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Critiques de Richard Russo (481)
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Retour à Martha's Vineyard



°°° Rentrée littéraire 2020 # 38 °°°



La scène d'ouverture est superbe. 3 amis, étudiants boursiers dans une université huppée du Connecticut regardent la télévision depuis la cuisine de la sororité dans laquelle ils travaillent. Nous sommes le 1er décembre 1969 et c'est la draft lotery, le tirage au sort par dates de naissance pour l'enrôlement dans l'armée américaine avec la guerre du Vietnam comme horizon. Mickey se retrouve avec le numéro 9. Aucune chance d'y échapper alors que Teddy et Lincoln devraient pouvoir éviter la boucherie.



A partir de là, Richard Russo nous immerge dans les destins croisés de ces trois amis dont la vie, façonnée par le hasard, la chance mais aussi les décisions de chacun – judicieuses ou pas – est présentée rétrospectivement. Ils ont désormais 66 ans, c'est la fin de la présidence Obama, et ils se retrouvent une dernière fois dans la maison de Martha's Vineyard avant que Lincoln ne la mette en vente.



Et l'auteur prend son temps. Comme narrateur omniscient, il présente longuement ces trois personnages, alternant les points de vue, passé / présent, pour révéler, couche après couche, tous les secrets d'une vie, les regrets, les souvenirs obsédants. A chaque fois que je lis Russo, je suis frappée par son oeil infaillible pour parler des hommes, et toujours avec un humour doux et intelligent  : rarement un auteur parle aussi bien d'eux, de ce qu'ils pensent, de leurs failles autour de thématiques comme l'amitié masculine, la relation père-fils, les idéaux envolés et le déterminisme social. Les trois univers masculins sont observés avec une délicatesse classieuse et une empathie humaniste remarquable qui rend compte de toutes les textures d'une vie. A ce propos, Teddy est sans doute le personnage le plus intéressant car le plus complexe.



A cette intrigue très intimiste, Richard Russo adjoint un mystère : celui de la disparition de Jacy lors d'un week-end à Martha's Vineyard, en 1971 pour fêter les diplômes obtenues et convaincre Mickey de fuir au Canada pour éviter le Vietnam. Jacy, c'est une femme « magique », celle dont les trois amis sont éperdument amoureux et espèrent qu'elle les choisira. Elle disparaît sans jamais reparaître et plus de quarante ans après, ils ne l'ont jamais oublié. S'est-elle suicidée ? A-t-elle été assassinée ? Un accident ? Au départ, ce mystère tourne autour du récit, sur ses marges, puis il s'infiltre au coeur du roman comme un révélateur des trajectoires de vie qui se croisent. Son dénouement n'est pas le plus réussi dans le roman, je ne l'ai pas trouvé crédible du tout pour tenir ainsi sur plus de quarante ans.



Mais peu importe. Ce n'est pas cela qui intéresse l'auteur, ni le suspense que cet arc narratif aurait pu introduire. Ce qu'on retient, c'est le questionnement constant de personnages fouillant dans leur mémoire afin de savoir qui ils sont et comment ils sont devenus ce qu'ils sont en 2015. A l'issu du roman, ces multiples questions restent non résolues. Mais une porte s'est ouverte. Celle de l'acceptation qui surmonte les regrets et la résignation. Celle d'une rédemption qui libère, pourtant pleine de désenchantement et de nostalgie. Celle d'une possible réinvention, même tardive, teintée de mélancolie douce amère.
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Retour à Martha's Vineyard

Lincoln, Teddy et Mickey se sont connus à l'université de Minerva, tous les trois issus de milieux sociaux différents travaillent comme serveurs dans une sororité du campus. Jacy membre des Thêta va se lier avec les trois garçons. la devise du groupe " un pour tous tous pour un ".

1969, la guerre du Vietnam bat son plein, les quatre mousquetaires sont devant la télé pour assister aux tirages au sort des futurs appelés.

1971, la remise des diplômes veut dire l'incorporation pour les étudiants et le voyage vers l'enfer. Un dernier week-end sur l'ile de Martha's Vineyard dans la maison familiale de Lincoln. L'ambiance est plutôt morose, la fin du parcours, les chemins qui se séparent, l'amour que partagent secrètement les trois garçons pour Jacy.

Quarante cinq ans plus tard Lincoln Teddy et Mickey se retrouvent sur l'ile, ils ont vieilli, la vie ne les a pas épargné, seule Jacy manque à l'appel.

