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Critiques de Alaa El Aswany (443)
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L'Immeuble Yacoubian



L'immeuble Yacoubian dont la construction remonte à l'année 1937 se trouve dans le centre du Caire. Ses habitants appartenaient à la haute société égyptienne, toutes origines confondues. Suite à la révolution de 1952, la plupart des résidents sont partis pour laisser la place aux officiers de l'armée. Petit à petit la terrasse en haut de l'immeuble s'est transformée en habitations de fortune pour des travailleurs pauvres avec leurs familles. Au fil des années, l'immeuble devient un melting-pot représentatif de toutes les strates de la société égyptienne. Vestige d'une époque disparue, il est le reflet du schisme qui a lézardé le pays.



Dans un style épuré et tout en finesse, El Aswany décortique l'âme humaine en dévoilant toute sa splendeur et ses bassesses à travers une panoplie de personnages. Parmi ceux que nous rencontrons il y a "Zaki", l'aristocrate nostalgique d'un Caire multiculturel et raffiné; le bigot et fourbe "Azzam"; "Boussaïna", la jeune femme belle et pauvre; "Hatem", l'intellectuel homosexuel; et "Taha", le jeune étudiant pauvre qui voit ses rêves se fracasser.

Dans cette société où l'abus de pouvoir est monnaie courante, l'extrémisme religieux trouve la brèche pour croître et engouffrer une jeunesse désabusée et écrasée par un régime violent et corrompu.



"L'Immeuble Yacoubian" n'est pas sans rappeler les œuvres de Naguib Mahfouz et son réalisme social, mais dans sa description de la mutation sociale El Aswany va plus loin avec sa liberté de ton, et ce, pour notre plus grand bonheur.
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Automobile club d'Egypte

L'épaisseur de ce livre m'a d'abord un peu inquiétée...Et puis je suis entrée dans l'histoire et je ne l'ai plus lâché!

Fin des années 40, l'automobile club du Caire accueille les grosses huiles d'Egypte, parfois même le roi en personne, pour des soirées spéciales.

Evidemment, une armada d'employés, de serveurs mal payés, mal traités, servent ces personnes sous l'égide de El-Kwo, le redoutable chambellan, qui n'hésite pas à employer des châtiments corporels, et à humilier le personnel.

Dans ce roman Alaa El Aswany évoque quelques personnages plus ou moins corrompus, plus ou moins honnêtes, des familles impactées par le pouvoir des grands, et des femmes soumises aux hommes.

Quelques uns se rebellent, et c'est alors que les puissants emploient tortures et emprisonnements, afin de continuer à régner sur le peuple.

Les chapitres se suivent, évoquant l'un ou l'autre personnage, et se terminent sur un rebondissement appelant une suite qui arrive un peu plus tard.

C'est une peinture impitoyable de l'injustice sociale.
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J'ai couru vers le Nil

Quel livre ! Et quel écrivain ! Bien sûr depuis « L’immeuble Yacoubian » on savait que Alaa El Aswany était un écrivain indispensable à notre compréhension de l’Égypte, mais il va plus loin dans ce roman et il nous montre comment l’islam et la violence des forces de l’armée corrompue font bon ménage, et ont fait couler une chappe de plomb brûlante sur la si grande envie de changement de la jeunesse égyptienne en 2011.

L’auteur suit la destinée des composantes de la société égyptienne, elles ont en commun les manifestations de la place Tahrir. Il peut s’agir de jeunes qui croient et qui participent à ce qu’ils pensent être une révolution. Ou des cadres du régime qui vont mettre en place une répression aveugle et sans pitié. Répression bénie par un Cheick qui sous couvert du Coran bénéficie des largesses financières du régime et qui est prêt à adapter les sourates du Coran pour justifier les conduites les plus barbares des militaires.

On suit, par exemple, Khaled un jeune méritant, originaire d’un milieu très simple et qui réussi brillamment ses études de médecine. C’est lui ou plus exactement son père qui terminera ce roman. Je pense qu’hélas la fin est romanesque alors que la lectrice que je suis, aurait tant voulu que dans la vraie vie, tous les les pères des jeunes tués à bout portant sur la place Tahir, réussissent leur vengeance.

