Citations de Maurice Maeterlinck (296)
Tenir grandes ouvertes les routes de ce que l'on voit à ce que l'on en voit pas.
Mélisande : Comme nos ombres sont grandes ce soir !
Pelléas : Elles s'enlacent jusqu'au fond du jardin... Oh ! qu'elles s'embrassent loin de nous !
Pourquoi chercher d'autres bonheurs que ceux dont jouit la goutte d'eau dans l'océan ?
Si le mort est un vivant qu`on ne voit plus, le vivant est un mort qu`on ne voit pas encore. Tout ce qui compte se passe dans l`invisible.
Il faut dire la vérité à quelqu'un qui va mourir... Il faut qu'il sache la vérité, sans cela il ne pourrait pas dormir...
ARIANE. Ah ! ce n'est pas encore la clarté véritable !... Qu'y a-t-il sous mes mains ?... Est-ce du verre, est-ce du marbre ?... On dirait un vitrail qu'on a couvert de nuit... Mes ongles sot brisés... Où sont-elles, vos quenouilles ?... Sélysette, Mélisande, une quenouille, une pierre !... Un seul de ces cailloux qui sont là par milliers sur le sol !...
Acte II
Ainsi, sans liens dans un passé presque inconsistant encore, sans visage et sans mains de femmes autour de mon enfance, je me vis, sachant à peine me tenir debout, au milieu d'une cour entourée de hauts bâtiments de pierre d'un antique orphelinat oublié au fond d'une immémoriale forêt du Massachusetts.
PREMIER AVEUGLE-NÉ. Oh ! comme vous êtes loin de nous!Je vous croyais en face de moi !
TROISIÈME AVEUGLE-NÉ. Nous savons, à peu près, tout ce qu'il faut savoir ; causons un peu, en attendant le retour du prêtre.
LA PLUS VIEILLE AVEUGLE. Il nous a dit de l'attendre en silence.
TROISIÈME AVEUGLE-NÉ. Nous ne sommes pas dans une église.
LA PLUS VIEILLE AVEUGLE. Vous ne savez pas où nous sommes.
TROISIÈME AVEUGLE-NÉ. J'ai peur quand je ne parle pas.
Les aveugles
Vous êtes las, dîtes-vous, de votre vie inactive ; mais si l'activité et le devoir se trouvent sur les routes, on les reconnaît rarement dans la hâte du voyage. Il vaut mieux les attendre sur le seuil et les faire entrer au moment où ils passent ; et ils passent tous les jours.
Oui, je sais. Tu cherches l'Oiseau Bleu c'est-à-dire le grand secret des choses et du bonheur.
Tout indique que ce n'est pas la reine, mais l'esprit de la ruche qui décide l'essaimage. Il en est de cette reine comme des chefs parmi les hommes; ils ont l'air de commander, mais eux-mêmes obéissent à des ordres plus impérieux et plus inexplicables que ceux qu'ils donnent à qui leur est soumis.
L`humanité n`a-t-elle pas accepté, durant deux mille ans, tous les mystères, c`est-à-dire toutes les puérilités, toutes les absurdités qu`on attribuait au Dieu des juifs, des chrétiens et des musulmans? Pourquoi ne pas accepter, en attendant mieux, l`inexplicable d`un univers que nous commencons à peine d`interroger?
Tout ce que l`humanité cherche, tout ce qu`elle trouvera, existe déjà autout de nous. Il s`agit de le voir. De même que tout ce que diront les génies futurs est dit en nous.
L'ÉTRANGER. Elle nous regarde...
LE VIEILLARD. Non; elle ne sait pas ce qu'elle regarde; ses yeux ne clignent pas. Elle ne peut pas nous voir ; nous sommes dans l'ombre des grands arbres. Mais n'approchez pas davantage. Les deux sœurs de la morte sont aussi dans la chambre. Elles brodent lentement; et le petit enfant s'est endormi. Il est neuf heures à l’horloge qui se trouve dans le coin... Ils ne se doutent de rien et ils ne parlent pas.
