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Critiques de Henri Michaux (139)
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Choix de poèmes

Poète belge, découvert sur les bancs du lycée, mais ce n'est que bien plus tard que j'ai pu me procurer ce mince volume de poésies choisies où l'absurde rime avec ... rien. Mais quel bonheur de se plonger dans un autre monde avec des mots nouveaux ou de nouveaux sens dessus-dessous.
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Connaissance par les gouffres

Etrange livre qui tente de dire l'indicible, qui essaie de relater l'expérience de la drogue et celle de la folie. Michaux (d)écrit la mescaline qui assaille le cerveau, il fait de la poésie sous haschisch, il tente de drôles de champignons qui n'ont rien de drôle, puis il entre, par le biais des drogues, dans la tête des fous, il montre l'enfer qu'ils s'inventent et où ils sont enfermés, il les restitue dans la vérité de leur délire. Le lecteur assiste, surpris, à la naissance d'un monde parallèle. Il reste à son bord, désorienté, impressionné par les mille détours possibles et imaginaires du cerveau humain quand il se déglingue.
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Le Jardin exalté

Un petit livre de poésie très beau, qui évoque parfois le Baudelaire de "L'invitation au voyage", dans sa façon de faire sonner les syllabes.
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Ailleurs : Voyage en Grande Garabagne - Au ..

Pour voyager Ailleurs (c.-à-d. plus haut), Henri Michaux empreinte des routes stupéfiantes, des chemins hallucinants, mais toujours, il en revient. Et c’est bien le principe du voyage que d’en revenir, sinon c’est ... autre chose, le quotidien, peut-être ... Michaux s’intéresse plus aux habitants qu’aux paysages, moi je dis, dommage car j’aime les paysages et je dis tant pis, parce que ces Mages (habitants du pays de la Magie) ou ces Poddemaïs (de Poddema), tous ces Hacs et ces Emanglons nous ressemblent un peu trop, ils ont souvent nos travers, nos tares et nos folies. Pourtant les pays que Michaux visite ne sont pas sur nos atlas, ni sur nos planisphères (j’ai vérifié !); attention, je ne dis pas qu’ils n’existent pas, puisqu’Henri y est allé, mais je les trouve plus fantaisistes que poétiques, car c’est l’altérité qui les sous-tends. Heureusement on sent bien une bonne dose d’humour dans ces descriptions, ainsi que dans les détails qui font ces étranges récits. Alors, si ça vous tente ; Bon voyage et ... à bientôt.
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L'Espace du dedans

Michaux (Henri) : La vie d’Henri Michaux (Namur, 24 mai 1899 – Paris, 19 octobre 1984), poète et peintre de génie d’origine belge, bascule lorsqu’il perd son épouse. La douleur de ce décès tragique ne cicatrisera jamais, et il portera le deuil jusqu’à sa propre mort. Mais c’est sans doute grâce à ce terrible événement que sa carrière bifurque vers des travaux de tous styles, emprunts de la véritable essence de l’âme tourmenté du veuf inconsolable. Mais déjà, avant cela, ses confrontations à l’Abîme étaient fréquentes et, depuis son enfance, on peut dire que Michaux aura avalé sa part de ténèbres.

Cet homme, qui deviendra un Maître dans ses domaines de prédilection, la poésie et la peinture, a connu une adolescence difficile, entre angoisse et dépressions. A cette époque, ses premiers travaux voient le jour, influencés sans aucun doute par ses plus jeunes années durant lesquelles il a connu les pensionnats et l’éducation à la dure des jésuites, mais surtout à la fréquentation des auteurs russes Léon Tolstoï et Fiodor Dostoïevski. Tout en faisant ses premiers pas dans la littérature, il s’orientera vers la médecine pour l’abandonner assez vite, prenant la mer entre 1920 et 1921. C’est peu de temps après, en découvrant Lautréamont, qu’il se décide à se lancer corps et âme dans la littérature.

Durant les Années Folles, il arrive à Paris, une ville dont il tombera éperdument amoureux. Dès lors, il n’aura de cesse de renier tout ce qui le rattache à son pays natal et se considérera parisien. Même si, par la suite, il voyagera dans le monde entier, la capitale française restera son berceau. Il sera d’ailleurs, avec la plus grande fierté, naturalisé français en 1955. Aussi rédigera-t-il ses "Carnets de Voyages", réel ou fictifs, qui feront partie intégrale de son œuvre colossale, lancé par son éditeur et ami proche, Jacques-Olivier Fourcade. En plus de l’écriture, Henri Michaux commence à s’intéresser de plus en plus à l’art pictural dont il entamera des travaux, restés longtemps secrets.

