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Citations de Michel Pastoureau (578)


A Rome, on réduit l'émeraude en poudre pour en faire des baumes oculaires :le vert fortifie l'oeil et equiilibre la vision.
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[Le bonnet phrygien] est le symbole de la liberté à conquérir par des hommes et des femmes qui ne veulent plus être sujets mais citoyens. L’année suivante, il fait partie de l’uniforme ordinaire des sans-culottes, et lors de la journée insurrectionnelle du 20 juin 1792, la populace qui envahit les Tuileries oblige Louis XVI à s’en coiffer. Dans les jours suivants, le journal patriote Les Révolutions de Paris décrit ce bonnet rouge comme “l’emblème de l’affranchissement de toutes les servitudes et le signe de ralliement de tous les ennemis du despotisme”.
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C’est alors que le poète Alphonse de Lamartine, membre du gouvernement provisoire et ministre des Affaires étrangères, prononce un discours resté célèbre et retourne l’opinion en faveur du drapeau tricolore:
“Le drapeau rouge que vous nous apportez, est un pavillon de terreur [...], qui n’a jamais fait que le tour du Champ-de-Mars, traîné dans le sang du peuple, tandis que le drapeau tricolore a fait le tour du monde, avec le nom, la gloire et la liberté de la patrie [...]. C’est le drapeau de la France, c’est le drapeau de nos armées victorieuses, c’est le drapeau de nos triomphes qu’il faut relever devant l’Europe.”
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On utilise [le blanc de céruse] en crème ou en poudre : il s’agit d’avoir le visage et le cou - et, pour les femmes, les épaules, les bras et la gorge - du blanc le plus blanc afin de ne pas être confondu avec un paysan ou une paysanne au teint nécessairement cuivré ou rougeaud, ni même avec un noblaillon de province vivant à la campagne, au grand air. Un courtisan se doit d’avoir le visage le plus pâle possible, au besoin en complétant le recours à la céruse par l’absorption de pastilles à base d’arsenic : à faible dose, celles-ci, tout en restant très toxiques, ont le pouvoir de décolorer la peau, au point que les veines peuvent apparaître et mettre en valeur ‘le sang bleu” de l’homme ou de la femme ainsi dépigmentés artificiellement.
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Depuis quand le rouge est-il la couleur du désir sexuel? Une telle question a-t-elle même un sens avant Freud ? Il est permis de se le demander. Certes, cette couleur est depuis longtemps celle de la luxure et de la prostitution, mais pour la psychanalyse ce n’est nullement cela qui est en jeu dans le conte : il s’agit des premiers émois amoureux, et même charnels. Or au Moyen Age, lorsque apparaissent les plus anciennes versions de cette histoire, et encore à la fin du XVIIè siècle, lorsque Charles Perrault en rédige sa propre version, les premiers élans du cœur et des sens ne sont pas associés au rouge mais au vert, couleur symbolique des amours naissantes. Si les théories psychanalytiques étaient ici fondées - ce dont je doute-, le Petit Chaperon rouge devrait être un Petit Chaperon vert.
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La Bible étant soucieuse des choses religieuses, l’appareil sacré du temple en voyage est mis en valeur, et avec lui le domaine pourpre-rouge, statistiquement très majoritaire. Ainsi, le rouge domine et est valorisé; le blanc suit loin derrière et n’est pas bon ; le noir est à peine mentionnée, mais n’est pas mauvais. Nous sommes donc dans un univers coloré assez varié, mais en tout cas très éloigné de l’enfer rouge méchant, du noir des ténèbres terrifiantes, du blanc candide et angélique, qu’on associe parfois bien à tort aux représentations bibliques.
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Dans les cavernes du Paléolithique.
Nous savons, ... grâce à des analyses effectuées en laboratoire, que certains pigments blancs, comme du reste les rouges et les jaunes, étaient enrichis de produits considérés aujourd’hui comme des charges, destinées à modifier leur pouvoir couvrant et leur rapport à la lumière, ou bien à faciliter leur pose sur la paroi : talc, feldspath, mica, quartz, graisses diverses. Assurément, la chimie est ici bien présente. Brûler du bois pour en faire un charbon avec lequel on va dessiner ou peindre en noir est une technique relativement simple. Mais extraire du sol des blocs de kaolin, les laver, les diluer, les filtrer, les brûler puis broyer au pilon le matériau ainsi récolté afin d’obtenir une fine poudre blanche, enfin mélanger celle-ci avec de la craie, des huiles végétales ou des graisses animales pour lui donner différentes nuances ou pour mieux la faire adhérer à la surface de la roche en est une autre, beaucoup plus complexe. Or elle est déjà connue et pratiquée par les peintres des grottes quelque quinze, vingt, trente mille ans avant notre ère. Nous ne sommes alors plus dans la nature mais dans la culture.
Page 18
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La Grèce ancienne n’était pas blanche, ni monochrome, mais habillée de couleurs vives et contrastées. Que l’on soit aux périodes archaïques, au temps de Périclès ou à l’époque hellénistique, les Grecs aiment les couleurs et en couvrent leurs murs, leurs colonnes, leurs temples, leurs statues. L‘image d’une Grèce blanche est une image fausse, comme du reste celle d’une Rome austère et peu colorée. … L’architecture des temples, les frises sculptées, l’ensemble de la statuaire, tout était peint et/ou doré. …
Aux couleurs s’ajoutaient l’or, notamment sur les statues des divinités. Les plus riches étaient en or massif, ou bien en or et ivoire (sculptures chryséléphantines), quelquefois en argent. D’autres étaient dorées à la feuille ou bien, plus modestement, constituées de bronze doré. Le monde des dieux était un univers de lumière, brillant, éclatant, somptueux. Rien n’était trop beau pour leurs temples.
Page 30
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Tout au long de la Bible, la neige, la laine et le lait sont ... les référents le plus fréquemment cités pour mettre en scène la couleur blanche. La première est d’autant plus admirée qu’elle est rare en Palestine. Elle est le symbole de pureté, d’éclat, de beauté et passe pour fertiliser la terre. La laine la plus pure est celle de l’agneau ; elle associe blancheur et douceur et doit être offerte au sanctuaire. Quant au lait, c’est le premier aliment que l’être humain reçoit dès sa naissance ; il est lui aussi symbole de douceur et de pureté. S’y ajoute une idée de santé et de prospérité, le lait de chèvre ou de brebis constituant un aliment de base des peuples de la Bible. Lorsqu’il est abondant, il est signe de bien-être, de richesse et d’un certain bonheur messianique. La Terre promise est pour les Hébreux « le pays où coulent le lait et le miel ».

