Citations de Céline Denjean (277)
D'abord cette lumière, unique, qui semblait teinter le monde comme seuls les peintres savent le faire. Parce que la lumière, ici, donnait du relief aux couleurs.
Louise passa la porte du bureau sur les coups de midi. Violaine et Thierry étaient à pied d’œuvre devant leurs ordinateurs, et un calme parfait régnait dans la pièce.
– On entendrait voler une mouche ! lança-t-elle d’une voix forte.
Une longue série d’aboiements inattendus lui répondit et la fit sursauter.
– Mais qu’est-ce que…
Dressé sur ses pattes à côté du bureau de Violaine, le chien de Ducuing couvait Louise d’un œil inquiet. Avant même que cette dernière ouvre la bouche, Violaine se défendit :
– Qu’est-ce que tu voulais que j’en fasse ?! Je n’allais pas laisser ce pauvre animal seul dans une maison qu’il ne connaît pas. Déjà qu’il est à moitié traumatisé.
– Ce pauvre animal s’appelle Balto, figure-toi !
À l’évocation de son nom, le cocker jappa de contentement et s’approcha de Louise en remuant la queue.
– Eh oui, mon gros Balto ! l’accueillit-elle en s’accroupissant. Tu vas bientôt rentrer chez toi, hein ! Mais d’abord, tu vas nous laisser travailler, d’accord ?
En réponse, le chien lui lécha généreusement la main.
– Ah ! J’avais presque oublié pourquoi je préférais les chats !
Puis elle lui caressa le dos
Mais laissez-moi vous dire une chose, à mon tour : vous n'avez pas le moindre idée de ce dont est fait mon quotidien professionnel. Essayez d'imaginer la jalousie, la méchanceté, l'envie, la haine, la vengeance, la colère, la sottise, le désespoir, la misère, le mensonge, la fourberie, la lâcheté, la folie, la mesquinerie. Imaginez toutes ces choses humaines, et si vous pensez être parvenu à vous en faire une idée, alors prenez le tout et multipliez-le par dix, puis par cent, puis par mille... Donc, je suis désolée si je vous ai heurté, mais la triste vérité, c'est que, dans les caves du monde entier, il y a davantage de tournantes, de filles séquestrées, de cadavres, de junkies, de recels, de trafics et de secrets de famille qu'il n'y a de groupes électrogènes.
Maintenant que tu es là, songe qu’il faut l’attraction lunaire pour orchestrer les marées… Songe aussi que les rochers sous nos pieds et « le gouffre mortel » juste derrière nous sont le résultat de la collision de plaques tectoniques… Songe que le Soleil est une colossale boule de feu indispensable à la vie sur Terre… Songe à tout ça et dis-moi ce que tu penses de ta vie à l’évocation de toutes ces vérités.
En plus, Il est coiffé comme un dessous de bras !
_Imagine le dépit, la colère de ce couple prêt à tout pour obtenir un enfant_ jusqu'à payer une GPA interdite... Comment ces gens-là ont-ils réagi à l'annonce du décès de leur bébé?
Louise sentit son coeur se fendre en deux. Elle comprenait parfaitement les réticences de Mégane : à y bien regarder, un film porno n'est rien d'autres qu'une passe sans fin, offertes à la concupiscence de centaines d'inconnus....
La somme des jours peut faire des années, et la somme des années peut rapidement faire une vie. Attendre, c'est un piège.
En définitive, le marquage a un pouvoir d’esclavagisme plus puissant qu’une chaîne : une chaîne peut être brisée, le branding, lui, ne disparaît jamais. Il est gravé sur la peau de manière indélébile, comme une marque d’identité.
D'après ce que j'entends de la bouche des autres filles, un ventre est une matrice lucrative, et un bébé, une marchandise comme une autre.
Est- ce qu'une mère peut haïr sa fille? Toi, tu as peut- être un avis sur la question… Moi, je sais… Moi, je suis la réponse. D'aussi loin que je me souvienne, je n'ai jamais vu dans les yeux de ma mère que la désolation de m'avoir enfantée. Rejet viscéral. Dégoût. Parce que je suis l'incarnation même de son drame…
Mais elle est très jolie, cette petite tache, lui avait-il murmuré en passant un doigt dessus. Laisse-moi te raconter comment cela s’est produit ! Figure toi que quand les fées se penchèrent sur ton berceau, elles trouvèrent le résultat de leur travail tellement réussi qu’elles ne purent réprimer l’envie de porter un toast ! La plus âgée des fées, qui devait avoir plus d’un million d’années, choisit pour l’occasion un champagne rosé d’un grand cru millésimé. Et Alors qu’elle trinqua joyeusement avec ses acolytes, une larme de champagne éclaboussa ton ventre… La plus jeune des fées en fut fort contrariée. « Voilà donc notre ouvrage rendu imparfait ! » s’exclama-t-elle rageusement. « Point du tout, rétorqua la doyenne, je vois ici la marque de notre félicité! Cette enfant est ainsi à nulle autre comparable: quiconque goûtera cette tâche sera à jamais ivre d’amour ! »
Je planifiais mes actions méthodiquement, avec en tête cette métaphore de la grenouille que l'on ébouillante, tout simplement en montant très progressivement la température de l'eau. J'allais être à la fois celui qui tourne la molette du gaz et celui qui extrait la grenouille de la casserole au moment ultime où elle comprend qu'elle va mourir et que totalement ankylosée, elle n'est plus à même d'effectuer le moindre mouvement pour se sauver.
