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Critiques de Karel Capek (177)
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La guerre des salamandres

Il y a un sentiment d'injustice à constater l'oubli dans lequel est tombé ce roman. On pourrait d'ailleurs en dire autant d'autres textes de la même veine et de la même époque, à commencer par les livres de Jacques Spitz. C'était à l'époque où la science-fiction ou le fantastique n'étaient pas encore constitués en tant que genres littéraires, et moins encore en tant que ghettos. De la production européenne de l'époque, il ne subsiste plus grand chose dans la mémoire collective, hormis peut-être Barjavel quelques années plus tard. C'est ainsi que pour le grand public, le nom de Capek est tout juste cité à propos de l'invention du terme « robot », dans sa pièce de théâtre R.U.R, écrite en 1920.

La Guerre des Salamandres, pourtant, mérite encore amplement d'être lue aujourd'hui : dystopie à la fois loufoque et grinçante, le livre raconte la découverte d'une espèce intelligente de grandes salamandres marines, quelque part au large de Sumatra. le début fait croire à un récit d'aventures au ton léger et distancié. Mais on comprend vite qu'on ne tient là que la plus petite des poupées-gigogne du roman, dont la structure se modifie bientôt en s'élargissant progressivement, l'auteur n'ayant de cesse de déjouer les attentes de son lecteur. Les hommes apprivoisent tout d'abord les salamandres, trouvent bientôt très utile d'en faire une main d'oeuvre sous-marine corvéable à merci, et les exploitent sans vergogne en proclamant leur supposée infériorité. Puis ils comprennent l'étendue de leur erreur, mais il est alors trop tard pour revenir en arrière... Certains chapitres, qui pastichent le ton de l'étude scientifique, du reportage journalistique ou de l'analyse diplomatique sont franchement désopilants. Au terme d'un livre toujours surprenant, le final est si inattendu que l'on se demande s'il relève de la pirouette d'un auteur qui veut arriver au bout de son livre, ou bien si ce n'est pas la conclusion la plus habilement dérangeante qui soit.

Au bout du compte, voilà un livre qui est bien de son époque et qui n'a pas tant vieilli que cela : dénonciation du capitalisme à courte-vue et de la crédulité des peuples, mais aussi des égoïsmes nationalistes, tout cela avec un spectre inquiétant en toile de fond : car cet empire des salamandres, où l'individu n'est que la simple composante de masses soumises à une autorité unique, qu'est-ce donc sinon la transposition grotesque des ordres totalitaires qui s'affirment alors en Europe ? La Guerre des salamandres en 1936, tout comme La Guerre des mouches de Jacques Spitz, deux ans plus tard, sont en somme des livres qui témoignaient à leur façon et avec une imagination débridée d'une angoisse alors très répandue  : l'imminence de la fin d'un monde.
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La guerre des salamandres

Voilà une satire brillante, originale et légère, de nos mœurs. Avec une fantaisie digne de Roald Dahl et une intelligence dans la critique et l'analyse de nos mœurs qui n'a rien à envier au grand Molière, Karel Capek fait la condamnation pessimiste de nos défauts et dénonce nos ridicules.

Cette dénonciation, accomplie, avec un art du roman consommé, est d'une rare force.

Karel Capek a beaucoup d'originalité et c'est avec truculence et légèreté, qu'il écrit son texte.

La réflexion sur la nature humaine est juste et puissante, et comment n'aurais-je guère de plaisir de lecture end découvrant cet écrit intelligent, original, puissant, profond, tragicomique et plein de verve ?...

Excellent !...
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L'Année du jardinier

Un livre destiné aux initiés au jardinage, aux accros de la petite fleur et du potager, ceux qui se battent avec le tuyau d'arrosage, surveillent la météo et leurs semis comme le lait sur le feu, ceux qui n'ont jamais assez de place pour planter tout ce qu'ils souhaitent, ceux qui bêchent et piochent sur la moindre petite parcelle laissée libre oubliant qu'ils avaient en fait déjà planté là une plante ou un bulbe pas encore sorti de terre !



Où l'on découvre également que l'engouement pour les activités jardinières mais aussi les jardineries ne datent certainement pas d'hier, ce texte si actuel ayant été écrit en 1929. Mais le jardinage est à la fois très dépendant du temps et intemporel...