Page 66
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La Bible n’est pas un texte où abondent les notations colorées, tant s’en faut. Des livres entiers n’usent d’aucun terme de couleur (le Deutéronome par exemple) ; d’autres limitent leur emploi au seul domaine textile ; partout la lumière (clair, sombre, brillant, éclatant, obscur) et la matière (or, argent, ivoire, ébène, pierres précieuses, lin, pourpre, kermès) prennent le pas sur la couleur proprement dite. Au reste, en hébreu biblique, aucun terme générique ne désigne cette dernière, et en araméen le mot « tseva’ » renvoie davantage à la teinture qu’à la couleur. …
La traduction grecque des Septante, commencée à Alexandrie vers 270 avant notre ère, n’est guère plus colorée que la Bible hébraïque. Avec le latin, en revanche, il en va autrement. Les premiers traducteurs ont tendance à introduire un certain nombre d’adjectifs chromatiques là où il n’y en avait pas, ni dans le texte hébreu ni dans le texte grec. Saint Jérôme lui-même, qui leur fait suite au tournant des IVè-Vème siècles, en ajoute quelques autres lorsqu’il révise le texte latin du Nouveau Testament puis retraduit directement l’Ancien sur l’hébreu et le grec. Mouvant, le texte biblique tend ainsi à se colorer au fil des siècles et des traductions, d’autant qu’à l’époque moderne, les langues vernaculaires accentuent le phénomène. Des adjectifs qui en hébreu ou en grec signifiaient simplement « pur », « propre », « éclatant » sont traduits en latin par "candidus" puis en français par « blanc comme neige ». De même, là où l’hébreu disait « une étoffe magnifique », le latin traduit "pannus purpureus" et le français moderne « un tissu écarlate » ou « une couverture cramoisie »