Dans ce dernier roman de Richard Russo " Retour à Martha's Vineyard " on découvre avec bonheur une nouvelle écriture de l'auteur de " le déclin de l'empire Whiting " . Un roman Chorale comme je les aime, des voyages dans ces trois décennies où l'on découvre la psychologie des personnages, dans la complexité à s'ouvrir aux autres. Une ambiance très sixties, l'amour et l'amitié se côtoient et le fantôme de Jacy qui les hante.

Une fois de plus j'ai été mené par le bout du nez par Richard Russo, le don qu'a l'écrivain de nous questionner sur notre propre existence. C'est difficile de quitter un livre qui nous a absorbé, où l'on est emporté par l'histoire, l'empathie des personnages.

" Quand on découvre que la vérité n'est que mensonge" Some body to love de Jefferson airplane.

La vérité vous la découvrirez mais à quel prix ?

Je trouve que la fin du roman pourrait laisser penser à une suite, ça n'engage que moi.

Merci à Babelio et son opération masse critique et je remercie la maison d'Edition de la table ronde pour le joli cadeau qu'est ce livre.

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Retour à Martha's Vineyard

Chances are… Il y a des chances… Tel est le titre original de Retour à Martha’s Vineyard, comme dans la chanson de Johnny Mathis :



Chances are, 'cause I wear that silly grin

The moment you come into view

Chances are you think that I'm in love with you



Il y a des chances, car j'ai ce sourire idiot

Au moment où tu es en vue

Il y a des chances que tu penses que je suis amoureux de toi […]



Guess you feel you'll always be

the one and only one for me

and if you think you could,

well, chances are your chances are awfully good

The chances are your chances are awfully good



Je suppose que tu sens que tu seras toujours

Le seul et unique pour moi

Et si tu penses que tu en es capable

Alors il y a des chances pour que tes chances soient terriblement bonnes

Il y a des chances pour que tes chances soient terriblement bonnes



Dans ce roman, le personnage de Jacy inspire à trois amis des sentiments amoureux qu’ils n’osent s’avouer car ce serait trahir les deux autres.



La figure de Jacy, jeune femme fougueuse, qui chantait sur scène avec un charisme presque similaire à celui de Tina Turner, domine ce roman. Elle brille par son absence car elle a disparu au début des années soixante-dix. Que lui est-il arrivé ?



Plus de quarante ans plus tard, Teddy, Lincoln et Mickey sont réunis sur l’île de Martha’s Vineyard, comme le jour de la disparition de Jacy. Lincoln veut vendre la maison familiale. Les trois sexagénaires demeurent hantés par cette jeune femme, même si chacun a construit plus ou moins sa vie de son côté.



C’est le premier roman de Richard Russo que je lis et j’ai beaucoup aimé la manière dont il dresse le portrait de ses personnages, la finesse de l’analyse psychologique. Il émane de ce texte bien écrit, bien traduit de la nostalgie, de la mélancolie, mais aussi, vers la fin, une impression d’apaisement, de paix retrouvée.



Les souvenirs de la jeunesse sont parfois source de douleur, d’anxiété car, à l’époque, la guerre du Vietnam faisait rage et les jeunes hommes étaient tirés au sort pour aller se battre. Les différences de statut social sont aussi évoquées avec justesse, ainsi que les problèmes qu’elles peuvent générer.



Retour à Martha’s Vineyard est un roman que j’ai trouvé captivant sur l’amitié masculine. Richard Russo sait créer une atmosphère autour de ces sexagénaires, dont Mickey, le rockeur, qui rend hommage à Jacy sur scène en chantant à tue-tête, en « braillant », comme à l’époque, « Nutbush City Limits », le « vieux standard de Tina Turner ». Ce passage, vu à travers les yeux de Teddy, est festif, malgré la mélancolie qui habite ce dernier. C’était lui le plus amoureux de Jacy, lui qui se souvient de leur brève et fugace étreinte, marquée par le sceau d’une tragédie intime, contre laquelle Teddy ne peut rien.

« Euphorie si lointaine, et si brève. Et, à l’instar de la vie elle-même, terminée avant même que l’on puisse la comprendre totalement. Une arnaque, en fait. »



Ce roman tantôt poignant et émouvant tantôt enjoué et joyeux offre une belle réflexion sur la fatalité, le hasard et la place du libre arbitre dans nos existences.



« Ça force à s’interroger. Supposons que les secondes chances existent. Si on disposait tous de plusieurs vies, seraient-elles différentes ? » Lorsque la voiture qui le précède avance au ralenti, Lincoln enclenche la première. «Ou bien exactement semblables ?»