Khaled est amoureux de Dania fille du général Alouani qui est le principal acteur de la répression. Sa femme se pique de religion donc nous suivons l’hypocrisie du Cheick Chamel, c’est peut être le personnage le plus horrible car voir la religion bénir toutes ces horreurs c’est, comme toujours, insupportable. Mais à la première place de l’horreur, il y a aussi une femme qui tient les média et achète des témoignages pour pourrir la réputation des jeunes de la place Tarhir. Dans ce roman choral, on suit aussi Mazen et Asma, qui paieront très cher leur enthousiasme pour les manifestations. Asma sera sauvée de la première répression grâce à un ancien aristocratique chrétien Achraf qui sortira de sa dépression grâce à l’amour d’une femme et grâce aux jeunes révolutionnaires qu’il va aider de toutes ses forces. Asma partira en exil après avoir été torturée par des militaires et subi ce qu’on appelle « un test de virginité » qui n’est ni plus ni moins qu’un viol : mise entièrement nue devant des soldats hilares, les jeune filles sont pénétrées par des hommes pour vérifier qu’elles sont bien vierges sinon elles ont considérées comme des putains !

À travers ce roman, c’est toute la société égyptienne que nous voyons traverser ces événements. La difficulté des rapports amoureux, la reproduction des rapports sociaux, la corruption à tous les niveaux, l’horreur de la répression et l’hypocrisie de la religion. Et si l’on retrouve parfois l’humour de l’auteur, c’est un humour triste et parfois tragique.

Un roman éprouvant certes, mais que l’on doit lire, c’est le moins que l’on puise faire pour soutenir le combat de cet écrivain et sauvegarder la liberté dans notre pays . En effet, ce livre est interdit en Egypte et dans de nombreux pays arabes. Ce roman n’aide pas à prendre confiance dans la nature humaine.
Lien : https://luocine.fr/?p=13424
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L'Immeuble Yacoubian

Un vrai coup de coeur pour ce livre qu'une voisine, la seule que je connaissais à l'époque dans l'immeuble parisien que nous occupions, m'a offert avant de déménager – elle y fut contrainte après des années à vivre dans ce quartier du 17e arrondissement – elle me l'a dédicacé et je l'ai, bêtement, laissé de côté jusqu'à ce livre se rappelle à moi.

J'ai écouté très récemment une intervention (« une traversée de l'histoire du cinéma égyptien ») très riche sur le cinéma égyptien donnée par la passionnante Emna Mrabet, dans le cadre d'une formation et un passage du film tiré de ce livre a été analysé par la conférencière.

Je me suis alors rappelé que j'avais ce livre en ma possession depuis cinq ans et je me suis donc empressée de le trouver et de le lire pour ensuite voir le film. J'ai souvent tendance à procéder dans cet ordre-là et il s'avère que j'avais le livre à disposition… Ce fut un choc, d'où l'abondance des passages que je cite. Il est vraiment pertinent de donner une voix à différents habitants de l'immeuble et de voir leur évolution, leur trajectoire – souvent tragique – sans y sentir de dénonciation pour autant, c'est au lecteur de comprendre de l'intérieur, dans cet immense dialogue où hommes et femmes ont voix au chapitre même si, évidemment, nous nous sentons plus proches de certain(e)s d'entre eux.

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J'ai couru vers le Nil

Pour raconter les événements de l'année 2011 qui ont entraîné le départ de Moubarak et, malheureusement pour les manifestants de la place Tahrir, le retour des militaires au pouvoir, Alaa El Aswany, a créé de nombreux personnages parmi lesquels :

Le général Alouani, chef de la sécurité d'Etat, présenté comme croyant et bon père de famille, mais surtout comme l'homme qui fait torturer les opposants au régime,

Nourhane, présentatrice de télévision officielle, très ambitieuse, s'érigeant en icône musulmane,

Le cheikh Chamel, grand théologien pour certains, surtout homme d'affaire pour Dania.

Dania , fille du général Alouani, étudiante en médecine, condisciple et amie de Khaled.