Page 62
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La Tenture de la Dame à la licorne.
Malgré une abondante bibliographie, la série des six tapisseries dites de « La Dame à la licorne » n’a pas encore livré tous ses mystères. Autrefois largement admis, le thème iconographique des cinq sens ne paraît plus aussi évident aujourd’hui. …
Les armoiries elles-mêmes, abondamment représentées sur chacune des tapisseries, posent problème. Elles se blasonnent « de gueules à la bande d’azur chargée de trois croissants d’argent » et donc enfreignent grossièrement la règle d’emploi des couleurs : le « gueules » et « l’azur » se touchent. … Pourquoi donc une telle infraction ?
Page 96
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« Le Blason des couleurs en armes, livrées et devises. »
Il connut un succès considérable : imprimé à Paris dès 1495, il l’était de nouveau en 1501, puis six fois encore jusqu’en 1614 … A le lire, le blanc est bien la couleur de la foi et de la fidélité, et le bleu celle de la loyauté et de la fermeté. Associées, ces couleurs forment une livrée particulièrement vertueuse qui convient pour un homme « courtois et sage, …. loyal en amour et en amitié ». Que Rabelais ait choisi ces deux couleurs pour habiller le jeune et intempérant Gargantua est évidemment une provocation pleine d’ironie. D’autant que, selon Le Blason des couleurs, le blanc et le bleu portés ensemble par un jeune homme ou par une jeune fille signifient « vertueuse jeunesse ». Ce qui est loin, très loin d’être celle de Gargantua !

Page 113
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Venise, capitale de la couleur.
Peintres, teinturiers et imprimeurs font de la Venise du XVIème siècle la capitale européenne de la couleur. Pigments et matières colorantes de grand prix y arrivent d’Orient afin d’être redistribués dans l’Europe entière. Les fêtes, religieuses et civiles, sont l’occasion de cérémonies, processions, parades et spectacles riches en couleurs.

Page 118
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Comme le noir son compère, le blanc avait progressivement perdu son statut de vraie couleur entre la fin du Moyen Âge et le XVIIème siècle : l’apparition de l’imprimerie et de l’image gravée- à l’encre noire sur du papier blanc- avait donné à ces deux couleurs une position particulière que la réforme protestante d’abord, les progrès scientifiques ensuite avaient fini par situer sur les marges de l’univers des couleurs. Finalement, lorsqu’en 1666 Isaac Newton découvrit le spectre, il proposa au monde savant un nouvel ordre chromatique au sein duquel il n’y avait plus de place ni pour le blanc, ni pour le noir. Ce fut là une véritable révolution qui ne se limita pas à la science, mais s’étendit progressivement aux savoirs ordinaires, puis à la culture matérielle.
Cette mutation dura presque trois siècles, pendant lesquels le blanc et le noir ont été pensés et vécus comme des « non-couleurs », puis comme formant ensemble un univers autonome : le « noir et le blanc ». En Europe, une telle conception a été familière à une dizaine de générations et, même si elle n’est plus guère de mise de nos jours, elle ne nous heurte pas vraiment : noir et blanc d’un côté, couleurs de l’autre.
Nos sensibilités, toutefois, ont changé. Ce sont les artistes qui les premiers, à partir des années 1900, ont peu à peu redonné au blanc et au noir le statut qui avait été le leur avant la fin du Moyen Âge : celui de couleurs à part entière. Les hommes de science les ont peu à peu suivis, même si certains physiciens sont longtemps restés réticents à reconnaître au blanc de réelles propriétés chromatiques. Le grand public a fini par faire de même.

Page 7
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Introduction (p7 à 9).

"Une couleur ne vient jamais seule. [...] elle ne fonctionne, du point de vue social, artistique et symbolique, que pour autant qu'elle est associée ou opposée à une ou plusieurs autres couleurs. "

"Quelle que soit l'époque concernée, le regard est toujours culturel."

"toute histoire des couleurs doit d'abord être une histoire sociale."