C’est en 1948 que la vie de l’auteur prendra un tournant radical, suite au décès tragique de Marie-Louise Termet, son épouse, suite à d’atroces brûlures dues à un accident domestique. Michaux en rendra compte violemment avec l’écriture de "La Vie dans les Plis" (1949), l’un des textes les plus viscéraux qu’il aura écrit.

Suite à cet évènement, il se considèrera comme un mort en sursit et comme n’ayant plus rien à perdre, commencera les expériences littéraires sous l’influence des drogues, principalement la mescaline, le LSD et la psilocybine. Ces plongeons dans l’abîme des hallucinogènes commenceront tardivement, à l’âge de 55 ans, alors qu’il n’avait jamais touché auparavant aux produits stupéfiants, mis à part l’éther qu’il consomma plus jeune. Ces expériences psychédéliques renoueront Michaux et la médecine, principalement la psychiatrie, et donneront naissance à des travaux sous l’influence des drogues, avec l’assistance d’un médecin qui calculera les dosages avec précision. Il en ressortira des textes impressionnants, mélangés avec des dessins sur des carnets spécialement utilisés pour ce que l’auteur voulait comme des approches scientifiques des effets des substance et de la créativité littéraire et picturale pouvant en découler. Les toiles qu’il a laissé derrière lui sont autant de bijoux d’art atypique qui ne peuvent pas laisser indifférent. Notons certaines œuvres picturales significatives :

Henri MICHAUX "Têtes"

Henri MICHAUX "Clown"

Henri MICHAUX "Paysages"

Henri MICHAUX "Prince de la Nuit"

Henri MICHAUX "Dragon"

Henri MICHAUX "Combats"

Henri MICHAUX "Couché"

Henri MICHAUX "Parcours"

Henri MICHAUX "Description d’un trouble"

Henri MICHAUX "Arrachements"

Henri MICHAUX "Composition"

Henri MICHAUX "Frottage"

Henri MICHAUX "Mouvements"

Henri MICHAUX "Repos ans le Malheur"





Vers la fin de sa vie, Henri Michaux vivait en reclus et était perçu comme un personnage public fuyant son lectorat et la presse. Il meurt seul à Paris, sa ville d’enracinement, le 19 octobre 1984

La bibliographie de l’auteur étant colossale – 63 ouvrages dont 6 posthumes – on retiendra surtout ses recueils de textes poétiques modernes dont voici une liste non-exhaustive :



MICHAUX Henri "Connaissance par les Gouffres"

MICHAUX Henri "La Vie dans les Plis"

MICHAUX Henri "Epreuves, Exorcismes"

MICHAUX Henri "L’Infini turbulent"

MICHAUX Henri "Poteaux d’Angles"

MICHAUX Henri "L’Espace du Dedans"

MICHAUX Henri "La Nuit remue"

MICHAUX Henri "Plume"

MICHAUX Henri "Ecuador"

MICHAUX Henri "Lointain Intérieur"

Henri MICHAUX "Misérables miracles"



Ghislain GILBERTI

"Dictionnaire de l'Académie Nada"
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Qui je fus (précédé de) Les Rêves et La Jambe (et..

Je suis entré dans l’œuvre d’Henri Michaux croyant lire de la poésie avec tout ce que ce terme contient de présupposés et d’images d’Epinal et j’ai été très agréablement surpris d’y découvrir un univers de libertés formelles et thématiques. Les groupements de textes ressemblent plus à un cahier de notes, un fourre-tout d’impressions et d’impulsions personnelles sur le quotidien de l’auteur, ses centres d’intérêts, ses rencontres.


J’aime découvrir ce qu’a pu vivre Henri Michaux, et tenter de comprendre la société de son époque à travers ses remarques : révolution freudienne, interprétation des rêves ; bouleversements artistiques avec l’unanimisme, le dadaïsme et le surréalisme ; enfin, apparition du cinématographe et du septième art, avec la figure emblématique de Charlie Chaplin.
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Poteaux d'angle

