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Citations de Pascal Bruckner (612)


"Repentez-vous!" Voilà le message,que, derrière l’hédonisme proclamé, nous martèle la philosophie occidentale depuis un demi-siècle, elle qui veut être à la fois une parole émancipatrice et la mauvaise conscience de son temps. Ce qu'elle nos inocule, en fait d'athéisme, c'est bien la vieille notion de péché originel, l'ancien poison de la damnation. (p.14)
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Qu'est-ce qu'un couple ? Le renoncement à l'existence en échange de la sécurité, le visage sans attrait de l'amour légitime.
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Sa motivation ultime [au terrorisme], toutefois, c'est l'hostilité que les fanatiques vouent au principe d'une société ouverte où l'égalité formelle est reconnue à tous. C'est notre existence en tant que telle qui leur est intolérable. (p.33).
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Plus un peuple se civilise et réfrène ses pulsions meurtrières, plus il se délecte d'histoires atroces.
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La sauvegarde du globe commande de dénigrer tout ce qui relève de l'esprit d'entreprise, du goût de la découverte, surtout en matière de science. Nous avons cessé d'admirer, nous ne savons que dénoncer, décrier, geindre. La faculté de s'enthousiasmer est en voie de dépérissement.
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Attention toutefois de ne pas nous barbouiller de sublime. La vie quotidienne ne tient que par les antihéros : il y a aussi de l'abnégation, du courage, de la folie dans le geste d'une infirmière qui pose une perfusion, lave un grand malade, vide un bassin, ou dans le dévouement des parents, des éducateurs qui nourrissent leur progéniture, la protègent, l'éduquent, la guident. La vie collective ne tient que par ce ciment invisible, cet instinct presque animal qui soude les humains les uns aux autres dans le bain tiède de la bienveillance et du secours aux plus démunis.
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Chacun de nous pourrait remonter dans son arbre généalogique et trouver, qui un exploité, qui un serf ou un pendu pour expliquer sa misère présente. Le principe de la démocratie, c'est que la faute comme la blessure s'arrêtent à celui qui l'a commise ou subie : le fils d'un gangster n'est pas un gangster, le fils d'un déporté n'est pas un déporté, même si la mémoire des traumatismes reste vive. Aucun enfant ne nait coupable ou victime du fait de ses aïeux. L'humanité recommence avec chacun de nous et je ne porte pas sur moi les stigmates de mes ascendants. J'ai une histoire familiale, je ne suis pas cette histoire, il est en mon pouvoir de l'emmener ailleurs.
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Depuis l’enfance , nous n'apprenons qu'une chose: le prix hors de prix de l'existence. Nous restons des êtres en transit, perdus sur un sentier obscur et qui tentent de s'éclairer à la lumière de la raison et de la beauté. On ne reste libre qu'en s'immergeant parmi les autres, frère, ami, camarade, parent, toujours curieux, jamais résigné. Nous perdrons notre enveloppe corporelle, disparaîtrons dans le flux, redeviendrons cendres. Et alors? Nous n'avons jamais été que de passage, fragment d'un tout qui nous dépasse. Réjouissons-nous d'avoir duré et de pouvoir encore bénéficier des bontés du monde.
Au soir de notre vie, si heureuse ou douloureuse fût-elle, nous mesurons la chance qui nous a été donnée. Nous avons été simultanément blessés et comblés. Beaucoup de nos prières n'ont pas été entendues: d'autres, que nous n'avions pas formulées , ont été exaucées au centuple. Nous avons traversé des cauchemars et reçu des trésors. L'existence a pu être cruelle autant que capiteuse et opulente.
Le seul mot que nous devrions prononcer chaque matin, en reconnaissance du cadeau qui nous a été fait, c'est : Merci! Rien ne nous était dû.
Merci pour cette grâce insensée.
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La montagne m'a enseigné une leçon fondamentale : la vraie misère est dans l'extinction des convoitises. En altitude comme en amour, l'essentiel est de toujours repousser la date de péremption. A tout âge, il faut avoir les yeux plus grands que le ventre, désirer au-delà du possible. Équilibrer l'affaiblissement par l'ambition, manifester un appétit sans limites. Afin que jamais ne se relâche la ferveur qui nous unit au monde.
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Le besoin de sécurité absolue peut étouffer jusqu’au goût des autres. La fin du monde, c’est d’abord la fin du monde extérieur, c’est le manque d’attirance pour la vie commune. L’appétit de vivre des années 60 est fini : il faut refroidir le sublime, réduire les ambitions, inviter chacun à des orgies de petitesse. Le désir de jouir de tout ce que la vie offre de meilleur est banni voire condamné comme un péché contre la planète, la nation, le passé, la morale, les minorités.
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L’avantage du voyage sur place est qu’il ne coûte rien, ne fait courir aucun risque à celui qui l’entreprend, convient aux démunis autant qu’aux poltrons et aux oisifs
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Le paradis a la surface de ma pièce. Côtoyer des anonymes n’est plus un plaisir mais une corvée. Les grands rituels collectifs, sorties, galas, etc. risquent de diminuer ou d’être transportés dans l’outre-monde. Tout ce qui peut être fait depuis son canapé sera désormais privilégié par rapport aux activités d’hier
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« Quand la neige fond, où va le blanc ? » demandait Shakespeare. Dans la terre qui le bois comme une éponge et le déverse dans les ruisseaux et les rivières. Quand le livre est lu, où vont les pages tournées ? Lesquelles portent à conséquence ou tombent dans le grand puits de l’oubli ? Combien de romans ont retenti en nous, combien ont disparu corps et biens ?
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La faute s'arrête à celui qui l'a commise et ne déteint pas, comme un poison, sur ses descendants, pas plus que le malheur ne se transmet aux héritiers tel un fardeau à porter.
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Les réformateurs du mariage depuis les Lumières insisteront sur trois points : privilégier les sentiments sur l’obligation, en finir avec le tabou de la virginité et faciliter la séparation des époux mal accordés. C’est Balzac qui, obsédé par l’adultère féminin – « ce mot […] qui traîne à sa suite un lugubre cortège, les Larmes, la Honte, la Haine, la Terreur… » et la vision de millions de maris « minotaurisés » (c’est-à-dire cocufiés, dotés de cornes) – plaidera pour la liberté sensuelle des jeunes gens, seule à même de remédier à une foule de maux :