Merci aux ami(e)s lecteurs, lectrices qui l'ont lu et, par leurs chroniques, m'ont donné à mon tour envie de le découvrir! 😀


Lien : https://laurebarachin.over-b..
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Retour à Martha's Vineyard

Mickey, Lincoln et Teddy se sont connus, dans les années 60, sur les bancs de l'université de Minerva, pourtant loin de leur lieu d'enfance. Une très forte amitié les lie malgré leurs différences sociales. Travaillant dans la sororité du campus, Teddy et Lincoln en tant que serveurs et Mickey à la plonge, ils font la connaissance de Jacy, membre des Theta. Si tous les trois en sont épris, aucun ne se déclarera et la jeune femme disparaitra mystérieusement, peu après la remise des diplômes, alors que les quatre amis passent le week-end du Memorial Day sur l'île de Martha's Vineyard...

Quarante-quatre ans plus tard, les trois vieux amis se retrouvent sur l'île, dans la maison de Lincoln, à Chilmark, que celui-ci a hérité de sa mère. Un week-end comme au bon vieux temps... Si chacun a réussi à mener sa petite vie, aucun n'a oublié Jacy...



Du tirage au sort, en 1969, des futurs enrôlés pour le Vietnam qui aura, inévitablement des conséquences sur l'avenir de chacun, à ce week-end de retrouvailles quatre décennies plus tard, Richard Russo déroule une fresque romanesque emplie de tendresse, de nostalgie, d'amitié et d'une certaine mélancolie. Donnant alternativement la voix à Lincoln et Teddy, Mickey n'ayant voix qu'au cours d'un seul chapitre (mais ô combien important), il dévoile, petit à petit, le passé de chacun, leurs souvenirs, les choix qu'ils ont faits, l'influence familiale, les rêves déchus mais aussi les regrets qui les tiraillent maintenant que plus de quarante ans ont passé. Chacun a-t-il fait le bon choix ? A-t-il suivi la voie qu'il souhaitait ? Sur fond de disparition inquiétante, à laquelle Lincoln tentera, enfin, de trouver des réponses, ce roman , profondément humain, dépeint une très belle histoire d'amitié et d'amour au travers de personnages inoubliables.
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Retour à Martha's Vineyard

En 1969, Lincoln, Teddy et Max sont étudiants boursiers à Minerva, université huppée du Connecticut. le 1er décembre, ils suivent en direct à la télévision le tirage au sort, selon les dates de naissance, des futurs enrôlés pour l'armée, avec la guerre du Vietnam comme probable destination finale pour les premiers appelés. Max tire un mauvais numéro.



En mai 1971, les trois inséparables fêtent leur diplôme dans la maison de vacances de Lincoln, sur l'île de Martha's Vineyard, avec Jacy, leur amie de fac dont ils sont tous trois éperdument amoureux. Pendant le week-end, sans doute le dernier qu'ils passent ensemble, il règne une atmosphère de fin d'époque, avec la fin des études (et de leur amitié?) et l'entrée dans la vraie vie et les questionnements qui l'accompagnent : qu'en faire, justement, de cette vie, alors que la guerre n'est toujours pas terminée et que Max y sera appelé, et les deux autres peut-être aussi ? Mais surtout il y a l'espoir fou et secret des garçons : que Jacy choisisse enfin l'un d'eux. Espoir déçu, puisque Jacy disparaît sans laisser de traces à la fin du week-end.



Septembre 2015 : Lincoln, désormais agent immobilier à Las Vegas et patriarche d'une famille nombreuse, s'apprête à vendre la maison de Martha's Vineyard, mais veut y passer un dernier week-end avec Teddy et Max. Restés en contact de loin en loin au cours de ces années, les trois mousquetaires se retrouvent et avec eux, leurs souvenirs, et le mystère de la disparition de Jacy. Presque par hasard (mais y a-t-il un hasard?), Lincoln interroge un flic de l'époque et tire ainsi le fil d'Ariane qui les mènera à la vérité.



