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Citations de Dino Buzzati (624)


Au volant de la "Bull 370", je suis plus jeune et plus fort, je suis devenu aussi plus beau, moi qui ai toujours tellement souffert de mon physique. Je me suis composé une expression désinvolte, hardie et plutôt moderne, les femmes devraient me regarder avec plaisir et me désirer. Si je ralentis et que je m'arrête, les belles filles vont se jeter à l'abordage, quelle fatigue d'avoir à se défendre de leurs pluies de baisers.
[...]
Ce qui est merveilleux surtout, c'est mon assurance quand je roule dans ma "Bull". Jusqu'à hier je n'avais pas la moindre importance, maintenant je suis devenu très important, je pense même que je suis l'homme le plus important, à vrai dire l'unique de la capitale toute entière, il n'y a pas de superlatifs assez forts.

La confiance en moi, le bien-être physique, une charge d'énergie sauvage, la superbe athlétique – j'ai des pectoraux comme la porte du Dôme, j'ai envie de faire sentir qui je suis j'ai envie de chercher querelle, pensez donc ! moi qui à la seule idée d'une discussion en public me sentais défaillir.
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C'est là que dorment coude à coude, pourrait-on dire, les grands du Milan industriel, les puissants, les redoutables, les légendaires, les infatigables qui tous les matins de l'année sans exception à sept heures précises donnaient l'exemple, et maintenant dorment..... En ce très bel après-midi qui vous appelle à la mer, à la forêt, dans les prés, vous autres les magnats du fer, de l'acier, du textile, du papier, des appareils électroménagers, que faites-vous enfermés là-dedans ? Que faites-vous tout seuls, sans secrétaire, sans conseil d'administration, sans personnel permanent ou auxiliaire, sans femme enfants ou parents ? Peut-on vous demander, messieurs, si le poids de tant de marbre vous est léger ?
(Week-end)
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Ainsi, se déroulait à son insu la fuite du temps.
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Ce fut un matin de septembre que Giovanni Drogo, qui venait d'être promu officier, quitta la ville pour se rendre au fort Bastiani, sa première affectation.
Il faisait encore nuit quand on le réveilla et qu’il endossa pour la première fois son uniforme de lieutenant. Une fois habillé, il se regarda dans la glace, à la lueur d'une lampe à pétrole, mais sans éprouver la joie qu'il avait espérée. Dans la maison régnait un grand silence, rompu seulement par les petits bruits qui venaient de la chambre voisine, où sa mère était en train de se lever pour lui dire adieu.
C'était là le jour qu'il attendait depuis des années, le commencement de sa vraie vie. Pensant aux journées lugubres de l'académie militaire, il se rappela les tristes soirées d'étude, où il entendait passer dans la rue les gens libres et que l'on pouvait croire heureux ; il se rappela aussi les réveils en plein hiver dans les chambrées glaciales où stagnait le cauchemar des punitions, et l'angoisse qui le prenait à l'idée de ne jamais voir finir ces jours dont il faisait quotidiennement le compte.
Maintenant enfin, tout cela était du passé, il était officier, il n'avait plus à pâlir sur les livres ni à trembler à la voix du sergent. Tous ces jours, qui lui avaient paru odieux, étaient désormais finis pour toujours et formaient des mois et des années qui jamais plus ne reviendraient. Oui, maintenant, il était officier, il allait avoir de l'argent, de jolies femmes le regarderaient peut-être, mais, au fond, il s'en rendit compte, ses plus belles années, sa première jeunesse, étaient probablement terminées. Et, considérant fixement le miroir, il voyait un sourire forcé sur le visage qu'il avait en vain chercher à aimer.
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La mort physique est un phénomène éternel et au fond extrêmement banal. Mais il y a une autre mort, qui quelquefois est encore pire. L'abandon de la personnalité, le mimétisme par habitude, la capitulation devant le milieu, le renoncement à soi-même... Mais regarde un peu autour de toi. Mais parle avec les gens. Mais ne te rends-tu pas compte qu'au moins soixante pour cent d'entre eux sont morts ? Et le nombre augmente chaque année. Éteints, nivelés, asservis. Ils désirent tous la même chose, il font le même discours, ils pensent tous la même chose, exactement la même. Ignoble civilisation de masse.

