Citations de Pete Fromm (608)
Et bien que la sensation ait disparu depuis longtemps, je goute le vin, le citron, l'ail et l'aneth, et tandis que je ferme les yeux, je le goute lui, tout entier, je suis sure de sentir la fumée de chaque feu de camp, peut être un peu de sable du canyon, Iz et Atty sont là aussi, et toutes les autres choses nickel que nous faites, mes doigts plongent dans ses cheveux lorsqu'il remonte pour une respiration et je l'attire à nouveau vers moi, chuchotant : il n'y aura rien de tout cela. Il est agenouillé, sur le carrelage qu'il a posé lui même dix ans plut tôt, je suis à moitié sortie du fauteuil, nous nous enlaçons dans ma salle de bains pour handicapés et maintenant je sais précisémment pourquoi mes yeux sont voilés et je n'ai aucune intention de le lâcher, jamais.
Je me glissai dans une baignoire en fer galvanisé et, armé d'un pichet, j'écopai l'eau chaude et la versai sur ma tête. Je me lavai rapidement les cheveux , et utilisai comme je pouvais l'eau qui descendait le long de mon corps pour laver le reste. Je ne disposais que d'une dizaine de litres d'eau chaude, et je finis par y mélanger de l'eau froide afin de pouvoir me rincer. Toute l'affaire fut précipitée et maladroite, et finalement peu agréable.
De la mi-octobre à la mi-juin, j’allais être responsable de deux millions et demi d’oeufs de saumon implantés dans un bras entre deux rivières. La route la plus proche se trouvait à quarante miles, l’être humain le plus proche à soixante miles. Si j’étais intéressé, précisa-t-il, je n’aurais que deux semaines pour me préparer.
J’entendais de moins en moins ce qu’il disait. Tout me semblait parfait. J’allais enfin découvrir le monde sauvage. Film ou réalité ? Galère ou liberté sans limite ? Mais, de toute manière, peu importe ce que j’allais découvrir, j’aurais une histoire à raconter plus tard, mon histoire.
Je dis au garde que tout cela me semblait très intéressant. Si j’avais été plus attentif, j’aurais sans doute pu l’entendre secouer la tête.
— Et le salaire, ça ne vous intéresse pas ? demanda-t-il.
Je lui répondis que si, bien sûr, même si je n’y avais pas songé.
— Deux cents dollars par mois, lança-t-il.
— D’accord, répondis-je.
C’était trop beau pour être vrai. Être payé, en plus. Il me conseilla d’y réfléchir et de le rappeler le lendemain.
— Entendu, fis-je.
Une formalité. Ma décision était prise.
Ce n'est pas la fin du monde, juste la planète qui la ramène, histoire de nous montrer ce dont elle est capable, au lieu de se contenter d'exister, ainsi qu'elle le fait d'habitude, une petite rodomontade au crépuscule pour nous rappeler que nous ne sommes pas le centre de la Terre, mais un détail mineur condamné à errer à sa surface.
La surface se trouble et s'assombrit, d'abord grise puis charbon, tandis qu'au nord, le ciel noircit tel un fruit pourri.
- On ne se rappelle jamais des mauvais moments, dis-je. (...) Pourquoi faudrait-il retenir ces moments-là ?
- Moi, je crois que si on ne le faisait pas, on finirait par devenir dingue.
Great Falls, Montana, avril 2004
Après m'être installé à dix-sept ans dans le Montana, j'ai passé des années à rêver aux montagnards et à leurs exploits virils et solitaires, je rêvais de trouver une cabane introuvable car trop isolée, digne d'une carte postale, avec peut-être un hybride de loup qui passerait la gueule à la porte pour anéantir tous les étrangers. (p. 17)
Chaque jour, mon unique tâche était de faire circuler l'eau dans le bassin, mais chaque soir la cascade située au bout gelait, bloquait l'eau et menaçait de tout changer en glace, en me laissant deux millions de petits cubes de saumon. Donc chaque matin, je fendais la cascade glacée à coups de hache, je libérais l'eau prisonnière, je la faisais circuler et maintenais les oeufs en vie. Un jour normal, cette tâche prenait en moyenne cinq minutes. Le reste de la journée, de chaque journée, vingt-trois heures et cinquante-cinq minutes, était du temps libre.