Madani, chauffeur d'Issam, père de Khaled,

Asma, professeur d'anglais et Mazen,ingénieur chimiste dans une cimenterie.

Achraf Ouissa, acteur raté, spécialisé dans les second rôle, copte, marié à Magda, amoureux de son employée Akram.

Issam Chaalane, directeur de la cimenterie, alcoolique, ancien mari de Nourhane.



Au cours de la lecture, nous découvrons un peu ce que fut la réalité de cette période.

Comment le pouvoir, représenté par Alouani, le cheikh Chamel et Nourhane, a brisé l'élan révolutionnaire par les arrestations, emprisonnements, tortures, émissions de télévision totalement truquées et au cours desquelles de faux manifestants viennent raconter qu'ils ont été payés par les juifs, les franc-maçons pour manifester.

Mais le plus insupportable à lire ce sont les six témoignages réels, insérés dans le roman, transcription de déclarations faites par les victimes ou des témoins d’événement comme les tests de virginité, l'écrasement volontaire des manifestants par des camions militaires.



Heureusement il y a les autres personnages qui luttent pour un régime démocratique.

Khaled, qui sera abattu, mais dont l'engagement ouvrira les yeux de Dania sur la réalité. Asma et Mazen, tous les deux très engagés dans le mouvement, dont les échanges par mail sont passionnants. Achraf Ouissa dont la rencontre avec Asma bouleversera son quotidien. Avec l'aide d'Akram, il se rendra sur la place Tahrir pour aider les manifestants et ouvrira ses locaux pour leurs réunions. Madani qui demandera justice pour la mort de son fils.



Ce roman est vraiment exceptionnel.

A sa lecture on est horrifié par la description de certaines scènes et ce d'autant plus, que depuis le départ de Moubarak rien ne semble avoir vraiment changé. On est impressionné par l'engagement des jeunes qui ne semble pas avoir peur alors qu'ils savent ce qui les attend. On est révolté par le cynisme des dirigeants.





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L'Immeuble Yacoubian

Dans un immeuble du Caire, une galerie de personnages qui vivent ou survivent, espèrent et désespèrent, résistent, se perdent ou tentent de continuer à rester debout dans un pays où tout bascule. Dans l'Egypte que nous décrit El Aswany il n'existe aucun espoir pour un avenir meilleur ; le pays est dirigé par une poignée d'hommes corrompus qui ne font aucune place "au peuple", fut-il instruit. Pas d'élite intellectuelle ici, juste la force, le vice, la corruption. Alors pour les plus assoiffés de changement l'islam radical représente l'espoir ou peut être le désespoir.

On comprend à la lecture de ce livre les racines du fanatisme religieux, on sent la blessure d'un pays qui a renié sa culture, ses racines pour se perdre dans une admiration intéressée du monde occidental.
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L'Immeuble Yacoubian

« L’Immeuble Yacoubian » est un immeuble art-déco construit par un riche arménien dans les années 30 dans un quartier alors en vogue au Caire. C’est là que le père d’Alaa El Aswany avait son cabinet d’avocat et que lui-même avait installé son cabinet de dentiste. C’est aussi le titre de son premier roman qui a eu un succès énorme d’abord dans les pays arabes et ensuite dans le monde entier. Avec le temps, l’immeuble et le quartier ont perdu de leur prestige et les familles qui y habitaient initialement y côtoient maintenant les migrants des campagnes qui ont investi les toits où autrefois vivaient les domestiques. Alaa El Aswany décrit magistralement ce microcosme. Les anciens riches qui s’accrochent tant bien que mal à leur mode de vie, où l’on parlait français, buvait du cognac et fredonnait Edith Piaf. Les pauvres sur le toit dont les rêves de promotion sociale se brisent sur les réalités d’une société corrompue jusqu’á l’os. Tout en offrant une critique sociale féroce, le roman est plein d’humour et d’humanité pour ses personnages. Le roman a été porté à l’écran dans un film réalisé par Marwan Hamed que j’ai beaucoup aimé. Ce tour d’horizon de romans situés dans la capitale égyptienne me donne vraiment envie de retourner au Caire et déambuler dans les rues de la vieille ville.
Lien : http://www.lecturesdevoyage...
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J'aurais voulu être égyptien

