Citations de Raphaël Enthoven (207)
Nous devons montrer l’exemple, montrer comment, en tant que frères et sœurs qui partageons cette planète, nous avons le devoir de nous respecter les uns les autres… Ce qui nous rassemble est plus fort que ce qui nous divise. Quand les temps sont difficiles, le sage construit des ponts, alors que l’idiot érige des barrières…
(...) l'indignation a ceci de génial qu'étant l'affect rousseauiste par excellence elle donne le sentiment d'être iconoclaste tout en appartenant à la majorité. Elle consiste à hurler avec la meute tout en persuadant l'indigné qu'il est son seul maître. Elle a l'air de révolte, mais c'est un sédatif. Dormez, braves gens, faites comme tout le monde, indignez-vous !
L'humour n'a pas de but. L'ironie a toujours une idée derrière la tête.
On a beau constater, la conscience jaune encore de sommeil, qu'un Janvier blafard exhibe des bouteilles vides, et que, outre l'aspirateur il va falloir passer la serpillière, rien n'y fait, le Nouvel an renaît chaque années des cendres de Décembre, tel un Phénix impénitent qui aurait la mémoire d'une poule
N'oublions pas toutefois que le roman de Proust fonctionne à la manière d'un télescope, l'instrument de l'astronome, qui sonde l'univers en prenant pour mesure l'année_lumière, qui évalue l'espace avec le temps, puisque l'année-lumière est la distance que parcourt la lumière pendant une année entière. Il n'y a pas de jonction possible, et lorsque l'enfant se précipite vers sa mère pour l'embrasser (rien de plus proustien que cela), c'est toujours le moment où la mère vient d'apprendre qu'il a volé de la confiture, le moment où il a fait telle ou telle faute, et elle veut alors le repousser, le gronder ; il n'y a jamais d'accord parfait entre ces univers d'espace-temps au sein desquels nous vivons, où nous mourons lentement, et qui font autour de nous comme un vide immense, au sommet duquel nous chancelons de plus en plus avant de tomber dans l'abîme.(...)
Mais revenons à Méséglise. Je crois que du côté de Méséglise l'enfant va faire l'expérience absolue que l'illusion de l'amour, par la proximité des corps, croit pouvoir vaincre. C'est le rêve de chaque homme, franchir cette distance que seules peuvent abolir la réminiscence romanesque et le travail d'écriture, dans une solitude totalement assumée puiqu'elle ressemble à celle d'un mort qui s'ensevelit dans une pièce, hors du monde, n'écrivant que la nuit, tel Saint-Simon écrivant ses Mémoires, comme Shéhérazade distille ses contes, et qui, se vouant à une nuit de l'écriture accepte son indépassable solitude.
En même temps, cette solitude est la condition, justement, d'une ultime réunion des êtres. Une façon de les mettre dans ce grand cimetière quest la Recherche. Si solitude il y a, elle est la condition, peut-être l'unique possibilité, de réunir ceux qui, sans cela, demeureraient dispersés dans l'espace.
D'instinct, je venais de faire la différence entre la résignation et le consentement. Et de comprendre que le lieu où l'on se rend a moins d'importance parfois que la démarche elle-même. J'allais perdre la partie, bien sûr. Mais délibérément. Au jeu d'échecs, je perdrais sans être vaincu. (p192)
Une cité qui doute d’elle-même est prompte à se donner des boucs émissaires.
Le regard de l’être aimé contraint à la vertu.
Si l’on formait une armée d’amants, ils seraient invincibles...
Tous aimeraient mieux mourir cent fois que déposer les armes.
L’imagination est un voyage sans but, qui nous emmène ici et maintenant, dans les événements les plus anodins ou les plus fugaces, dont elle fait un trésor en versant sur eux la belle eau d’un regard d’enfant. Imaginez…
Comprendre un texte, c'est bien, seulement le cœur ne s'emballe pas. Mais quand on comprend, en comprenant un texte, que c'est lui qui nous comprend, alors tout change. Et il suffit qu'un mort millécentenaire mette les mots justes sur le problème qui vous hante, pour que, soudain, sans jamais les résoudre, on se trouve apaisé.
Je fais ce que je peux est la seule attitude recevable en un monde qui ne promet rien et nous malmène indifféremment.
je fais ce que je peux est l'unique sagesse . p. 365
Nul n'est responsable de ce qui lui arrive mais chacun est responsable de ce qu'il en fait. p.42
Je jouais au phénomène intéressant. Le rire d’Emile et les compliments de mon père étaient mon salaire d’enfant supérieur. Ma monnaie de singe savant.
Douter. Refuser de savoir. Et, par là même, refuser cette forme d’ignorance qui consiste à croire qu’on sait. L’homme qui doute est un cauchemar pour ses congénères, parce qu’il est seul à vivre sans la béquille d’une certitude.
L’anagramme, avec ses piquantes métamorphoses, se joue de nous, se joue d’un monde rempli d’apparences trompeuses et... prometteuses.
Escalader l'Everest est une idée absurde, donc c'est une bonne idée.
Et il faut imaginer l'alpiniste heureux.
Une théorie scientifique n'est pas une vérité.
Une théorie est un scalpel délicat qui ouvre le monde sans l'abîmer.
(...) l'art contemporain est le théâtre d'une étonnante inversion au terme de laquelle il es plus facile d'être "artiste" que spectateur. L'hermétisme et l'élitisme qui le caractérise lui viennent, paradoxalement, d'une démocratisation du geste de l'artiste qui, remplaçant le talent par le seul courage de cracher ce qu'il porte en lui, dispense de tout effort, à commencer par celui de se rendre intelligible. Quand tout le monde peut devenir artiste, l'art ne s'adresse à personne. L'art contemporain, c'est un réalisme démocratique né du dévoiement de l'égalité des droits en équivalence (imaginaire) des talents.
C'est la crainte et non le goût de la philosophie qui fait d'elle une mode.
- Donc tu ne vas pas changer d'avis ?
- Changer d'avis sur quoi ? J'ai changé de vie. Je ne vais changer d'avis.