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Citations de François-Henri Désérable (577)


Tout est écrit et, de fait, sur Evariste on a beaucoup écrit. On ne compte plus les essais, les biographies, les témoignages de contemporains. On ne compte plus les colloques, les mémoires, les thèses, les articles. On a dit tout et son contraire : on s'est souvent trompé. On a dit à tort qu'il fut victime d'un complot ; à raison qu'il fut aux mathématiques ce qu'à la poésie fut Arthur Rimbaud : un Rimbaud qui n'aurait pas eu le temps de nous envoyer la Saison à la gueule ; qui aurait cassé sa pipe après Le bateau ivre, les vingt-cinq quatrains depuis le fin fond des Ardennes envoyés à la gueule de Verlaine en même temps qu'à celle de Paris ; un Rimbaud qui n'aurait connu ni Harar ni Aden ni les dents d'éléphant ni la scie sur la jambe à Marseille : parce qu'en vérité c'est la fin du dormeur que ce Rimbaud a connue, c'est le trou de verdure, la nuque baignant dans le frais cresson bleu, le soleil, la main sur la poitrine. Le trou rouge au côté droit.
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L'ARCHE DE LA COLOMBE

Maudite
soit l'arrière-grand-mère
de l'épouse du père
de celui qui fit l'encoche dans l'écorce du tronc
de l'hévéa géant d'où commença l'extraction
du latex qui devait donner le caoutchouc
à partir duquel furent produites les roues
de la bétonnière grâce à quoi l'on put
faire le ciment du trottoir de la rue
dans laquelle ton père
a rencontré ta mère (p. 155).
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Le sonnet, c'est un peu comme l'amour conjugal : sa beauté naît des contraintes qui lui sont inhérentes. Pour le sonnet : nombre invariable de vers, invariablement répartis en deux quatrains suivis de deux tercets, nombre équivalent de syllabes pour chaque vers, alternance des rimes féminines et masculines, etc. Pour l'amour conjugal : pesanteur du tête-à-tête quotidien, inévitable effet de routine, inopportune irruption du trivial, etc. Et c'est en dépit de cela qu'il faut tirer du beau, voire du sublime - et c'est, inversement, ce qu'il y a de si grisant mais aussi d'un peu facile dans le vers libre et l'adultère, où l'abolition des contraintes donne le sentiment d'une liberté suprême, absolue, ivre d'elle-même, or que vaut la liberté, j'ai demandé, dépourvue des contraintes qui la bornent ? Vous avez trois heures (p. 86).
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Alors parlons politique, puisqu'il nous y oblige. Au pouvoir, on le sait, il y avait le roi, Louis-Philippe, or le roi, on le sait aussi, ne faisait que régner ; il ne gouvernait pas. Celui qui gouvernait, alors, s'appelait Casimir Perier, banquier devenu président du Conseil, chef de file du parti de la Résistance qui au-dedans voulait l'ordre sans sacrifice pour la liberté, et au-dehors la paix sans qu'il en coûtât rien à l'honneur. Et de fait il eut et l'ordre et la paix, mais au prix de la liberté et dans le déshonneur : il matait les révoltes à grands coups de grandes seringues à clystère, de sabres et de fusils, à grand renfort de fantassins et de dragons suppléant la Garde nationale, ce legs de 89 habilement transformé en milice de bourgeois bedonnants qui préféraient une injusdce à un désordre.
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On sait qu'Evariste — d'emblée appelons-le Evariste — eut pour père Gabriel Galois, et de Gabriel Galois on ne sait pas grand-chose, si ce n'est qu'il fut le père d’Evariste (voyez comme une phrase, sous des dehors anodins, peut regorger d'indicible cruauté : que l'on puisse, après sa mort, réduire à sa seule qualité de père un homme qui vécut cinquante-quatre années, voilà qui devrait inciter les autres à cesser tout commerce charnel — et au diable l'humanité).
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François-Henri Désérable
Il ne faut que deux choses dans la vie: de bonnes chaussures et un bon lit. On passe deux tiers de son temps dans les unes, un tiers dans l'autre.
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Delacroix a écrit quelque part, dans son journal peut-être — lorsqu'il ne peignait pas La Mort de Sardanapale ou La Liberté guidant le peuple, Delacroix troquait son pinceau pour une plume et, d’une inain lissant ses moustaches de maharaja, tenait de l'autre un journal —, que « la pratique d'un art demande un homme tout entier ».