Ce recueil de nouvelles est paru peu après "L'immeuble Yacoubian", qui a rendu célèbre Alaa El Aswany. Les dix textes présentés sont de longueur très variable, mais tous donnent une image sans complaisance de l'Egypte contemporaine. Je n'ai pas la prétention de connaitre le peuple égyptien, mais je sens bien l'authenticité de ces tableaux de la vie quotidienne dans ce pays. Avec des mots le plus souvent mesurés, l'auteur décrit avec réalisme ses concitoyens : leur mesquinerie, leurs obsessions sexuelles, leur religiosité hypocrite et les impitoyables rapports de force. Cruauté et compassion alternent dans ces nouvelles. J'ai particulièrement apprécié les (courtes) nouvelles "La séance de gymnastique" et "Un regard sur le visage de Nagui" (dont les héros sont des enfants), et aussi "Le factotum" (qui met en scène un jeune adulte).

Mais le texte le plus remarquable est le premier, intitulé "Celui qui s'est approché et qui a vu". C'est une nouvelle particulièrement longue et ambitieuse. Dès les premières lignes, le narrateur Issam Abd-el Ati n'y va pas de main morte: « Je défie qui que ce soit de me citer une seule vertu égyptienne. La lâcheté, l'hypocrisie, la méchanceté, la servilité, la paresse, la malveillance, voici les qualités des Egyptiens ». On comprend sans peine que ce texte ait été interdit dans le pays ! de fait, Issam Abd-el Ati décrit avec virulence la petitesse de ses concitoyens, qui le rejettent et qu'il méprise. Il s'isole dans la tour d'ivoire qu'il s'est construite… jusqu'à une rencontre presque miraculeuse, que je ne me sens pas le droit de révéler ici. J'ai compris que, en fait, le héros est un peu (ou beaucoup) fou; son rejet de la société égyptienne ne relève pas d'une vérité objective. Mais Alaa El Aswany utilise habilement ce personnage atypique pour exprimer ses critiques personnelles à l'encontre d‘un peuple asservi constamment et mal dans sa peau. Ce texte me semble beaucoup plus subtil que ne le laisserait croire une première lecture trop rapide.

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L'Immeuble Yacoubian

Alaa El Aswany est présenté comme le digne successeur de Naguib Mahfouz - qu'il évoque d'ailleurs au détour d'une page de L'immeuble Yacoubian.

Rue Soliman-Pacha se trouve l'immeuble dans lequel (et autour duquel) vivent les personnages de ce roman qui nous entraîne d'une histoire à l'autre tout en gardant une unité géographique précise : la rue et l'immeuble.

On croise le jeune étudiant ambitieux, Taha, qui veut entrer dans la police et échapper à son origine sociale basse (son père est gardien de l'immeuble Yacoubian). Il est amoureux de Boussaïna et, depuis toujours, l'un et l'autre se sont promis de se marier. On fait connaissance avec un vieil et riche libidineux, Azzam, qui n'avait jamais été tourmenté par la chair et qui, à la soixantaine, se voit saisi d'une vigueur toute nouvelle : son imam lui conseille de prendre une seconde épouse en cachette. Il y a aussi celui qui ouvre et ferme le livre, Zaki Dessouki, un vieil homme voluptueux qui a des ennuis avec sa soeur Daoulet, une folle décidée à le spolier. Tous tentent d'assouvir leurs désirs ou de simplement satisfaire leurs besoins. Il est question de l'état de l'Egypte contemporaine, de l'islamisme grimpant, d'amour, d'ambition, d'homosexualité en la personne d'Hatem, homosexuel passif qui pense avoir trouvé l'amour en Abdou.

Le roman se lit rapidement, avec intérêt et plaisir. Il est vrai qu'il existe des ressemblances avec Naguib Mahfouz, mais Alaa El Aswany est beaucoup plus direct en ce qui concerne les désirs sexuels et leur assouvissement, par exemple.