"Lexiques, étoffes teintures :en matière de couleurs, les poètes et les teinturiers ont au moins autant à nous apprendre que les peintres, les chimistes et les physiciens."
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Pour les Romains, il y a ... noir et noir, comme en témoigne le vocabulaire. L'un (ater) est mat et terne, disgracieux, parfois inquiétant ; l'autre (niger) est saturé et séduisant, parfois tellement brillant qu'il semble éclairer les ténèbres et permettre de voir dans la nuit. Il en va de même dans les anciennes langues germaniques .... Dans la plupart des anciennes sociétés européennes, au nord comme au sud, ce beau noir "lumineux", instrument de création et de connaissance, trouve son incarnation animale la plus éclatante dans le plumage du corbeau, un oiseau qui observe le monde et qui connaît le destin des hommes.

p. 27
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A Lyon, la colline de Fourvière est un site sacré bien avant la fondation d'une colonie romaine en 43 avant notre ère. Son nom latin, Lugdunum, est rapidement devenu celui de la grande cité, capitale des Gaules et port de commerce très actif au confluent de la Saône et du Rhône. Il signifie soit "la colline (ou la citadelle) de Lug", soit .... "la colline aux corbeaux".

... les fouilles archéologiques ont montré que le site de Lyon est habité depuis la protohistoire et que la colline de Fourvière a très tôt été un lieu sacré. Même si aucun culte du dieu Lug n'y est attesté, interpréter "Lugdunum" comme "la colline de Lug" semble raisonnable. Au demeurant, le corbeau étant un des attributs principaux du dieu, le lien reste possible entre la ville et l'oiseau et pourrait expliquer cette appellation traditionnelle de "la colline aux corbeaux".

p. 19
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Pour le Moyen Âge chrétien, l'héritage païen, favorable au corbeau, ne pèse guère face à l'héritage biblique, fortement hostile à notre oiseau. D'où chez beaucoup d'auteurs, à commencer par les Pères de l'Eglise, une symbolique négative qui va perdurer pendant presque deux millénaires. La source première s'en trouve dans le livre de la Genèse, et plus précisément dans l'épisode du Déluge : une fois la tourmente apaisée, Noé fait du corbeau son messager et l'envoie observer si les eaux ont entamé leur décrue ; mais, plutôt que de rapporter la bonne nouvelle, l'oiseau préfère s'attarder et se repaître de cadavres. Cette attitude égoïste et nécrophage attire sur lui la malédiction divine et le range pour une très longue durée au nombre des animaux pleins de vices. Au reste, son plumage noir n'est-il pas le signe extérieur de sa nature mauvaise ?

p. 33
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Les bestiaires sont des ouvrages de zoologie, particulièrement en vogue au Moyen Âge central, qui décrivent les "propriétés" d'un nombre plus ou moins grand d'animaux afin d'en tirer des enseignements religieux ou moraux ... Le lion, par exemple, qui passe pour dormir les yeux ouverts, est un symbole de vigilance ; d'où sa présence aux portes des églises et une comparaison avec le Christ,
qui dans son tombeau ne dort pas mais attend sa Résurrection. ...
Ainsi se développe le discours des bestiaires : partant d'observations ou de légendes concernant tel ou tel animal, voire plus simplement de son apparence ou de son nom, il procède par comparaison, métaphores, étymologies ou similitudes. En ce sens, il est le parfait reflet de la pensée médiévale qui se construit souvent autour d'une relation de type analogique, c'est-à-dire une relation appuyée sur la ressemblance -plus ou moins évidente- entre deux mots, deux notions, deux objets, ou bien sur la correspondance entre une chose et une idée. ...

... Tous les bestiaires racontent que lorsqu'un corbeau s'apprête à déchiqueter un cadavre, il commence par les yeux : c'est pour lui un moyen d'accéder plus facilement à la cervelle, son mets favori. Les auteurs font ainsi de l'oiseau une image du Diable qui nous aveugle par ses séductions afin de mieux s'emparer de notre âme.

p. 77
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A partir des années 1820, le héros romantique devient ... un personnage de plus en plus instable et angoissé, qui non seulement revendique l'ineffable "bonheur d'être triste" (Victor Hugo) mais se croit marqué par la fatalité et se sent attiré par la mort. ... Le noir devient alors envahissant, aussi bien dans les poèmes et les contes, les romans ou les drames que dans la gravure et la peinture. C'est le triomphe de la nuit et de la mort, des sorcières et des cadavres, de l'étrange et du fantastique. Tout un bestiaire à pelage ou plumage sombre se dévoile au sein duquel le corbeau occupe la première place.

p. 124
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