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Citations de Anne Hébert (266)


Ils font la fête à Flora Fontanges parce quelle est une actrice et qu'elle vient des vieux pays. Ils décidèrent de lui faire les honneurs de la ville . Ils la traitèrent comme une touriste modèle. Le circuit habituel. La maison de Montcalm, les trésors des ursulines de l'Hôtel-Dieu . À la maison du fort, quelqu'un dans la pénombre , parmi les maquettes bien alignées, raconte la bataille , de quelques minutes à peine, au cours de laquelle, en 1759, on a perdu la ville et tout le pays.
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Sous la pluie

Ah que la pluie dure !
Lente fraîcheur
Sur le monde replié
Passif et doux.

Pluie pluie
Lente lente pluie
Sur celle qui dort
Ramenant sur soi le sommeil transparent
Tel un frêle abri fluide

Séjour à demi caché
Sous la pluie
Cour intérieur dérobée
Où les gestes de peine
Ont l'air de reflet dans l'eau
Tremblante et pure

Toutes les gouttes du jour
Versées sur celle qui dort.

Nous n'apercevons son coeur
Qu'à travers le jour qu'il fait

Le jour qu'elle ramène
Sur sa peine
Comme un voile d'eau.
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La précise mémoire des fous ramène les faits comme des coquillages.
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"Ecrire un poème"

Ecrire un poème c'est tenter de faire venir au grand jour quelque chose qui est caché. Un peu comme une source souterraine qu'il s'agirait d'appréhender dans le silence de la terre. Le poète est une sorte de sourcier, sans baguette de coudrier, ni aucune baguette magique, qui se contente d'être attentif (à la pointe extrême de l'attention), au cheminement le plus lointain d'une source vive. La moindre distraction de sa part suffirait pour que disparaisse et se cache ailleurs ce souffle d'eau dans le noir, cette petite voix impérieuse qui cogne contre son coeur et qui demande la parole.
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Au matin, il est réveillé par la femme de chambre qui apporte le petit déjeuner, commandé la veille. Elle brandit la clef oubliée par Julien sur la porte, à l'extérieur de la chambre,
La fenêtre maintenant grande ouverte découpe l'image d'une ville dont Julien rêve depuis longtemps; le quai Voltaire, la Seine, Le Louvre, et, sur tout cela, une lumière tamisée, comme une douceur incertaine. L'hôtel avait été choisi, entre des dizaines d'autres, à cause de sa situation au coeur même
de Paris.
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Les lames de fond dévastent le sable, formes des dunes, aussitôt balayées, creusent des ravines, aussitôt comblées. Toute vie ou mort enfouie est extirpée, saisie, lâchée dans la fureur de l'eau. Les filles qui dorment au fond , la tête dans le sable, les pierres et les cordes des ancrages pour la pêche au saumon dont elles sont lestées, subissent le tohu-bohu des lames et des courants. Nora ma cousine, ma soeur flotte entre deux eaux, rejoint la grève de Griffin Creek, les gens de Griffin Creek la reconnaissent, livrent ses restes au médecin légiste , qui les enterrent dans le petit cimetière marin.
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Fumées blanche sur le ciel. Les oiseaux sortent de la mer blanche d'écume . Prennent leur envol sur le ciel gris. Septembre. Plumes blanches d'écume.
Plumes grises. Barres jaunes des fous de Bassan. Oiseaux d'écume blanche.
Nés de la mer blanche d'écume. Leurs cris perçants sortis de la vague. Leurs becs durs creusant la vague pour sortir de l'eau. Oiseaux fous crevant leur coquille d'eau. Pour naître à nouveau. Emplissant le ciel de clameurs déchirantes. Tournent autour de ma tête. Me cassent les oreilles.
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LE TOMBEAU DES ROIS
Extrait 1
 
 
J'ai mon cœur au poing.
Comme un faucon aveugle.

Le taciturne oiseau pris à mes doigts
Lampe gonflée de vin et de sang,
Je descends
Vers les tombeaux des rois
Étonnée
À peine née.

Quel fil d'Ariane me mène
Au long des dédales sourds ?
L'écho des pas s'y mange à mesure.

(En quel songe
Cette enfant fut-elle liée par la cheville
Pareille à une esclave fascinée ?)