Une nuit, je crois cependant avoir dépassé un peu cette première confluence d'horreur où mon âme s'était noyée tant de fois. Je refusais vainement depuis l'apparition de la lune sur ma fenêtre de vivre au milieu des œuvres de mes yeux ; je ne pouvais plus les fermer intérieurement ; et néanmoins j'étais déjà sous l'orage de l'agonie où mes jours s'éclairaient de la lumière grossissante de l'épouvante, tandis que les premiers seuls jouaient comme des enfants dans le rayon bleu de la miséricorde. Je savais qu'une limite de ténèbres que je ne voyais pas allait disparaître et malgré cela je nageais encore inutilement dans l'alcool des anciennes tentations. J'essayais de mettre mes mains sur mes yeux pour les fermer enfin au-dehors.
Vision de l'énigme, II
LE PLUS VIEIL AVEUGLE. Voilà des années et des années que nous sommes ensemble, et nous ne nous sommes jamais aperçus ! On dirait que nous sommes toujours seuls !... Il faut voir pour aimer...
LA PLUS VIEILLE AVEUGLE. Je rêve parfois que je vois...
LE PLUS VIEIL AVEUGLE. Moi, je ne vois que quand je rêve...
PREMIER AVEUGLE-NÉ. Il ne revient pas encore ?
DEUXIÈME AVEUGLE-NÉ. Vous m'avez éveillé !
PREMIER AVEUGLE-NÉ. Je dormais aussi.
TROISIÈME AVEUGLE-NÉ. Je dormais aussi.
PREMIER AVEUGLE-NÉ. Il ne vient pas encore ?
DEUXIÈME AVEUGLE-NÉ. Je n'entends rien venir.
TROISIÈME AVEUGLE-NÉ. Il serait temps de rentrer à l'hospice.
PREMIER AVEUGLE-NÉ. Il faudrait savoir où nous sommes.
DEUXIÈME AVEUGLE-NÉ. Il fait froid depuis son départ.
PREMIER AVEUGLE-NÉ. Il faudrait savoir où nous sommes !
LE PLUS VIEIL AVEUGLE. Y a-t-il quelqu'un qui sache où nous sommes ?
Parfois leur charité va trop loin et entraîne la ruine de la colonie. Par exemple, une fourmi tunisienne, la Wheeleriella, étudiée par le docteur Santchi, s'introduit dans le nid d'une autre espèce de fourmis, la Monomorium Salomonis. Elle y est d'abord assez froidement accueillie; mais bientôt, à force d'habiles caresses elle gagne la faveur des ouvrières qui finissent par la préférer à leurs propres reines qu'elles abandonnent et maltraitent au profit de l'astucieuse aventurière dont les charmes semblent irrésistibles. Peu après, l'usurpatrice se met à pondre. Son espèce essentiellement parasite et qui ne travaille jamais prolifère et se substitue aux trop hospitalières et trop confiantes ouvrières dont la race s'éteint. Alors, c'est la famine, la misère et la mort
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(...) ceux qui aimèrent beaucoup savent aussi des secrets que d'autres ne savent pas ; car il y a, dans ce que taisent les lèvres de l'amitié et de l'amour profonds et véritables, des milliers et des milliers de choses que d'autres lèvres ne pourront jamais taire.
Les trois sœurs ont voulu mourir
Elles ont mis leurs couronnes d’or
Et sont allées chercher leur mort.
S’en sont allées vers la forêt :
« Forêt, donnez-nous notre mort,
Voici nos trois couronnes d’or. »
La forêt se mit à sourire
Et leur donna douze baisers
Qui leur montrèrent l’avenir.
Les trois sœurs ont voulu mourir
S’en sont allées chercher la mer
Trois ans après la rencontrèrent.
« Ô mer donnez-nous notre mort
Voici nos trois couronnes d’or. »
Et la mer se mit à pleurer
Et leur donna trois cents baisers
Qui leur montrèrent le passé.
Les trois sœurs ont voulu mourir
S’en sont allées chercher la ville
La trouvèrent au milieu d’une île.
« Ô ville donnez-nous notre mort
Voici nos trois couronnes d’or. »
Et la ville s’ouvrant à l’instant
Les couvrit de baisers ardents
Qui leur montrèrent le présent.