Offert par ma sœur à Noël dernier, j'ai lu ce livre en janvier 2019, moment idéal car le jardinier y ''cultive surtout le temps"



Quiconque aime trifouiller la terre se reconnaîtra dans cette année du jardinier contée avec poésie et humour par Karel Capek et joliment illustrée par Joseph Capek.
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La fabrique d'absolu

A la lecture de cet ouvrage, le ton amical de Karel nous fait sourire et rire et nous absorbe dans un futur rocambolesque où resonne avec inquiétude la situtation de la planête et des êtres humains aujourd'hui... entre 1930 et presque 2020, ce Monsieur avait raison sur de nombreux points.



Presque aussi bien que la Guerre des Salamdres, le point de départ étant la physique et les religions.



Lu édittion de La Baconnière avec les dessins du frère Josef illustrant des scène s clefs de l'ouvrage.
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Contes d'une poche et d'une autre poche

Karel Capek : contes d’une poche et d’une autre poche. Nouvelles traduites du tchèque par Barbora Faure et Maryse Poulette, éditions du Sonneur, 2018

Plus que de nouvelles, ceci est un recueil de contes, comme son titre l’indique. En effet les histoires sont présentées comme des contes par leur forme : elles débutent toutes par une entrée en matière annonçant un récit du style « l’histoire que je vais vous raconter s’est passée en… », et sont relatées par des narrateurs différents.

Dans ces quarante-huit nouvelles, dont plus de la moitié étaient inédites en français, Karel Čapek mêle l’ordinaire à l’extraordinaire, l’humour à la satire ; il est souvent question de crimes, de disparitions, de mystères. Les Contes d’une poche et d’une autre poche sont parfois des paraboles qui font réfléchir, mais aussi beaucoup sourire.

Karel Capek (1890-1938) a écrit plusieurs romans, recueils de nouvelles, pièces de théâtre. Il parle pour la première fois du mot « robot » en 1920, dans un texte de science-fiction, terme inventé par son frère Josef.

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Voyage vers le nord

En librairie mes yeux se sont posés sur la couverture bleu verte de ce récit de voyage. Le résumé positionné verticalement sur la couverture m’a intrigué. Résultat je me suis laissé tenter.

L’auteur nous emmène en voyage à l’extrême nord de l’Europe en passant par le Danemark, la Suède et la Norvège. Le texte n’est que de la description des paysages traversés, vus ou ressentis de l’auteur. Cela pourrai paraître « bardant » mais en fait non. L’écriture est douce, poétique tout en restant accessible. Les petits dessins d’une main sûr et efficace nous montrent les paysages autrement que par les mots.

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Contes d'une poche et d'une autre poche

"Pourtant, croyez-moi, il faut qu'il y ait Quelqu'un d'absolument juste. C'est une évidence, Monsieur. Nous ne pouvons que châtier, pourtant il faut bien qu'il y ait quelqu'un, quelque part, qui pardonne. Je vais vous dire, la véritable justice, la justice supérieure, est aussi étrange que l'amour."

("Crime à la poste")



L'âme humaine est profonde. Profonde. Profonde...

Et Capek l'examine sous toutes ses coutures, dans ce double recueil des histoires criminelles "de poche".

Je retourne régulièrement avec plaisir vers ce livre rempli de la poésie des temps passés, et son atmosphère élégante de la Première République Tchécoslovaque, où les dames portaient des chapeaux "cloche" et des robes "charleston", et les hommes fumaient des "égyptiennes" et mettaient une fleur dans leur boutonnière.



Même si la qualité des histoires n'est pas toujours égale, on y trouve quelques merveilles inoubliables.

Comme cette "Ballade de Youraï Tchoup", à qui le Tout-Puissant à permis de survivre à une tempête de neige dans les Carpates, pour qu'il puisse se rendre à la justice humaine. Vous y sentez comme une odeur de lampes à l'huile, de manteaux en peau de mouton et de l'Ancien Testament.

Comme ce "Chute de la maison Voticky", où l'on résout une affaire vieille de 500 ans grâce à l'érudition d'un professeur obstiné et le sens de la déduction d'un commissaire dubitatif.

Comme ces histoires d'un voleur de cactus passionné, d'un très rare chrysanthème bleu, ou d'un cambrioleur-poète.

Ou "Les pas dans la neige", qui s'arrêtent inexplicablement au milieu de la route - faut il appeler la police, vu que ça frôle de près la métaphysique ?