Piquets en coin

Les recommandations que fait Henri Michaux (1899-1984) au lecteur ne sont pas toutes à prendre à la légère. Si certaines sont datées, convenues, voire absconses, d’autres fouettent l’esprit avec ferveur, tranchant et laissent de sévères entailles sur la peau, cette surface que nous avons probablement de plus élargie et de plus profonde en nous : « Si tu traces une route, attention, tu auras du mal à revenir à l’étendue ». Et les pages égrènent les aphorismes, les apophtegmes comme un chapelet une foi en soi, en dépit de ses propres gouffres et de ses faiblesses insondables : « Ne te livre pas comme un paquet ficelé. Ris avec tes cris ; crie avec tes rires ». Michaux tutoie un interlocuteur invisible qui est autant lui-même que le lecteur. Le procédé est efficace. Le poète, après mûres réflexions et un âge avancé, délivre des messages boomerang dont l’évidence et la clarté effraient. Il existe trois versions du texte, datées de 1971, 1978 et 1981, enrichis de nouveaux développements. Michaux est alors respectivement âgé de 72 ans, 79 ans et 82 ans. D’un abord aisé, l’écriture de Michaux, paradoxalement, ne se livre pas aussi facilement. Elle esquive, feinte et pique quand la garde du lecteur est baissée. Il faut recommencer sans cesse la lecture de Poteaux d’angle car la pensée de l’auteur s’éploie derrière les points de suspension, dans le non-dit. Fine lame des lettres, l’immense poète au regard incandescent délivre sa vision acérée du monde à l’hiver de sa vie quand tout le toc et le clinquant des existences étriquées rutilent en vain et que le grand départ s’annonce : « Non, non, pas acquérir. Voyager pour t’appauvrir. Voilà ce dont tu as besoin. » Le songe, l’écoulement des secondes constituent des précieux moments de vie où l’effacement et l’allègement de l’être sont les garants d’une libération de l’esprit : « Habiter parmi les secondes, autre monde/si près de soi/du cœur/du souffle//Perpétuel incessant impermanent/Train égal vers l’extinction//Passantes/Régulièrement dépassées/régulièrement remplacées/passées sans retour/passant sans unir/sobres/pures/une à une descendant le fil de la vie/passant… ».
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Oeuvres complètes, tome 1

Premier tome des œuvres complètes de Michaux (je n'ai que lui -le tome, pas Michaux) dans la Pléiade, celui-ci regroupe les œuvres de jeunesse.

J'ai moins accroché que pour les livres que j'avais déjà lu auparavant, paradoxalement situées plutôt tard dans la bibliographie de Henri.

Bon, rien n'est mauvais ou détestable, c'est plutôt que sa recherche en littérature, stylistique est encore un peu plus balbutiante, moins sûres, moins aboutie surtout, plus expérimentale peut être, enfin je ne sais comment dire mais ça m'a paru très abscons, peut être trop ancré dans le moment, l'après guerre, le surréalisme, le dada, les choses comme ça, la nouveauté à tout prix, l'invention de mots à tout va, le jeu avec les sons, les mots, les formes, la taille, les sujets. Tout est un peu brouillon et mélangé à mon goût.



J'attendais beaucoup de Plume (de mémoire recommandé par Nicolas Bouvier et tant d'autre) et d'Ecuador. J'ai aimé le second mais pas à la folie, un peu déçu par le manque d'envergure, j'ai en revanche été déçu par Plume. Sans doute est-ce la faute de mes attentes, trop fortes ou précises, mais le ton m'a paru trop burlesque alors que je m'attendais à une chose très poétique.



Bon, donc, la recherche, le style est déroutant mais intéressant, voire passionnant, on sent une très intense réflexion sur la littérature, et chaque texte est sous tendu par une grande culture des "anciens", et c'est ce qui sauve le tout. Rien n'est hors-sol, esbrouffe ou tartarinade, même si tout ne m'a pas plu, loin s'en faut, jamais on ne peut se dire qu'il se fout de nous. A lire, donc, mais doucement, en prenant le temps, en laissant les textes et ses questions infuser.



J'ai adoré Un Barbare en Asie, parce que j'adore ce continent, le ton et l'ouverture d'esprit de Michaux, le style est bien plus conventionnel et la lecture plus facile !
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Plume (précédé de) Lointain intérieur

Ce recueil est un de mes livres de chevet. Ouvrage constitué de brèves, de pensées et d'histoires farfelues, c'est une excellente piste d'introduction à l'œuvre d'Henri Michaux, ce poète tourmenté et délicat. J'ai beaucoup d'affection pour "Plume", que l'on peut lire et relire tout au long de sa vie. Le plaisir reste intact, la surprise permanente.
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Un barbare en Asie

Henri Michaux... Mon auteur favori Nicolas Bouvier le cite si souvent qu'il me fallait le découvrir.