Mais "Retour à Martha's Vineyard" est bien plus que la captivante résolution d'un mystère après 45 ans d'interrogations. C'est l'histoire d'une amitié inébranlable malgré le temps et la distance. C'est le récit des vies de trois jeunes hommes qui auraient tout aussi bien pu ne jamais se rencontrer et dont les vies auraient pu être totalement différentes, mais que le hasard (le hasard?) a réunis et a fait tomber amoureux de la même fille. L'histoire de trois hommes et une femme, de leur enfance entre des parents qui ont fait du mieux qu'ils le pensaient (mais certains parents pensent très mal), de leurs vies d'étudiants puis d'adultes jusqu'au seuil de la vieillesse. Les choix qu'ils ont faits, ceux qu'ils auraient dû faire ou pas, les causes et les conséquences, le libre arbitre ou le destin, les lâchetés et le courage ordinaire, les renoncements, les espoirs, les désillusions.



Avec un grand souffle romanesque, ce talentueux conteur qu'est Richard Russo nous berce dans la nostalgie et le désenchantement, et nous emporte dans l'intime et la mémoire de ses personnages. Avec le flot de questionnements sur qui ils sont, qui ils ont été et s'ils sont restés les mêmes, sur ce qu'est une vie réussie ou heureuse, ils nous montrent que malgré le prix à payer parfois, il n'est jamais trop tard pour s'accepter, se libérer, et vivre.



En partenariat avec les Editions 10/18 via Netgalley.



#RetouràMarthasVineyard #NetGalleyFrance
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Trajectoire

Des trajectoires erronées ?



Cavalier

Janet découvre qu'un de ses élèves lui a rendu un devoir plagié. Lui revient en mémoire un entretien qu'elle avait eu avec son directeur de thèse dix ans auparavant. En substance celui-ci lui avait dit que contrairement à ce qu'elle pensait dans une critique littéraire le « je » ne doit pas disparaître ou plutôt le « je » peut-être mais pas l'auteur qui est derrière. Sans s'immiscer dans le débat, il faut une approche passionnée et personnelle : « ... Quels risques prenez vous dans cette dissertation ? Quelle passion dans votre vie l'a inspirée ? ... »

Alors Janet la bonne élève, en rendant des devoirs sans âme — qui ne sont pas vraiment les siens — n'a-t-elle pas été comme son étudiant tricheur ?



Voix

À la Biennale de Venise deux frères retrouvent leur antagonisme, réactivant presque malgré eux leurs différends nés d'un événement douloureux de leur enfance. Une fois de plus, semble-t-il, un rendez-vous manqué pour le timide professeur Nate, tourné vers le passé mais réaliste, avec son frère Julian, un charmeur inscrit résolument dans le présent, qui n'a d'autre choix que la fuite en avant.



Intervention

Dans le Maine, vendre la maison d'une entasseuse compulsive à un texan rudimentaire, voila un défi qui n'est pas à la portée du premier agent immobilier venu. En plus si l'agent n'y croit pas lui-même, la partie n'est vraiment pas gagnée. À moins en y réfléchissant bien qu'il existe encore un espoir mesuré...



Milton et Marcus

Les scénaristes sont des larbins dans le milieu du cinéma. Aussi quand un romancier se voit confier le remaniement d'un scénario, il se méfie. L'avenir va lui donner raison.



Point commun de ces quatre nouvelles, à la faveur d'un élément déclencheur, des êtres voient ressurgir un passé éclairant leur présent, qui les entraîne dans une crise existentielle. Leur introspection donne lieu à d'élégantes et pertinentes analyses, exercice dans lequel Richard Russo excelle, nullement pénalisé par le format court de la nouvelle. Bien au contraire, la concision, la densité et l'humour sont parmi les grandes qualités de ces trajectoires.

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Le Déclin de l'empire Whiting

Empire Falls, une petite ville du Maine a perdu son aura. La crise est passée par là, jadis prospère grâce à l'empire Whiting, elle n'est plus que l'ombre d'elle-même.

Miles Roby gérant d'un snack connaît bien ces habitants, amis d'enfance où pas. Miles est un gars sympathique, un type qui ne fait pas de vague, un revenant tant il est transparent quoi de plus normal quand on habite une ville fantôme.

Miles est perdu, égaré, en pleine crise existentielle, Janine sa "future ex femme" va se remarier avec un prof de gym, sa fille Tick supporte mal son nouveau beau-père, Max le père de Miles un parasite notoire qui prend la vie comme elle vient, et madame Whiting propriétaire de la moitié de la ville et patronne de Miles.

" Le déclin de l'empire Whiting" prix Pulitzer 2002 m'a emballé, le style d'abord, un mélange de Jonathan Franzen, de Richard Ford de Russell Banks, une fluidité du texte qui nous emporte au gré des pages dans la vie de ces personnages. Leurs difficultés à vivre, leurs espoirs, et leurs rêves.

