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Critiques de Jake Hinkson (264)
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Sans lendemain

Bienvenue chez les ploucs. Dès les premières lignes, Jake Hinkson annonce la couleur. « N'allez pas dans l'Arkansas, me dit le propriétaire du cinéma à Kansas City. »

Les histoires sans lendemain, au mieux vous laissent de bons souvenirs ou, dans le pire des cas, hypothèquent sérieusement votre avenir et Billie Dixon ne va pas tarder à en faire l'expérience.

Texane venue tenter sa chance à Hollywood, elle aurait voulu faire une belle carrière de scénariste. Hélas, pour gagner sa vie elle fourgue des films de série B dans des cinémas paumés des Ozarks pour une boite de production miteuse. Eté 47, elle arrive au volant de sa vieille Mercury à Stock's Settlement et se rend très vite compte que si elle veut vendre quelques films, il va falloir composer avec le pasteur local, Obadiah Henshaw, un vétéran héros de guerre touché par la Grâce divine. Malheureusement pour les affaires de Billie le pasteur, qui voit Satan partout, ne souhaite aucune projection dans sa paroisse. Billie pourrait repartir avec ses films sous le bras, mais voilà, frère Obadiah est marié avec la belle Amberly, et cette dernière lui a tapé dans l'oeil. La vie de Billie Dixon vient de basculer.



En quelques pages, l'intrigue est posée. Le lecteur se frotte les mains devant ce qui s'annonce comme un hommage aux classiques du roman noir, à tous ces polars qui ont planté au milieu de nulle part un voyageur attirant, différent, sans attache, qui fait tache dans le patelin, tombe amoureux de la belle fille du coin mal mariée avec un type qui lui barre la route du bonheur. Sans lendemain est un bel hommage aux romans de James M. Cain. Dans les Ozarks - terre du néo-noir maintes fois arpentée par Woodrell- pour Billie Dixon, le facteur va sonner deux fois.



Le romancier Jake Hinkson a eu la bonne idée de redistribuer les rôles de ce trio fatal et de faire de Franck Chambers une femme libre qui porte pantalons et cheveux courts, et qui se fiche du regard des autres. Effrontée, cynique, intelligente et pleine d'humour, elle est déjà singulière à Hollywood: « Moins d'une semaine après mon arrivée à Los Angeles, j'avais rencontré une ouvrière aux cheveux courts qui m'avait emmenée au Well Well Club dans LaBrea. C'était un monde dont je n'avais jamais osé rêver. Des filles en jean et chemise à carreaux en train de danser avec des dames en jupe et chaussures à talons. Ce fut une période bénie pour moi. Je m'habillais comme Marlène Dietrich et couchais avec des secrétaires et des épouses de militaires. C'était amusant , mais cela ne durait jamais. Echapper aux descentes de police était assez pénible (…). »

Alors forcément dans l'Arkansas, elle ne va pas passer inaperçue et les pèquenauds ont toujours une sainte horreur de la différence. Amberly quant à elle est une Cora inoffensive et un peu nouille (pour rester polie), quant à Obadiah Henshaw , il campe un Nick Papadakis allumé de la Bible et complètement ravagé.



J'ai adoré Sans lendemain. Enfin un Gallmeister qui a pour héroïne une femme qui pourrait sortir d'un roman de Marc Behm, une Lucy de Et ne cherche pas à savoir, une Cora de La vierge de glace, une Edmonde de La reine de la nuit, une femme née trop tôt pour être heureuse, une effrontée marrante et lucide, sur elle, sur l'amour, sur Hollywood: « Dans cette ville, le moindre employé jusqu'au plus petit , le moindre figurant se voit comme un tombeur parce qu'il peut s'offrir sa part de chatte d'actrice en herbe. Les rêves vont mourir sur le canapé des castings, mais que peuvent-elles faire, ces filles, à part se mettre à genoux ou rentrer dans l'Arkansas? Pas une seule jolie fille ne s'est jamais pointée à Hollywood en priant pour finir avec la queue de Bob Hope dans la bouche, mais nombre d'entre elles ont connu ce destin là. »

Le rêve américain n'est pas fait pour les femmes, et Jake Hinkson le prouve avec plusieurs d'entre elles. Amberly, belle et éduquée, a cru toute sa vie que son salut viendrait des hommes et s'est retrouvée dans une impasse. L'adjointe du shérif, Lucy Harington, opiniâtre, et retorse, est une femme née au mauvais endroit, cantonnée dans un rôle d'assistante administrative alors qu'elle est plus intelligente que tous les cerveaux du patelin réunis.



Comme dans ses précédents romans l'écriture de Hinkson est rythmée, concise, sa plume incisive et ses personnages une nouvelle fois se fracassent sur le rêve américain. Adieu Billie, il fallait écouter le propriétaire du cinéma de Kansas City...et merci aux Editions Gallmeister pour ce roman reçu dans le cadre de l'opération Masse Critique.
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Au nom du bien

Frère Richard Weatherford est pasteur dans une petite ville de l’Arkansas, marié, cinq gosses, bien sous tout rapport. Sauf que… (Car sinon le roman de Jake Hinkson serait aussi passionnant que le bottin de la Picardie)… Sauf que ce cher pasteur a un secret qui risque de lui couter 30000 dollars s’il ne veut pas qu’il soit révélé et ainsi, voir sa réputation s’envoler vers les derniers cercles de l’enfer et sa petite vie tranquille céder la place à un lynchage en place publique par la vindicte populaire.

La morale de cette histoire est inattendue et les voies du Seigneur sont effectivement impénétrables. « Au nom du bien » est un bon roman à la construction originale et dont la lecture est vraiment plaisante.