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Comment distinguer ce qui relève de la littérature de ce qui n'en est pas ? "Si l'on ne peut trouver de jouissance à lire et relire un livre, disait Oscar Wilde, il n'est d'aucune utilité de le lire même une fois." C'est un critère subjectif, excessif, largement excessif, tout aussi largement exclusif ; j'y souscris : chaque fois qu'il y a désir de relecture, il y a littérature.
J'ai lu et relu La Promesse de l'aube...
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Si l’on voyage, ça n’est pas tant pour s’émerveiller d’autres lieux : c’est pour en revenir avec des yeux différents. Et dilater le temps qui passe : chez soi, les heures nous filent entre les doigts ; en voyage, un seul jour a l’épaisseur d’une semaine, une semaine d’un mois, un mois d’une année, une année d’une vie tout entière.
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C’est peut-être ça et rien de plus, être écrivain : fermer les yeux pour les garder grands ouverts, n’avoir ni Dieu, ni maître et nulle autre servitude que la page à écrire, se soustraire au monde pour lui imprimer sa propre illusion. P 121
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Gary écrit le nom de Piekielny sur la page. Le fait-il naître ? Renaître ? Jaillir du tréfonds de sa mémoire ? Ou bien cela vient-il de plus loin, de l’imaginaire se déployant par miracle pour assujettir le réel ? Je ne sais pas. Il est tout-puissant. Il écrit. Il ne pense qu’à cela. Écrire. Tenir le monde en vingt-six lettres et le faire ployer sous sa loi.
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Et il lui a expliqué qu'il y avait deux sortes de peintres, ceux qui s'adressent à l'oeil, et ceux qui s'adressent à l'esprit : les premiers peignent comme on peint, et les seconds comme on pense.
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Il ne faut pas avoir peur du bonheur, tu sais, c'est seulement un bon moment à passer.
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Je songeais qu’il faudrait établir une typologie du silence, les décrire puis les classer, du silence suggestif au silence oppressant, du silence solennel au silence désolé, du silence monotone d’un coin de campagne en hiver au silence pieux des fidèles à l’église, du silence éploré des chambres funéraires au silence contemplatif des amants au clair de lune, tous, il faudrait les décrire, jusqu’aux silences radiophoniques de Tina. 
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Alors, lieutenant, on passe du bon temps dans les bras des Anglaises ? C’est que, mon général, a dit Gary, j’ai toujours considéré qu’il était de mon devoir de défendre l’honneur de la France, à l’arrière comme au front. De Gaulle a esquissé un sourire – réprimé dans l’instant : gardez vos forces, la guerre est gagnée mais elle n’est pas finie. Repos.
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Gary, on le voit, ne faisait pas la guerre. Qu'est-ce que c'est d'ailleurs que la guerre ? Le massacre de gens qui ne se connaissent pas, disait Paul Valéry, au profit de gens qui se connaissent mais ne se massacrent pas. Un amplificateur d'héroïsme et de bassesse. La meilleure part de hommes, et la pire. La fureur de vivre décuplée par l’imminence de la mort. et aussi, pour les Français de Londres, un salon mondain sous les bombes.
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Au parc Kosar, les branches des arbres étaient nues, leurs feuilles jonchaient la pelouse : l'hiver était là, mais l'hiver était doux, comme un post-scriptum de l'automne.
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De même que l’écrivain pour qui une phrase n’est pas une phrase tant qu’elle n’est pas la phrase, pour qui le texte est corps et souffle, rythme et puissance, grâce et poésie, pèse chaque mot avant de le placer dans l’écrin de ses pages, s’incarne dans le verbe, est le Verbe en personne, le mathématicien qui dans une simple formule ne perçoit pas autre chose qu’une suite de nombres et de symboles obscurs, mystérieux, mais un moyen de se soustraire au monde pour mieux s’en emparer, d’échapper au réel pour mieux l’assujettir, ce mathématicien-là, mademoiselle, s’incarne dans le nombre comme l’écrivain dans le verbe, est le Nombre en personne. Évariste, quand il fait des mathématiques - et à cette époque il ne fait que cela - est le Nombre en personne.
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J’avais tout, disait-il. Et puis il nuançait : je croyais tout avoir, elle n’est pas venue combler un manque ; elle est venue en créer un. (p.80)
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En cinq jours de pure exaltation je lus Belle du Seigneur, et dès lors je vécus entouré de livres.
(..)
On me croyait sur les bancs de la fac : j'étais à la bibliothèque où je lisais, j'écrivais. Je ne savais pas, alors, que ma vie tout entière allait tenir dans ces deux verbes, au point qu'elle se confondrait avec eux.
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