AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Citations de Renaud Camus (203)


L'effondrement de la langue affecte maintenant, et d’abord, ceux qui traditionnellement parlaient bien : les professeurs, les intellectuels, les journalistes, les hommes politiques.
Commenter  J’apprécie          400
Renaud Camus
Journal, 24 septembre 2019.

Les ennemis de la haine sont tellement haineux qu'ils finiraient presque par la rendre sympathique. (...) Je n'étais d'ailleurs pas du tout hostile à Melle Thunberg, jusqu'à présent ; mais je dois dire qu'avec son discours à l'ONU elle a offert une icône planétaire à tous ces enfants et adolescents dont frappe l'expression haineuse, supérieure, méprisante et vindicative, quand ils s'adressent à leurs parents et sans doute à leurs professeurs.
Commenter  J’apprécie          249
On se moque des théoriciens de la sortie de l'histoire mais l'économisme, la réduction de la vie politique à des questions de produit national brut, d'emploi, de balance des échanges commerciaux et d'équilibre des marchés, est bel et bien une forme atténuée de sortie de l'histoire - atténuée parce que cette réduction à l'économie n'a pas encore fait la preuve qu'elle excluait les guerres, civiles ou étrangères. Elle n'exclut certainement pas la violence, en tout cas, et moins encore la nocence, même si elle les fait glisser comme une poussière sous le tapis en les réduisant, fidèle à elle-même, à des problèmes de "chômage des jeunes", d'échec scolaire ou d'insuffisance du réseau des transports suburbains : comme si ces problèmes-là eux-mêmes n'avaient rien à voir avec la nature des populations, leurs origines et leurs cultures diverses. Néanmoins, face à cette conception purement comptable de l'existence et des rapports de force, toute tension qui prendrait sa source dans des questions d'appartenance ou d'identité, de race, d'ethnie, de religion, de culture, de frontière, de maîtrise d'un territoire ou de forme des institutions, apparaîtrait vite et serait dénoncée comme un archaïsme, nécessairement dangereux. Il reste qu'un peuple pour qui ces sujets-là ne comptent plus, et dont le président ne se rend plus à l'étranger qu'en tant que représentant de commerce, pour y discuter de contrats qui éventuellement seront signés au palais présidentiel entre lui-même et le président du conseil d'administration d'une firme quelconque, comme s'il s'agissait d'un traité international entre deux grandes nations, un tel peuple a déjà quitté, autant et plus que l'histoire, le temps, la conscience qu'il y a du temps, des siècles, de l'épaisseur de siècles, une chronologie, des dates, un passé, du futur, autre chose que ce présent gâteusement occupé à coïncider avec lui-même, comme le fait l'individu-type du soi-mêmisme ambiant, obsédé de l'idée d'être soi-même et rien d'autre, d'épouser exactement les contours de ce qu'il est déjà, sans jeu aucun, sans place pour le détour, la littérature, la courtoisie, la syntaxe, les formes, le destin, l'histoire.
Commenter  J’apprécie          230
Nous n'avons chacun à notre disposition, j'y reviens, et c'est triste à dire, et c'est une platitude que de le rappeler, qu'un temps étroitement circonscrit, et que tous nos efforts et toutes nos prudences ne rendront pas indéfiniment extensible. Et je ne regrette pas d'avoir proposé ailleurs, comme une des définitions possibles de la culture, "la claire conscience de la préciosité du temps". L'homme cultivé n'a jamais trop de temps, il n'en a même jamais assez pour tout ce qu'il y a à lire, à voir, à entendre, à connaître, à apprendre, à comprendre et à aimer. L'intelligible, par son énormité, est incommensurable à son intelligence. L'existant, par son immensité, est sans rapport de proportions avec sa soif de connaissance et les possibilités de sa mémoire. L'aimable, par son infinitude, outrepasse de toute part son amour. A tout moment il doit faire des choix, c'est-à-dire renoncer à des chemins, à des livres, à des études, à des admirations et à des distractions. Et ce qu'il est, autant que par ce qu'il lit, par ce qu'il entend et par ce qu'il étudie, il l'est par ce qu'il ne lit pas, par ce qu'il ne fréquente pas, ce à quoi il refuse de perdre son temps, ce temps que la culture rend précieux.
Commenter  J’apprécie          220
Renaud Camus
(Tweet écrit à l'hôpital).
Quand il n'y a plus de culture, on appelle culture ce qu'il y a.
Commenter  J’apprécie          210
"Des peuples qui restent des peuples ne peuvent pas s’agréger à des peuples. Ils ne peuvent que les conquérir, les submerger, les remplacer."
Commenter  J’apprécie          190
Renaud Camus
Journal 2019, entrée du 17 septembre 2019.
... C'est bien pourquoi tous ces fantasmes d'union de la droite, d'union des droites, n'aboutissent jamais à rien. La droite veut bien un moment, pour complaire à ses électeurs, s'associer à la résistance au changement de peuple et de civilisation, mais, outre qu'une part croissante de ses électeurs potentiels sont déjà changés, et appartiennent au nouveau peuple, il lui revient toujours à l'esprit, tôt ou tard, que les intérêts qu'elle défend non seulement ne sont en rien desservis par la submersion ethnique mais qu'ils ont besoin d'elle, ou croient avoir besoin d'elle, et la souhaitent. Elle est prise entre les suffrages qu'elle lorgne et les commanditaires qu'elle aguiche. Et comme les suffrages seront toujours manipulables par les commanditaires, qui sont maîtres des machines à décérébrer et à contrôler les esprits, elle est programmée pour trahir.
Commenter  J’apprécie          170
La politique n'intéresse plus personne, les gens préfèrent les variétés ? On fera passer les hommes politiques dans les émissions de variétés, et ils seront jugés sur leurs capacités à soutenir un dialogue avec Doc Gynéco.