- Chez le médecin -
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Quel poids, la présence de Dieu, quand on ne la désire pas!
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La neige tombait du ciel, très drue, blanchissant les terrasses. En la regardant, Drogo éprouva avec plus d'acuité son angoisse habituelle; en vain cherchait-il à la chasser en pensant à sa jeunesse, aux très nombreuses années qui lui restaient encore à vivre. Inexplicablement, le temps s'était mis à s'enfuir de plus en plus vite, engloutissant un jour après l'autre. Il suffisait de regarder autour de soi et déjà la nuit tombait, le soleil disparaissait à l'horizon et reparaissait de l'autre côté pour éclaircir un monde couvert de neige.
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page 206

Et pourtant un jour, il s'est aperçu que, depuis assez longtemps, il n'allait pas galoper sur l'esplanade, derrière le fort. Il s'est même aperçu qu'il n'en avait aucune envie et que, ces derniers mois ( Dieu sait quand exactement ?) , il ne montait plus les escaliers quatre à quatre. Bêtises, a-t-il pensé; physiquement, il se sentait toujours le même, il n'y avait aucun doute, le tout était de recommencer; se faire examiner eût été ridicule et superflu.
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Littérature, art ?... tout ça c'est des grands mots..,, Mais l'art au jour d'aujourd'hui ne peut être qu'une denrée, comme un bifteck, un parfum, un litre de vin. De quel art s'occupent les gens ? Regarde la marée montante qui est en train de tout submerger. De quoi est-elle faite ? De chansons, de chansonnettes, de paroliers, de musiquette... bref d'une marchandise d'usage courant. Voilà la gloire. Tu as beau écrire, toi, des romans très intelligents et même géniaux, le dernier des yéyés t'écrasera sous le poids de ses triomphes. Le public va droit au solide, à ce qui lui donne un plaisir matériel, palpable, immédiat. Et qui ne lui coûte pas de fatigue. Et qui ne fasse pas travailler le cerveau...
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L'histoire de Del Colle a fait le tour de toutes les vallées. « Il y a des bandits sur les montagnes ! » crie la rumeur publique. « Qu'attend-on pour leur donner la chasse, pour les faire prisonniers ? » [...] Aussitôt certains décrochent leur fusil du mur, le nettoient, achètent des cartouches. Une tache allongée demeure sur le papier peint, à l'endroit où le fusil était accroché. Et pourtant, la dernière fois qu'on l'avait utilisé, n'était-ce pas à peine hier ? Le canon s'est déjà rouillé à l'intérieur. À peine hier, et tout lentement la tache s'est inscrite sur le mur. C'est ainsi que le temps passe.
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Tout ce qui est dans le monde inanimé nous fascine, les bois, les plaines et les fleuves, les montagnes, les océans, les vallées, les steppes, plus encore, plus encore, les villes, les palais, les pierres, plus encore, le ciel, le vent de la montagne, les tempêtes, plus encore, la neige, plus encore, la nuit, les étoiles, le vent, toutes ces choses indifférentes et vides par elles-mêmes, se chargent d'une signification humaine dans la mesure où, sans que nous en prenions conscience, elles contiennent un pressentiment de l'amour. (p.141)
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A un certain âge, espérer demande un trop gros effort .
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La troisième guerre mondiale, que l'on avait tellement redoutée, eut la durée exacte prévue par les techniciens militaires: moins de vingt-quatre heures. Mais le déroulement du conflit démentit toutes les prophéties. Entre autres, il laissa les choses exactement comme auparavant. (L'Arme secrète)
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Un religieux du nom de Célestin s'était fait ermite et était allé vivre au coeur de la métropole, là où la solitude des coeurs est la plus grande et la tentation de Dieu la plus forte. Car si la force des déserts de l'Orient faits de pierre, de sable et de soleil, où l'homme le plus obtu arrive à prendre conscience de sa propre petitesse devant la grandeur de la création et les abîmes de l'éternité, est merveilleuse, plus puissant encore est le désert des villes fait de multitudes, de vacarme, de roues, d'asphalte, de lumières électriques et de pendules qui marchent toutes ensemble et prononcent toutes au même instant la même condamnation.
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Jusqu'alors, il avait avancé avec l'insouciance de la première jeunesse, sur une route qui, quand on est enfant, semble infinie, où les années s'écoulent lentes et légères, si bien que nul ne s'aperçoit de leur fuite.
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Tronk, à qui Giovanni avait tout à l'heure demandé des renseignements, lui avait fait comprendre que la bonne règle était de rester éveillé.
Au lieu de cela, Giovanni Drogo, étendu sur le petit lit, hors du halo de la lampe à pétrole, fut, tandis qu'il songeait à sa vie, pris soudain par le sommeil. Et cependant, cette nuit-là justement - oh! s'il l'avait su, peut-être n'eût-il pas eu envie de dormir - cette nuit-là, justement, commençait pour lui l'irréparable fuite du temps.
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"- [...] que toi et des milliers d'autres, vous passiez votre vie à écrire des histoires qui n'ont jamais existé, et qu'il y ait des éditeurs pour les imprimer et des gens pour les acheter, et que vous fassiez fortune, et que les journaux en parlent, et que des critiques par-dessus le marché en discutent en long et en large dans des articles interminables, et que ces articles soient imprimés, et que l'on en parle dans les salons... tout ça pour des histoires inventées de fond en comble... Mais est-ce que ça ne te semble pas, à toi aussi une folie à l'époque de la bombe atomique et des spoutniks ? Comment une telle farce peut-elle encore se poursuivre ?
- Je ne sais pas."
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Voici le texte de la "quatrième de couverture" des deux premiers romans du grand Dino BUZZATI : "Bàrnabo des montagnes" ["Bàrnabo delle montagne", 1933] et "Le secret du Bosco Vecchio" [" Il segreto del bosco vecchio" , 1935], si heureusement réunis dans cette toute récente édition de poche en langue française (2013) :