Je m'étonne qu'il n'y ait pas encore une fatwa lancée contre lui car il fait une critique violente de l'intégrisme islamique.
Lien : http://edencash.forumactif.o..
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Chicago

Cheïma, Tarek, Nagui, Saleh, Raafat...qu'ils soient étudiants ou professeurs, ils ont tous en commun d'avoir quittés l'Egypte pour venir vivre aux Etats-Unis. Certains rentreront en Egypte après plusieurs années d'étude, d'autres se sont définitivement installés sur le sol américain mais tous gardent au fond du coeur l'amour de leur pays d'origine. Dans le département universitaire de Chicago, cette "Little Egypt" en exil se perd, se cherche et s'interroge, partagée entre Orient et Occident, entre vie rêvée, règles imposées ou devoirs religieux.

Avec "Chicago", Alaa El Aswany peint une très belle fresque contemporaine sur la communauté égyptienne exilée aux Etas-Unis. A travers une galerie de personnages brillamment auscultés, c'est toutes les difficultés sociales, politiques, religieuses et relationnelles du monde arabe tiraillé entre modernité et tradition, démocratie et dictature, que "le dentiste du Caire" aborde avec un ton juste et plein d'humanité. Avec un sens du suspense totalement maîtrisé, l'auteur nous fait partager les espoirs et les désillusions de ses compatriotes égyptiens.

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L'Immeuble Yacoubian

Est-ce un roman ou un livre d’histoire ou encore une étude sociologique ? Un peu des trois.

Vous êtes dans un immeuble un peu décati du vieux centre du Caire. Cet immeuble s’est dégradé au fil du temps, comme le reste du quartier, quand l’entre s’est déplacé vers de nouveaux quartiers.

Ses habitants sont à l’image de son historique : des populations âgées qui ont l’ère de sa splendeur avant le coup d’état des officiers dans les années 1950, des nouveaux arrivants des années 70-80 et des habitants plus rigoristes des années 90.

Ce livre, c’est la fois l’interconnexion entre ces différents mondes, l’évolution de l’Egypte vers une division de plus en plus forte entre riches et pauvres et la montée d’un islamisme rigoureux, voire extrême.

Nous vivons dans ce livre le destin tragique ou heureux (les deux parfois ensemble) de ces personnages durant quelques mois : entre les aventures du journaliste homo et l’étudiant qui devient ultra fanatique, entre le rôle des hommes d’affaires plus ou moins louche et la condition de la femme pauvre, c’est un véritable tableau qui se dépeint sous nous.

Passionnant !
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J'ai couru vers le Nil

Si les dictatures sont plus nombreuses que les démocraties, il est parfois des moments où le renversement de l’ordre établi semble possible.



Des révolutions populaires qui éclatent pour réclamer justice et liberté.



Ce fut le cas notamment en Égypte, en 2011. Lorsque la place Tahrir s’emplit de gens rêvant et luttant pour un meilleur pays. En effet, « la morale sans religion est meilleure que la religion sans morale » comme le dit l’un des personnages.



Car cette société égyptienne est gangrenée par la corruption, les passes-droits, les violences. Commises par des gens respectables, des religieux qui maquillent de préceptes religieux leurs aspirations égoïstes.



Mais Khaled, Dania, Achraf, Akram, Mazen et Asma ne baissent pas les bras. Ils sont les visages de l’auteur pour nous conter cette révolution.



Et celle-ci est belle. Portée par des souhaits progressistes et humanistes, fraternels.



Mais les révolutions sont brisées. Par celles et ceux qui sont au pouvoir, qui brassent de l’argent pour manipuler l’information, pour briser ceux qui ont choisi de lutter. Anarchie organisée, désinformation, libération de prisonniers…tous les moyens sont bons.



Les révolutions sont aussi trahies par le peuple, qui observe les manifestants depuis son balcon, qui attend de savoir qui gagnera avant de se prononcer.



La révolution a-t-elle fait progresser l’Égypte ? Le peuple égyptien méritait-il ses jeunes qui ont tout sacrifié ? Pour certains oui, pour d’autres non. À vous de vous faire votre propre opinion en lisant ce magnifique roman, servi par une plume magnifique, sensuelle.