Richard Russo est ce genre d'écrivain que j'aime et que je recherche; j'aime ces auteurs qui m'interpellent, me déstabilisent à travers des phrases des situations. J'apprends à me connaître en lisant ces histoires, ces tranches de vies pour ensuite poser mes jalons sur une route pas toujours tracée.

un livre que je recommande à celles et ceux qui aiment la littérature américaine, les sagas familiales et les études psychologiques.

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Retour à Martha's Vineyard

Quand trois amis, anciens universitaires, se retrouvent après quelques décennies, cela promet des surprises, des déceptions et des interrogations.

Car à 66 ans, chacun des trois hommes a connu une ligne de vie ponctuée de failles, certaines difficiles à combler. Il faut dire aussi qu’ils se sont quittés sur une absence, celle de leur amie Jacy, pour laquelle ils éprouvaient tous trois un sentiment…certain. Celle-ci a disparu après leurs adieux, et on ne l’a jamais revue.



Les voilà donc dans le lieu où ils avaient passé leur dernier week-end ensemble, une charmante maison de vacances sur l’île de Martha’s Vineyard, pas loin de Cape Cod.

Cet endroit me fait rêver. Je m’imagine assise à la terrasse, face à l’océan, dans un rocking chair. Très américain, tout ça. Ambiance nostalgique, musique rétro (ah les années 70 !), un verre de vin…



Ces trois hommes ont beaucoup de difficultés à se parler franchement et à s’avouer leur parcours chaotique. Et c’est ça qui est prenant, car cette incompréhension se heurte perpétuellement à leur désir d’amitié fusionnelle. L’ombre de Jacy, cette jeune fille au caractère fort et libre, plane et les tracasse. Est-elle morte ? L’a-t-on tuée ?

Les secrets de famille se dévoilent, les caractères se découvrent, les tracas de santé aussi. La vieillesse approche, avec ses questionnements sur la destinée, la liberté et l’engagement.



Oui, franchement, j’ai bien aimé côtoyer ces hommes fragiles, comme tout être humain, finalement. Et j’y retournerais volontiers, sur cette île de Martha’s Vineyard.

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À malin, malin et demi

Quarante-huit heures dans la vie des habitants de North Bath, ancienne cité industrielle du New Jersey qui ne s’est jamais relevée de la crise. Une ville qui agonise : usine qui s’écroule, odeur pestilentielle, bref un putain de trou paumé dans le nord de l’Etat. Dans ce décor sinistre et banal à pleurer se déroule une triste et tragique mais aussi joyeuse et tendre comédie humaine.



Notre guide sera Douglas Raymer, le policier de la ville, un enfant du pays qui connait tout le monde et que tout le monde connait. Veuf inconsolable d’une femme trop belle pour lui, névrosé, un peu veule mais aussi sincère et secrètement amoureux de sa jeune coéquipière black.



Tout autour de lui, s’agite une ronde de personnages, touchants, paumés et parfois résignés. Il faudra deux jours pour que les choses et les destins qui semblaient immuables évoluent. Quarante-huit heures pour que tout change afin que rien ne change.



Enorme roman fleuve, énorme dans tous les sens du terme, six cents pages serrées avec un sens de la narration et une maitrise du récit qui laisse le lecteur admiratif. Une foule de petites gens auxquels on s’attache, des menues péripéties qui impactent leur vie malgré eux, il semblerait que Richard Russo ait inventé le roman qui se lit comme on regarde une série télé.



Cette description méthodique entomologiste et ironique de l’Amérique des loosers, des combinards et des seconds couteaux n’est jamais cynique ou ricaneuse. Le romancier respecte ses personnages, il les regarde évoluer, se fourvoyer ou se défendre avec une sincère empathie.



Russo est un grand romancier américain, Baz’art garde un formidable souvenir de « Quatre saisons à Mohawk » et du « déclin de l’empire Whiting » avec « Á malin, malin et demi » il devient l’égal de Richard Ford ou Philip Roth ni plus... ni moins .
Lien : http://www.baz-art.org/archi..
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Les sortilèges du Cap Cod

Deux mariages et des emmerdements.