Traduction limpide de Sophie Aslanides

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Sans lendemain

Billie Dixon travaille depuis quelques mois chez les studios PRC. Sa mission : fournir en films les petits cinémas situés dans des bleds paumés. En somme, placer les merdes du studio aussi loin que possible. Billie devra donc se rendre dans les coins les plus reculés de l'Arkansas, du Missouri et du Tennessee. Première mission : Stock's Settlement dans l'Arkansas. Là, elle rencontre Claude Jeter, le propriétaire du cinéma quelque peu déserté. En effet, depuis la fin de la guerre, les gens n'ont plus un sou à mettre dans un billet de cinéma mais surtout le pasteur Obadia Henshaw a décrété que les films étaient l'oeuvre du Diable. Qu'importe, la jeune femme fait tout de même affaire avec Claude et compte bien rendre visite au pasteur. Une rencontre pour le moins inamicale puisque Billie se fait envoyer paître. Juste avant qu'elle ne quitte les lieux, elle croise la belle Amberly, l'épouse du pasteur, qui ne laisse pas insensible. Cette dernière lui donne rendez-vous le lendemain, lorsque son mari fera ses visites. Un rendez-vous qui risque bien de chambouler la petite vie de Billie...





Billie Dixon aime les femmes et collectionne les histoires sans lendemain. Jusqu'au jour où elle rencontre la belle et sensuelle Amberly Henshaw. Mais, voilà, Amberly, en tant qu'épouse du pasteur, est un peu comme le fruit défendu dans lequel, pourtant, la jeune femme va mordre. Il ne fait visiblement pas bon aimer les femmes en cette Amérique profonde de la fin des années 40. Et Billie va en faire l'amère expérience. Des néons d'Hollywood aux champs boueux de Stock's Settlement, Jake Hinkson nous plonge dans une ambiance un brin malsaine et électrique. Il dresse le portrait d'une femme éprise de liberté (fut-elle sexuelle ou non), cynique et rebelle. Autour d'elle, Amberly qui voit en elle comme une forme de libération ou encore Lucy Harrington, l'assistante du faux shérif, une femme posée et intelligente. Ce récit sombre et authentique, à l'intrigue rondement menée et aux moult rebondissements, se révèlera aussi beau que tragique.
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Au nom du bien

Encore une histoire de pasteur .

Il semblerait que Jake Hinkson en fasse une spécialité . En effet , la lecture de sa bio pourrait donner à penser : aurait-il quelques comptes à régler ?

C'est le troisième roman que je lis de cet auteur et à chaque fois , les hommes d'église nourrissent des fictions bien décoiffantes !



Et cette fois , on part pour l'Arkansas où officie Frère Richard Weatherford , marié et père de famille drapé d'une respectabilité qui pourrait bien être mise à mal .

Des ouailles diaboliques vont l'entraîner dans le péché ! ...diantre !



Voilà qui va animer une petite ville d'Amérique profonde si bien pensante qui , sous le joug de la religion , affiche ses idées pro Trump sur ses pelouses .

Et puis , si petits trafic il y a , on les tolère bien cachés . L'important est de sauver les apparences .

Mais , Frère Richard va en peu de temps se retrouver dans l'œil d'un cyclone et le suspense est entretenu par sa maîtrise et sa froideur .

Machiavélique le berger .



Alors , je dirais que c'est ce personnage principal qui mène le roman .

Mais , tour à tour , les autres héros amènent du corps au récit . Bien des thèmes sont abordés : la famille , le couple , la sexualité , la politique , la religion , les problèmes existentiels etc ...

Ce polar est aussi un roman social ; une photo réaliste d'une société en souffrance qui a perdu ses repères . Beaucoup d'introspection et de remises en cause , de grincements .



Mais , malgré la noirceur , le ton est léger , enlevé et souvent drôle . Belle maîtrise de la narration et de la traduction que l'on doit à Sophie Aslanides .

Voici donc mon favori avec " L'Enfer de Church Street " . Mais j'ai aussi bien aimé " Sans lendemain " .



Très bon moment de lecture et merci à l'amie Stockard qui , par son billet , m'a irrésistiblement ramenée vers cet auteur .





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Rattrape-le !

Dans cette petite ville de l'Arkansas, la famille Stevens est fort appréciée et respectée. En effet, le père, David, est pasteur à l'église pentecôtiste unitaire. Lorsque Lily, à peine 18 ans et lycéenne, tombe enceinte de son petit ami, Peter, il ne fait aucun doute, pour la communauté, que le jeune couple doit se marier. Mais deux jours avant la célébration, le jeune homme disparaît mystérieusement. Si tous pensent qu'il a fui ses responsabilités, même le chef de la police qui n'envisage aucune recherche, la jeune femme, elle, n'y croit pas un seul instant. Elle est persuadée qu'il lui est arrivé quelque chose, d'autant que son jeune frère, Adam, lui apprend qu'un certain Chance cherche à le joindre. Bien décidée à le retrouver, elle se tourne vers Allan Woodson, le collègue de Peter qui travaille aussi de nuit au Corinthian Inn Hôtel...



Fils d'un prêcheur baptiste, Jake Hinkson connaît, l'on n'en doutera pas, les aspects et les fondements de cette Amérique puritaine. Et la critique de l'église est bien dépeinte, notamment la façon dont les membres doivent se comporter, interagir et se jugent. L'on ressent le poids porté par les nouvelles générations. Avec cette toile de fond comme décor, l'on s'attendait à des révélations et des rebondissements mais il n'en fut rien. Cette histoire de disparition, où surgissent proxénètes et escrocs à la petite semaine, est décevante. La faute peut-être à ces personnages pas assez approfondis, à ces retournements peu crédibles, à ce rythme trop lent et plat, à cette écriture manquant de personnalité...

Une lecture en demi-teinte...
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Rattrape-le !

J'avais découvert Jake Hinkson avec son précédent roman "Au nom du bien". Et la belle critique de Christophe_bj sur ce nouveau livre de l'auteur m'a donné envie de le découvrir.