Parfois on a une fin ouverte qui interpelle le lecteur; ni vu, ni connu, Capek nous fait réfléchir sur nos faiblesses, notre conscience, sur la justice humaine et la justice "supérieure" avec un détachement pragmatique et intelligent.

Ces histoires se lisent toutes seules. Et, étrangement, même si ça parle de crimes et meurtres, elles font chaud au cœur.

C'est la première fois que j'ai pu lire ce recueil en français, et je trouve que la traduction est plutôt bonne; ce n'est pas aisé de traduire les phrases de Capek, pourtant simples, mais où chaque mot est tellement à sa place. Y compris les expressions populaires un peu désuètes.



Il y a aussi de la nostalgie, là-dedans...

Où sont ces temps où l'on pouvait dire tout simplement : " Un crime, Monsieur, c'est soit une affaire de jalousie, soit une affaire d'argent."...?

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La guerre des salamandres

Indéniablement une trouvaille! multiple, lisible, inventif...
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La guerre des salamandres

En 1936, Karel Čapek aborde dans « La guerre des salamandres » un sujet grave avec une inventivité caustique : l'esclavage auquel conduit la cupidité des hommes dans un capitalisme effréné.

Ce roman d'anticipation commence comme un livre de Jules Verne. le capitaine van Toch découvre au large de Sumatra des animaux marins intelligents qui vont lui apporter des perles. En contrepartie il va leur apprendre à se battre contre les requins, leurs ennemis. Les protégées du capitaine qui ressemblent à de grandes salamandres vont donc se multiplier. Il y est attaché et va vouloir les déplacer pour agrandir leurs lieux d'habitat, les grottes marines souvent proches des côtes. Pour cela il va faire appel à un ancien camarade de classe devenu un homme d'affaires qui va tirer parti de la situation en exploitant ces néo-humains inattendus, en leur donner une valeur économique. Mais après s'être alliés, les hommes et les Salamandres vont se faire la guerre. C'est assez surprenant parce qu'on ne sait pas finalement qui est le plus humain des deux.

Beau conte philosophique et écologique qui montre que l'homme va à sa perte s'il veut dominer la nature à n'importe quel prix.





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L'Année du jardinier

Une très agréable respiration offerte par le cher Capek...
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Récits apocryphes

Dans les marges de la Bible, de Shakespeare ou de la grande Histoire, l'auteur écrit de brèves chroniques à l'humour méditatif : comment Abraham échoue à sauver Sodome et Loth refuse de quitter sa ville, ce que pense un boulanger de la multiplication des pains, l'enquête d'un jeune homme auprès de Ponce Pilate, un autre monologue d'Hamlet, ou cette lettre d'Alexandre le Grand à Aristote, par laquelle il lui explique qu'il a assuré la sécurité des "frontières naturelles de la Macédoine", de proche en proche, jusqu'aux confins de l'Inde. Ce genre existait déjà : les "Moralités Légendaires" de Jules Laforgue, ou certains contes de Karen Blixen ("Le vin du Tétrarque") exploitent cette mine infinie et chaque fois, quand le conteur a du talent, le plaisir littéraire est assuré. Seules certaines proses m'ont échappé, qui se réfèrent sans doute à des réalités tchèques des années 30 qui nous sont devenues indéchiffrables.
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La guerre des salamandres

Karel Čapek tend le miroir à l'humanité. Un reflet noir mais drôle.



Karel Čapek est un illustre inconnu dont pourtant beaucoup d'auteurs, de scientifiques et de lecteurs emploient un terme qu'il a inventé, rentré dans le langage courant : il est en effet L’homme qui inventa le terme Robot dans la pièce « R.U.R. ».



Nous sommes dans une histoire assez classique, celle de l'exploitation d'une ressource, ici les salamandres, des êtres qui ont eu la mauvaise idée de croiser la route de l'homme et lui faire miroiter des bénéfices substantiels en leur amenant sur un tapis rouge des perles naturelles devenues extrêmement rares. Les salamandres vont révéler d'autres avantages qui pourraient bien causer leur perte, ou celle de l'homme... La guerre du titre est trompeuse, n'occupant en fait que quelques pages en toute fin du roman.



Un roman datant de plus de 80 ans, malheureusement toujours d'actualité. Le capitalisme du début du 20ème siècle n'a pas à rougir face à celui de notre époque.