L'absence des savoirs rudimentaires, comme la lecture et l'écriture, le non-accès à la culture - chansons, textes, peintures, films, informations et tutti quanti - rendait très difficile le développement d'une pensée autonome. Finalement, penser était un combat qui supposait la possession de certaines armes !
Manon semblait taillée dans le diamant d’une race supérieure et mystérieuse, affranchie des basses contingences de l’humanité crasse. Même la peur lui allait bien.
— Puisque tu en parles… Sache que Charles n’est pas au courant des menaces qui planent sur ma vie. Et que je ne veux pas qu’il le soit.
— Tu ne lui as rien dit ?
— Non.
— Mais enfin Manon, il a le droit de savoir, tu ne crois pas ? Il s’agit aussi de ses enfants !
Manon leva une main autoritaire.
— Je n’ai pas besoin d’un directeur de conscience, Élo. Je sais ce que je fais. Si je te dis que Charles n’a pas à savoir, c’est qu’il n’a pas à savoir.
Le ton n’était ni cinglant, ni défensif. Il était juste pétri de la certitude qui s’imposait à tous. Éloïse n’en ressentit pas moins la démonstration supplémentaire du diktat de sa sœur.
Une fois encore, je rêve de briser la malédiction de ma famille. Je devrais me venger. Détruire les Le Guen. Révéler tous leurs infâmes petits secrets…
Ma mère qui se tient à ma gauche réprime un haut-le-cœur quand les hommes basculent le cercueil en terre. Voilà, c’en est fini. Quelques minutes encore, et la dizaine de gens présents s’éparpille après avoir transmis ses condoléances. On ne s’attarde pas, même si ce départ prématuré et violent, c’est bien du malheur tout de même !
Vous avez déjà joué au Meccano, le jeu de construction ?
-Oui, évidemment. Et ?
-Donc vous avez déjà ouvert une boîte de ce jeu. Vis, pattes en fer percées, roues…. tous ces éléments sont en vrac au fond du carton et ça ne ressemble qu'à un vague amas de ferraille. Pourtant en assemblant les éléments de la bonne manière et dans le bon ordre, on construit la tour Eiffel, un camion, une voiture… En fait, c'est exactement ce qu'on est en train de faire avec nos deux affaires
— Mmm… Et la blessure à la poitrine ?
— C’est a priori la cause du décès, répondit Le Roc, prudent. D’après les premières constatations, la fille est morte d’une balle qui lui a perforé les côtes juste sous l’omoplate, a traversé le cœur avant de ressortir ici, expliqua-t-il en montrant la tache de sang. Je ne sais pas quel type d’arme peut faire ça, à vous de voir. En tout cas, les autres blessures sont relativement superficielles.
Ce disant, il remit ses gants et remonta légèrement la chemise de nuit, dévoilant des marques de griffures ou des hématomes.
— La fille en a un peu partout sur le corps. Bras, mains, mollets, cuisses. Seul le dos semble intact à première vue. Les genoux, comme vous le voyez, sont bien esquintés. Tous les ongles sont cassés ou retournés et il y a des traces de terre bien visibles sous ce qu’il en reste, poursuivit le légiste. La paume des mains est aussi très abîmée et, comme vous l’avez sûrement repéré, un des pieds est profondément entaillé.
— Elle a fui, commenta Agathe.
— Exactement, approuva Le Roc. Sur une distance assez longue, je pense, vu le nombre considérable d’entailles, d’abrasions et de griffures.
Une jeune femme blanche d’environ 25 ans reposait sur le dos. Cheveux longs et bruns dégringolant sur un visage qui avait dû être joli avant que la mort lui ravisse toute expression. Ses yeux grands ouverts, couleur noisette, légèrement vitreux, fixaient un point introuvable dans le feuillage de l’arbre qui l’ombrageait. Elle portait une sorte de longue chemise de nuit fabriquée dans un tissu épais et rugueux qui faisait penser aux vieux sacs de pommes de terre d’antan.