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Citations de Line Papin (200)


On s’aimait ici, parce qu’on s’était toujours aimés ici, parce que l’embargo avait été levé et qu’un air grisant soulevait les cœurs, Hanoï 2000, jamais ils n’ont revécu cela. Les nouveau-nés débarquaient avec les produits étrangers, ils étaient accueillis avec autant d’enthousiasme, ils jouissaient d’une nouvelle paix, d’une nouvelle ère.
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Hanoï, 1996 : il y a les voix vietnamiennes, ta mère, ton père, seule voix française, ils communiquent en anglais aussi, il y a les visages, tellement de visages, ta grand-mère, ta nourrice, tes tantes. Autour de toi, c’est noir de visages et de vociférations : c’est la vie telle qu’on l’aime – telle que tu l’aimes. Et au-dessus de ce capharnaüm, le soleil explose, humide et lourd comme il l’est au Vietnam ; personne n’y échappe.
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Elle, qui avait vécu la première guerre contre les Français, ne comprenait pas pourquoi son enfant se tournait vers le camp ennemi et faisait le choix d’une vie autre, non pas vietnamienne, classique, dans la lignée du combat des femmes et des soldats, de leurs valeurs et de leurs traditions. Pourquoi un étranger, pire, un Français, pourquoi s’échapper dans une autre grammaire, d’autres coutumes, d’autres pays ? Mais peu à peu, parce que le jeune Français se révélait plutôt sympathique, parce qu’il s’intéressait lui aussi à l’histoire et à la littérature, parce qu’enfin il avait fait des progrès considérables dans la langue vietnamienne, la famille des trois sœurs parvint à l’apprécier, à s’égayer en sa présence, et même à l’accepter comme l’un des leurs.
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Il est entré dans le magasin quand la seconde sœur H. en sortait. On appelle cela un coup de foudre. Il la courtisa aussitôt et elle fut charmée, malgré les secousses de tête et signes de bras que son amie gesticulait derrière. « C’est un Français ! C’est un beau parleur ! Il est dangereux ! » La seconde sœur, comme nous le savons, était observatrice. Elle n’avait pas la fougue de son aînée, ni la tranquillité de sa cadette. Elle avait la curiosité.
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Elles n’étaient pas malheureuses. Elles étaient unies, bosseuses, rieuses, osseuses. Elles allaient avoir vingt ans, rencontrer des hommes, avoir des enfants… Le conte se terminerait joliment car tout est bien qui finit bien. Elles seraient heureuses et auraient beaucoup d’enfants, oui. Elles ne se quitteraient pas : on pourrait les reconnaître encore de dos, côte à côte, trois belles grandes filles, avec cette chevelure noir de jais qui leur coulait sur le dos, et des enfants soudain sur les bras, trois mères.
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La guerre passée, Hanoï demeurait noire de misère parce qu’elle essuyait les restes des bombes et des récoltes brûlées, parce qu’elle subissait l’embargo américain qui interdisait à tout pays de faire du commerce avec elle. Il n’y avait rien, au Vietnam : pas d’électricité, pas d’eau potable, ni de savon, de dentifrice, de chaussures pour les gens, pas de frigidaire, pas d’ustensiles de cuisine, rien. Ils vivaient dans le dénuement et la crasse. Ils ne s’en rendaient pas compte : ils n’avaient rien pour comparer. Ça avait toujours été ainsi. Les journaux les encourageaient : ils étaient les meilleurs, tout prospérait, le pays perçait, leur progrès effrayait. C’était fabuleux ! C’était la gloire !
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Chaque fois que le pont est détruit, les paysans se précipitent pour le remettre sur pied, mais, chaque fois, une nouvelle bombe retombe, et ils se précipitent encore, en un geste désespéré, humain, un geste presque élégant. Ils refont leur petit pont, ils ne le laissent pas tomber. Aujourd’hui, il est sur pied, avec des renforts rocambolesques d’architecture : pour soutenir la passerelle, des treillis en béton sont apposés tous les deux mètres. On dirait une vieille dame écroulée, puis réparée, dont les os souffrent d’un cancer qui la casse sans fin. C’est une petite passerelle les pieds dans le plâtre, avec bien des béquilles au bras.
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Ce pont a son importance. C’est le pont qui permet d’entrer au village et d’en sortir ; c’est le pont qu’empruntent successivement les armées japonaise, française puis américaine. Lorsque l’armée japonaise – sur le territoire vietnamien depuis le début de la Seconde Guerre mondiale – craint, en mars 1945, un débarquement allié, elle s’en prend à l’Indochine française dont elle détruit l’administration coloniale. Cela se traduit, sur le territoire même, par une guerre entre Français, Japonais et Vietnamiens, mais aussi par une famine due aux plants de riz que les Japonais déciment. Cela se traduit, dans ce village même, par des balles qui fusent et des gens qui ont faim. Cela se traduit, sur ce pont même, par trois soldats français qui le traversent et se retrouvent ensanglantés.