" La surprise et l'envoûtement. Voilà les deux ressorts des récits de Dino Buzzati pour traiter les thèmes qui lui sont chers, tels que la fuite du temps, la fatalité du destin, l'absurde condition humaine. Ils sont tous énoncés dès "Bàrnabo des montagnes", son premier livre, et s'y déploient déjà avec génie, faisant plus que jamais écho à cette terrible et angoissante question : quel est le sens de notre vie ?

La quête de Bàrnabo est la quête de ce sens, ce fondement vital : affecté parmi des gardes forestiers pour veiller sur un dépôt d'explosifs, il est contraint à la fuite après une attaque de contrebandiers et est démis de ses fonctions. Des années plus tard, quittant une vie établie et confortable, il retourne dans les montagnes et regagne son poste. La poudrière a été déplacée, les gardes forestiers renvoyés dans la plaine, mais l'essentiel n'est pas là. Dans son appartenance irréductible à ce lieu, Bàrnabo célèbre un culte, une religion qui prête enfin un sens à sa vie.

Rassemblés dans cette édition, "Bàrnabo des montagnes" et "Le Secret du Bosco Vecchio", fable sur la perte de l'enfance, illustrent la fragilité de nos certitudes matérielles et philosophiques lorsqu'elles sont inévitablement confrontées à l'absurde. "
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Peu à peu, sa confiance diminuait. Il est difficile de croire à quelque chose quand on est seul et que l’on ne peut en parler avec personne. Juste à cette époque, Drogo s’aperçut à quel point les hommes restent toujours séparés l’un de l’autre, malgré l’affection qu’ils peuvent se porter ; il s’aperçut que, si quelqu’un souffre, sa douleur lui appartient en propre, nul ne peut l’en décharger si légèrement que ce soit ; il s’aperçut que, si quelqu’un souffre, autrui ne souffre pas pour cela, même si son amour est grand, et c’est cela qui fait la solitude de la vie.
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Délicieuse est la volupté du malheur d'autrui quand on est si nombreux et qu'on se sent solidaires dans la contagion.
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