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Citations de Pablo Neruda (1111)


PREMIERS VOYAGES

Je devins infini quand je gagnai les mers.
J'étais plus jeune que le monde entier.
Et sur la côte à ma rencontre s'avançait
Dans son immensité le goût de l'univers.
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Mais j'aime, moi, jusqu'aux racines de mon petit pays si froid.
Si je devais mourir cent fois, c'est là que je voudrais mourir et si je devais naître cent fois c'est là aussi que je veux naître près de l'araucaria sauvage, des bourrasques du vent du sud et des cloches depuis peu acquises.
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Parmi les étoiles admirées, mouillées
par des fleuves différents et par la rosée,
j'ai seulement choisi l'étoile que j'aimais
et depuis ce temps-là je dors avec la nuit.

Parmi les vagues, une vague, une autre vague,
vague de verte mer, branche verte, froid vert,
j'ai seulement choisi l'unique et seule vague
et c'est la vague indivisible de ton corps.

Vers moi toutes les gouttes, toutes les racines
et tous les fils de la lumière sont venus,
que ce soit aube ou crépuscule ils sont venus.

Je n'ai voulu que ta chevelure pour moi.
Et de toutes les offrandes de la patrie
je n'ai choisi que celle de ton coeur sauvage.
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Que de choses en un jour

Salut pour le pain et la pierre,
Salut pour le feu et la pluie.
Pour ce qui change, naît , croît,
Se consume et devient baiser.
Salut pour ce nous possédons d'air
et ce que nous possédons de terre.
.......
Salut pour la nuit et le jour
et les quatre saisons de l'âme.
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A bientôt, invité.
Bonjour.
Mon poème a surgi
Pour toi, pour personne,
Pour tous.

Je vais t’en prier : laisse-moi inquiet.
Je vis avec l’océan intraitable
Et le silence m’est pesant, terriblement.

Je meurs dans chaque vague chaque jour.
Je meurs dans chaque jour en chaque vague.
Pourtant le jour
Ne meurt jamais.
Il ne meurt pas.
Et la vague ?
Non plus.

Merci.

Ile Noire, Chili.
6 juillet 1969.
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LE TRAIN DE NUIT

« Oh ! long Train de nuit,
Souvent
Du Sud en direction du Nord,
Au milieu des ponchos mouillés,
Des céréales,
Des bottes que la boue raidit,
En Troisième,
Tu as déroulé la géographie.
C’est peut-être alors que j’ai commencé
La page terrestre,
Que j’ai appris les kilomètres
De la fumée,
L’étendue du silence.
… »
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La solitude, dans ce cas, ne se réduisait pas à un thème d'invocation littéraire, elle était une chose dure comme le mur du prisonnier, contre lequel on peut s'ouvrir la tête sans que personne accoure, même si on crie, même si on pleure.
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Pablo Neruda
Si tu m'oublies


Je veux que vous sachiez
une chose.

Tu sais ce que c'est :
si je regarde
la lune de cristal, la branche rouge
du lent automne à ma fenêtre,
si je touche
près du feu
la cendre impalpable
ou le corps ridé de la bûche,
tout me porte à toi,
comme si tout ce qui existe,
arômes, lumière, métaux,
était de petits bateaux
qui voguaient
vers tes îles qui m'attendent.

Eh bien, maintenant,
si peu à peu tu cesses de m'aimer,
je cesserai de t'aimer peu à peu.

Si soudain
tu m'oublies
ne me cherche pas,
car je t'aurai déjà oublié.

Si tu le penses long et fou,
le vent de bannières
qui traverse ma vie,
et que tu décides
de me laisser au bord
du cœur où j'ai des racines,
souviens-toi
que ce jour-là,
à cette heure-là,
je lèverai les bras
et mes racines partiront
à la recherche d'une autre terre.

Mais
si chaque jour,
chaque heure,
tu sens que tu m'es destiné
avec une douceur implacable,
si chaque jour une fleur
monte à tes lèvres pour me chercher,
ah mon amour, ah le mien,
en moi tout ce feu se répète,
en moi rien ne s'éteint ni ne s'oublie,
mon amour se nourrit de ton amour, bien-aimé,
et tant que tu vivras il sera dans tes bras
sans quitter les miens.
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Muraille adoucie par les doigts.
Toiture combattue par les plumes.
Bouquets de miroir, appuis de tempête.
Trônes renversés par les lianes.
Ordre de la serre ensanglantée.
Ouragan en suspens sur la pente.
Immobile cataracte de turquoise.
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Écume minérale, lune de quartz.
Serpent des Andes, front d’amarante.
Coupole du silence, patrie pure.
Fiancée de la mer, arbre de cathédrales.
Bouquet de sel, cerisier aux ailes noires.
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je suis jeune avec la jeunesse de l'eau,
je suis lent avec la lenteur du temps,
je suis pur avec la pureté de l'air,
sombre avec le vin de la nuit;
je ne me figerai qu'une fois devenu
ce minéral qui ne peut plus voir ni entendre,
ni contribuer à ce qui naît et qui grandit.

