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Citations de François-Henri Désérable (577)


[...] il est resté dans sa chambre, à ne rien faire, à rêver, à se souvenir, à mettre des mots les uns derrière les autres, à les faire danser à la queue leu leu dans une grande frénésie, et c'est peut-être cela et rien de plus, être écrivain : fermer les yeux pour les garder grands ouverts, n'avoir ni Dieu ni maître et nulle autre servitude que la page à écrire, se soustraire au monde pour lui imposer sa propre illusion.
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On croit que l'écrivain choisit toujours le sujet de ses livres. [...] Or ce n'est pas toujours le cas, en tout cas pas souvent, pour ainsi dire jamais. Mais après tout, s'il plaît à l'écrivain de penser qu'en ce domaine il est bel et bien tout puissant, que rien n'est à l’œuvre sinon sa seule volonté, pure, inaltérable, dénuée de contraintes, au nom de quoi viendrait-on lui ôter ce plaisir ? Pourquoi ne pas laisser se bercer d'illusions ? Faut-il vraiment lui dire qu'en vérité c'est le sujet qui le choisit, bien plus qu'il ne choisit son sujet ? Des évènements hétéroclites, en apparence anodins et dont la logique lui échappe, se succèdent dans un désordre trompeur ; peu à peu, voilà qu'ils s'agencent parfaitement, qu'ils font sens, l'idée germe, chemine et l'écrivain, frappé par l'évidence, se frappe le front, eurêka, il tient son sujet; le livre est là, il peut déjà le lire en esprit : il n'y a plus qu'à l'écrire.
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Est-ce que les dignitaires du régime ont lu 1984 ? En tout cas, ils en ont assimilé la leçon : la mesure la plus efficace pour étouffer les velléités de contestation intérieures, c’est encore de mobiliser sa population contre un ennemi extérieur. Dans la dystopie orwellienne, quand l’Océania n’est pas en guerre contre l’Eurasia, c’est qu’elle est en guerre contre l’Estasia, l’important, c’est d’avoir toujours un combat à mener, un ennemi à honnir. En Iran, l’Irak de Saddam Hussein a tenu ce rôle pendant la décennie 1980 (c’est grâce à l’invasion de l’Iran par l’Irak que Khomeini a pu consolider le régime). Aujourd’hui, le rival dans la région c’est l’Arabie saoudite, et puis bien sûr il y a « le petit Satan » et « le grand Satan », ennemis héréditaires de la République islamique. Et s’il paraît improbable d’imaginer Israël ou les États-Unis engager les hostilités, tout l’enjeu est de le faire croire à la population pour la maintenir dans un état de péril imminent. Résultat : service militaire de dix-huit à vingt-quatre mois, afin d’exacerber la fibre patriotique de la jeunesse iranienne. Obligatoire, sauf exception (si par exemple votre père est mort et que vous avez charge de famille), mais sinon, pas le choix. Ou plutôt, si, vous avez le choix, vous pouvez échapper au service militaire, mais alors vous serez considéré comme déserteur, ce qui veut dire privé d’un certain nombre de droits : celui de voyager à l’étranger (on ne vous délivrera pas de passeport), celui d’acheter une voiture, celui d’acheter une maison, celui de travailler dans la fonction publique, celui de bénéficier d’une assurance maladie, etc. Sauf à vivre en marginal jusqu’à la fin de ses jours, pour un jeune Iranien, remplir ses obligations militaires, ça fait partie des emmerdements auxquels on peut difficilement se soustraire, comme pour une jeune Iranienne le port du voile dans la rue.
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Combien de temps faudra-t-il aux Iraniens pour se débarrasser de la république Islamique ? On peut prendre des paris : un mois, deux mois, avant la fin d’année… On peut se perdre en conjectures. On peut aussi être honnête et dire la vérité. Et la vérité, c’est que personne n’en sait rien. Mais chacun sait une chose : derrière chaque personne qui meurt battent mille cœurs.
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Vint l’oral de français. (…) Il y eut un miracle. Que pouvez-vous me dire sur le chapitre VII de La Promesse d l’aube ». (…) Vous savez précisa l’examinatrice, ce passage sur un certain M. Piekielny, dans le livre de Romain Gary ? Alors je lui contai la vie de l’auteur, j’analysai le texte et j’en retraçais la génèse, je parlai longuement de ce M. Piekielny, et j’agrémentai le tout de figures de style, métaphores, périphrases et litotes (je donnai même un zeugma en exemple)
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Si l'on voyage, ça n'est pas tant pour s'émerveiller d'autres lieux; c'est pour en revenir avec des yeux différents.
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Il y a une volupté à se laisser ensevelir sous les mots.
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Il y eut des examens, des résultats, des éloges : je rougis comme un Dalloz et m’enivrai de gloriole.
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Il ne parlait jamais de la guerre : elle lui avait coûté l’œil droit (il lui restait le gauche), le genou gauche (il lui restait le droit) et surtout sa jeunesse (et cela, vois-tu, disait-il, après trois années passées sous le drapeau puis cinq autres sous les verrous, il ne m’en restait rien).
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Il ne faut pas avoir peur du bonheur, tu sais, c'est seulement un bon moment à passer
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Et dans ses prières du matin il [M. Piekielny] ne Lui demandait qu'une chose, une toute petite chose dérisoire et grandiose et qui m'émeut infiniment : que les damnés de la Terre fussent connus, ne serait-ce qu'un instant, de ceux qui en étaient les maîtres.
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Le mathématicien est un aveugle dans une pièce noire cherchant à voir un chat noir qui souvent n'est pas là.
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Connaît-on vraiment jamais ses amis ? Parfois on ne se comprend plus, on avance à l’aveugle, on se heurte à des murs, jusqu’au jour où l’on finit par se dire mutuellement ce qu’on a sur le cœur, comme on craque une allumette dans la nuit : pas pour y voir plus clair, mais pour mesurer la part de ténèbres que chacun porte en soi. 
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Quelle crainte peut bien vous inspire un policier en claquettes ?
- Qui selon vous, va remporter la coupe du monde ?
Tout ce cinéma pour briser le silence avec une question à laquelle vous n''étiez pas préparé. Une heure plus tard, et malgré des points de vue divergents (lui penche pour le Brésil et vous pour la France, évidement pour la France), votre visa est prolongé : vous pouvez rester en Iran, et pour longtemps.
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— Monsieur Désérable ?Je n’ai pas pour habitude de filtrer les appels des numéros inconnus. Il y a, dans l’inconnu, une part de mystère qui demande à être élucidée. Même si le plus souvent le mystère est un démarcheur téléphonique ou un emmerdeur dans le genre, quand sur l’écran de mon téléphone s’affiche un numéro inconnu, je décroche.