p.313
Commenter  J’apprécie          151
Tous les jours de la semaine dernière, l'émission "Les Chemins de la connaissance", sur France Culture, était consacrée aux Berbères et à leur univers, ce qui chaque fois me faisait penser à Farid [ex amant de Renaud Camus], qui à l'occasion se prétendait berbère, ou disait se vouloir berbère, comme les plus anciens Marocains. Chaque fois que j'entends parler du Maroc, du monde arabe, des Berbères, de la religion musulmane, je suis pris d'une nostalgie de lui, car le fréquenter m'avait donné avec ces choses un lien sensible, si ténu soit-il, qui me faisait les voir de façon tout à fait différente, je n'oserais dire de l'intérieur, non, mais amoureusement, c'est plutôt cela - avec tout ce que le terme implique de profonde mécompréhension, bien entendu.
Commenter  J’apprécie          140
"Le temps de l’antiphrase, le mot pour un autre, l’euphémisme d’euphémisme et tout simplement le mensonge, président à ce qui survient, pour faire croire que cela ne survient pas."
Commenter  J’apprécie          130
La parole impie par excellence, impie à l'égard de l'homme, c'est "Tu ne jugeras pas". C'est seulement à partir du moment où l'homme transgresse cet interdit divin qu'il est vraiment homme ; à partir du moment où il écarte avec répulsion le "tout se vaut" que lui suggère éternellement la mort. (...) Juger est l'affaire d'une vie. Juger c'est distinguer et distinguer encore. Les hommes ne sont égaux qu'en ce qu'ils ont de moins humain. Etre homme, c'est être inégal. Valoir plus ou valoir moins. De toute façon : valoir. Ne vaut vraiment que ce qui ne vaut pas la même chose que tout le reste.

p. 39
Commenter  J’apprécie          120
Le paradoxe de ma position est que je suis le défenseur de la forme, des formes, et qu'elles ne sont guère associées (qu') à la reconnaissance et même à l'exploration de l'échec, de la solitude, de l'extrême gêne quotidienne, à défaut de la misère. Mais justement : c'est dans la vérité, surtout la plus amère, qu'il convient de garder forme à tout prix, et donc figure humaine, si dépouillée qu'elle soit, si ravinée, si corrodée. Ce visage de vaincu de la vie, cette situation objective de vaincu, ce statut d'oublié, de mal-aimé, d'ignoré, ce corps abandonné par le désir, c'est à ce journal seul qu'il appartient de les habiter avec autant de dignité que possible, sans rien cacher de leur déréliction.

p. 49
Commenter  J’apprécie          120
La balustrade est une sorte de subjonctif imparfait du langage architectural : elle implique toujours un certain degré de prétention
Commenter  J’apprécie          110
La société devient de plus en plus brutale, non seulement violente et délinquante, criminelle, mais à tout moment grossière, agressive, mufle, incivile, à mesure qu’elle est plus idéologiquement et médiatiquement bien-pensante : comme si l’exigence là la libérait de toute contrainte ici, et l’idéologie de la morale. Les mêmes qui, en sortant d’un ascenseur, passent devant vous en vous marchant sur les pieds sans vous voir et sans interrompre leur conversation avec des tiers sont prêts à vous donner l’instant d’après de sérieuses leçons sur l’égalité entre les hommes, entre les hommes et les femmes, entre les enfants et les vieillards, entre les races qui n’existent pas. D’une société qui n’a d’autre mot à la bouche qu’ouverture et diversité s’efface progressivement le regard, cette façon de reconnaître l’autre et d’abord de le voir et de laisser paraître qu’on le voit, qu’on lui fait sa place dans la communauté d’espèce.