Griffin s’apprête à vivre deux années bien compliquées, Entre Joy son épouse qui ressent le besoin de s’éloigner, les cendres de son père qu’il doit disperser au Cap Cod mais qu‘il recule de faire indéfiniment et une mère envahissante, désagréable et cynique, cela fait beaucoup pour notre anti héros qui supporte tout ça sans se révolter. Alors que le premier mariage devient un déluge de catastrophes, le deuxième celui de sa fille Laura sonne celui des explications. D’autant que Maman Griffin à rejoint son ex-mari dans le coffre de la voiture en vue d’une dispersion commune.

On retrouve tout ce qui fait le talent de Richard Russo. Entre humour vache et tendresse, une réflexion sur l’amour, sur le temps qui passe, sur les choix de vies. La lecture est toujours plaisante même si pour ma part mon attachement aux personnages c’est moins imposé qu’a l’accoutumée. Les incessants retours en arrière, pourtant essentiels m’ont empêché d’adhérer pleinement à son récit. Néanmoins, ça reste tout de même bien agréable, avec notamment une scène d’anthologie lors du deuxième mariage à ne pas rater. Drôle et cruel.
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Le Déclin de l'empire Whiting

Empire Falls dans le Maine était le siège d'industries florissantes jusqu'au jour de la faillite qui a amené la fermeture des usines de la famille Whiting, propriétaire des lieux depuis plusieurs générations, une famille dont tous les héritiers mâles semblent voués aux mariages malheureux, Charles Beaumont, dit C.B. ne fait pas exception, c'est Francine, son épouse, qui commande. Miles Roby, personnage principal du roman, est le tenancier de l'Empire Grill dont Francine Whiting est la propriétaire. Le déclin de l'empire Whiting c'est l'histoire de Miles et de ses proches, son histoire au présent avec de fréquents retours dans son passé jusqu'à un fait majeur qu'il vivra avec sa mère alors qu'il a neuf ans ; c'est aussi l'histoire d'une population d'une petite ville du Maine, victime de la fermeture des deux usines des Whiting. Richard Russo qui a reçu le Prix Pullitzer en 2002 pour ce roman, dresse avec humour et tendresse le portrait contemporain d'une petite ville américaine.



Challenge Pavés 2015-2016

Challenge Atout Prix 2015-2016
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Le Déclin de l'empire Whiting

Le Déclin de l'empire White est un livre où il ne se passe rien pendant les trois premiers quarts du roman. Pourtant la tension monte doucement jusqu'au raz de marais inattendu. Richard Russo distille les détails précurseurs du drame humain qui va submerger la petite ville d'Empire Falls.

Le lecteur ne faute pas par manque d'attention, mais les détails précurseurs sont noyés dans le climat dépressif de cette ville.

A la fin de la lecture du livre, je me suis étonné que le manque d'actions ne m'ait pas gêné. Richard Russo par sa qualité d'écriture a su me captiver en racontant des histoire humaines
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Le Déclin de l'empire Whiting

Ça ne manque pas de qualités, mais ça ne m’a pas fait décoller - un peu à l’image du personnage principal, Miles, très sympa, intelligent, quelqu’un de bien vraiment, mais ça n’empêche, sa femme veut le quitter parce que la vie avec lui n’est pas bien folichonne, surtout au lit.

Alors oui, bien sûr, je l’ai appréciée, elle ne manque pas d’intérêt, cette atmosphère désenchantée d’une ville déchue, en crise, après la vente de l’usine à papier, de la chemiserie, de l’usine textile des Whiting à des multinationales qui les ont pillées puis fermées. Et puis il y a autour de Miles beaucoup de bons personnages aux caractéristiques plus saillantes que lui, son bouffon de père, Max, crado, alcoolo, sans-gêne; la terrible veuve Whiting, redoutable manipulatrice; John Voss, l’ado souffre-douleur, désespéré, dépenaillé, qui suscite en nous autant de pitié que d’inquiétude... Et c’est bien ficelé, avec des flash-backs bien sentis, souvenirs d’enfance de Miles qu’il met bien longtemps à comprendre ou éclairages sur cette famille Whiting dont les hommes semblent, génération après génération, tous voués à épouser la femme dont la mission sur terre est de leur pourrir la vie.

Mais quand cette peinture d’une banalité fertile en sourdes désillusions laisse place à une scène d’un registre bien plus violent, on peine à y croire, on a l’impression que dans cette ville endormie, ça ne peut être qu’un mauvais rêve, ça ne fonctionne pas très bien.

Bref, un assez bon roman, mais n’en attendez pas le grand frisson.
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Ailleurs

Richard Russo est incontestablement un des mes écrivains préférés, prouvant, si besoin en était, que les Etats Unis engendrait autre chose que des fous dangereux menaçant la planète.