Lorsque j'ai choisi la forêt
pour apprendre à exister,
feuille à feuille,
j'ai étendu mes leçons
et appris à être racine, boue profonde,
terre muette, nuit cristalline,
et un peu plus chaque fois, toute la forêt.
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MARÉES

J'ai grandi en baignant dans l'eau de la nature
tel le mollusque dans le phosphore marin:
le sel brisé qui me heurtait et m'emplissait
de son écho, construisait mon propre squelette.
Comment vous expliquer : sans mouvement ou presque
de cette respiration, bleue haleine amère,
une à une les vagues répétèrent
ce que je pressentais et qui palpitait là,
et pour finir sel et écume me formèrent:
le dédain et aussi le désir d'une vague,
le rythme vert qui au cœur de l'impénétrable
bâtit un édifice transparent,
ce secret-là se maintint ferme et aussitôt
je sentis que mon cœur battait à l'unisson:
que mon chant grandissait en même temps que l'eau.
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LA SOLITUDE

Ce qui n'arriva pas fut si soudain
que je suis resté là et pour toujours,
sans savoir, sans qu'on sache ma présence,
comme caché sous un fauteuil
ou comme égaré dans la nuit :
ainsi fut ce qui ne fut pas,
ainsi je suis resté et pour toujours.

Plus tard j'ai questionné les autres,
j'ai demandé aux hommes et aux femmes
ce qu'ils faisaient d'une pareille certitude
et comment ils avaient appris la vie :
j'attends encore qu'ils me répondent,
ils ont continué à vivre, à danser.

Ce qui ne vous est arrivé
est ce qui détermine le silence,
et si je ne veux plus parler
c'est que je suis resté là dans l'attente:
dans cette région, ce jour-là,
je ne sais pas ce qui m'est arrivé
pourtant je ne suis plus le même.
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ÉLOGE DE LA LANGUE ESPAGNOLE
Quelle belle langue que la mienne, quelle belle langue nous avons hérité des farouches conquistadors. Ils marchaient à grandes enjambées à travers les terribles cordillères , à travers les Amériques courroucées, cherchant des pommes de terre, des saucisses, des haricots, du tabac gris, de l'or, du maïs, des œufs frits, avec cet appétit vorace que l'on n'a plus jamais vu nulle part. Ils avalaient tout, les religions, les pyramides, les tribus, les idolâtries, semblables à celles qu'eux-mêmes apportaient dans leurs grands sacs... Partout où ils passaient la terre était dévastée... Mais des bottes des barbares, de leurs barbes, de leurs heaumes, des fers de leurs chevaux tombaient, comme des pierres précieuses, les mots lumineux, qui sont restés ici dans toute leur splendeur... la langue. Nous sommes sortis perdants... Nous sommes sortis gagnants... Ils ont emporté l'or et nous ont laissé l'or... Ils ont tout emporté et nous ont tout laissé... Ils nous ont laissé les mots."
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L'enfant perdu

Ô lente enfance d'où
comme une longue pâture
grandit le dur pistil,
le bois de l'homme.

Qui ai-je été ? Et quoi ? Qu'avons-nous donc été ?