Un Barbare en Asie est une entreprise risquée: l'oeil de l'auteur juge divers peuples et races qu'il a côtoyés lors de ses voyages. Dans le contexte des années 30, c'est délicat. Qu'on pense au ton involontairement colonialiste des premiers Tintin! Souvent, Michaux n'évite pas l'écueil des généralités: "le Chinois est comme ceci, le Bengali comme cela, ...". Ce qui le sauve, c'est son auto-critique. Une auto-critique dans la préface - une préface nouvelle, rédigée 40 après -, dans les notes de bas de page, dans l'introduction au chapitre sur le Japon. D'ailleurs le premier mot du livre, dans la préface, est "mea culpa". Le monde change, et si les observations de Nicolas Bouvier restent pertinentes et délicieuses, celles d'Henri Michaux s'avèrent vite dépassées. C'est parce que Bouvier s'intéressait aux individus, en évitant les généralisations. Si Bouvier considérait Michaux comme un maître, alors je dirais que l'élève a dépassé le maître. Peut-être une seconde oeuvre de Michaux me permettra de corriger mon jugement.
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Plume (précédé de) Lointain intérieur

Il me faut lire et relire Michaux, le découvrir et le redécouvrir encore. Alors, s'éloigne ma lassitude de vivre et je nais à un autre monde.

Un monde déréglé où d'autres lois agitent les êtres, où les objets familiers deviennent singuliers, se reconnaissent à peine à leur forme, sont souvent démembrés, parfois des morceaux de corps qui sollicitent alors notre attention, ainsi dans ce poème où "une tête sort du mur" et nous laisse songeur face à cette tête qui s'obstine à franchir un mur et encore un mur.

La poésie de Michaux nous semble échapper à toute définition, à toute analyse. Bien sûr ça et là se manifestent la fantasmagorie des rêves, la folie d'un aliéné qui pérore mais "l'animal mange serrure" ou "une femme me demande conseil", dans le recueil "entre centre et absence", par exemple dépassent les prouesses de l'imaginaire onirique ou la littérature des aliénés.

On rencontre là une forme d'absurde si étrange que frappé par les images, l'on suspend sa lecture ou bien on la précipite pour savoir à la fin ce qui va sortir de tout ce théâtre.

Ainsi Michaux ne fait pas qu'écrire avec son inconscient sur le mode de l'écriture automatique, ne fait pas qu'écrire sous l'emprise de la mescaline dont il fut un consommateur affûté.

Tous ces personnages, humains, animaux, objets en tout genre, vivent des aventures impensables. Michaux prend plaisir à les soumettre aux dangers les plus sanglants, à les placer en situation de fuite ou bien à les faire s'accoucher les uns des autres dans une ronde effrénée.

Nombre de ces poèmes en prose font une concession à la lisibilité en éclairant les scènes les plus effarantes à la lumière de l'humour.

Non, la poésie de Michaux n'est pas hermétique. Elle nous propose un autre monde ou plutôt notre monde dissocié, recomposé, éclaté ou ravaudé, en proie à des lois qui défient toute logique, où l'intégrité des éléments de la réalité est battue en brèche. Où les différents règnes naturels s'interpénètrent, s'imitent, se combattent.

Et bien sûr il y a "Plume". Monsieur Plume, l'anti-héro d'une nouvelle poétique restée célèbre, car tout en entrant de plain pied dans l'univers halluciné du poète, nous pouvons tout du moins nous identifier à Plume et partager ses multiples avanies à travers de courts poèmes en prose où l'imaginaire singulier du poète le dispute à une veine comique maîtrisée.

Que dire sinon que, certes, l"'on peut entrer dans la poésie de Michaux avec perplexité, mais que du chaos inénarrable qui y règne, l'on sort ragaillardi et, somme toute, allègre.



KP
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En rêvant à partir de peintures énigmatiques

Ce livre porte très bien son titre qui résume parfaitement l'intention de l'auteur « En rêvant à partir de peintures énigmatiques ».

J'aime beaucoup l'écriture d'Henri Michaux et les tableaux de René Magritte. J'aurai donc dû être totalement séduite par ce recueil de textes oniriques mais il m'a manqué quelque chose. Et ce quelque chose c'est l'image.