Je me suis lancé dans ce Ailleurs sans en connaître le moindre contenu.

Grande fut donc ma surprise de tomber sur un livre retraçant le parcours de sa mère, mais également celui de R.Russo. Et quand on est un adepte de l'auteur, on ne peut qu'apprécier.

Russo est égal à lui même . Il écrit divinement bien, est réservé dans ses propos et nous plonge dans ses personnages comme personne.

Il s'agît ici des relations avec sa mère, la construction de sa vie avec son épouse et ses filles en parallèle. Mais on plonge aussi dans le comté de Fulton, celui des tanneries , celui du merveilleux déclin de l'empire Withing, de Mohawk.





Sa mère , tout d'abord. Malade , bourrée de toc, indépendante mais aussi accroché à son fils dont elle ne peut se passer. Elle s'est sacrifiée pour l'élever. L'auteur, fils unique, s'est habitué "aux délires"de sa maman qui le suivra en Arizona ou en Illinois .

Le livre revient sur l'état de la mère et son évolution.Avec beaucoup de pudeur, sans 'pathos', livrant l'auteur à une introspection honnête et remarquablement retranscrite. Il dresse un portrait émouvant de cette femme courageuse qui a livré toute sa vie un terrible combat contre elle même et a usé son temps à se "passer des savons".



Et puis il y a Gloversville, la ville de l'enfance, soumise aux déclins des tanneries. Ce livre éclaire complètement l'oeuvre de Richard Russo .On le suit dans sa construction d'écrivain .

Pour ceux qui connaissent l'oeuvre de Russo, il y a un roman un peu dissonant, les sortilèges du Cape Cod. ... Tout va s'éclairer ici!



C'est un livre essentiel pour les afficionados de Richard Russo . Il ajoute à son talent l'histoire de sa vie , avec toute la retenue dont il est coutumier.

Il est humble, réaliste, émouvant, un peu masochiste presque, précis.

Il rend un hommage original à sa maman, mais sans doute juste et honnête.

Il est surtout un immense écrivain qui s'est positionné en fils et s'est servi de son talent pour nous narrer "son" histoire, qui se lit comme un roman.
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Retour à Martha's Vineyard

La disparition de Jacy Calloway



Avec Retour à Martha’s Vineyard Richard Russo a réussi un chef d’œuvre. En orchestrant les retrouvailles de trois étudiants près d’un demi-siècle après leur rencontre, il nous offre une superbe plongée dans l’Amérique des années Vietnam à nos jours. C’est splendide!



Comme Les Trois mousquetaires, ils sont quatre à se retrouver en 1969 sur le campus de Minerva College: Mickey, Lincoln et Teddy ainsi que la belle Jacy, dont ils sont tous trois secrètement amoureux. C’est le moment de leur vie où ils se construisent un avenir et où ils doivent prouver à leur famille qu’ils ont bien mérité leur bourse, que le rêve américain est toujours possible quand on vient d’une famille modeste. Pour compléter leur revenu, ils travaillent comme serveurs dans une sororité du campus de cette université du Connecticut. En fait, ce ne sont pas leurs résultats universitaires qui les inquiètent, mais le tirage au sort décidé par l’administration Nixon et qui fixe l’ordre de conscription pour rejoindre les troupes combattantes au Vietnam.

Alors, en attendant de savoir à quelle sauce ils vont être mangés, ils font la fête et passent quelques jours à Martha’s Vineyard, à l’invitation de Lincoln. Sur cette île, surtout connue comme résidence d'été de la jet set américaine et des présidents des États-Unis, il profitent de la maison que les parents de Lincoln louent aux touristes. Un cadre enchanteur qui va servir de toile de fond à un drame: c’est là qu’en 1971 Jacy va disparaître sans laisser de traces…

