Citations de Jérôme Garcin (583)
Elle lui demande de dédicacer le numéro de l'hebdomadaire Arts. Avant de le signer, Gérard se relit et puis tend l'exemplaire avec un grand sourire : "C'est un peu anecdotique, mais au moins, je n'ai pas triché..."
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- Quelles qualités appréciez-vous chez une femme ?
- Tendresse, générosité, lucidité.
- Quelles qualités appréciez-vous chez vos amis ?
- Le silence. J'aime qu'un ami sache l'observer.
Adossé à un vieux chêne-liège, un vieux Ramatuellois glisse à l’oreille de son voisin : « C’est peut-être mieux, ces funérailles sans cérémonie, sans église, sans prêtre. Mais tout de même… » Et l’autre lui répond : « Oui, tout de même, mais imagine le pire, que Dieu existe. Eh bien, il ne peut pas faire mauvais accueil à Gérard. (p. 186)
On visite volontiers le malheur mais on déteste les couples heureux. Ils rendent jaloux, ils font peur et creusent le vide autour d'eux.
Nous étions invincible. Dieu que nous étions bêtes.
Dieu que je les aimés, Pam et Mam, mes inséparables. Ils avaient la grâce sauvage des couples idylliques. Ils mêlaient la gourmandise des hédonistes à la spiritualité des pèlerins, un pied dans la cuisine de Colette, l'autre dans la sacristie de Mauriac... Ensemble, ils exhalaient un parfum d'éternité.
Car j'étais de cette race d'épicuriens qui ont besoin de lois pour jouir et, au tribunal comme au réduit, de stratégies pour gagner.
Quelle consolation ou quelle argumentation, enfin, suis-je donc allé chercher en visitant cette dynastie de mandarins ? Peut-être l'idée toute simple que si soigner, c'est sauver des vies, écrire, c'est les prolonger. Il fait beau, allons au cimetière, préconisait Emmanuel Berl. Et rappelons-nous à la mémoire de ceux qui, même disparus, ne nous ont pas oubliés
Il dit aussi qu'à Buchenwald seules la terreur et la poésie avaient le pouvoir de provoquer, dans le Block, un silence collectif immédiat.
La cécité a changé mon regard, elle ne l'a pas éteint.
"Pourquoi me demandes-tu si cela m'ennuie ou me fatigue ? Si tu n'étais pas là et si je ne devais pas t'expliquer, je verrais tout cent fois moins bien."
Somme toute, les Français boudent l’œuvre passionnante d'un auteur qui a eu le mauvais goût de mourir pour eux.
Je dois faire connaitre Jean de la Ville de Mirmont avant qu'il ne soit connu. S'il suffisait , pour vendre un livre, que l'auteur ait du génie, ça se saurait.
"D'Aure était l'héritier de la chevalerie, des tournois homériques, des destriers pompeux, des carrousels royaux, des Mousquetaires du roi, des Gendarmes de Luvénille, bref, des cavaleries de mecs qui vont de l'avant sans se retourner, saignent volontiers les flancs des chevaux et tirent sur leur bouche comme un marin sur une drisse de grand-vergue. Baucher, "le génie équestre le plus exceptionnel qui ait jamais existé" selon le général l'Hotte, inaugurait au contraire ce qu'on pourrait définir comme le siècle des femmes, ces reines incontestées du dressage de haute école, et le gouvernement des centaures de chapiteaux [...] qui œuvrent, en silence, dans l'élasticité, la légèreté et l'apparente décontraction."
Le cheval m'a parfois donné l'impression que j'y parvenais (à m'accomplir) portant sur son dos musculeux tout ce dont, à chaque foulée, je me délestais, mais c'est une illusion. Il ne concède en vérité, que des moments de répit. Il offre une récréation aux tourments ordinaires. J'ai longtemps cru qu'il m'aidait à grandir, à me grandir, jusqu'au jour où j'ai compris qu'il me restituait l'enfance que j'avais perdue. Un mélange d'allégresse, d'élasticité, d'émerveillement, d'inconscience et de témérité ; même pas peur. Avec lui je galope en arrière dans la poussière du temps.
J'aime le cheval parce que si parfois il m'avantage, jamais il ne me flatte. Il force à l'humilité, il ne me passe rien et, s'il accepte un jour de me récompenser de mes efforts, sans doute l'ai je alors mérité. C'est un grand donneur de leçons. Je ne peux rien lui imposer ; je lui propose seulement de consentir à faire, avec moi, un bout de chemin.
J'aime aussi travailler seul, l'hiver, dans le grand manège où le silence claustral, la semi-obscurité, les courants d'air et le persistant parfum de cinnamone froid évoquent ceux d'une cathédrale, un jour de messe basse.
"Si tu vivais encore, Olivier, peut-être me gronderais-tu, me malmènerais-tu, me forcerais-tu à sortir de mon cocon, me reprocherais-tu cette émotion excessive qui me saisit lorsque j'ouvre un vieil album de photos, mon goût grammatical pour l'imparfait, les passés simple et composé. Tu raillerais ma sensiblerie, je me moquerais de ton amnésie."
Il faut traduire leur silence. Et cela prend des années, des années… (p. 79)
Il ne voyait pas, mais il était plein d'images. (p.189)
Lorsqu'en plein randonnée, saisi par un scrupule, le mal-voyant exprime sa gêne d'obliger ainsi son ami à parler sans répit afin de lui décrire chaque parcelle du paysage, Jean a ce mot admirable : 'Pourquoi me demandes-tu si cela m'ennuie ou me fatigue ? Si tu n'étais pas là, et si je ne devais pas t'expliquer, je verrais tout cent fois moins bien".