Jake Hinkson vient d'une famille religieuse : un père diacre, une mère secrétaire pour une église, un frère pasteur. C'est un milieu qu'il connait de l'intérieur et dont il dépeint l'hypocrisie dans ses romans.



Lily est fille de pasteur et enceinte, dualité pas très appréciée par la communauté religieuse dont son père est le pasteur, communauté assez extrémiste. Son futur mari, Peter,vient de s'évanouir dans la nature. Pour échapper aux mariage, raconte les mauvaises langues. Lily qui n'y croit pas, se lance à la recherche de Peter, avec l'aide d'Allan, géant homosexuel, ancien collègue de Peter.



J'ai mis un peu de temps à renter dans ce roman,un peu exaspérée par le personnage de Lily, qui malgré cette grossesse non prévue, se montre au début très respectueuse des préceptes de son église, malgré les critiques dont elle est l'objet. Et puis, son enquête lui révèle bien des faits qu'elle n'aurait pu imaginer. Loin de se laisser abattre , elle va persévérer, faire front, et s'autoriser enfin à être elle-même, ne plus museler ses émotions au nom de principes figés.



Alors bien sûr l'enquête est intéressante, la tension présente, les rebondissements nombreux, mais plus que cet aspect roman policier, j'ai aimé dans ce livre les personnages. Lily d'abord, et puis Allan, qui va l'accompagner et lui aussi remettre en cause son attitude passée. Il est stigmatisé par cette communauté en raison de son orientation sexuelle, il ne croit pas, mais sera celui qui s'efforcera le plus d'aider Lily et d'agir en fonction de ce qu'il pense être le bien. Il y a aussi les parents de Lily, qui même profondément religieux, sont toujours là pour leur fille, l'entourent de leur amour et ne laissent pas les critiques des autres membres de la congrégation, assez détestables pour la plupart, confits dans leur religion, entièrement dans le paraitre et dépourvus de la moindre charité, semer la zizanie dans leur famille.



Ce roman, via cette enquête menée par Lily et Allan est une charge contre les dérives de la religion, quand elle devient extrémiste, et l'hypocrisie de ces personnes pour qui le paraitre est essentiel, plus que leurs actes. Elle est d'autant plus crédible que l'auteur sait rester nuancé. Il y a des méchants et des gentils dans les deux camps, les religieux et les non religieux.
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Rattrape-le !

Dans l'Arkansas, la famille Stevens appartient à la communauté religieuse pentecôtiste intégriste d'une petite ville. le père en est le pasteur. Mais sa fille de 18 ans, Lily, encore lycéenne, est enceinte de son petit ami Peter. C'est une tache pour la famille, mais Peter semble décidé à épouser Lily, ce qui pourrait limiter les dégâts. Cependant, de manière inexplicable et soudaine, Peter disparaît. Tout le monde pense qu'il a voulu fuir à la fois Lily et ses responsabilités, mais Lily se refuse à croire à cette version des faits. Envers et contre tout et tous, elle va mener l'enquête, ce qui va l'amener à bien des découvertes totalement inattendues. ● J'ai lu tous les livres de Jake Hinkson (sauf The Big Ugly, introuvable en français comme en anglais) et à chaque fois pour moi la magie opère. C'est un maître en matière de composition d'intrigue, il excelle dans le roman noir. le rythme de son récit n'est ni trop lent, ni trop rapide : il est efficace et au service de l'intensité de l'histoire racontée. Les rebondissements, tous vraisemblables, abondent et on ne lâche pas le livre avant de l'avoir terminé. La fin est magistrale. Les personnages sont travaillés, ont de la profondeur. On s'attache à Lily et à son oncle Allan, mais aussi à son père et à sa mère, désorientés, perdus, ne sachant que faire. Allan est un personnage magnifique : celui qui ne croit pas, qui est considéré comme un pestiféré par la communauté est aussi celui qui agit le plus en faveur du Bien, par simple souci moral. ● Ayant baigné toute son enfance, son adolescence et sa jeunesse dans une communauté évangélique (son père était diacre, sa mère secrétaire dans une église, ses oncle et tante dirigeants d'une église dans la si particulière région des Ozarks), sa critique de cette Eglise est particulièrement bien menée. La façon qu'il a de dénoncer l'hypocrisie de ce milieu est jubilatoire et implacable (— Ça alors. Je ne savais pas que ce petit connard était doué à ce point. Pour moi, c'était un bon petit rat d'église. — Souvent, ce sont les pires.) Mais dans ce roman, la religion peut aussi être vécue avec sincérité : c'est le cas de Lily par exemple, mais aussi de son père. le livre évite le manichéisme. ● La critique sociale s'associe à la perfection aux éléments du roman noir et du polar pour produire des récits brillants dont on se délecte. Je conseille sans réserve celui-ci ! ● (Mesdames et Messieurs de Gallmeister, quand traduirez-vous et publierez-vous The Big Ugly paru en anglais en 2014 ?)
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Au nom du bien

Trente mille dollars. C'est le prix que doit payer Richard Weatherford, pasteur de la petite communauté de Stock, Arkansas, pour faire taire son ex-amant et dissimuler aux yeux de ses paroissiens d'abord, à ceux de son épouse et de ses enfants ensuite, sa liaison homosexuelle. Sauf que ces trente mille dollars, bien entendu, Richard Weatherford ne les a pas et qu'il ne pourra pas se les procurer légalement sans susciter des questions embarrassantes.



Dans cette petite communauté conservatrice et bien pensante tentée par le vote en faveur de Donald Trump (nous sommes en 2016), où l'Eglise et la stricte observance des dogmes chrétiens occupent une place considérable, où les plaisirs profanes sont suspects et où l'alcool même est interdit, un pasteur adultère, et de surcroît homosexuel, serait du plus mauvais effet…



S'ensuit un enchaînement implacable de chantages, de fausses promesses et de manigances au sein desquels s'emballe ce récit choral où une poignée de personnages se révèlent prêts à tout - et surtout au pire - pour préserver les apparences ou s'acheter à n'importe quel prix une vie meilleure.