De la découverte du "sauvage" qui va bientôt passer à celui de "bon sauvage", l'histoire de ces salamandres est une satire de notre société. Tout y passe : industrie, finance, vie politique, géopolitique, nationalisme, racisme, société, médias, patron/ouvrier, syndicalisme, religion, éducation, la brocarde est salutaire, le cynisme à son paroxysme, l'humour y est noir, très souvent grinçant. Notre histoire, reconstruite dans les grandes lignes et qui n'est pas à porter à notre bénéfice.



Un défaut à mon sens, qui peut expliquer l'oubli de ce livre face à d'autres "grandes oeuvres" : l'auteur emploie différents styles pour nous livrer son conte philosophique : récit, coupures de presse, extraits de livres, médias qui donnent un aspect assez décousu, il manque clairement une intrigue un peu plus conséquente pour rester dans les mémoires du lecteur.



Ceci dit, une lecture salutaire, même si l'humanité ne s'y montre pas sous son jour le plus favorable. Les années passent et n'améliorent pas notre civilisation, les erreurs du passé n'offrant que de nouvelles idées pour asservir son prochain. Mais mème si le propos est sombre, le texte pourra plaire au plus grand nombre de part son humour quasi omniprésent.
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R.U.R. : Rossum's Universal Robots

Connaissez-vous celle là ?



C'est l'écrivain Karel Capek qui va voir son frère Josef dans son atelier...

- Dis, Jojo, j'ai une bonne idée pour une pièce de théâtre...

- Eh bien, écris la ! grommelle Josef; parce que quand on est en train de peindre, on n'aime pas être dérangé.

- Oui, mais je cale pour trouver un nom pour ces bonhommes artificiels, tu sais... je pensais d'appeler ça un "labor", mais ça me paraît un peu trop littéraire... enfin, j'en sais rien !

- Alors, appelle ça un "robot" ! grogne Jojo à travers le pinceau coincé entre ses lèvres. - Et fiche moi la paix, maintenant !



Voici, paraît-il, comment le mot "robot" (qui vient de "robota", ces travaux forcés du 17ème, quand le peuple tchèque était sous le joug de son maître austro-hongrois) a vu le jour.

La pièce "R.U.R" (Rossum's Universal Robots) a été jouée pour la première fois en 1921; pour être reprise avec succès par BBC pendant l'année critique de 1938 qui a vu la signature des accords de Munich.

Une pièce dramatique qui s'inscrit dans la lignée de la philo-SF de Capek, avec "Krakatite", "La guerre des salamandres" ou "La fabrique d'absolu".



L'histoire est simple - une usine qui gagne des millions en fabriquant les robots qui soulagent les hommes dans leur tâches quotidiennes. À tel point que l'humanité devient oisive et désoeuvrée - et elle utilise cette intelligence artificielle pour se faire la guerre. Mais, peu à peu, les robots se mettent à penser, eux aussi, tout en adoptant les sentiments typiquement humains, y compris la vanité, l'orgueil et la soif du pouvoir.

Et l'invention se retourne contre son créateur...



Je ne vous révèle pas la fin, je vais me contenter de dire que cette pièce-avertissement n'exprime pas seulement les craintes pour l'humanité d'être happée par une quelconque "machinerie" (technologie, guerre), mais montre aussi l'espoir et la foi inébranlable en l'esprit et l'intelligence de l'homme.

Pour l'instant, ce n'est pas encore le cas...

Mais si, un jour, les machines font tout à notre place, nos cerveaux ne vont-ils pas se rouiller au point de ne plus être capables d'une moindre déduction, analyse ou synthèse par nous mêmes ? Faute de n'avoir rien d'autre à faire, n'allons nous pas faire n'importe quoi ?

Mais non... nous sommes suffisamment raisonnables !



Capek a toujours fait partie de mes écrivains préférés. Son style est tellement simple; un peu comme un gentil grand-père qui vous raconte des histoires. Mais avec quelle richesse du vocabulaire et quel humour philosophique !





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Lettres d'Angleterre

Critique douce amère de l’Angleterre des années 1920 par un écrivain tchèque .

Ce qui est particulier à ce livre ce sont les petits dessins qui émaillent le texte , petits dessins assez simplistes d’ailleurs .