Un roman qui se lit la colère au cœur et les larmes au bord des yeux.



Un roman à découvrir absolument !
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J'ai couru vers le Nil

Etant donné la vision que l'auteur donne de l'Egypte actuelle, il n'y a rien d'étonnant à ce que ce roman y soit interdit de publication !

Alaa el Aswany retrace avec précision les événements de 2011 et emmène le lecteur Place Tahrir pour le faire assister en première loge aux manifestations qui ont entraîné la chute de Hosni Moubarak et ce qui s'en est suivi.

Cette révolution, commencée dans la joie et l'enthousiasme par des jeunes qui veulent voir changer leur pays va vite leur être volée par l'armée et s'achever non seulement dans la déconvenue, mais dans la violence et la terreur !



Et l'auteur de pleurer sur son pays dont les élans démocratiques vont se solder par un cuisant échec.

Car, le Conseil suprême des forces armées, aidé par la police, avec les frères musulmans en sous-main, va faire tout son possible pour étouffer dans l'oeuf cet élan libertaire.

Et tous les moyens à sa disposition seront mis en oeuvre pour parvenir à ses fins : intimidation, faux rapports, meurtres et tortures ; sans oublier l'utilisation des médias pour défigurer l'image de la révolution, faire passer les révolutionnaires pour des suppôts de puissances étrangères et inspirer au peuple la haine de ces jeunes gens qui vont être assimilés à des traîtres à leur pays.

Ainsi, la révolution en Egypte n'aurait été qu'un complot financé par les services secrets américains aidés par leurs confrères israéliens du Mossad !



Alaa el Aswany fustige également l'hypocrisie religieuse et à ce titre le patelin cheikh Chamel (comparable au Tartufe de Molière) et la présentatrice de télé Nourhane, répugnante de fausse ingénuité, stigmatisent parfaitement les pratiques honteuses d'un certain Islam qui apparaît ici particulièrement répulsif.

Et grâce à des émissions télévisées du style "Avec Nourhane" diffusant "la liste noire" destinée à discréditer auprès des égyptiens des personnalités trop connues à l'étranger, qu'il n'est donc pas possible d'arrêter, la révolution va rapidement être jugulée, les séditieux matés ou emprisonnés et les égyptiens remis dans le droit chemin afin que les militaires puissent accaparer le pouvoir.



Il n'y a de Dieu que Dieu ....... et Mohamed est son prophète !



La vision de l'auteur correspond-elle à la réalité ? En tout cas c'est ainsi qu'il voit l'Egypte : un pays gangrené par la corruption et l'hypocrisie, où les possédants n'auront de cesse de protéger leurs fortunes et éventuellement prêts à tuer un million d'égyptiens pour garder le pouvoir !



Il est regrettable que sa démonstration soit entachée par une relation un peu brouillonne des faits et l'utilisation de ficelles narratives grossières destinées à tenir en haleine, ce qui a abouti, pour moi, à l'effet inverse : lasser le lecteur.

Dommage ..... vu l'intérêt de conter ce "printemps arabe" vibrant d'espoir qui s'est transformé en automne de la désillusion.

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J'ai couru vers le Nil

Alaa El Aswani relate la genèse de la révolution de 2011 et les événements de la Place Tahrir à travers une galerie de personnages représentatifs de la société égyptienne dans sa variété (population urbaine, cairote, précisé-je). Il dépeint des hommes et femmes satisfaits d'un immobilisme rassurant, d'un fatalisme culturel sûrement, qui approuvent le régime et qui se heurtent à d'autres dont la volonté est d'assister à un changement. 



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J'ai apprécié la fluidité et la facilité de la lecture. J'ai aimé trouver une variété de personnages. 