Jake Hinkson est le fils d'un pasteur baptiste, ce qui - pour des raisons qui lui appartiennent - est apparemment à l'origine d'un traumatisme et d'une véritable haine contre l'Eglise protestante qui, de roman en roman, nourrissent toute son oeuvre. Avec "Au nom du bien" il s'en donne ici à coeur joie dans ce procès résolument à charge contre une communauté religieuse et une foi qui ne signifient rien d'autre à ses yeux qu'hypocrisie, faux-semblants et accommodements en tous genres afin que soit préservé aux yeux de tous l'honneur de l'Eglise et de ses représentants.



J'ai lu avec un certain plaisir ce roman bien construit, à mi-chemin de l'étude de moeurs et du thriller, qui ménage savamment ses effets et élabore pas à pas et avec talent son intrigue ; une intrigue qui, au fil des pages, gagne en noirceur jusqu'à un dénouement plein de cynisme où "au nom du bien" s'exprime en toute impunité ce que l'on peut trouver de pire dans l'âme humaine. Mais je n'ai pas été réellement convaincue par ce roman : trop de parti-pris, trop de règlements de compte personnels, peut-être, et des personnages caricaturaux auxquels je n'ai pas réussi à m'attacher.



Une lecture agréable, distrayante. Sans plus.



[Challenge Multi-Défis 2020]

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L'enfer de Church street

J'ai mal à ma foi, docteur, c'est grave ?



Effectivement ce livre fait très mal à la foi. Garanti 100 % hérétique, ce livre est une ode à l'athéisme et au laïcisme. Du pur nihilisme théologique. Un chemin de croix dont il faudra porter l'épaule lourde pour en gravir la colline.

Jake Hinkson, l'auteur, lui-même fortement marqué par son éducation religieuse frappe là où ça fait mal et nous délivre une charge sauvage contre la bigoterie. Il a du en baver gamin et on ressent les traumatismes de cette éducation que l'on imagine sans peine avoir été rude et peu amène.



Empli de cynisme, l'auteur délivre son poison qui lentement va se distiller dans vos veines au fur et à mesure des pages tournées.

L'écriture est sèche, clinique, donne des coups de trique aux plus récalcitrants. Jake Hinkson nous plonge dans un univers d'une noirceur étouffante et nous n'aurons pas de bons mots comme dans "Pike" de son collègue Benjamin Whitmer pour nous permettre de prendre quelques goulées d'oxygène avant de replonger tête béante dans ce marasme. Non, il faudra boire la coupe jusqu'à la lie et se régaler de cette hostie vénéneuse que nous sert le diacre Hinkson.



Digne héritier d'un Jim Thompson, personne n'est épargné et ne trouve grâce aux yeux d'Hinkson. Ce bouquin est une violente diatribe contre la religion et l'hypocrisie qui en émane, tant de la part de ses porteurs de foi que des ouailles qui s'en repaissent.



Jugez plutôt :

"Mais c'est exactement la raison pour laquelle la religion, pour l'essentiel, est une escroquerie. En dépit de toute son histoire et de son prestige, de tous les bâtiments construits pour l'honorer et de tout le sang versé pour la diffuser, la religion n'a rien de différent des lignes de la main ou de l'interprétation du marc de café."



"Cela me frappa de plein fouet, comme une inspiration divine. La religion est le boulot le plus génial jamais inventé, parce que personne ne perd jamais d'argent en prétendant parler à l'homme invisible installé là-haut. Les gens croient déjà en lui. Ils acceptent déjà le fait qu'ils lui doivent de l'argent, et ils pensent même qu'ils brûleront en enfer s'ils ne le paient pas. Celui qui n'arrive par à faire de l'argent dans le business de la religion n'a vraiment rien compris. »



Jake Hinkson crée avec son personnage, Geoffrey Webb, l'archétype de l'odieux personnage, d'un ministre de Dieu plein de vices, veule et vil. Une revisite du "Tartuffe" violente et immorale pour le plus grand bonheur du lecteur. Manipulations, mensonges, abus, meurtres, tromperies sont le pain quotidien dont va se nourrir ce personnage principal pour tenter de se hisser au sommet de la chaîne alimentaire chrétienne. Et nous, pauvres hères naïfs, qui allons nous bien pouvoir prier pour en sortir vivant ? Saint-Roman Noir, priez pour nous...







ps : Impossible de terminer cette chronique sans saluer l'excellent travail éditorial des éditions Gallmeister et la qualité du papier de leurs couvertures, aussi douces que leurs contenus sont rugueux et âpres. La première immersion sensorielle est présente dès la prise en main et c'est un petit bonheur de se plonger dans les tréfonds et tourments de l'âme humaine
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Au nom du bien

Richard Weatherford est un pasteur aimé, respecté, dans un trou à rats de l’Arkansas. Très investi dans la lutte pour la prohibition de l’alcool. Ses voisins, qui ont planté dans leur jardin la même pancarte que lui, «Pas d’alcool dans le comté de Van Buren», lui font de chaleureux signes de connivence, pouces dressés.

Mais voilà, Gary - «un pion du diable»-, avec qui Frère Weatherford a eu une relation marquée du sceau infâme du péché, veut monnayer son silence.

Au nom du bien (étant entendu que le bien suprême c’est de sauver sa réputation) jusqu’où ira le bon Pasteur?

En tout cas, pour faire éclater la vaste supercherie, l’escroquerie monumentale d’une pratique religieuse qui ne se préoccupe que des apparences, Jake Hinkson, lui, n’y va pas avec le dos de la cuillère.

Ça aurait dû être réjouissant.