Je survécus. J'appris à le faire. J'appris que la solitude a ses hauts et ses bas. J'appris qu'un endroit comme celui-là, lorsqu'on y vit seul, devient plus qu'un simple endroit. Alors que j'étais un être dénué de toute importance dans cet endroit, il devint une partie de moi-même. Une partie de moi-même qu'il me faudrait des années, des décennies, pour seulement commencer à comprendre. (p. 41)
Putain, l'ignorance a ses avantages. J'en reprendrais bien un verre. Servez m'en un double.
J’en ai vu s’élancer depuis leur nid de branches, se rattrapant à la dernière brindille à la dernière minute, trop vite, trop loin, et voilà que la magnifique créature ailée devenait un maelström de plumes furieuses, se cognant tête en bas contre le nid, dégringolant puis trouvant, avec un peu de chance, assez d’air sous ses ailes en torche pour atterrir en catastrophe sur un banc de gravier, sans plus de dommages qu’un ego meurtri
Je les préviendrai, dit-il. De faire très attention au bonheur. Je leur dirai qu'il risque de les prendre par surprise, de leur couper le souffle, et qu'ils en voudront toujours plus.
En acceptant de venir ici , j' avais dans la tête une vague idée de liberté : n' obéïr à personne , ne faire que ce que je voulais . Il me semblait maintenant avoir négligé le fait tout simple que , même si je pouvais faire tout ce qui me chantait , et à n' importe quel moment , il n'y avait rien à faire. ( p 57/58)
L'intérieur du réservoir était plus noir que d'habitude, uniquement percé par les constellations pâles des trous faits par les balles. Me tenant à la porte, je me demandai tout à coup si le monde d'Abilene ressemblait à ça : sa tête remplie de ses étoiles rien qu'à elle, d'abord captivantes, mais finalement terrifiantes quand elle se rendait compte que toutes les autres sources de lumière s'étaient éteintes.
— Toi et moi...
— Contre le monde entier.
— Pauvre monde...
— Il n'a aucune chance.
Je pensais t’avoir au moins transmis ça, qu’un travail n’équivaut pas à une vie.
- C'est justement ça, notre boulot, non? Les elevers jusqu'à ce qu'ils nous abandonnent.
- Exact. Et qui pourrait vouloir d'un boulot pareil?
- Et qui pourrait vouloir d'un deuxième round?
Ce serait la goutte de cerise qui ferait déborder le pot aux roses.
« Il s’assied sur le canapé affaissé et tend l’oreille ; autour de lui, la maison s’assombrit .
Midge dort dans la nursery , silencieuse .
Il se frotte les yeux . Marnie et lui, fous de désir , lustrés de sueur , incapables de s’arrêter, incapables de penser à vouloir s’arrêter , d’imaginer une telle chose possible ……. »
« Malgré la chaleur torride de ce tout début de mois de juillet, l’eau est si froide qu’elle les saisit .
Ils y pénètrent en riant , le souffle court, avant de nager plus loin jusqu’aux rapides, puis ils se laissent repousser en aval et tournoient dans le courant , la respiration plus régulière à présent .
Taz passe les bras autour du ventre de Marnie, ils regardent les nuages glisser dans le ciel , aussi inoffensifs que des coups de pinceau : cela fait des mois qu’aucune goutte n’est tombée ….. »
Monica songeait à reprendre ses études, parce que les enfants ne seraient pas toujours là et qu'après leur départ elle serait trop vieille. Cela nous faisait beaucoup rire car nous étions encore assez jeunes pour trouver drôle l'idée d'être trop vieux pour quoi que ce soit.