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Citations de August Strindberg (174)


GERDA. – Ai-je vieilli ?
LE MONSIEUR. – Je ne sais pas. Il paraît qu’au bout de trois ans, pas un atome de notre corps n’est resté le même, et qu’en cinq ans, tout a été renouvelé ; c’est sans doute pourquoi vous qui êtes là, vous n’avez aucun rapport avec celle qui était assise ici et souffrait… Je peux à peine vous tutoyer, tant vous m’êtes étrangère.
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LE FRERE. – Je crois que tu vis dans une profonde erreur…
LE MONSIEUR. – Laisse-moi continuer à y vivre, mon frère : une conscience pure, ou relativement, a toujours été pour moi comme un scaphandre qui me permettait de descendre dans les profondeurs, sans étouffer.
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"JEAN. - Vous savez, vous êtes très étrange !

JULIE. - Peut-être, mais ça, vous l'êtes aussi. Et puis tout est étrange. La vie, l'humanité, tout ... Cette neige noire qui tourne, tourne sur l'eau et s'enfonce, s'enfonce. J'ai fait un rêve qui me revient de temps en temps, et je me le rappelle en ce moment. Grimpée tout en haut d'un pilier, j'y suis assise sans aucune possibilité d'en descendre ; j'ai le vertige en baissant les yeux, et je dois regagner la terre, mais je n'ai pas le courage de m'élancer ; je ne puis m'y maintenir et il me tarde te tomber, mais je ne tombe pas. Pourtant je ne connais la paix, je ne connais le repos que lorsque je suis en bas, tout en bas, sur le sol. Et si j'ai réussi à l'atteindre, je voudrais disparaître sous la terre. Avez-vous jamais connu cette sensation ?