Mais ce n’est pas une grande réussite à mes yeux, ça sent le règlement de comptes (avec son père qui était diacre? avec l’Église pentecôtiste ultra-orthodoxe qu’il a un temps fréquentée? avec l’Arkansas, dont il est originaire et qui a nourri ses cauchemars durant des années après son départ?), ou du moins le roman qui tient avant tout à faire passer son message sans trop s’occuper de subtilités littéraires. Il en fait trop, je n’y ai pas vraiment cru, je n’ai pas trouvé ça très habilement amené. Ça aurait pu être beaucoup plus malin, avec plus de retournements de situation surprenants.

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Sans lendemain

Lorsque Billie Dixon posa ses valoches emplies de bobines de films à fourguer au cinéma du coin dans ce trou perdu d'Arkansas que personnifie Stock's Settlement, elle n'imaginait pas le flot d'emmerdes incommensurable qu'elle allait s'agréger.

Nous non plus.



Sans Lendemain est un sublime portrait de femme.

De celles au caractère entier qui assument ce qu'elles sont, désirent et accomplissent.

Un esprit libre en totale opposition avec l'ordre établi et l'obscurantisme religieux.

En parlant d'obscurantisme, j'aperçois, au loin, le jovial prédicateur, frère Obadiah, flanqué de sa sublime épouse, Amberly.

De ce trio singulier devait naître des étincelles. Ce fut un véritable feu de forêt.



Lorsque le vin est tiré, il faut le boire.

Un adage auquel va se frotter Billie, dégustant le calice jusqu'à la lie.

Inéluctabilité du destin. Engrenage fatal.

Appelez ça comme vous voulez.

Ne subsiste qu'une femme aux abois condamnée à affabuler pour tromper la mort.



Sans Lendemain est d'une force peu commune au déroulé imperturbable.

Un rouleau compresseur parfaitement maîtrisé à l'éloquence épurée.

Phrases courtes. Intensité maximale.

Portrait d'une Amérique pudibonde, archaïque et phallocrate qu'il ne fait pas bon titiller...
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L'enfer de Church street

Dans « L’enfer de Church Street » paru en 2012, Jake Hinkson, auteur du très réussi « Sans lendemain », mêle comme à son habitude la religion et le crime. Ce fils de prêcheur baptiste connaît son sujet et réussit le prodige d’écrire des romans hors du temps, qui trouveraient leur place dans les années cinquante, au coeur de l’âge d’or du roman noir.



Geoffrey Webb, l’anti-héros du roman se fait braquer sur un parking. Notre homme est passé de l’autre côté du miroir et ne semble pas craindre le pistolet que braque sur lui son agresseur. Il a même le culot de lui proposer un marché : en échange des trois mille dollars qui se trouvent dans son portefeuille, ce dernier devra le conduire en voiture juste qu’à Little Rock, Arkansas, située à cinq heures de route. Webb va se confesser auprès de son agresseur et lui narrer la succession tragique d’évènements qui l’ont conduit dans ce lieu où la peur des hommes n’existe plus.



« Je vais vous dire pourquoi je vais aller en enfer. Vous vous rangerez rapidement à l’idée que je le mérite. »



Après avoir fini ses études supérieures, Webb trouve un premier emploi d’aumônier à « l’Eglise Baptiste pour une Vie Meilleure » dans le sud-ouest de Little Rock. Une vocation singulière qui dissimule un calcul froid. « La religion est le boulot le plus génial jamais inventé, parce que personne ne perd jamais d’argent en prétendant parler à l’homme invisible installé là-haut. Les gens croient déjà en lui. Ils acceptent déjà le fait qu’ils lui doivent de l’argent, et ils pensent même qu’ils brûleront en enfer s’ils ne le paient pas. Celui qui n’arrive pas à faire de l’argent dans le business de la religion n’a vraiment rien compris. »



Calculateur et perspicace, Webb a tôt fait de jauger la communauté qu’il vient d’intégrer, et n’a que mépris pour le pasteur qui la dirige, le dénommé Frère Card. Il distille tel un serpent des sermons érudits et percutants qui lui permettent de trouver rapidement sa place au sein de la communauté, tandis que le soir venu, il pioche dans son imposante collection de films pornographiques. Notre imposteur semble maîtriser sa partition à merveille. Du moins jusqu’à ce que la rencontre d’une jeune fille de seize ans, « sans attrait, grosse », ne déclenche un désir aussi inexplicable qu’irrésistible.



Webb ne le sait pas encore mais cette rencontre marque le début d’un véritable voyage au bout de l’enfer, qui de lâchetés en compromissions, conduira notre homme au coeur des ténèbres.



« Un livre totalement immoral, d’une drôlerie, d’un humour, d’une ironie extraordinaires », mentionne le bandeau un brin enjôleur apposé sur cette réédition par Gallmeister d’un roman sombre comme une nuit sans lune. Si l’humour noir et la faconde ironique sont au rendez-vous, ce roman ne m’a jamais semblé « immoral », bien au contraire. Si l’adjectif « immoral » est probablement jugé transgressif et censé constituer à ce titre un gage de qualité, il faut rétablir une vérité : une morale teintée d’ironie irrigue le roman et constitue in fine le coeur de l’intrigue développée avec malice par Jake Hinkson. Comme « Sans lendemain », « L’enfer de Church Street » s’attache avant tout à dénoncer l’hypocrisie absolue qui règne dans une communauté prête à sacrifier son âme sur l’autel des apparences.



S’il joue avec maestria avec les codes du roman noir, « hard boiled », l’auteur dévoile pour mieux les dénoncer les faux-semblants de la communauté baptiste où se déroule l’intrigue. A sa manière, il sonde les reins et les coeurs et dynamite avec un plaisir non feint la duplicité d’une société disposée à toutes les compromissions pour satisfaire son désir de respectabilité. Comme ses illustres prédécesseurs, Raymond Chandler ou Ross McDonald, Jake Hinkson nous emporte dans une intrigue qui s’assombrit chaque page davantage. Au-delà de la violence inouïe que déchaîne un psychopathe prêt à tout pour parvenir à ses fins, l’auteur nous rappelle que, « L’enfer de Church Street » est avant tout le lieu où se côtoient imposteurs, pharisiens, et tartuffes sans envergure.