Lors de la lecture des premières pages , j’ai été ravie puis un peu lassée par le style un peu répétitif .

Un tableau d’Angleterre qui semble être intemporel , voilà ce qui fait la force , le charme du livre .

Je remercie Babelio pour l’envoi de ce livre lors du dernier Masse Critique.
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Lettres d'Angleterre

En 1925, séparé de Lili Brik et ne traînant plus à l'arrière des taxis, Vladimir Maïakovski entreprend enfin un voyage aux États-Unis via le Mexique et Cuba. De ce voyage, il en reviendra entre autres avec un Ma découverte de l'Amérique. Longtemps partiellement traduit en français, Ma découverte de l'Amérique a été intégralement publié en 2017 par Les éditions du Sonneur avec une préface de Colum McCann.



Lettres d'Angleterre est l'équivalent pour Karel Čapek de Ma découverte de l'Amérique pour Maïakovski.



Aussi, il est dommage que les éditions de La Baconnière - c'est le troisième livre de l'écrivain tchèque qu'elles publient - n'aient pas jugé bon d'introduire le texte de Čapek par une préface comme Les éditions du Sonneur l’avaient fait pour Ma découverte de l’Amérique.



Le quatrième de couverture apprend simplement au lecteur que le voyage a été entrepris en 1924, qu'il s'agissait d'une invitation dans le cadre du congrès national du PEN Club* et de la British Empire Exhibition**. C’est un peu court dans la mesure où, en 2017, Karel Čapek est désormais un inconnu notoire. Inconnu parce que peu de personnes savent qui est Karel Čapek ; notoire car c’est lui qui a introduit le mot robot - inventé par son frère - dans sa pièce de théâtre R.U.R. de 1921. Il eut été bien de le rappeler au lecteur d’autant que ce quatrième de couverture indique que Karel Čapek est « Critique face au Progrès ».



Cette précision faite, ces Lettres d’Angleterre est un récit de voyage en Angleterre, dans une moindre mesure en Écosse, et dans une très moindre mesure en Galles septentrionale et en Irlande - cette dernière destination lui est d’ailleurs déconseillé par toutes les personnes qu’il rencontre. Dans un récit, « [accompagné], pour mieux montrer les choses, de dessins de l'auteur », tantôt grave - sur l'extrême misère de l’East End, sur le colonialisme lors de sa visite de la British Empire Exhibition, ... - tantôt drôle - sur la cuisine anglaise, sur les clubs anglais, sur l’art anglais, sur les dimanches anglais et écossais, … et sur lui-même -, Karel Čapek partage avec le lecteur sa découverte des différentes facettes du Royaume-Uni. Tantôt admiratif, tantôt critique de la perfide Albion, le texte de Karel Čapek reste sur certains points résolument moderne et d’actualité comme il est coutume de le dire désormais.



En comparaison du récit de Maïakovski, ce récit de lecture très agréable et plus drôle reste plus léger (par exemple, sa critique du progrès et des machines n'est pas très profonde, ni systémique), moins « épiphanique » en quelque sorte et parfait pour être lu à l’arrière des taxis.



* Association d'écrivains internationale fondée en 1921 par Catherine Amy Dawson Scott, le PEN club international a pour but de « rassembler des écrivains de tous pays attachés aux valeurs de paix, de tolérance et de liberté sans lesquelles la création devient impossible ».

** La British Empire Exhibition est une exposition coloniale qui s’est tenue en 1924 et 1925.
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Lettres d'Angleterre

Quelle belle surprise ! Merci à Masse critique et aux éditions LaBaconnière de m’avoir permis de découvrir Karel ČAPEK et ses « Lettres d’Angleterre » dont la première édition remonte à 1924.

J’avoue que j’avais quelques craintes avant d’ouvrir cet ouvrage ; les récits de voyage sont, hélas, trop souvent ennuyeux voire rébarbatifs.

Ici c’est tout le contraire, ČAPEK utilise l’humour, la tendresse, l’ironie, la dérision, le dessin, l’auto-dérision (appliquée à lui-même, à ses compatriotes tchèques et aux continentaux, bref à tous ceux qui n’ont pas la "chance" d’être grands-bretons.) sans jamais une once de méchanceté.