« Rendons à la jeunesse les passions, les coquetteries, l’amour et ses terreurs, l’amour et ses douceurs. A cette saison printanière de la vie, nulle faute n’est irréparable… et l’amour y sera justifié par d’utiles comparaisons. Dans ce changement de nos mœurs périra d’elle-même la honteuse plaie des filles publiques. »

Balzac développe ici un argumentaire qui deviendra classique au XIX e siècle et sera défendu également par Fourier, Stendhal, Hugo : la chasteté obligatoire des jeunes filles génère le double fléau des amours tarifées et des aventures extraconjugales, avec le spectre terrifiant de la bâtardise (dans la Rome antique, seules les femmes enceintes pouvaient se montrer infidèles sans problème, car cela ne remettait pas en cause la lignée, c’est-à-dire la pureté spermatique). Les hommes affamés recourent aux maisons closes, les épouses déçues par le manque d’assiduité des maris s’abandonnent aux galants de passage, tapis en embuscade. Léon Blum, dans un livre qui fit scandale lors de sa parution en 1907, approfondit avec talent la proposition balzacienne : il dépeint côte à côte la vierge

« dans son lit triste, tendant inutilement ses bras au rêve d’amour dont une imagination exaltée exagère encore la violence ou la douceur, et la prostituée dépêchant sur son lit de travail, avec un ennui hâtif sa tâche trop de fois répétée ».