Michaux excelle dans cet exercice descriptif des oeuvres du peintre mais certains tableaux, bien que célèbres, ont besoin d'être vus pour apprécier toute leur poésie (et leurs détails) car l'imagination a ses limites. Personnellement, j'avais quelques tableaux en tête mais pas tous. Alors je suis allez voir sur internet et je ne les ai pas tous retrouvé, comme celui concernant la contrebasse, page 41. J'ai bien trouvé un violon et d'autres instruments de musique (ainsi qu'une pipe, un parapluie, des nuages, un oiseau, un poisson, une fenêtre, des hommes avec des chapeaux melon...) mais pas de contrebasse. Dommage.

Quand Michaux donne le titre du tableau, il est facile de le retrouver. Mais il le fait uniquement pour L'enfance d'Icare. J'ai donc testé une lecture en miroir et je dois dire que Michaux est très fort. Il a un vrai pouvoir de suggestion grâce à son écriture car il est difficile de raconter ce qui se passe dans les tableaux de René Magritte, que l'on associe aisément au mystère et au surréalisme.





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Oeuvres complètes, tome 3

Le troisième volume des oeuvres complètes de Michaux regroupe trois sortes de textes au moins dont je puis dire quelque chose : d'abord, le corpus de livres consacrés à la mescaline (voir aussi le tome II), la série des Idéogrammes en Chine (et autres textes où l'écrit dialogue avec le dessin), et enfin une dernière sorte de poésie, poésie gnomique, sentences, proses de sagesse, aphorismes, où l'effet poétique ne se distingue pas de la surprise de la pensée. On trouvera encore les critiques, hommages et discours de la fin de sa vie, et des inédits.
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Oeuvres complètes, tome 1

J'ai bien du mal à parler de Michaux, car j'ai toujours l'impression à sa lecture qu'il m'échappe et ne se laisse pas confiner, définir ou circonscrire dans un discours de lecteur. Même si, du premier au troisième volume de la Pléiade, on se sait confronté à la même personnalité créatrice et même si l'oreille apprend à reconnaître cet accent particulier, il y a autant de Michaux qu'il y a de textes et de livres de lui. Une chose en tous cas m'aide à avancer dans ce labyrinthe : le rire, l'ironie continuelle qui baignent ses poèmes, ses proses, ses textes. A la fois profond et drôle, Michaux a été mon compagnon. de lecture de tous les instants.
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Oeuvres complètes, tome 3

C'est l'expérience d'un « buveur d'eau »

H.M. ne cherche pas à échapper à l'angoisse, il se consacre à l'exploration de l'univers que lui a révélé l'usage des drogues. Sa quête porte sur les conditions de la pensée, les moyens propres à l'exprimer, quitte à plonger dans les ressacs inexplorés de l'esprit.

Les livres sont des descriptions des effets de la drogue, myriades d'images intenses qui disloquent le corps et le monde. La mescaline est une expérience de la folie, un « mécanisme d'infinité » absolument bon ou terriblement mauvais, une exploration des possibilités de la pensée et une tentative de retranscription. Les mots tentent de suivre systématiquement les effets de la drogue sur la conscience, d'en éprouver l'étendue, les ressources et les limites. Cette introspection se fait en une notation au fur et à mesure des prises de mescaline, sur le papier, des avatars et de nombreuses tribulations s'inscrivent de manière heurtée, disloquée, les mots s'écroulent parfois en d'incompréhensibles gribouillis. Les dessins sont d'« innombrables lignes fines, parallèles, serrées les unes contre les autres avec un axe de symétrie principal et des répétitions sans fin ».

Accélération de la vitesse mentale, surabondance qui gonfle les phénomènes (images, pensées, impulsions), caractérisent la modification essentielle de la mescaline ; mécanisme qui «exclut la conscience du sentiment, pour l'exprimer» en une longue descente dans des gouffres aux luminosités blanches et aveuglantes, sensations de faim violentes aussitôt disparues, invasions de couleurs, poussées d'architectures chaotiques, grimaces, ruines, montagnes, minarets, sensation de n'être plus qu'une ligne, une amplification des bruits – le moindre froissement assomme les

tympans : « c'est une vibration énorme, multiple, fine, polymorphe et effroyable qui semble ne devoir plus jamais finir ». La conscience est décapée avec violence, la surabondance des stimulis et la dislocation de l'esprit sont comparables à celles dont souffrent les schizophrènes.