Toutefois la forme choisie par l'auteur ne m'a pas plu. J'ai vraiment peiné dès les 99 premières pages. A chaque chapitre apparait un personnage différent, que l'on ne retrouve d'ailleurs pas au chapitre suivant et que l'on ne peut pas lier aux autres (sauf Asma et Mazen). Visuellement, j'étais comme un cameraman qui se serait saisi d'instants de vie, les aurait mis bout à bout sans rien connaître des protagonistes. Le problème est que sur autant de pages, cela lasse et vu l'absence de lien, cela faisait "catalogue" et fut préjudiciable à l'appréciation de ma lecture pendant un quart du roman. Il n'y a que lorsque les liens familiaux, amicaux ont enfin été livrés que cela est allé mieux.

L'autre point qui m'a gênée fut l'incursion de six témoignages de victimes de la place Tahrir au milieu du roman (l'auteur a toutefois changé les noms). Autant cela me semble naturel dans un texte autre qu'un roman : un article, un essai...mais d'avoir ces témoignages au sein même du roman j'ai trouvé que cela n'avait pas sa place. 



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Pour terminer, je dirais que cette lecture a soulevé beaucoup de questions (de façon positive). L'auteur met bien en avant la difficulté pour tous ces personnages d'adhérer à un bouleversement. On peut se demander comment toutes ces strates d'un peuple vont d'un commun accord impulser un changement. Quid de celles et ceux qui vivent loin des pôles citadins et de personnes décisionnaires ou influentes ? (sans forcément envisager de façon claire à court et long terme qui serait l'homme providentiel et sa troupe qui pourraient relever le défi). 
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L'Immeuble Yacoubian

L'immeuble Yacoubian est un bâtiment du centre ville du Caire regroupant une multitude d'occupants aux profils les plus divers. A travers les problèmes de ces habitants, nous découvrons l'ensemble des plaies et des tabous du monde arabe : un jeune diplômé attiré par l'intégrisme, une jeune femme voulant travailler tout en faisant face aux avances de son patron mais aussi l'homosexualité, la religion, la corruption.
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L'Immeuble Yacoubian

"On a un urgent besoin des romanciers. Et des romans du monde"

(Alaa El aswany)



"Derrière chaque fanatique, il y a un drame, une ignorance, une injustice : on ne naît pas terroriste, ou fanatique, on le devient" explique Alaa El Aswany dans un article de "Lire" (février 2016, Écrire contre la terreur ?). Sans vouloir faire preuve d'angélisme, la lecture de "L'immeuble Yacoubian" aide à comprendre l'affirmation de l'écrivain égyptien qui manifeste sa foi en une république de la littérature : "Dès qu'on lit, on devient citoyen d'une république unique, et unie, de l'art, de la littérature, une république civilisée".



L'immeuble Yacoubian – il existe –, du nom de son promoteur albanais millionnaire, est un microcosme qui symbolise la société égyptienne durant la période de diffusion de l'islamisme qui a accompagné la révolution iranienne de 1979. On y retrouve les différentes composantes d'une société malade, déstructurée par la corruption, l'affairisme et l'inégalité, dont les désillusions et le mal de vivre offrent prise à une religion qui mêle foi et combat politique. Taha, idéaliste, doué, voit son avenir dans la police barré pour avoir un père concierge et se tourne vers les paroles d'un imam militant; Azzam, vieux bigot lubrique poursuit des rêves d'argent et de gloire en achetant une position puissante; Zaki, aristocrate nostalgique d'une Égypte à l'Occidentale se voit vieillir dans un pays mutant; puis il y a les femmes, Soad, Boussaïna,... objets des hommes, meurtries et révoltées dans leur quête insoluble d'identité et de tendresse. Le livre fait vivre ces gens, bons et méchants, parmi une longue série de séquences de quelques pages, passant en alternance des uns aux autres, créant un ensemble cosmopolite très réussi et représentatif.



Pour qui veut s'y arrêter, la leçon de ce livre est qu'il faut apprendre à ne pas voir les autres comme des étiquettes. Dans un roman, les personnages finissent par ne plus paraître juifs, musulmans, belges ou africains: ce sont des hommes et des femmes.



Alaa El Aswany poursuit une activité de dentiste. Les Frères musulmans continuent de menacer cette bête noire dans son propre cabinet. Il a publié en 2014 un recueil de chroniques "Extrémisme religieux et dictature. Les deux faces d'un malheur historique", toujours chez Actes Sud.