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Sans lendemain

-Où allez vous Melle Dixon ?

-En Arkansas.

-N'y allez pas

-Pourquoi?

-Passé ces montagnes , vous allez arriver chez les sauvages; des grenouilles de bénitier qui ne jurent que par la parole de Dieu, des campagnards arriérés qui n'auront que faire de vos bobines hollywoodiennes.

-Je n'ai pas peur , tout se passera bien.Merci quand même.



Mais tout ne va pas bien se passer pour notre représentante. Dès son arrivée au fin fond de l'Arkansas, le responsable du cinéma la met en garde contre l'homme le plus puissant du comté, le pasteur, revenu aveugle de la guerre.



Une histoire simple, linéaire. Une écriture simple, un destin simple. Et pourtant un livre attachant, faisant une belle part aux femmes dans une société où l'interprétation de la parole divine guide le quotidien.

Ici les femmes sont shérifs, représentantes dans le cinéma, rêvent d' Hollywood .

Au delà du destin de Billie (Melle Dixon), ce livre plante le décor de l' américaine puritaine de 1947 en Arkansas.

Les relations entre femmes sont au cœur de l’œuvre et en constituent finalement le pole d'intérêt majeur, presqu'autant si ce n'est plus que le coté policier. On ne peut pas dire que le suspens soit insoutenable, loin de là.

Il n'empêche que ce livre , bien dans la lignée de ce que fait cette maison d'édition (sans le coté nature writing), nous plonge dans l'autre Amérique avec des personnages attachants, une histoire forte et bien racontée, sans fioriture.
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Sans lendemain

Ce n’est pas une surprise si le roman de Jake HINKSON » Sans lendemain » a reçu le Grand Prix de la Littérature Policière – Etrangère en 2018. Traduit de l’américain par Sophie Aslanides, ce roman noir addictif est publié en 2019 aux éditions Gallmeister. Jake HINKSON est originaire de l’Arkansas. Né en 1975, ce fils de prêcheur baptiste découvre en cachette à quatorze ans le roman policier. Les deux obsessions de ses jeunes années – la religion et le crime – l’habitent encore aujourd’hui. Il vit à Chicago, où il passe le plus clair de son temps à écrire et à fréquenter les salles de cinéma.

A la fin de la guerre, en 1947, les américains n’aspirent qu’à une chose : rêver d’un monde meilleur. Et pour se faire, Billie Dixon sillonne les routes pour tenter de vendre des films de seconde zone dans les bleds les plus paumés des Etats-Unis. Chargée de la distribution des Etats du Sud pour PRC depuis quelques semaines à peine, Billie réalise que les mentalités, quant à elles, n’ont pas vraiment évoluées, notamment lorsque le propriétaire du cinéma de Kansas City lui prédit des difficultés à venir…

p. 13 » – Vous devriez éviter l’Arkansas. Une fille seule dans ce coin-là, vous porriez bien avoir des ennuis […] Je vais vous dire, là-bas, c’est un autre monde, Billie. C’est là que le Midwest s’arrête et que le Sud commence, et elle n’est pas jolie la transition. «

Sans tenir compte des recommandations qui lui ont été faites, Billie arrive enfin dans l’Arkansas. Lorsqu’elle rencontre le propriétaire du cinéma, Claude Jeter, celui-ci lui explique qu’il ne serait pas contre le fait d’investir et de projeter de nouveaux films. Mais la difficulté serait de convaincre le pasteur du coin.

p. 22 : » – Mon problème numéro un, c’est l’homme d’Eglise qui vit de l’autre côté de la rivière, là-bas, qui a la plus grande église du coin ; il a décidé que les films étaient l’œuvre du diable. «

Claude lui propose alors de rencontrer Obadiah Henshaw, le pasteur, pour tenter de lui proposer un accord financier, en échange de ne plus dissuader les habitants de se rendre au cinéma. Comprenant que cet accord est également dans son intérêt, Billie se rend chez le pasteur.

Lorsqu’elle rencontre le pasteur, elle est d’abord surprise de voir que l’homme est aveugle, blessé durant la guerre. Mais sa plus grande surprise est de faire la connaissance de la femme du pasteur : Amberly.

p. 49 : » – J’ai vu des choses d’une beauté fabuleuse, dis-je. Des hôtels en marbre, des piscines aussi grandes et bleues que le ciel. J’ai vu des millionnaires, des stars de cinéma et des mannequins, mais je n’ai jamais rien vu de plus beau que la femme qui se tient devant moi. «

Billie se voit invitée par cette dernière en l’absence de son mari. Ne sachant comment interpréter cette demande, Billie ne peut cacher son trouble.

p. 51 : » […] je ne connaissais que trop bien ce jeu-là. Le flirt vain qui ne menait à rien. J’avais déjà vu ça. Certaines personnes aiment approcher au plus près de ce qu’elles désirent de manière à ressentir, ne serait-ce qu’un instant, la brûlure de sa concrétisation imminente, avant de faire machine arrière sans avoir été souillées par l’acte. «

Une troisième femme d’influence va tenir un rôle essentiel dans le déroulement de l’intrigue : Lucy Harington. Elle et son frère Eustace sont chargés de faire respecter la loi à Stock’s Settlement. Or, le drame qui se prépare va faire interagir ces trois destins de femme.

» Sans lendemain « est un sublime polar, où les femmes ont une place essentielle dans un contexte qui ne leur en laisse guère ! Et c’est sur cette ambivalence que joue l’auteur tout au long du récit. Une belle découverte, mêlant des sujets ô combien toujours criant d’actualité…
Lien : https://missbook85.wordpress..
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Rattrape-le !

