Citations de Baptiste Beaulieu (1039)
Les Hommes ont trois visages. Celui qu’ils montrent au monde, celui qu’ils montrent à leur famille, et celui qu’ils ne montrent à personne. La Guerre te les mélange et te les casse un peu tous.
Il me faisait l'amour comme il jouait à ses jeux sur la console, pressant les boutons dans le désordre, avec l'espoir que quelque chose arrive...
"J'ai tendu des cordes de clocher à clocher ; des guirlandes de fenêtre à fenêtre ; des chaînes d'or d'étoile à étoile, et je danse."
Rimbaud
Aucun enfant au monde ne sait regarder sa mère avec des yeux raisonnables.
Il n'y a pas d'étrangers en ce monde ;
seulement des amis qui s'ignorent encore.
Ce qu’il faut, c’est qu’on soit naturel et calme
Dans le bonheur comme dans le malheur,
Et, à l’article de la mort,
Se souvenir que le jour meurt,
Que le couchant est beau, et belle
La nuit qui demeure.
Puisqu’il en est ainsi, ainsi soit-il
(Fernando Pessoa)
Parfois, la vie c'est juste ça : obéir à ce qu'on voit.
Nous savions la facilité avec laquelle l'univers brise le verre, brise les enfants, brise les cités des Hommes, brise tout. Qu'est-ce que la mort d'un enfant, sinon un paysage lointain qui tremble, vacille sur ses bases et finalement s'efface ?
C'était une alliée précieuse [Diane], qui réussissait à tout dédramatiser... Lors d'un cours sur les violences faites aux femmes, elle avait prononcé cette phrase à prendre au trentième degré, mais qui nous avait permis de décompresser: "Comme disait papa: c'est pas un viol si tu cries "surprise" avant!" Il y avait eu des exclamations indignées dans l'assemblée, et Diane avait ri aux éclats en ajoutant: "Tape ta femme, si tu ne sais pas pourquoi, elle le sait."
C'est simple: il suffit de regarder les choses simples derrière les choses compliquées et de s'émerveiller des choses compliquées derrière les choses simples.
- Comment ça va, le moral, en ce moment ?
- C'est-à-dire, docteur ?
- Je sais pas, est-ce que vous vous sentez plutôt heureux ?
- Ouh là ! Je prête surtout attention à ne pas confondre le bonheur et le plaisir, docteur.
(…) Le plaisir, c'est ce qui me distrait de mon chagrin habituel, docteur. Un peu comme la météo et le climat. C'est pas la même chose. Parfois j'éprouve du plaisir, et c'est comme s'il faisait beau temps. Ça ne veut pas dire que le climat est meilleur. Mais quand il fait beau souvent, on finit par se dire : tiens, cette année, le climat a été clément. Voilà.
- Et il est comment le climat, cette année ?
- Comme la Bretagne, docteur. À chier.
– De quelle couleur c’est, un baiser ? dit-il.
– Bleu comme une framboise, répondit-elle sans réfléchir.
« Quiconque nous parle de sa solitude nous parle de nous. L'homme a ses sous-bois, où personne ne s'aventure, pas même lui, mais qui sont là : la nuit de l'enfance, les échecs, les renoncements, le brusque émoi d'un nuage au ciel. »
Simone de Beauvoir
Anticiper le bonheur, c'est le vivre deux fois.
Le chemin du bonheur, on ne le perd jamais, on l'oublie parfois, à cause de soi, à cause de l'autre, mais on ne le perd jamais.
La Mort, le Temps, c'est ce qui efface les visages.
La vie, c'est le combat de soi contre soi.
Madame Orange, cinquante-huit ans. La maladie a condamné son corps à la lyophilisation : elle a la sécheresse d'un agrume oublié au soleil. Elle ne demande et n'attend pas grand-chose. Elle aime juste regarder "Des jours et des vies" le matin...
Depuis deux jours, le poste de télévision ne s'allume plus.
Fabienne :
- J'ai appelé le service technique : sa famille n'a pas payé, ils ne remettront pas la télé tant que ce n'est pas réglé.
Le technicien, au téléphone :
- Je veux rien savoir. Pas payé, pas de télé.
- Allez, quoi ! Sa famille paiera plus tard.
- Aura la télé plus tard, alors.
- Elle sera morte. Combien?
- Huit euros.
Je descends, avec des envies de meurtres, jette dix euros au mec.
- Ca fait deux euros de monnaie. Gardez-la. Vous vous achèterez des couilles, ou un coeur.
Là - je ne sais plus -, j'ai peut-être dit un mot très vulgaire (pardon Mamie) et adressé une prière au Petit Dieu des Armes à Feux avant de claquer la porte.
A l'Hôpital, on sous-traite la télé avec des entreprises privées. Un jour, on sous-traitera l'Humain, le Sacré, le Mystère. Pourtant, une femme qui meurt, c'est Humain, c'est Sacré, c'est Mystérieux. Même - surtout - devant "Des jours et des vies". Il lui en reste si peu.
Huit euros...
L'argent est un sujet tabou à l'hôpital. Officiellement, la santé des gens ne se monnaye pas ! Officieusement? Il en est question partout. C'est comme une grosse pépite d'or qui roule dans les couloirs. On court après. Tout le temps. Le directeur, l'administration, les chefs de service, c'est une vraie chasse au trésor. A l'hôpital, officiellement, on ne parle pas d'argent. Le silence est d'or et cet or est joueur...
Et si on confondait le fait d'être heureux avec le fait d'être momentanément distrait de notre chagrin quotidien ?
Les hommes ont beaucoup trop confiance en eux, bien plus que les femmes, parce qu'ils naissent avec des testicules et un pénis, c'est tout, même que c'est pour cette raison qu'ils se pensent légitimes à exercer un tel niveau de violence sur autrui en toute impunité. Faudrait que les nanas arrêtent toutes de simuler l'orgasme, pour que les mecs sachent une bonne fois pour toutes combien ils sont irrémédiablement nuls. C'est une idée comme ça. Le début d'une utopie révolutionnaire qui commencerait par là : cesser de mentir aux hommes au sujet de leur insondable médiocrité.