Et comme ces deux misères se conditionnent, la vierge et la prostituée, celle-ci presque toujours une ouvrière, doivent être sauvées ensemble :

« A l’une, il faut faire oublier que l’amour existe, à l’autre qu’il existe dans la vie autre chose que l’amour. »

A la première, on interdit l’entrée dans la vie sexuelle, à l’autre on défend d’en sortir. Et Blum de plaider, d’une plume inspirée, pour le libre vagabondage des jeunes filles, aptes à vivre leurs fantaisies érotiques avec qui bon leur semble avant que « la maturité matrimoniale » ne les dispose à convoler en justes noces.

Les femmes ont un corps et ce corps a besoin d’exulter tout comme celui des hommes : il faudra plus d’un siècle après Balzac pour que les sociétés occidentales, marquées entre-temps par la révolution freudienne, admettent la réalité de l’Eros féminin, contrevenant au préjugé antérieur qui prêchait la pureté par terreur de la lubricité.
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Pascal Bruckner
« A chaque attentat, nous balançons entre la routine et l’effroi. […] On n’a pas le droit d’être bête ou négligent face au terrorisme. Bruxelles est aussi la capitale de l’Europe…
L’islam radical exporte sa sale guerre dans le monde entier. […] Sa démence meurtrière veut s’imposer à tous les hommes. C’est une guerre mondiale mais très particulière. Asymétrique, erratique et pourtant une guerre totale dont les premières victimes sont des civils tous coupables d’exister. Il reste un impensé dans la façon dont nous l’abordons. Nous répétons qu’il ne faut pas faire d’amalgame avec l’islam sans comprendre que les djihadistes revendiquent eux-mêmes le fait d’être les seuls véritables musulmans. Les autres, la très grande majorité, sont rejetés par ces fanatiques dans les ténèbres de la mécréance. Ces soldats de l’apocalypse sont d’abord des croyants et nous devons les prendre comme tels.

La Belgique a fait le choix assumé du communautarisme. Le quartier de Molenbeek est devenu symbolique… Les policiers qui ont arrêté Abdeslam à Molenbeek ont été caillassés par des jeunes gens. Ce sont des gestes rares sur notre continent. Molenbeek est devenu une sorte de Gaza, de Mossoul à l’intérieur de l’Europe. […] Il va falloir assainir ce quartier. La vérité est cruelle : les élus de droite comme de gauche, en Belgique comme en France, par clientélisme, ont négocié avec les associations culturelles, les imams, les caïds. Ils ont laissé s’installer non pas des zones de non-droit mais des zones d’un autres droit, mélange de charia et de « code d’honneur » des voyous.

Peut-on parler de Molenbeek français ? Manuel Valls l’a dit et l’on peut penser qu’il dispose d’éléments fiables pour asséner un tel verdict. Il y a en France un risque de guerre civile larvée en raison de la porosité entre les gangs de banlieue et les cellules radicalisées : le djihad est la voie de sortie pieuse du banditisme [sur laquelle prospère Daech dans son entreprise de propagande] […]