Quand tu es né d'un père diacre et d'une mère secrétaire dans une église, que ton frère est pasteur, que tu as passé le temps libre de ta jeunesse à la messe ou en camps religieux avant, un peu plus tard, de t'éloigner de la religion, comment s'étonner de la retrouver au centre de ton oeuvre une fois devenu écrivain ?



C'est le parcours atypique de Jake Hinkson, qui a fait de la question de la foi et de la façon dont la pratiquent certains américains, le fond de sauce de ses livres. Et encore cette année avec Rattrape-le ! traduit par Sophie Aslanides



Un livre qui aurait pu s'appeler Recherche Peter désespérément, puisque l'impétrant n'a rien trouvé de mieux que de disparaître juste avant d'épouser la jeune Lily qui attend son enfant. Fille de pasteur, cette union ne fait pas l'unanimité dans sa famille, et encore moins dans la communauté pentecôtiste apostolique de cette petite ville de l'Arkansas.



Alors que chacun pense que Peter n'a fait que lâchement fuir ses responsabilités, jetant la honte sur la famille de Lily, celle-ci est persuadée du contraire et qu'il est arrivé malheur à son promis. Avec l'aide plus ou moins volontaire d'Allan, collègue de Peter qui en sait plus qu'il ne le dit, elle décide de mener l'enquête.



Entre prostitution sordide et petits trafics de drogues locaux, l'intrigue de Rattrape-le ! se laisse lire, sans déplaisir aucun mais, avouons-le, avec un peu moins d'enthousiasme que pour les précédents.



Toujours la même délectation en revanche pour cette observation acérée de ce microcosme de tartuffes ricains et cette dénonciation de leurs travers qui les poussent généralement à voir davantage les pailles que les poutres dans les lits de leurs voisins.



Et rien que pour ça, j'en redemande du Hinkson !
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Au nom du bien

Encore un très bon roman noir découvert grâce aux billets de Babelio !

Richard, pasteur dans l'Arkansas, est réveillé par un coup de fil en pleine nuit : le jeune Gary, avec lequel il a eu une aventure homosexuelle, lui demande 30,000 dollars avant ce soir sinon il révèlera leur liaison.

Seule solution pour Richard, trouver cet argent discrètement, en faisant lui aussi pression sur un de ses paroissiens.

La seule boussole de Richard est d'éviter le scandale et surtout que sa femme et ses cinq enfants ne se doutent de rien, et pour cela il n'hésitera pas à employer tous les moyens, même les moins...catholiques (si l'on peut dire cela d'un pasteur !)



Le roman est construit sous une forme chorale, et l'on entre peu à peu dans la tête de chacun des protagonistes.

Les motivations des uns et des autres sont simples : gagner le plus d'argent possible pour les uns, éviter à tout prix le scandale pour...l'autre !

Cela donne un roman rythmé (tout se passe en 24 heures) , jouissif, féroce, témoin d'une communauté protestante hypocrite, basée sur l'apparence, et surtout pas sur l'amour des uns et des autres !

A lire d'urgence si on apprécie la noirceur et le cynisme...en littérature bien sûr ;-) (la chute est excellente !!)

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Au nom du bien

24 heures dans la vie d’un prêtre, et quel prêtre !



Richard Weatherford est le pasteur de Stock, petite ville des Ozarks dans le nord de l’Arkansas. Avec sa femme Penny, ils sont les références de leurs ouailles et « jouent » à guider leurs vies dans ce bout d’Amérique conservatrice qui s’apprête à voter Trump. Bon, on l’aime moyennement, mais il défend quand même nos valeurs... Alcool, sexe, enfants, TV, fréquentations… C’est facile, tout est réglé par la religion et Frère Richard est là pour rappeler le chemin aux quelques brebis que le malin tenterait. Douter oui, mais pas longtemps.



Sauf qu’un moment d’égarement de Frère Richard va venir fracasser ce fragile château de cartes a priori bien ordonné, plongeant en l’espace d’une journée le prêtre et sa communauté dans le doute puis le chaos total. Vengeance, chantage, parjure, baston, incendies, crimes… L’heure de l’addition a sonné pour Richard, devenu le symbole de cette hypocrisie puritaine et sclérosante d’un autre temps !



« Quelle merde cet endroit. Il est le roi des hypocrites. Il est leur grand héros et regarde ce qu’il est. Juste un gros menteur. » … « Il va nous payer. Il va nous payer ce qu’il nous doit. Il va nous payer ce que ces connards nous doivent. »



Une fois de plus, Jake Hinkson démontre dans Au nom du bien – joliment traduit par Sophie Aslanides – sa totale maîtrise du noir. Après les superbes L’enfer de Church Street et Sans lendemain, il continue à explorer les effets de la religion du côté le moins brillant de la médaille, plongeant ses personnages particulièrement travaillés – Brian l’entrepreneur looseur, Tommy le parrain parvenu, Gary et Sarabeth les amoureux rêvant d’ailleurs et enfin Penny, faux pantin qui se découvre une âme et un cerveau – dans un tourbillon de questionnements, introspections, remises en cause, le tout dans un rythme de métronome.



C’est noir, c’est drôle, c’est brillant !

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Au nom du bien

Étant donné que j'ai lus tous les livres - du moins ceux qui ont été traduits en français - de Jake Hinkson, je peux d'ores et déjà dire que j'aime beaucoup cet écrivain et qu'on retrouve dans chacun de ces livres une critique de la religion catholique. Dans Sans lendemain (son avant-dernier ouvrage), il nous servait une passionnante histoire d'amour lesbien entre une jeune femme et une autre mariée à un pasteur...