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De l’aube au crépuscule, les paysans bêchent le sol, ramassent les herbes, cueillent les fruits, guident les buffles, récoltent le riz… Ils sont courbés sur cette terre dont ils dépendent. Chaque rendement est une victoire. Ils ont sous leurs pieds le travail et son gain. Le bonheur est présent car le sol est généreux, les voisins sympathiques.
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Soudain, abandonnant mon anglais de touriste, je me mets à parler vietnamien au chauffeur. Je sors cette langue, devenue étrangère, de ma bouche docile et je dis au mec qui s’en fout : je suis née ici, c’est mon pays aussi, le mien, j’ai mon histoire avec lui, j’y ai droit, alors oui, je suis partie longtemps, je n’ai plus la langue ni les codes ni mes amis ni ma famille, mais c’était ma mère aussi, ce pays. Le chauffeur acquiesce avec indifférence. Il me prend pour une folle.
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Berlin s'étale à perte de vue, déborde de son lit, et ses possibilités, sa fantaisie, ses ressources, de la même manière, sont infinies.
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De Toni, elle disait : " Il y a des gens qu'on aime, et d'autres qu'on aime pas , et c'est comme ça, et personne n'y peut rien. Il y a des gens qu'on recueille au bord des routes , des êtres perdus à qui l'on voudrait tout donner, l'eau, le pain, l'amour, tout donner et nos bras et notre coeur, même s'ils n'en sont pas dignes, même s'ils ont péché, même s'il sont affreux, et puis il y a des gens à qui on refuse tout, notre porte, nos bras, notre regard, notre parole, à qui l'ont refuse tout même s'ils sont aimables, même s'ils en sont dignes, à qui on refuse tout. C'est comme ça. p.121
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- Vous avez continué de vous voir, en gardant le silence sur Laura ? Toi, tu le voyais et tu savais qu'il en aimait une autre, et tu y mettais simplement un voile ?
- J'essayais. C'était l'homme voilé ou rien. Je préférais l'avoir dans ma vien malgré tout.
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Ta tristesse...Quelle est-elle ?
- Elle s'appelle Laura.
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Ça me rend dingue ces expatriés, comme Klin, qui n'osent pas se mêler aux indigènes et restent dans leur petite tour d'ivoire. Pourquoi se déplacer jusqu'à Hanoï si ce n'est pas pour bouffer du xoi ruoc, transpirer à grosses gouttes, se prendre la crasse et le bruit des rues plein la gueule ? C'est ce que je préfère, moi. C'est ce qui m'intéresse.
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Je vais lui lire des romans à la place ; elle parlera moins ; il faut qu'elle écoute. Je ne dirai pas mes impressions ni mes péripéties journalières. Lire, c'est bien. Elle dit mourir d'entendre ma voix. Elle l'entendrait plus si elle parlait moins.
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Elle me serre : "Oh, you,and this place altogether, warm dark deep nights among stars, long soft sweet nights among clouds..." Demain, tout cela de nouveau : elle a trop peur que ça s'arrête. Elle me l'a dit, avec ses mots anglais, quand on sombrait peu à peu : elle en veut à jamais, des warm dark deep nights.
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Avec lui seul, l'homme neutre, je retrouve la douceur d'Asie, la tendresse, la joie entière. Désormais, tout se mêle en lui, le pays, la chaleur, et je ne sais plus lequel de lui ou du pays a nourri l'autre, pour moi, de son amour. Là où nous étions, c'était la langueur des longues journées qui se traînent, c'était le souffle tiède et le bruissement de l'eau sous les pales vibrantes ; des journées de charbon, des journées de pierres plates et brûlantes. Il y avait les klaxons, les moteurs, les odeurs de viande grillée, les cris des femmes ombragées sous leur panier de pains chauds : "Banh mi nong day !", les crachats, les rires, les gestes. Tout encore il me semble est dans sa peau, là sous sa peau, l'humidité, l'amour, la fumée des motos, des fourneaux, les tabourets en plastique, les chevilles pliées, ployées sur leurs tendons et les peaux hâlées, les peaux jaunes, les peaux brunies, les peaux cornées, séchées, usées.
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Je le revois tous les jours, ne m'en cache plus, découche volontiers et ils savent maintenant, autour, que la petite a une liaison. On ne sait pas bien avec qui, elle ne veut pas en parler, ça doit être un vieux, un qu'elle a rencontré chez monsieur X, c'est odieux, inconsidéré, mais c'est comme ça, et tant pis, et après tout. Elle s'en va, revient, ça ne fait de mal à personne, à elle, oui, peut-être. "Le vieux la jettera, ça lui brisera le coeur, que veux-tu qu'il fasse d'autre? Que quelqu'un lui dise, ou tant pis."
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La fumée s'échappe des plats rassemblés sur la longue table en bois et chacun y prend place. La vapeur du riz, les odeurs de viande grillée, de la coriandre se mêlent à celle de la pluie, à celle de l'amertume, à celle de la tristesse. On s'invite à se servir, avec des signes de politesse, après toi, non après toi ; en vérité personne n'a envie de se servir.
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