Citations de Camille Laurens (792)
rentrer dans le silence comme dans un moulin sans paroles
Déranger pour donner à penser, assure à l’art une fonction critique, le mettre au service de la vérité, fut elle cruelle : telles sont les visées d’Edgar Degas, et son extrême modernité.
Surtout ne répondez pas. C'est inutile. Nous ne pouvons pas correspondre, il n'y a pas de correspondance possible entre nous. Vous êtes loin, vous êtes l'autre, vous êtes l'homme. J'ai accepté cette distance qui flotte entre nous comme le trajet d'une lettre qui voyage. Je n'écris pas pour que vous répondiez, et cependant je vous écris. N'en soyez pas étonné : j'ai renoncé à vous saisir, mais pas au geste de vous saisir. L'écriture est ce geste ; j'écris vers vous. C'est comme la main qu'on agite quand le train est parti : inutile, sans être vain.
Nous n'épiloguerons pas sur les affreuses injustices du monde de l'art et de l'argent, on sait combien de peintres sont allés à la fosse commune, dont les oeuvres dorment à présent au fond de coffres-forts.
Il me semblait que dans l'union des corps toutes les contradictions qui m'angoissaient si fort se volatilisaient, qu'alors, et la seulement, les questions avaient leur réponse: la vérité venait du corps, le corps était la vérité.
Il n'a jamais souffert comme d'autres n'ont jamais vu la mer, en quelques heures ça peut s'arranger.
Les yeux exercent un contrôle permanent qui adoucit la souffrance d'amour, et l'angoisse ne revient vraiment qu'avec l'absence. Loin des yeux, près du coeur.
Mais un écrivain? Tous les hommes ne rêvent-ils pas d avoir un écrivain à leur bras, autant pour poser dans le siècle que pour féconder les nuages? Pensais-je. (Je me trompais, bien sûr : les hommes rêvent seulement d'écrire.)
Venez, viens, je, tu, je vous, j'avoue, je tue, prenez, ceci est mon corps, je suis l'amante religieuse, je me dévoue à vous, je vous tue, ceci est ton sang, je pourrais si je voulais, j'aurais pu, si j'avais voulu.
Écrire, c'est traduire en mots des pensées, des faits, des sentiments, des sensations, le corps, la chair, le silence. La vie est la langue étrangère de l'écrivain. Il y a d'excellents traducteurs, certes. Mais traduire, c'est trahir, tout le monde connaît la formule.
C’était lui au battement de mon cœur je ne pouvais pas me tromper. Je sais que c’est difficile à croire, cette soudaine certitude, mais voilà.
J’écrirai ce que je vois d’eux et vous lirez ce qu’ils font de moi – qu’elle femme je deviens en inventant cet inventaire : les hommes de ma vie
Les hommes quittent leur femme parce qu’elles ne peuvent plus avoir d’enfants.
Juliette c'est le pendant de Romeo; enfin, le pendant, si on peut dire, ah ah ! Juliette c'est le degré zéro du zizi ...
Je ne tromperai jamais mon mari parce que je ne supporterais pas d’être la femme d’un cocu.
Mais les hommes ont peur aussi, tu sais, ne crois pas ça. Sur la peur, on est à égalité. Dès la petite école, on a peur de ne pas être à la hauteur. On doit rester sur ses gardes tout le temps, se bagarrer, ne pas pleurer, impressionner les filles. On a peur de ne pas être courageux, peur d'avoir à se battre pour montrer qui est le plus fort, peur de ne pas l'être. Quand on grandit, on a peur de ne pas bander au moment où il faut, peur de ne pas assurer, peur de se faire humilier. Non, je t'assure, c'est terrible de faire le garçon.
Quand aux garçons de son âge, ils font n'importe quoi. La seule chose qu'elle leur envie, c'est leurs billes, des agates rouges, bleues, jaunes, qu'elle aimerait faire rouler dans sa main. Mais les filles ne jouent pas aux billes, c'est comme ça. Même son voisin Joël, qu'elle aime bien, devient méchant ; un jour, dans son jardin, il attrape une grenouille, lui enfile une paille dans le derrière et souffle pour la faire éclater. Quand elle est à moitié morte, il la jette dans une fourmilière. Il ne rit pas, il grimace et son visage est inconnu. Elle se bouche les yeux, elle a froid, se sent grenouille. Aucun crapaud n'est prince, c'est des histoires tout ça, des contes de bonnes femmes.
« Je la vois, dis-je. A travers le temps, je me reconnais en cette enfant comme dans un miroir, mais c’est à une autre que les choses arrivent, sinon je ne peux pas. (…) L’année de ses dix ans elle sera tout le temps malade, c’est l’année où sa peau se plaint, où son corps porte plainte.«
" la différence, maman, entre hommes et femmes, tu vois, c'est que les hommes ont peur pour leur honneur, tandis que les femmes, c'est pour leur vie. Le ridicule ne tue pas, la violence, si" .
Qui va s'occuper de ma détresse, soulever la dalle de marbre qui m'enfonce la poitrine, faire reculer la terreur où je suis de ne pas rentrer dans le moule, ne pas savoir ( coudre, être une femme, être aimée)?
La perte de chance, ici et maintenant, c'est d'être quelqu'un qui ne choisit pas, qu'on manipule, le jouet d'un mensonge, l'objet d'une machination, l'enjeu d'un accord tacite, une personne dont le sort, la vie, le malheur et la joie se décident à côté d'elle, malgré elle, chez les parents, !es maîtres et les hommes.
Tu souffres de toutes tes forces , tu endures la noble douleur des mères qui te broie les entrailles mais tu aimerais,tout de même, si c'est possible, sans vouloir te plaindre ouinsister, tu aileraqu'on te fasse une péridurale.