Ce court livre est très moderne dans son écriture ainsi que très actuel. Par exemple, j’ai retrouvé dans les pages consacrées à Édinburgh ou à l’île de Skye (« Terra Hyperborea »), écrites il y a plus de 90 ans, le même « esprit des lieux » que celui que j’ai ressenti lorsque je les ai visités en 2016.

Un parfait livre de détente à travers lequel on retrouve l’humour tchèque.
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Dachenka ou la vie d'un bébé chien

Un très beau livre, à cheval entre le conte pour enfants et le récit pour les amoureux des chiens.

Le style de Čapek se prête parfaitement à l'histoire.
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La guerre des salamandres

La Guerre Des Salamandres est magistral pour les simples raisons que j’ai données dans mon poste le présentant (voir ma page facebook :))

Mais Je voulais m’arrêter ici sur un aspect plus subtil et peu traité.

Au-Delà du caractère universel de son histoire, Karel se livre à une description très fine de l’état du monde des années 30. Le bouquin se présente principalement comme une immense de revue de presse, une accumulation d’articles relatant les évènements liés aux Salamandres… ce faisant, Karel donne énormément d’indication sur sa perception de l’époque.

Nous réduisons souvent les années 30 à la simple montée du fascisme et à la Grande Dépression… c’est vrai ! Mais c’est la regarder plus les symptômes que la maladie elle-même : les années 30 marquent la fin d’une ère (que la Guerre finira par enterrée). Une ère dans laquelle le monde vit dans une certaine schizophrénie : Booster par l’amélioration des moyens de transport et de communication mais aussi par la colonisation, l’économie s’est mondialisée et globalisée alors que dans le même temps, les modes de gouvernance des états sont restés très largement souverainistes et autocentrés. Certes, la diplomatie existe mais les niveaux de collaboration sont bien en deça de ce qu’exigerait l’ampleur de l’interconnexion économique… exacerbant ainsi la tension entre les états, entrainant (en partie) un premier conflit mondial puis ensuite en aggravant une crise économique mondiale : le protectionnisme l’ayant emporté sur la coopération.

L’une des principales conséquences de la seconde guerre mondiale sera la création d’instances supranationales pour soit établir des règles, par exemple, commerciales (GATT… puis OMC), soit donner des lieux ou les états peuvent se rencontrer, discuter et négocier (ONU) plutôt que de se mettre sur la gueule… et que dire de l’Europe ?? le politique se mettait à la remorque de l’économie en se globalisant ou du moins en tentant de le faire. Dans les années 30, tout ça n’existait pas, c’était le bordel ! Il y eut des tentatives, la Conférence de La Haye ou la SDN… mais la défense de son intérêt particulier qui caractérise le souverainisme balancera toutes ces initiatives dans les toilettes. Si bien qu’au moindre sujet de tension, la guerre faisait partie des considérations vu qu’aucune instance ne pouvait encadrer sa résolution de façon pacifique.

Lisez le livre et voyez comment y sont retranscrites les relations entre les différents pays. Ça se finit d’ailleurs assez mal et c’est principalement pour la raison décrite ici.

Voila, j’ai essayé de faire assez court alors j’espère ne pas avoir trop versé dans la caricature.

Bonne lecture !
Lien : https://www.facebook.com/The..
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La guerre des salamandres

La guerre des salamandres est un roman de science-fiction, mais l’Histoire et le contexte de l’époque se dessinent très clairement sous cette histoire incroyable. Pêle-mêle, voici ce que j’ai décelé :

- les enjeux liés aux colonies ;

- le communisme : il prend la défense de la main-d’œuvre exploitée que sont les salamandres (« Salamandres opprimées et révolutionnaires du monde entier, unissez-vous, l’heure de la lutte finale a sonné. ») ;

- le racisme : lorsque les salamandres menacent les côtes asiatiques ou africaines, ces bons Européens diront en gros « mieux vaut eux que nous » ;

- le Ku Klux Klan : les lynchages et bûchers de salamandres aux Etats-Unis, d’ailleurs dénoncés par des Noirs s’insurgeant du sort de leurs « frères », ne sont pas sans rappeler les agissements de la tristement célèbre organisation ;

- l’antisémitisme : l’Allemagne interdit les vivisections… uniquement par les chercheurs juifs) ;

- la montée du nazisme : les Allemands révèleront l’existence d’une « race supérieure de salamandres », la race aryenne du reptile, celles qui vivent dans les eaux germaniques ont la peau plus claire, la démarche plus droite, le crâne plus ceci ou cela... ;