Une erreur de dosage ouvre le cauchemar, désagrément multiplié par le caractère d'infinité de la mescaline. Une « petite mort » vécue des centaines et des centaines de fois, imagination annulée, diminuée dans des explosions de feu, entre sérénité et turbulence. Sans aucun prodige, l'expérience de la mescaline peut conduire à un long glissement dans un gouffre broyeur, un grand froid qui « désensualise l'image ». La vulnérabilité de l'humain, sa porosité au contact de l'infini, est comme une nostalgie de fœtus, un souvenir d'une provenance visqueuse et transformeuse ; au bord de l'insoupçonné et d'une démesure inattendue, reste, parfois, une tension vers l'extase. L'existence est absurde, désespérément on y cherche quelque chose, sans trop savoir ce que c'est exactement, quand on le trouve enfin, tout s'éclaircit : on est dans un abîme où l'on ne finit plus de tomber ; avec le vertige rien à quoi se raccrocher, impossible de se ramasser, on tombe sans même pouvoir arrêter de respirer.
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La Nuit remue

Ce recueil a été publié en 1935. C'est sans doute son premier grand recueil. Le titre, comme souvent dans l'oeuvre de Michaux, est déjà tout un programme : qu'est-ce à dire ? La Nuit remue évoque cette étape éphémère, cette frontière fragile entre sommeil et veille, entre néant et existence mais aussi cette frontière fragile et mouvante entre la paix sereine des certitudes diurnes et l'angoisse des cauchemars nocturnes. Tel un funambule, Michaux se promène sur ce fil étroit du réel et du rêvé, du clair et du sombre, de l"angoissant et du rassurant et pour cela, il renouvelle sans cesse les rythmes et les formes et fascine ses lecteurs comme sous l'effet d'une magie.

Voici un choix de quelques poèmes, puisqu'il faut bien choisir, qui devraient convaincre bien mieux que mes paroles :











P 9 "La nuit remue" I

« Tout à coup, le carreau dans la chambre paisible montre une tache. L'édredon à ce moment a un cri, un cri et un sursaut ; ensuite le sang coule. Les draps s'humectent, tout se mouille. L'armoire s'ouvre violemment ; un mort en sort et s'abat. Certes, cela n'est pas réjouissant. Mais c'est un plaisir que de frapper une belette. Bien, ensuite il faut la clouer sur un piano. Il le faut absolument. Après on s'en va. On peut aussi la clouer sur un vase. Mais c'est difficile. Le vase n'y résiste pas. C'est difficile. C'est dommage. Un battant accable l'autre et ne le lâche plus. La porte de l'armoire s'est refermée. On s'enfuit alors, on est des milliers à s'enfuir. De tous côtés, à la nage ; on était donc si nombreux ! Étoile de corps blancs, qui toujours rayonne, rayonne... »



p 30 "Un point, c'est tout"

" L'homme _son être essentiel_ n'est qu'un point. C'est le seul point que la Mort avale. Il doit donc veiller à ne pas être encerclé.

Un jour, en rêve, je fus entouré de quatre chiens, et d'un petit garçon méchant qui les commandait.

Le mal, la difficulté inouïe que j'eus à le frapper, je m'en souviendrai toujours. Quel effort ! Sûrement, je touchai des êtres, mais qui ? En tous cas mes adversaires furent défaits au point de disparaître. Je ne me suis pas laissé tromper par leur apparence, croyez-le ; eux non plus n'étaient que des points, cinq points, mais très forts.[....]"



p 79 "Contre !"

" Je vous construirai une ville avec des loques, moi.

Je vous construirai sans plan et sans ciment un édifice que vous ne détruirez pas

Et qu'une espèce d'évidence écumante soutiendra et gonflera,

Qui viendra vous braire au nez, et au nez gelé

De tous vos Parthénons, vos Arts Arabes et de vos Mings.

Avec de la fumée, avec de la dilution de brouillard et du son de peaux de tambours

Je vous assoirai des forteresses écrasantes et superbes,

Des forteresses faites exclusivement de remous et de secousses,

Contre lesquels votre ordre multimillénaire et votre géométrie

Tomberont en fadaises et galimatias et poussières de sable sans raisons.

Glas ! Glas ! Glas ! Sur vous tous! Néant sur les vivants!

Oui! Je crois en Dieu ! Certes, il n'en sait rien.

Foi, semelle inusable pour qui n'avance pas.

Ô monde, monde étranglé, ventre froid !

Même pas symbole, mais néant , je contre, je contre,

Je contre, et te gave de chiens crevés !

En tonnes, vous m'entendez, en tonnes je vous arracherai



http://poezibao.typepad.com/poezibao/images/michaux_montage_copie_basse_def_1.jpg

Ce que vous m'avez refusé en grammes!



