Je crois avoir bien failli passer à côté de ce roman.
Aussi exceptionnel soit-il - je le pressentais,
Aussi dithyrambique soit la critique – j’en avais lu une partie,
Je ne parvenais pas à avancer dans ma lecture.
J’ai traversé la première moitié du roman en me demandant, toutes les deux pages, si je n’allais pas m’arrêter ici.
Sauf qu’à chaque fois, un petit quelque chose m’incitait à persévérer :
un mot, une phrase, ou un chapitre tout entier.
*
Un Apeirogon, dont le nom évoque une figure possédant un nombre dénombrablement infini de côtés, approche de la forme d’un cercle mais comprend un petit fragment qui, une fois grossi, ressemble à une ligne droite.
Cela signifie que l’on peut atteindre n’importe quel point à l’intérieur du tout,
que tout est atteignable.
Que tout est possible,
même ce qui semble ne pas l’être.
C’est sans doute ce que Colum McCann souhaitait montrer entre les pages de cette admirable fresque. Qu’au cœur de cette tragédie immense et infinie, des histoires d’amitié vraies, sincères, étaient possibles.
Qu’une exploration complète, toute à la fois historique, politique, philosophique, religieuse, photographique, musicale, pouvait nous permettre de voir. De comprendre. Pour échanger. Et entrevoir un nouvel avenir.
Je le disais, ma lecture d’Apeirogon a d’abord été difficile. J’étais gênée par le rythme de la narration, par cette succession de chapitres extrêmement courts – parfois composés d’une unique phrase -, entremêlant plusieurs histoires, plusieurs époques, plusieurs niveaux de lecture, plusieurs éléments narratifs. Je n’arrivais pas à me sentir partie prenante de ma lecture - actrice en un sens. Je ne cessais de perdre le fil, d’attendre je ne savais trop quoi.
Mais petit à petit, j’ai commencé à réaliser la force de cette narration. De ce rythme.
À la fois légers comme des balles de ping-pong et lourds de toute la misère d’un conflit sans fin, les chapitres se sont mis à rebondir et résonner les uns avec les autres
avec plus d’échos.
Ils prenaient de l’ampleur dans mon esprit, s’étiraient le long de ma colonne vertébrale, inquiétaient mes nerfs. J’ai commencé à lire et écouter tout ce que je trouvais sur le conflit israélo-palestinien, mes interrogations se sont transformées en colère, j’étais touchée – le mot est faible - au cœur par cette situation aussi absconse qu’injuste,
cause de tant de maux.
Et puis il y a l’Ecriture de Colum McCann ! Une écriture limpide, poétique, courageuse, et superbe de grâce et de sobriété.
Une écriture renversante, capable de faire tomber les murs et d’ériger des ponts,
En moins de temps qu’il n’en faut, c’est certain, pour donner corps à un projet de l’envergure d’Apeirogon.
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