L'auteur du songe
Presse le fil,
Et viennent les pas nus
Un à un
Comme les premières gouttes de pluie
Au fond du puits. …

p.59
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Catherine se dressa sur son lit et cria qu’elle était blanche et blonde, que son ventre sentait la neige fraîche et qu’elle n’avait que faire parmi la race étrangère de deux romanichels impuissants, couleur de safran.
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Catherine se retourna brusquement. Tout le rideau moussa sur elle en un vif bouillonnement de lumière argentée. Michel, ébloui, mit la main sur ses yeux. Il supplia Catherine de ne point demeurer là et de tirer le rideau à cause du soleil. Catherine ne broncha pas, les yeux grands ouverts, nimbée de lumière de la tête aux pieds
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“En pleine possession de nos privilèges de vivants, nous pénétrons dans le domaine des morts et le lieu sacré de leur refuge. Ce froid dans nos veines et cette odeur poignante de la terre dans nos bouches. Nous absorbons, avec une facilité étonnante, la nuit des morts, leur froid excessif, toutes ténèbres, terreur et horreur cachées. Élevés à une très haute puissance, tous tant que nous sommes, la vie et la mort n’ont plus aucun secret ni tournant pour nous. (Les enfants du sabbat, p. 44).”
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Je ne sais plus rien de lui. J'habite le vide absolu. Un désert de neige, chaste, asexué comme l'enfer. En vain j'examine la vaste étendue blanche, dépouillée de ses villages et de leurs habitants. Les grandes forêts. Les champs. Le fleuve gelé.
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LE TOMBEAU DES ROIS
LA CHAMBRE DE BOIS


Miel du temps
Sur les murs luisants
Plafond d’or
Fleurs des nœuds
cœurs fantasques du bois

Chambre fermée
Coffre clair où s’enroule mon enfance
Comme un collier désenfilé.

Je dors sur des feuilles apprivoisées
L’odeur des pins est une vieille servante aveugle
Le chant de l’eau frappe à ma tempe
Petite veine bleue rompue
Toute la rivière passe la mémoire.

Je me promène
Dans une armoire secrète.
La neige, une poignée à peine,
Fleurit sous un globe de verre
Comme une couronne de mariée.
Deux peines légères
S’étirent
Et rentrent leurs griffes.

Je vais coudre ma robe avec ce fil perdu.
J’ai des souliers bleus
Et des yeux d'enfant
Qui ne sont pas à moi.
Il faut bien vivre ici
En cet espace poli.
J’ai des vivres pour la nuit
Pourvu que je ne me lasse
De ce chant égal de rivière
Pourvu que cette servante tremblante
Ne laisse tomber sa charge d’odeurs
Tout d’un coup
Sans retour.

Il n’y a ni serrure ni clef ici
Je suis cernée de bois ancien.
J’aime un petit bougeoir vert.

Midi brûle aux carreaux d’argent
La place du monde flambe comme une forge
L’angoisse me fait de l’ombre
Je suis nue et toute noire sous un arbre amer.

p.42-43
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JE SUIS LA TERRE ET L’EAU


Je suis la terre et l’eau, tu ne me passeras pas à gué,
mon ami, mon ami

Je suis le puits et la soif, tu ne me traverseras pas sans
péril, mon ami, mon ami

Midi est fait pour crever sur la mer, soleil étale, parole
fondue, tu étais si clair, mon ami, mon ami

Tu ne me quitteras pas essuyant l’ombre sur ta face
comme un vent fugace, mon ami, mon ami

Le malheur et l’espérance sous mon toit brûlent,
durement noués, apprends ces vieilles noces étranges,
mon ami, mon ami

Tu fuis les présages et presses le chiffre pur à même
tes mains ouvertes, mon ami, mon ami

Tu parles à haute et intelligible voix, je ne sais quel
écho sourd traîne derrière toi, entends, entends mes
veines noires qui chantent dans la nuit, mon ami,
mon ami

Je suis sans nom ni visage certain ; lieu d’accueil et
chambre d’ombre, piste de songe et lieu d’origine,
mon ami, mon ami

Ah quelle saison d’âcres feuilles rousses m’a donnée
Dieu pour t’y coucher, mon ami, mon ami

Un grand cheval noir court sur les grèves, j’entends
son pas sous la terre, son sabot frappe la source de
mon sang à la fine jointure de la mort

Ah quel automne ! Qui donc m’a prise parmi des
cheminements de fougères souterraines, confondue à
l’odeur du bois mouillé, mon ami, mon ami

Parmi les âges brouillés, naissances et morts, toutes
mémoires, couleurs rompues, reçois le cœur obscur
de la terre, toute la nuit entre tes mains livrée et donnée,
mon ami, mon ami

Il a suffi d’un seul matin pour que mon visage fleurisse,
reconnais ta propre grande ténèbre visitée, tout le
mystère lié entre tes mains claires, mon amour.