Nos démocraties sont-elles armées pour la guerre qui nous attend ? Les démocraties sont par nature démunies face à la barbarie. Elles pensaient l’histoire finie, les religions un vestige de la préhistoire, la nation une formée désuète de communauté humaine […] Voilà ce qu’était l’utopie européenne et le 11 septembre n’y a rien changé. Songez que depuis vingt ans tous les budgets militaires sont à la baisse sur notre continent. Nous opposons toute une série d’explications sociologiques, géopolitiques pour nous rassurer face à l’entreprise d’islamisation du monde.
[…] On se demande : « Qu’a-t-on pu faire de mal pour qu’ils nous haïssent à ce point ? » La vérité que nous ne voulons pas entendre est pourtant criante : ils nous haïssent pour ce que nous sommes. Des êtres libres mus par l’amour de la vie, le respect du droit et l’esprit critique. Voilà notre crime. »
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Notre perception funeste ou gaie de l'état des choses est souvent conditionnée par cet environnement étroit qui nous influence autant que nous l'influençons. Il y a donc un bonheur suscité par les autres mais dont le cercle se limite à quelques intimes et ne rayonne jamais jusqu'aux confins de la terre. L'idéal serait bien sûr de concilier agrément personnel et collectif et de s'accomplir dans un monde d'où toute oppression et misère auraient été bannies. Qu'à l'horizon de chaque moment de joie, il y ait une envie de rendre l'humanité meilleure, de partager cette allégresse avec tous est exact. Mais s'il fallait que les injustices s'estompent pour accéder au « nirvana », nous ne pourrions même pas esquisser un sourire sur nos lèvres. L'horreur, l'abomination nous environnent mais nous vivons, prospérons et nous avons raison car cette insensibilité est indispensable à l'équilibre. Sous quelque angle qu'on le prenne, il n'est de bonheur que dans l'insouciance, l'inconscience et l'innocence, ces rares instants soustraits à l'inquiétude, aux alarmes. Nous ne sommes heureux qu'en dépit : en dépit d'un ami qui souffre, d'une guerre qui tue, d'un univers malade et il n'y a nulle honte à en avoir car il y aura toujours des calamités, des massacres qui renverront l'état social parfait aux calendes.
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Chacun de nous, responsable de son tonus, de sa bonne humeur, n'a plus à renoncer mais à s'adapter selon les voies d'un perfectionne¬ment qui rejette toute inertie. L'ordre a cessé de nous condamner ou de nous priver, il nous indique les chemins de la réalisation avec une sollicitude toute maternelle.
On aurait tort de prendre cette générosité pour un affranchissement. Il s'agit là d'un type de coercition charitable qui engendre le malaise dont elle s'efforce ensuite de délivrer les êtres. Les statistiques qu'elle dif¬fuse, les modèles qu'elle affiche suscitent une nouvelle race de fautifs, non plus les sybarites ou les libertins mais les tristes, les rabat-joie, les dépressifs. Le bonheur n'est plus une chance qui nous arrive, un moment faste gagné tsur la monotonie des jours, il est notre condition, notre destin. Quand le souhaitable devient possible, il est aussitôt intégré à la catégorie du néces¬saire. Incroyable rapidité avec laquelle l'édénique d'hier devient l'ordinaire d'aujourd'hui. C'est une morale de battants qui investit la vie quotidienne et laisse derrière elle de nombreux battus et de nom¬breux abattus. Car il existe une redéfinition du statut social qui n'est plus seulement du côté de la fortune ou du pouvoir mais aussi de l'apparence : il ne suffit pas d'être riche, encore faut-il avoir l'air en forme, nouvelle espèce de discrimination et de faire-valoir qui n'est pas moins sévère que celle de l'argent. C'est toute une éthique du paraître bien dans sa peau qui nous dirige et que soutiennent dans leur ébriété souriante la publi¬cité et les marchandises.
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Les livres ne m'ont jamais déçu, j'en ai lu beaucoup de mauvais mais tant de bons. Aujourd'hui encore, j'en achète chaque semaine, heureux de leur surabondance, de leur prolifération même si je sais que je n'aurai pas trop de cent vies pour les lire tous. Je les ouvre en tremblant, je cherche en eux une révélation comme on découvre le corps d'une inconnue, ému de retrouver ce que l'on connaît déjà et qu'on ne connaîtra jamais. Dans chaque volume, je me quitte provisoirement, j'épouse de nouveaux destins, me hausse à d'autres niveaux d'intelligence.
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Ainsi en 2000, le ministre de l’intérieur au sein du gouvernement Jospin, Jean-Pierre Chevènement, lança une vaste consultation qui aboutit à un pacte signé par les représentants de l’islam français. Jean-Pierre Chevènement aurait voulu, en bon républicain, y voir consacré « le droit de toute personne de changer de religion et de convictions ». Ce dernier étant assimilé à un acte d’apostasie, les autorités musulmanes refusèrent la mention."

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