Le regard, le regard poli échangé, m’a toujours semblé le contraire le plus exact du racisme véritable, parce qu’il est acquiescement muet à la fraternité d’appartenance. Mais notre époque, la plus obsédée qui ait jamais été, et pour cause, par la bonne pensée dogmatico-antiraciste, est en même temps, je crois bien, est-ce par coïncidence, celle qui a inventé la ridicule affectation de ne pas voir, de ne pas voir l’autre, fût-on enfermé trois minutes durant avec lui, entre vingt étages, dans une cabine d’un mètre carré, le croisât-on sur un sentier de montagne ou partageât-on avec lui une salle de petit déjeuner d’hôtel ; de ne pas le voir et, a fortiori, de ne pas le saluer, fût-ce d’un discret signe de tête ou d’une esquisse de sourire.
Commenter  J’apprécie          110
Le second degré est une impasse. Nous, les lecteurs, nous sommes de bout en bout persuadés que ce que nous lisons est infiniment plus intelligent que très superficiellement il n'y paraît ; mais en fin de course nous avons tout de même la désagréable impression de n'avoir lu malgré tout qu'un petit roman d'aventures, pas particulièrement plein d'aventures, d'ailleurs ; qu'un très élégant roman policier ; qu'un trop subtil roman d'espionnage, presque exsangue à force d'être si fin. Se peut-il que la littérature ne soit que cela ?
Commenter  J’apprécie          100
L'hyperdémocratie ne veut pas de hiérarchie, or la culture est toute hiérarchie. L'antiracisme dogmatique ne veut rien savoir de l'origine, or la culture n'est que tâtonnements autour de l'origine, et c'est seulement à travers cette quête toujours déçue - nécessairement déçue car l'origine est toujours plus haut, toujours en amont - qu'elle accède à l'universel. Il n'y a pas de culture possible en régime hyperdémocratique dogmatiquement antiraciste, et, de fait, nous la voyons disparaître sous nos yeux. Qu'elle soit prétendument partout n'abuse que ceux qui veulent être abusés : elle est partout parce qu'elle n'est plus nulle part.
Commenter  J’apprécie          100
Tome 1, lettres A-H, extrait de la préface.

... la simple défense de la langue, de sa logique et de sa correction, passe désormais pour politique - et, en l'occurrence, réactionnaire, naturellement, discriminatoire. A même été forgé, puisque nous en sommes aux néologismes, mais celui-ci n'est pas de moi, il va sans dire, le terme de "glottophobie", pour désigner, et désigner comme une maladie, donc, un souci jugé exagéré de la langue, et son caractère discriminant. Passerait encore si étaient visées là les personnes qui ne peuvent s'empêcher de corriger les autres, et surtout désagréablement, quand elles estiment que ces autres viennent de commettre une faute de langage - c'est en effet un vilain travers. Mais il semblerait qu'aux glottophobes même in petto (j'avoue me sentir visé) on reprocherait de se faire une opinion des tiers, dans les rapports sociaux ou dans la vie professionnelle, en tenant compte, horresco referens, de la qualité de leur grammaire et de leur orthographe : voire de viser eux-mêmes à une amélioration constante de leur propre pratique. Bref c'est tout souci de la langue que voici incriminé comme discriminant, ce qui renverse toute la tradition française dont il était le coeur et peut-être l'essence. Mais discriminant il l'était bel et bien.

pp. 28-29
Commenter  J’apprécie          90
Renaud Camus
Extrait du Journal de Renaud Camus, dimanche 28 juin.
Ils se soucient d’écologie, semble-t-il. [...] (Ecologie totalement vaine car) ... troisièmement elle n’attache aucune importance à la beauté, qui devrait être au cœur de son souci : car à quoi bon tâcher de sauver le monde, si ce que l’on sauve est un monde hideux, sans campagne, sans vide, souillé de toute part, sans échappatoire pour l’œil et pour l’âme ?
Commenter  J’apprécie          92
(Extrait de la préface de Roland Barthes).
Les scènes érotiques doivent être décrites avec économie. L'économie, ici, est celle de la phrase. Le bon écrivain est celui qui travaille la syntaxe de façon à enchaîner plusieurs actions dans l'espace du langage le plus court (il y a, chez Sade, tout un art des subordonnées) ; la phrase a pour fonction, en quelque sorte, de dégraisser l'opération charnelle de ses longueurs et de ses efforts, de ses bruits et de ses pensées adventices.
Commenter  J’apprécie          90
L'émerveillement où ce garçon paraît plongé du seul fait de ma cordialité souriante et affectueuse à son égard confirme bien l'idée qu'on peut se faire de la brutalité et de la froideur de la petite société achrienne* parisienne, telle qu'on peut l'observer au Key West où nous nous sommes rencontrés, et où les visages, les regards et les défauts de regard, les attitudes, les propos qu'on surprend, même, tout, ou presque tout, paraît signifier que se trouve bannie toute douceur désintéressée.

*achrien : mot forgé par l'auteur pour désigner l'homosexuel. Antonyme de hinarce.

p. 445
Commenter  J’apprécie          90



Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten

Lecteurs de Renaud Camus (259)Voir plus

Quiz Voir plus

Des animaux et des chansons (2)

Mais ça fait ces cinquante lieues Dans une nuit à queue leu leu Dès que ça flaire une ripaille De morts sur un champ de bataille Dès que la peur hante les rues Les loups s'en viennent la nuit venue, alors ?

Gérard Manset
Georges Brassens
Pierre Perret
Serge Reggiani

8 questions
52 lecteurs ont répondu
Thèmes : chanson française , animaux , interprète , musiqueCréer un quiz sur cet auteur

{* *}