Point de réponse. Nous passâmes.
Nous n'avons pas été. Nous étions. D'autres pieds,
d'autres mains, d'autres yeux.
Tout se transforma feuille à feuille
sur l'arbre. Mais en toi ? Ta peau changea,
tes cheveux, ta mémoire. Non, tu ne fus pas celui-là.
Cet enfant-là passa lui en courant
derrière un fleuve ou derrière une bicyclette,
avec le mouvement
s'en alla ta vie dans cette minute.
La fausse identité suivit tes pas.
Jour après jour les heures s'ammarèrent,
mais ce n'était déjà plus toi et l'autre vint,
l'autre toi, puis un autre encore et tu fus toi enfin
et tu finis par t'arracher
au passager lui-même,
au train, au wagon de la vie,
à la substitution, à l'être cheminant.
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LES MOTS
...Tout ce que vous voudrez, oui, monsieur, mais ce sont les mots qui chantent, les mots qui montent et qui descendent... Je me prosterne devant eux... Je les aime, je m'y colle, je les traque, je les mords, je les dilapide.. J'aime tant les mots... Les mots inattendus... Ceux que gloutonnement on attend, on guette, jusqu'à ce qu'ils tombent soudain... Termes aimés. Ils brillent comme des pierres de couleurs, ils sautent comme des poissons de platine, ils sont écume, fil, métal, rosée... Il est des mots que je poursuis... Ils sont si beaux que je veux les mettre tous dans mon poème... Je les attrape au vol, quand ils bourdonnent, et je les retiens, je les nettoie, je les décortique, je me prépare devant l'assiette, je les sens cristallins. vibrants, éburnéens, végétaux, huileux, comme des fruits, comme des algues, comme des agates, comme des olives. Et alors je les retourne, je les agite, je les bois, je les avale, je les triture, je les mets sur leur trente et un, je les libère. Je les laisse comme des stalactites dans mon poème, comme des bouts de bois poli, comme du charbon. comme des épaves de naufrage, des présents de la vague... Tout est dans le mot... Une idée entière se modifie parce qu'un mot a changé de place ou parce qu'un autre mot s'est assis comme un petit roi dans une phrase qui ne l'attendait pas et lui a obéi... Ils ont l'ombre, la transparence, le poids, les plumes, le poil, ils ont tout ce qui s'est ajouté à eux à force de rouler dans la rivière, de changer de patrie, d'être des racines.
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(incipit)
Je dirai pour commencer cette évocation des jours et des années de mon enfance que le seul personnage que je n'ai pu oublier fut la pluie. La grande pluie australe qui tombe du Pôle comme une cataracte, depuis le ciel du cap Horn jusqu'à la Frontière. Sur cette Frontière -Far West de ma patrie-je naquis à la vie, à la terre, à la poésie et à la pluie. Ayant beaucoup vu et beaucoup circulé, il me semble que cet art de pleuvoir qui s'exerçait comme une subtile et terrible tyrannie sur mon Araucanie natale a cessé d'exister. Il pleuvait des mois entiers, des années entières. La pluie tombait en fils pareils à de longues aiguilles de verre qui se brisaient sur les toits ou qui arrivaient en vagues transparentes contre les fenêtres ; et chaque maison était un vaisseau qui regagnait difficilement son port sur cet océan hivernal. Cette pluie froide du sud de l'Amérique n'a pas les violences impulsives de la pluie chaude qui s'abat comme un fouet et qui disparait en laissant le ciel bleu. Bien au contraire, la pluie australe se montre patiente et continue à tomber interminablement du haut du ciel gris.
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Dans la nuit haute en empruntant la vie entière,
allant des larmes au papier, de vêtement en vêtement,
j'avançai en ces jours soucieux.
J'étais le fugitif traqué par la police:
et lorsque l'heure est de cristal, dans l'épaisseur
et la solitude stellaires,
je traversai des villes, des forêts,
des métairies, des ports au milieu des montagnes,
du seuil d'un être humain à celui d'un autre homme,
d'une main à une autre main, puis à une autre.
La nuit est grave, pourtant l'homme
l'a jalonnée de signaux fraternels
et tâtonnant par les chemins, palpant les ombres,
j'arrivai à la porte illuminée, au petit point
étoilé qui était le mien,
à ce quignon de pain que les loups dans le bois
n'avaient pas dévoré.
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Au corail sanguinaire, à l'étoile brûlée,
à l'eau incandescente et humiliée
je n'ai pas livré le secret respectueux, la syllabe.
J'ai conservé ta voix en furie, un pétale
de sable tutélaire
au beau milieu des meubles et des vieux vêtements.

Une poudre de cloches, une rose mouillée.
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tout est ma nuit, tout
est mon jour, tout
est mon air, tout
est ce que je vis, souffre, érige et agonise.
Amérique, de nuit ou de clarté
ne sont point faites les syllabes que je chante.
De terre est la matière qui régit
le flamboiement, le pain de ma victoire,
et terre est mon sommeil qui n'est jamais sommeil.
Je dors entouré d'argile spacieuse
et dans mes mains il coule quand je vis
une source de terres, sols puissants.
Ce que je bois n'est pas vin, il est terre,
terre dérobée, terre de ma bouche,
terre d'agriculture humide de rosée,
ouragan de légumes lumineux,
racine céréale, cellier d'or.
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