Cette fois, le protagoniste dont nous allons principalement parler est Richard Weatherford, le pasteur d'une petite ville de l'Arkansas. Il a couché avec un jeune homme, Gary, et celui-ci le fait désormais chanter. Contre 30 000 dollars, il ne dit rien à personne et met les voiles. Seulement, il faut pouvoir se procurer tout cet argent... ce qui va mener cet homme de foi, prêt à tout, dans un enchaînement de mensonges.



Au fur et à mesure, nous allons rencontrer d'autres personnages, arborant tour à tour leur point de vue : celui de Gary Doane, le maître chanteur ; de Sarabeth Simmons, qui est vue comme la traînée de la ville et dont le beau-père, Tommy, est le salaud qui tient un bar dans le petit village ; Brian Harten, qui veut ouvrir un magasin de boissons, mais aussi Penny Weatherford, la femme de Richard qui ignore tout des penchants sexuels de son mari...



Ses destins vont finir par s'entremêler, liés par le pasteur qui tient absolument à conserver sa réputation et à ce que sa femme et ces cinq enfants n'apprennent pas son aventure homosexuelle. Dans ce roman choral, nous allons avoir la possibilité de suivre les pensées de plusieurs personnages et de comprendre ce qui peut mener ces différent·e·s protagonistes à agir ainsi, dans cette petite ville de l'Arkansas de l'Amérique profonde, où l'homosexualité est encore un pêché... pire encore pour un homme marié et de l'Église.



À mon tour, j'ai été prise dans cette spirale infernale où un croyant est prêt à tout pour ce qui lui semble être fait "au nom du bien". Ainsi, le titre de ce livre prend tout son sens. Un roman noir qui se dévore et qui nous permet de nous interroger sur les tréfonds de l'âme humaine. Une fois encore, Jake Hinkson met en avant les travers de la religion, et offre aussi une véritable critique de l'Amérique et de cette vision étriquée du bien, et faussée de ce qui est mal (diabolisation de l'alcool, des relations qui ne sont pas hétérosexuelles ou hétéro-romantiques...). C'est puissant et à dévorer de tout urgence !
Lien : http://anais-lemillefeuilles..
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Au nom du bien

Pasteur dans un bled paumé de l'Arkansas, Richard Weatherford a bien du mal à concilier foi et famille avec ses penchants crypto-impies. Malgré tout, ça marche pas trop mal pour lui. Depuis des années et au prix d'efforts monstres, l'hérésiarque réussit à peu près à faire taire ses tendances pas très catholiques. Enfin, réussissait plutôt jusqu'à ce qu'il rencontre Gary Doane, le loser du coin pour qui les insultes homophobes de la cour de récré persistent à résonner dans sa vie de jeune adulte et qui ne met pas des lunes à percer à jour la vraie nature du Révérend (nous apportant dans la foulée la preuve que le gaydar, à l'instar d'El Chupacabra, existe peut-être !)

Pas de mal avec un tel postulat de départ à imaginer comment Gary va avoir l'idée de faire cracher le cureton au bassinet après l'avoir fait cracher d'une façon toute différente.

Un plan démoniaque qui se déroule comme prévu ou presque puisque frère Weatherford n'ayant pas la somme d'argent exigée à disposition, les 24 heures de battante qu'il obtient pour la dégoter vont le plonger lui, sa famille et quelques brebis égarées du coin dans des remous gadouilleux dont certains n'auront plus l'occasion de sortir.



Au nom du Bien ou l'inéluctable chute d'un homme d'église. Non, pas tout à fait. C'est oublier un peu vite les ressources insoupçonnées qu'un être humain est capable de puiser quand on le menace d'annihiler son monde et pour Richard Weatherford il s'agit non seulement de son monde terrestre, sa famille et sa réputation mais aussi de son billet d'entrée pour le royaume des cieux qu'il croyait jusque là largement acquis.

Mais dans ce petit patelin pro-Trump dont les seules fleurs poussant dans les jardin sont les pancartes vantant la politique de l'agent orange, tout est toujours possible et Jake Hinkson, familier des revirements de situations inattendus nous sert comme à son habitude un petit noir bien serré qu'on serait bien mal inspiré de refuser.

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Au nom du bien

Le comté de Stock se situe dans le nord de l'Arkansas, en pleine «Bible belt». La vente d'alcool y est interdite et on y enseigne les théories créationnistes. Au cours des Primaires républicaines du printemps 2016, les pancartes « Make Amercia great again » fleurissent sur les pelouses tondues au cordeau.

Les fidèles de l'église baptiste s'activent aux préparatifs de la fête de Pâques sous la houlette de leur pasteur, Richard Weatherford. L'homme est à la la tête de cette communauté dynamique depuis une dizaine d'années. Il est épaulé dans sa mission par Penny, son épouse dévouée, avec qui il élève cinq enfants dans les préceptes de la foi chrétienne. Une famille semblable à celle de la série «7 à la maison». Mais la vie bienséante de Richard Weatherford est sur le point de voler en éclats. Son ancien amant menace de révéler leur relation homosexuelle s'il ne lui remet pas immédiatement 30.000$. Pris à la gorge, le pasteur entend bien se défendre par tous les moyens, quitte à mettre un voile sur la morale et les Évangiles. Le récit qui est concentré en une seule journée - le samedi qui précède Pâques- connaît alors de nombreux rebondissements. L'auteur dépeint un comté figé entre déclassement et bigoterie. La jeunesse étouffe dans l'ambiance malsaine des rumeurs malveillantes et des faux-semblants. Symbole de cette tartuferie, une psyché dans laquelle les personnages contemplent leurs reflets sans parvenir à saisir leur identité, comme s'ils étaient victimes d'un dédoublement entre ce qu'ils sont et ce qu'ils paraissent être… La cible de Jake Hinkson est évidente, il s'attaque à cette partie de l'Amérique engluée dans son hypocrisie. Avec ce récit sacrément efficace, il tape dans le mille.
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