Le venin du serpent est son fidèle compagnon.

Fidèle et il l'estime à sa juste valeur.

Frères, mes Frères damnés, suivez moi avec confiance;

Les dents du loup ne lâchent pas le loup.

C'est la chair du mouton qui lâche.



Dans le noir, nous verrons clair, mes frères!

Dans le labyrinthe, nous trouverons la voie droite!

Carcasse, où est ta place ici, gêneuse, pisseuse, pot cassé ?

Poulie gémissante, comme tu vas sentir les cordages tendus des quatre mondes !

Comme je vais t'écarteler ! "



Et l'un de mes préférés, dans le même recueil mais dans la section Mes Propriétés,

p 143, "Intervention"

"Autrefois, j'avais trop le respect de la nature. Je me mettais devant les choses et les paysages et je les laissais faire.



Fini, maintenant j'interviendrai



J'étais donc à Honfleur et je m'y ennuyais.



Alors résolument, j'y mis du chameau. Cela ne paraît pas fort indiqué. N'importe, c'était mon idée. D'ailleurs, je la mis à exécution avec la plus grande prudence. Je les introduisis d'abord les jours de grande affluence, le samedi sur la place du Marche'. L'encombrement devint indescriptible et les touristes disaient : " Ah ! ce que ça pue ! Sont-ils sales les gens d'ici ! " L'odeur gagna le port et se mit à terrasser celle de la crevette. On sortait de la foule plein de poussières et de poils d'on ne savait quoi.



Et la nuit, il fallait entendre les coups de pattes des chameaux quand ils essayaient de franchir les écluses , gong ! gong ! sur le métal et les madriers !



L'envahissement par les chameaux se fit avec suite et sûreté.



On commençait à voir les Honfleurais loucher à chaque instant avec ce regard soupçonneux spécial aux chameliers, quand ils inspectent leur caravane pour voir si rien ne manque et si on peut continuer à faire route ; mais je dus quitter Honfleur le quatrième jour.



J'avais lancé également un train de voyageurs. Il partait à toute allure de la Grand-Place, et résolument s'avançait sur la mer sans s'inquiéter de la lourdeur du matériel ; il filait en avant, sauvé par la foi.



Dommage que j'aie dû m'en aller, mais je doute fort que le calme renaisse tout de suite en cette petite ville de pêcheurs de crevettes et de moules."
Lien : http://aller-plus-loin.over-..
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Poteaux d'angle

sa version vieux sage, et je m'y suis plongée avec le plaisir de trouver exprimée de belle et ferme façon une vision du monde qui me convient, et d'y puiser, un peu en usurpatrice, justifications de mes faiblesses et quelques règles.

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Plume (précédé de) Lointain intérieur

Sur le thème du voyage, Michaux revisite l’esthétique poétique et la notion même d’histoire et de personnage.

C'est un langage étrange, difficile à saisir parfois, abusant des répétitions mais comportant des traits de génie.
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Poteaux d'angle

Ni Dieu ni maître



Un bréviaire ? Un viatique ? Un guide ? Un vade-mecum ? Et pourquoi pas, tant qu'on y est, un feel good book ? Ce serait commettre un singulier contresens que de définir Poteaux d'angle par un de ces genres, le dernier au demeurant fort bien représenté lors du dernier salon du livre de Paris, merci. Non. Poteaux d'angle est, sous ses faux airs sages de recueil de pensées d'inspiration extrême-orientale, une véritable bombe incendiaire à retardement, et Henri Michaux, un non moins véritable entrepreneur en démolition.



C'est qu'il pratique, sans avoir l'air d'y toucher et avec une tranquille désinvolture, un consciencieux et systématique travail de sape de tout ce qui constitue les fondements de la structure mentale de nos civilisations cartésiennes occidentales : la connaissance, la réussite, la mémoire, la force, la discipline, la communauté, la réalisation, le travail, la vitesse, l'efficacité, la justice, pas moins. Il est le poète de la grande, radicale et absolue liberté.



Si Michaux se fait le contempteur de l'acte, c'est pour mieux saluer la puissance, de celle qui ne s'accomplit pas. C'est à une longue et périlleuse entreprise individuelle qu'il nous convie là. Les embûches et les écueils sont nombreux. Ils se nomment compréhension, acquisition, apprentissage, adaptation, savoir, communication, satisfaction. Lui, nous invite à nous déprendre de nous-mêmes, à ne pas nous laisser coloniser ni asservir, et ce en cultivant nos défauts, nos oublis, nos faiblesses, nos erreurs et échecs. L'instinct, la rêverie, la méditation, l'errance, la paresse sont les réponses à l'esclavage des "fils de fils" qui nous guette.