Soulignons l'excellent travail de traduction (de l'arabe égyptien) et surtout la documentation (notes de bas de page brèves et instructives ) de Gilles Gauthier.
Lien : http://christianwery.blogspo..
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L'Immeuble Yacoubian

De ma semaine en Jordanie, en plus des souvenirs et des photos, je suis revenu avec des suggestions de lectures conseillées par notre guide, afin de prolonger le voyage et mieux comprendre les habitants de cette région d’Orient.



« L’immeuble Yacoubian » est le premier. J’ai pris plaisir à suivre les différents habitants de cet immeuble égyptien des années 30.

Ils vivent le changement s’opérant dans leur pays avec plus ou moins d’attente. Certains le voient comme retour en arrière, d’autres comme un rééquilibrage.



Alaa El Aswany, nous raconte à la fois la vie de cet immeuble avec ses joies, ses peines, ses histoires d’amour et d’amitié et la montée d’un régime totalitaire.

Il nous aide aussi à comprendre comment une société occidentalisée, tolérante et ouverte mais fortement corrompue va se transformer avec la montée de l’intégrisme.
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L'Immeuble Yacoubian

Un livre à redécouvrir et à relire au vu des derniers événements qui se sont produits récemment en Egypte. Dans ce livre, au travers de la vie des différents résidents d'un immeuble du Caire, c'est toute une atmosphère qui se dégage, une atmosphère d'insatisfaction et de colère contenue.. C'est l'Egypte de Hosni Moubarak, qui appartient déjà au passé. Un livre drôle mais teinté d'amertume, où l'on voit des personnages qui essaient d'avancer honnêtement et qui sont piétinés et freinés et où, inversement, on voit des gens corrompus et qui ont des connaissances dans le milieu politique progresser sans vergogne..

En lisant ce livre, on comprend pourquoi la place Tahrir s'est remplie de jeunes en colère...

Un beau témoignage sur une page récente de notre histoire...
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L'Immeuble Yacoubian

le somptueux l'Immeuble Yacoubian construit au Caire en 1934, symbole de l'ancienne classe dominante en Égypte, opulente et cosmopolite s'est profondément dégradé après la révolution nassérienne, la plupart de ses occupant ayant fui. L'histoire se déroule dans cet immeuble , probablement dans les années 1990, où cohabitent désormais toutes les générations et toutes les classes sociales, et où les rapports sexuels, légitimes ou non, homo- ou hétérosexuels, fonctionnent comme une métaphore des rapports de classe. Tous les drames de l'Egypte se trouvent être incarnés par les habitants de cet immeuble: Zaki Dessouki un nostalgiques désabusé de la chute du roi Farouk, Taha el Chazli , fils du travailleur et méritant du gardien de l'immeuble, qui, rongé par la frustration finira de se radicaliser auprès des Frères musulmans après avoir échoué à être admis à l'académie de police, en passant par Hajj Mohammed Azzam, un riche commerçant grâce au trafic de drogue qui se donne une respectabilité islamique pour se faire élire député et étendre son réseau mafieux. Plusieurs histoires se déroulent en parallèle dans ce microcosme, miroir d'un système social bloqué (quelques années avant la chute de Moubarak), pris en otage par la corruption, le parrainage et le népotisme. Cette peinture de la société cairote faite par l'auteur de ce grand roman , Alaa al Aswany (qui y a tenu son cabinet de dentiste pendant plusieurs années) est toujours d'actualité.
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J'ai couru vers le Nil

Roman au combien politique, on comprend que l auteur ne soit plus apprécié en Egypte, ni que son roman y soit en librairie



Dune écriture toujours magistrale on suit les divers protagonistes de la Révolution ayant amené à la chute de Moubarak mais pas à celle de la corruption à tous les niveaux



L auteur par la voix de différents protagonistes nous entraine au sein de cette Révolution & de la place Tahir au centre du Caire. Révolution & révolutionnaires décapités mais peut être encore en gestation sourde.



Un grand livre dans la veine de Naguib Mahfouz
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