p.86-87

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MYSTÈRE DE LA PAROLE


…O saisons, rivière, aulnes et fougères, feuilles, fleurs,
bois mouillé, herbes bleues, tout notre avoir saigne
son parfum, bête odorante à notre flanc

Les couleurs et les sons nous visitèrent en masse et par
petits groupes foudroyants, tandis que le songe dou-
blait notre enchantement comme l’orage cerne le bleu
de l’œil innocent

La joie se mit à crier, jeune accouchée à l’odeur sau-
vagine sous les joncs. Le printemps délivré fut si
beau qu’il nous prit le cœur avec une seule main

Les trois coups de la création du monde sonnèrent
à nos oreilles, rendus pareils aux battements de notre
sang

En un seul éblouissement l’instant fut. Son éclair
nous passa sur la face et nous reçûmes mission du feu
et de la brûlure

Silence, ni ne bouge, ni ne dit, la parole se fonde,
soulève notre cœur, saisit le monde en un seul geste
d’orage, nous colle à son aurore comme l’écorce à
son fruit

Toute la terre vivace, la forêt à notre droite, la ville
profonde à notre gauche, en plein centre du verbe,
nous avançons à la pointe du monde

Fronts bouclés où croupit le silence en toisons mus-
quées, toutes grimaces, vieilles têtes, joues d’enfants,
amours, rides, joies, deuils, créatures, créatures, langues
de feu au solstice de la terre

O mes frères les plus noirs, toutes fêtes gravées
en secret ; poitrines humaines, calebasses musiciennes où
s’exaspèrent des voix captives

Que celui qui a reçu fonction de la parole vous prenne
en charge comme un cœur ténébreux de surcroît, et
n’ait de cesse que soient justifiés les vivants et les morts
en un seul chant parmi l’aube et les herbes.

p.74-75
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L'ENVERS DU MONDE


[…]
Dans nos mains peintes de sel
(Les lignes du destin sont combles de givre)
Nous tenons d'étranges lourdes têtes d'amants
Qui ne sont plus à nous
Pèsent et meurent entre nos doigts innocents.

La voix de l'oiseau
Hors de son cœur et de ses ailes rangées ailleurs
Cherche éperdument la porte de la mémoire
Pour vivre encore un petit souffle de temps.

L'une de nous se décide
Et doucement approche la terre de son oreille
Comme une boîte scellée toute sonore d'insectes
prisonniers
Elle dit : « La prairie est envahie de bruit
Aucun arbre de parole n'y pousse ses racines
silencieuses
Au cœur noir de la nuit.
C'est ici l'envers du monde
Qui donc nous a chassées de ce côté ? »

Et cherche en vain derrière elle
Un parfum, le sillage de son âge léger
Et trouve ce doux ravin de gel
en guise de mémoire.

p.53
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LE TOMBEAU DES ROIS

LES PÊCHEURS D'EAU


Les pêcheurs d'eau
Ont pris l'oiseau
Dans leurs filets mouillés.

Toute l'image renversée ;
Il fait si calme
Sur cette eau.

L'arbre
En ses feuilles
Et dessin figé du vent
Sur les feuilles
Et couleurs d'été
Sur les branches.

Tout l'arbre droit,
Et l'oiseau,
Cette espèce de roi
Minuscule et naïf.

Et puis aussi
Cette femme qui coud
Au pied de l'arbre
Sous le coup de midi.

Cette femme assise
Refait, point à point,
L'humilité du monde,
Rien qu'avec la douce patience
De ses deux mains brûlées.

p.19-20
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Le soleil luit
Le soleil luit
Le monde est complet
Et rond le jardin.

J’ai allumé
Deux chandelles
Deux feux de cire
Comme deux fleurs jaunes.

Le jour pourrit
Les feux de nuit,
Deux fleurs fanées,
Aux blanches tiges d’église ;

Le monde est en ordre
Les morts dessous
Les vivants dessus.

Les morts me visitent
Le monde est en ordre
Les morts dessous
Les vivants dessus.

Les morts m’ennuient
Les vivants me tuent.

J’ai allumé
Deux fleurs tremblantes,
J’ai pris mes yeux
Dans mes mains
Comme des pierres d’eau

Et j’ai dansé
Les gestes des fous
Autour de mes larmes
En guise de fête.
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De retour de chasse ils prennent leur femme dans le noir, sans enlever leurs bottes. [...]
La lune d'est pas une orange ronde et pleine, comme disent les gens. La lune est plate, sans épaisseur, pareille à du papier blanc. Un rond de papier blanc. Une assiette de papier, ronde, blanche, brillante.
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La brutalité est le recours de ceux qui n'ont plus de pouvoir intérieur.
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