Citations de Elie Wiesel (315)
Mais, c'est simple : je le haïssais. Un point, c'est tout. La haine, relevant de l'absolu, clarifie tout acte humain, même lorsqu'elle l'entoure d'inhumain.
Jamais je n’oublierai cette nuit, la première nuit au camp qui a fait de ma vie une nuit longue et sept fois verrouillée.
Jamais je n’oublierai cette fumée.
Jamais je n’oublierai les petits visages des enfants dont j'avais vu les corps se transformer en volutes sous un azur muet.
Jamais je n’oublierai ces flammes qui consumèrent pour toujours ma Foi.
Jamais je n’oublierai ce silence nocturne qui ma privé pour l'éternité du désir de vivre.
Jamais je n’oublierai ces instants qui assassinèrent mon Dieu et mon âme, et mes rêves qui prirent le visage du désert.
Jamais je n’oublierai cela, même si j'étais condamné à vivre aussi longtemps que Dieu lui même.
JAMAIS.
L'être humain qui vit dans le temps ne connaît qu'une seule voie: vivre dans le présent en y épuisant toutes ses ressources, tous ses ressorts. Faire de chaque journée une source de grâce, de chaque heure un accomplissement, de chaque clin d’œil une invitation à l'amitié. De chaque sourire une promesse? Tant que le rideau n'est pas tombé, tout reste possible. Quelques part sur la terre, chacun joue sa propre pièce; elle fait pleurer ou rire aux éclats un inconnu ici et un autre là-bas. Leur lien est la récompense du poète, la vie un couloir entre deux abîmes?
La tempête a soufflé et les êtres ne sont plus ce qu'ils étaient. J'ai grandi, j'ai mûri. J'ai marché dans la forêt, je me suis égaré. Trop tard pour revenir en arrière. La vie, c'est cela : un impossible retour.
« J’ai vu d’autres pendaisons. Je n’ai jamais vu un seul de ces condamnés pleurer. Il y avait longtemps que ces corps desséchés avaient oublié la saveur amère des larmes. »
En quelques secondes nous avions cessé d’être des hommes."
Tu es la somme de ce que nous étions, m'expliqua le petit garçon qui ressemblait à celui que j'avais jadis été. Alors, c'est un peu nous qui exécuterons John Dawson demain à l'aube. Tu ne peux pas le faire sans nous. Tu comprends maintenant?
Je commençais à comprendre. Un acte absolu, comme celui de donner la mort, engage non seulement l'être lui-même mais aussi tous ceux qui ont participé à sa formation. En tuant un homme, je faisais d'eux des assassins.
En vérité,pour le Juif que je suis,Auschwitz représente une tragédie humaine,mais aussi-et surtout- un scandale théologique.
J'ai beaucoup appris sur moi même et mon environnement.Notamment, quelorsque le corps devient prisonnier de sa douleur,une petite pillule ou une injection est plus efficace que la pensée philosophique la plus brillante.
"Alors, comme le voyageur, qui, arrivé au sommet de la montagne, entrevoit le gouffre à travers les nuages est saisi d'un éblouissement angoissant, le vieil homme en moi fut pris d'un désir fou de danser."
"Pour moi, il était le commencement comme il était la fin. Mon rêve inavoué ? Redevenir enfant pour ne pas souffrir de la honte des adultes."
"Si l'on m'avait demandé ce que je ferais le jour de la libération, j'aurais répondu : crier, crier de toutes mes forces, dire au monde que moi, je suis moi, et que si lui est sourd, moi, je ne suis pas muet."
On continuait à marcher entre les barbelés électrifiés. A chaque pas, une pancarte blanche avec un crâne de mort noir qui nous regardait. Une inscription : " Attention ! Danger de mort ". Dérision : y avait-il ici un seul endroit où on ne fût pas en danger de mort ? (Chapitre III - page 67).
L'homme hait son ennemi parce qu'il hait sa propre haine. Il se dit : c'est lui, l'ennemi, qui fait de moi un être capable de haine ; je le hais, non parce qu'il est mon ennemi, non parce qu'il me hait, mais parce qu'il engendre ma haine.
Quelqu'un se mit à réciter le Kaddich, la prière des morts. Je ne sais pas s'il est déjà arrivé, dans la longue histoire du peuple juif, que les hommes récitent la prière des morts sur eux-mêmes.
- Vous voyez, là-bas, la cheminée? La voyez-vous?
Les flammes, les voyez-vous ? (Oui, nous
les voyions, les flammes). Là-bas, c'est là-bas
qu'on vous conduira. C'est là-bas, votre tombe.
Vous n'avez pas encore compris? Fils de chiens,
vous ne comprenez donc rien? On va vous brûler
! Vous calciner! Vous réduire en cendres !
Je voulais me voir dans le miroir qui était suspendu au mur d’en face. Je ne m’étais plus vu depuis le ghetto.
Du fond du miroir, un cadavre me contemplait.
Son regard dans mes yeux ne me quitte plus.
L’obscurité était totale. J’entendais seulement ce violon et c’était comme si l’âme de Juliek lui servait d’archet. Il jouait sa vie. Toute sa vie glissait sur les cordes. Ses espoirs perdus. Son passé calciné, son avenir éteint. Il jouait ce que jamais plus il n’allait jouer.
Nuit. Personne ne priait pour que la nuit passe vite. Les étoiles n’étaient que les étincelles du grand feu qui nous dévorait. Que ce feu vienne à s’éteindre un jour, il n’y aurait plus rien au ciel, il n’y aurait que des étoiles éteintes, des yeux morts.