- les tensions entre l’Allemagne, la France et la Grande-Bretagne (bien que pour d’autres raisons que celles retenues par l’Histoire, celles du livre étant liées aux salamandres) ;

- ou encore l’inefficacité de la Société des Nations à travers l’inutilité des grandes institutions qui échouent à trouver des solutions et même à trouver un nom correct aux salamandres : « La Commission pour l’Etude de la Question des Salamandres devait choisir l’appellation la plus appropriée et elle s’y attacha consciencieusement et avec ardeur jusqu’à la fin même de l’Âge des Salamandres ; mais elle ne fut pas en mesure d’adopter une conclusion finale et unanime. »

Et ce n’est que ce qui m’a sauté aux yeux grâce à mes petits savoirs ou de vagues souvenirs de cours d’histoire. Une meilleure connaissance du contexte de l’époque permet sans doute d’approfondir encore davantage sa lecture du roman et de la rendre plus passionnante encore.

Il y a également un passage qui m’a particulièrement perturbée. Quelques rapports présentent à un moment des expériences faites sur les salamandres. Enfin, par expériences, il faut entendre tortures. Ce qui m’a choquée, c’est que ces tortures (relatives aux températures, au jeûne, au manque d’eau, à des mutilations) rappellent celles subies par les Juifs entre les mains des « médecins » nazis. Sauf que ces « expériences » ont commencé quelques années plus tard. Ce n’est pas le seul moment où Karel Čapek se révèle visionnaire : une conférence fait étonnamment penser à celle de Munich en 1938…



Cette histoire nous est racontée d’un point de vue économique, politique, social… mais rarement émotionnel. A part le truculent capitaine Van Toch et sa touchante relation avec les salamandres, ses « tapa-boys », rares sont les personnages marquants. Nous ne sommes pas pris par la main par un personnage principal comme nous en avons l’habitude, les protagonistes passent, certains reviennent une ou deux fois, mais on ne les connaît jamais vraiment. Le point de vue change souvent de pays et reste relativement distant. Finalement, on nous présente des faits et la manière dont les choses se sont déroulées : la découverte, la fascination, l’idée commerciale, l’esclavagisme, etc. Le résultat aurait pu être froid, mais non. C’est un roman enthousiasmant, passionnant, que j’ai dévoré en quelques heures. L’auteur a réussi un véritable tour de passe-passe.



L’écriture est vivante, dynamique, moderne… Bien éloignée de ce que l’on pourrait redouter d’un roman de 1935. De nombreux comptes rendus et articles de journaux ponctuent le roman.

L’humour est omniprésent. S’il devient parfois presque saugrenu lorsque l’on nous fournit un document avec cette mention « Cf. la coupure suivante, d’un grand intérêt mais malheureusement dans une langue inconnue et donc intraduisible », il est souvent noir et cynique dans le ton, dans certaines comparaisons ou des remarques qui égratignent ici ou là les grandes nations.



Progressant dans ma lecture, je ne redoutais qu’une chose : la fin. Je craignais qu’elle ne parte en vrille et ne soit pas à la hauteur. Mais non ! Le dernier chapitre est une discussion de l’auteur avec lui-même, avec une petite voix intérieure qui l’interroge sur la suite des événements, sur les salamandres et sur les humains. C’est intelligent, fin, drôle et extrêmement original. J’adhère à 200%... sauf pour les six dernières pages. Mais peu importe pour moi, ce n’est qu’un fol espoir de sauver l’humanité, de vaines spéculations. Team salamandres ! (Même si je me doute qu’on est plus ou moins censé être pour les humains et que les salamandres, dictatrices voulant agrandir leur espace vital, représentent les nazis… Pas top…)



Commençant comme un récit d’aventures, La guerre des salamandres se révèle être un conte philosophique opposé aux totalitarismes d’une richesse inouïe. Pris un peu au hasard (pas totalement puisque j’ai réalisé par la suite avoir été attirée par le nom de l’auteur qui est le premier à avoir utilisé le mot robot inventé par son frère Josef), c’est une excellente découverte ! Un vrai coup de cœur, un concentré d'intelligence et d'humour dont je risque de parler longtemps !
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Dachenka ou la vie d'un bébé chien

Un agréable moment.
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