— Bonjour, c’est le centre de crise du ministère des Affaires étrangères. Vous avez informé l’ambassade de France d’un projet de voyage en Iran. Je vous le dis tout net : renoncez-y. Il est formellement déconseillé, vous m’entendez, formellement déconseillé de se rendre en Iran. Nous avons placé tout le territoire en zone rouge, il n’y a quasiment plus de Français sur place. Ceux qui y sont encore sont en train de rentrer, et ceux qui ne rentrent pas, c’est qu’ils sont en prison. À l’heure où je vous parle, nous avons plusieurs de nos compatriotes sous les verrous. Le risque d’arrestation et de détention arbitraire est très élevé, vous m’entendez, très, très élevé. S’ils vous arrêtent, ils monteront un dossier de toutes pièces, et ils vous condamneront pour Dieu sait quoi, espionnage, propagande, collusion en vue de porter atteinte à la sécurité nationale, ils trouveront un motif – ils trouvent toujours un motif. Vous deviendrez un pion, une monnaie d’échange, on ne pourra pas vous accorder la protection consulaire, on ne pourra pas vous rendre visite en prison, on ne pourra pas faire grand-chose, en somme, et vous y resterez des années : un an, deux ans, dix ans peut-être, allez savoir, vous m’entendez, monsieur Désérable ?

— C’est que…

— L’Iran n’est pas un État de droit, monsieur Désérable. Renoncez à votre voyage.

— J’aimerais bien, mais…Au même moment, dans un haut-parleur, une autre voix grésillait : « Madame, monsieur, bonjour, je suis votre cheffe de cabine. Le commandant de bord et l’ensemble de l’équipage ont le plaisir de vous accueillir à bord de ce vol à destination de Téhéran. Veuillez attacher votre ceinture, éteindre vos appareils électroniques et mettre votre téléphone portable en mode avion… »

— Monsieur Désérable ? Monsieur Désérable ?


(INCIPIT)
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Verlaine et Rimbaud – inestimable viatique qu’elle n’avait même plus besoin de lire, elle les connaissait, leurs poèmes, elle pouvait les dire de mémoire, peut-être pas tous mais la plupart, et pas seulement les plus connus, pas seulement Chanson d’automne ou Sensation, et quand on s’étonnait qu’elle les sût par cœur, elle disait simplement, en se touchant la poitrine : mais je n’y suis pour rien, c’est là qu’ils vont. 
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La mort en face, voilà ce qu'elle attendait d'un écrivain : qu'il écrive comme on rédige un testament, en regardant la mort en face.
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[...] et c'est peut-être cela et rien de plus, être écrivain : fermer les yeux pour les garder grands ouverts, n'avoir ni Dieu ni maître et nulle autre servitude que la page à écrire, se soustraire au monde pour lui imposer sa propre illusion.
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Qui veut naviguer revêt un tricot rayé, une vareuse et, par coquetterie, se couvre le chef d'un bonnet blanc et bleu - lequel, pour plus de fantaisie, peut être surmonté d'un pompon rouge. Qui s'apprête à plonger enfile une combinaison, chausse des palmes, s'équipe d'un masque et se munit d'un tuba. Qui compte mener une enquête se couvre d'un trench, coiffe un chapeau melon, tire quelques bouffées d'une pipe en écumé et se pourvoit d'une loupe - ou ne fait rien de tout cela et va sur Google.
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« Lui qui n’avait jamais cru en rien, pas même à la poésie, voilà qu’il croyait aux mathématiques, qu’il y voyait l’alphabet grâce auquel, après le claquement de doigt originel, l’univers fut écrit. » (p. 27)
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