JEAN. - Non. Je rêve d'ordinaire que je suis couché sous un grand arbre dans une forêt obscure. Je veux monter, monter au sommet, pour voir le clair paysage tout brillant de soleil, et dénicher le nid où dorment les brillants oeufs d'or. Et je grimpe, je grimpe, mais le tronc est si énorme, si lisse, et elle est si loin, la première branche ! Mais je sais que si je l'atteins, la première branche, j'arriverai au sommet aussi aisément que par une échelle. Jamais encore je ne l'ai atteinte ; mais j'y arriverai, même si c'est en rêve ! "
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LA JEUNE FILLE. Puis-je aller me baigner avec les jeunes filles, aujourd'hui ?
LA MÈRE. Pas sans ta mère, tu le sais bien !
LA JEUNE FILLE. Oui, mais elles savent nager et tu ne sais pas !
LA MÈRE. Il ne s'agit pas de savoir qui sait nager ou non, mais tu sais que tu ne dois jamais sortir sans ta maman.
LA JEUNE FILLE. Si je le sais ! Je l'ai entendu depuis que j'ai pu comprendre ce que tu disais.
L'HABILLEUSE. Cela montre que tu as une mère pleine d'amour, qui voulait le bien de son enfant... Oui, c'est cela !
LA MÈRE (tend la main à l'habilleuse). Merci ! Merci pour ces paroles, Augusta ! Ce que j'ai été pour le reste, cela... mais que je sois restée une bonne mère, je peux le dire moi-même sans crainte.
LA JEUNE FILLE. Oui... Ce n'est pas la peine de demander la permission d'aller jouer au tennis non plus !
L'HABILLEUSE. Il ne faut pas être impertinente envers sa mère, ma jeune demoiselle, et quand on ne veut pas faire à ses proches la joie de partager leurs humbles plaisirs, alors il me paraît pour le moins offensant
de venir demander à s'amuser dans la compagnie des autres !
Scène I
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[ deux domestiques ]
- Non, ça suffit, je ne veux plus rester dans cette maison où l'on ne peut même pas avoir de respect pour ses maîtres !
- Pourquoi faut-il les respecter ?
- Oui, pourquoi, qu'il me le dise, puisqu'il est si malin ! Restera-t-il au service de gens dévergondés ? Hein ? On se déshonore soi-même en les servant, à mon avis.
- Au contraire, on se console en se disant que les autres ne sont pas meilleurs que nous !
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- Soyez gentil avec moi ; là, vous me parlez comme un être humain.
- D'accord, mais soyez humaine vous-même ! Vous me crachez dessus, mais vous ne permettez pas que je m'essuie - sur vous !
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KURT. Tu n'es pas satisfait de ton existence ?
LE CAPITAINE (soupire). Satisfait ? Le jour où je pourrai mourir, je serai satisfait !
KURT. Ça, tu ne le sais pas... Mais, dis-moi : que se passe-t-il entre vous, ici, dans cette maison ? Qu'y a-t-il ici ? L'odeur se répand comme d'une trame empoisonnée et elle rend malade à peine entré ! Je préférerais passer mon chemin, n'était que j'ai promis à Alice de rester ; des cadavres sont couchés sous les planchers ; la haine est ici, et elle empêche de respirer. (Le capitaine s'affaisse et regarde fixement devant lui.) Qu'est-ce qui t'arrive ? Edgar ! (Le capitaine reste figé, Kurt le frappe sur l'épaule.) Edgar !
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ALICE. – […] Mais je songe que la paix règne maintenant dans la maison. La paix merveilleuse de la mort. Merveilleuse, comme le trouble solennel qui accompagne la naissance d’un enfant. J’entends le silence, je vois sur le parquet les traces de la chaise longue qui est partie avec lui. Et je sens que ma vie est finie, et que je m’achemine vers la destruction… Comme c’est étrange, les paroles toutes simples du lieutenant, qui est une âme simple, eh bien, elles me poursuivent, elles prennent tout leur sens. Mon époux, l’amour de ma jeunesse –oui, faut-il rire ?- était un homme noble et bon, malgré tout.
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LE CAPITAINE, à Kurt. – De l’argent, de l’argent, de l’argent ! Toute la journée, le porte-monnaie à la main. J’ai fini par m’imaginer que j’étais devenu un porte-monnaie. Tu connais ça ?
KURT. – Oh oui ! Avec cette différence que je m’imaginais être un portefeuille.
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Eh ! N'avait-il pas tout lieu d'être content ? Puisque tel avait toujours été son rêve : éveiller l'amour d'une femme, si complètement qu'elle vînt à lui suppliante, rampante, disant : "Je t'aime, daigne m'aimer !" Puisque tel était l'ordre de la nature que la plus faible s'approchât du plus fort avec humilité ! Et non point en conquérante, quoique ce fût encore le cas chez ceux qui vivent parmi des résidus de superstitions décernant à la femme quelque chose de mystiquement sublime – et cela à l'encontre de la science qui a prouvé que le mystique était simplement du désordre, et le sublime un poème créé par le désir exaspéré des mâles !
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Non ! L'amour n'existait pas sans illusion. Et conquérir une femme par la sincérité était impossible : s'approcher d'elle la tête haute, le verbe franc, c'était la repousser loin de soi.
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Moi, comme tu sais, je considère les hommes avec une absolue indifférence. Je les prends comme des formations géologiques, comme des minéraux. Certains cristallisent en un système ; d'autres en un autre. Pourquoi font-ils ainsi ? Cela dépend de lois ou de circonstances en face desquelles nous n'avons qu'à rester indifférents. Je ne pleure pas sur le calcaire parce qu'il n'est point dur comme le cristal de roche.
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Jean.- Vous me haïssez aussi ?
Julie.- Au-delà des mots ! Je voudrais vous abattre comme une bête.
Jean.- Comme on tue un chien enragé. C'est ce que vous vouliez dire ?
Julie.- Exactement.
Jean.- Mais il n'y a pas d'armes, et pas de chien ! Donc, qu'est-ce que nous allons faire ?
Julie.- Partir.
Jean.- Et nous tourmenter l'un l'autre jusqu'à la mort ?
Julie.- Non, le plaisir, deux jours, huit jours, aussi longtemps que nous pourrons le prendre, et, alors, mourir...
Jean.- Mourir ? C'est idiot ! Si c'est ça, je crois qu'il vaut mieux monter un hôtel.
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August Strindberg
Au fond, c'est ça la solitude : s'envelopper dans le cocon de son âme, se faire chrysalide et attendre la métamorphose, car elle arrive toujours.
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LE CAPITAINE. - Je supporte de plus en plus mal le tabac trop fort.
ALICE. – Prends-le plus léger. Puisqu’il paraît que c’est ta seule joie.
LE CAPITAINE. – La joie ? Qu’est-ce que c’est ?
ALICE. – Ce n’est pas à moi qu’il faut le demander. Je n’en sais pas plus long que toi… Tu ne veux pas un whisky ?
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LOUISE. – C’est mauvais de rester trop longtemps dans les vieux souvenirs.
LE MONSIEUR. – Pourquoi ? Quand le temps a passé, ils sont tous beaux…
LOUISE. – Mais Monsieur peut encore vivre vingt ans, c’est beaucoup pour s’installer déjà dans des souvenirs qui s’estomperont, et qui finiront même par changer de couleur.
LE MONSIEUR. – Comme vous êtes savante, mon enfant ! Bon, commencez, déplacez un pion. Mais pas la reine. Vous seriez mat en deux coups.
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On dirait que la vie n'est qu'une immense dérision.
(trad. Alfred Jolivet et Georges Perros, p106)
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Ainsi va le monde : quand les dieux s’amusent, les mortels en abusent !…
On n’ose pas me tuer, on veut seulement me rendre fou, par des artifices, puis me faire disparaître dans une maison blanche.
Les autres ne peuvent rester heureux sans me faire souffrir.
Me voilà tombé de l’athéisme dans la superstition la plus complète.
Ce livre est celui du grand désordre et de la cohérence infinie..
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Pourquoi suis-je ici? La solitude me force à rechercher les êtres humains, à écouter des voix humaines.
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BENGTSSON. C'est l'habituel souper des spectres, comme ils l'appellent. Ils boivent du thé, sans échanger un mot. Tout au plus le Colonel parle-t-il et pendant ce temps ils grignotent des petits gâteaux, tous ensemble : cela s'entend, on dirait des rats qui courent dans un grenier.
JOHANSSON. Pourquoi appelle-t-on cela le souper des spectres ?
BENGTSSON. Ils ont l'air de spectres... et voilà vingt ans que cela dure : toujours les mêmes personnes, qui disent les mêmes choses ou gardent le même silence, pour ne pas avoir à rougir de honte.

Acte II
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