Il va jusqu'à dénoncer l'infirmité du style pour un écrivain, sorte de sclérose, "distance inchangée" vis-à-vis du monde. Rien n'échappe au regard acéré qu'il porte sur nos sociétés. Il y décèle les petits arrangements, les compromissions qui rassurent et apaisent. Son exigence est sans faille. Il y a tant à gagner. Cet immense petit livre engendre une puissance d'arrêt rare. Me revient à l'instant en mémoire un de ces beaux titres que je voyais défiler du temps où j'étais libraire : Les Plaies d'entrée par armes à feu courtes. La mienne est béante.





"C'est à un combat sans corps qu'il faut te préparer, tel que tu puisses faire front en tout cas, combat abstrait qui, au contraire des autres, s'apprend par rêverie."



"Toute pensée, après peu de temps, arrête."



"Faute de soleil, sache mûrir dans la glace."



"Si tu traces une route, attention, tu auras du mal à revenir à l'étendue."



"Souviens-toi. / Celui qui acquiert, chaque fois qu'il acquiert, perd."



"Tu es contagieux à toi-même, souviens-t'en. Ne laisse pas "toi" te gagner."



"Si tu es un homme appelé à échouer, n'échoue pas toutefois n'importe comment."



"Les heures importantes sont les heures immobiles. / … étendues horizontales par-dessus des puits sans fond."



"Le précieux, le véritablement précieux, est distribué sans le savoir et sans contrepartie."



"Cherchant une lumière, garde une fumée."



"Si affaissé, brimé, si fini que tu sois, demande-toi régulièrement — et irrégulièrement — "Qu'est-ce qu'aujourd'hui encore je peux risquer ?""



"Pour se délivrer d'incertitude, ils défilent, pensant qu'ils déferlent, cœurs d'enfants dans un corps de foule. / Et toi ?"



"Lorsqu'une idée du dehors t'atteint, quelle que soit sa naissante réputation, demande-toi : quel est le corps qui est là-dessous, qui a vécu là-dessous ? / De quoi va-t-elle m'encombrer ? / Et me démeubler ? / Cependant au long de ta vie, te méfiant de ta méfiance, apprends aussi à connaître tes blocages."





Et puis il y a cette merveilleuse dernière page. Alors ? Un livre de vie ? Le livre d'une vie ? La sienne ? Les nôtres ?



(Je ne note pas les livres qui ne sont pas de bons ou de mauvais élèves.)
Lien : https://lesheuresbreves.com/
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La Vie dans les plis

Une découverte d'une compilation de textes d'un auteur approché pour la première fois quand j'étais étudiante. Auteur que j'adore depuis, malgré mon inculture, bien qu'il m'arrive très souvent de ne pas comprendre un mot de ce qu'il écrit (au premier abord seulement, le plus souvent. Et même ensuite, d'une certaine façon...). Ce recueil est tombé délectablement à propos à un moment très particulier de ma vie. Mais ça, ça m'appartient et n'a pas lieu d'apparaître ici. Tout ce que je puis dire est qu'à cette première lecture de ces mots agencés, un « aperçu » de ma vie, à la fois superficiel et profond (je sais, ça se contredit, au premier abord), a semblé éclaté sous mes yeux et dans ma tête. Beau feu d'artifices dont j'ai savouré chaque éclat sensoriel.

Dommage que ce livre ait été emprunté. Je pense que je me l'achèterai, car comme souvent avec cet auteur, il me faudra plusieurs lectures pour en savourer avec plus de justesses et de délices chaque mot, tellement picturalement, « sensitivement », sensoriellement, amplement et oniriquement employés.



Beaucoup de textes ont trouvé un tel écho en moi (Tahavi en est peut-être l'exemple le plus parlant en tant que reflet d'une époque révolue pas si lointaine), que j'aurai souhaité tous vous les citer dans la rubrique Babelio dédiée à cet exercice de copie. Mais certains auraient été beaucoup trop longs pour y figurer. Ainsi en est-il de La séance de sac ou Liberté d'action, par exemple. Donc, tant pis. Il ne vous reste plus qu'à lire et / ou relire ce livre, à votre rythme.



Bon voyage.
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