fini tout de suite. Avec leurs garces de ceintures, ils espèrent, ils gueulent, ils se démènent… Jamais ça ne les sauve. J’en ai vu un passer vers la pointe qui remuait encore, un jour d’il y a trois ans. il a tellement remué qu’il a chu la tête en bas durant que ses jambes se raidissaient en l’air. Les noyés, c’est si bête ! Quand ils s’arrêtent le long de la « Baleine », ils verdissent là, au soleil, jusqu’à la prochaine montée des vagues. Le flot les reprend, les roule, et ils redescendent pour chercher les bons courants. Cette fois, la fournée s’amène au grand complet. C’est des tas de gens riches, des passagers de première : les matelots sont dorlotés jusqu’au moment final; on a pourvu tout le monde de sa belle couronne d’enterrement… Et ça leur procure l’agrément du grand voyage. Les matelots sont plus libres dès que la petite classe est à la trempette. À preuve, hein ?… Nous n’en avons vu qu’un ? Et je parie qu’on ne reverra pas de marin, au moins ce soir.
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Un soir, je vins guetter en compagnie de mon ancien. Nous fumions nos pipes sous la pluie, n'échangions point nos pensées, car nous n'en possédions guère de nouvelles. Il ruminait son alphabet, probablement; moi, je comptais les jours à tirer avant la prochaine sortie de ce purgatoire. L'eau du ciel nous ruisselait dans le dos, sur les bottes, imbibait nos habits comme des éponges; on en avalait des pintes malgré soi, rien qu'à sucer son tuyau de pipe, la fumée bleue se transformait en buée grise, on fumait de la pluie, quoi!
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- Après ? Vous oubliez notre devise : tout est dans tout ? En haut, chez nous, il n'y a pas plus de distinction honorifique et de discours que de préparation spéciale. Nous n'avons pas voulu que, parvenu au sommet de la science pure, un cadavre eût le droit de se croire autre chose qu'une ordure quelconque. Vous avez traversé la salle des morts en passant par la première salle de cette usine dite d'épuration collective. Ils étaient perdus dans la foule anonyme des débris que nous aspirons à l'état malfaisant pour les rejeter à l'état bienfaisant. Ils sont à la fois le savon parfumé avec lequel vous vous frottez les mains, le morceau de fusiline que vous étalez sur une sandwich, et le monument ou le vêtement de caoutchouc dont vous admirez la résistance.

"Le tout-au-ciel"
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