Richard Russo a choisi de commencer son roman en 2015, au moment où les trois amis, âgés de soixante-six ans, se retrouvent à Martha’s Vineyard, sans doute pour la dernière fois. Car Lincoln, devenu agent immobilier du côté de Las Vegas, a l’intention de vendre la demeure où il ne vient plus guère et qui a besoin d’être entièrement rénovée. Teddy est devenu éditeur et s’est installé à Syracuse, tandis que Mickey, musicien et ingénieur du son, est venu de Cape Cod, tout à côté. Le roman va dès lors osciller entre ces deux époques, offrant au lecteur de découvrir au fur et à mesure comment le temps s’est écoulé pour les uns et pour les autres, comment un demi-siècle plus tôt, sans qu’ils s’en rendent vraiment compte, leur vie a basculé. Avec maestria l’auteur déroule les existences, sonde les âmes et tente de lever les secrets soigneusement enfouis. Derrière les anciennes rivalités, la jalousie et les convoitises, il va conduire le lecteur vers la résolution de ce drame qui, comme un bon polar, va accrocher le lecteur. Mais ce qui fait la force du livre et le rend incontournable à mon sens, c’est la façon dont l’auteur raconte les années qui passent, les illusions qui s’évanouissent, les rêves avec lesquels il faut composer au fur et à mesure qu’apparaissent les premières rides. Et, derrière la mélancolie, les belles traces laissées par des sentiments que les années n’ont pas érodés. Où quand le vague à l’âme laisse place à l’amitié la plus solide. C’est étincelant de beauté et de vérité.




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Retour à Martha's Vineyard

Ils sont 4 copains étudiants à l’université du Connecticut, Minerva, quatre mousquetaires, « un pour tous, tous pour un » : Lincoln, Teddy, Mickey et Jacy, 4 sixties qui se retrouvent pour fêter la fin de leurs études à Martha’s Vineyard, la maison de la côte Est appartenant aux parents de Lincoln.

Mickey lors de la première conscription par tirage au sort , n’avait pas eu de chance, la guerre du Vietnam l’attend désormais puisqu'il a fini ses études.

A l’issue de cette ultime rencontre , Jacy Calloway, celle dont les trois garçons sont amoureux, disparaît à tout jamais.

2015, quarante ans plus tard. (Donald John Trump est candidat à la Maison blanche), les trois sixties se retrouvent dans cette résidence. Jacy est encore présente dans leur mémoire, dans leur cœur. Chacun tente de savoir ce qui a pu lui arriver.

L‘intrigue est intéressante, un roman à lire pour les amoureux de la musique des années 60 Creedence Clearwater Revival , Cat Stevens (Oh peace train sounding louder Glide on...), Tom Waits, Herb Alpert, Tijuana Brass , Leonard Cohen of course ! et même Johnny Mattis …

Une bonne traduction de Jean Esch qui a eu l'excellente idée de conserver des mots, des expressions en vo .



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Retour à Martha's Vineyard

Lincoln Moser est sur le point de mettre en vente la maison familiale de Martha’s Vineyard qui lui vient de sa mère. Pour ce faire, il donne rendez-vous à ses amis Teddy et Mickey qu’il connaît depuis leurs années étudiantes. Alors qu’il vient à peine de débarquer du ferry, un fantôme vient s’ajouter au trio : leur amie commune Jacy a disparu il y a près de quarante ans et personne ne l’a jamais revue. Est-elle morte, s’est-elle enfuie ? le passé va refaire inévitablement surface.



Par un jeu d’allers-retours, l’auteur nous en apprend plus sur les trois compères : Lincoln, fils de Wolfgang Amadeus Moser (soyons fous !), alias Dub Yay, homme imbu de lui-même, narcissique, manipulateur, chrétien fondamentaliste avec tout ce que cela comporte pour asseoir sa tyrannie, qui règne en patriarche sur sa famille (réduite à sa femme et son fils !) et sur les ouvriers qui travaillent dans sa mine en Arizona. Lincoln a plus tard épousé Anita et vit confortablement, même si la crise de 2008 a fait quelques ravages.



Teddy, atteint de troubles bipolaires qui le font passer de l’euphorie à l’abattement le plus profond, auquel ses parents professeurs ne se sont jamais vraiment intéressés (ils connaissent mieux leurs élèves que leur propre fils !) qui a trouvé refuge dans la religion, la quiétude des monastères permettant de juguler ses crises d’angoisse. Gamin il a été victime de violence de harcèlement, car perçu comme « différent » avec une chute provoquée au basket qui lui a valu un handicap (il a failli se retrouver paraplégique quand même). Il a été sous l’influence d’un professeur de lettres à l’université dont le maître mot était : n’écrire un roman que lorsqu’on est sûr qu’il est parfait et qu’on ne pourra jamais faire mieux !



Mickey, fils d’un héros de la seconde guerre mondiale, dernier de la fratrie, et unique garçon après sept filles, passionné par le rock and roll, qui a encore un groupe et fait des concerts, habile à se servir de ses poings quand quelque chose l’énerve. Le voisin de Lincoln en a fait les frais quand il a tenté de se livrer à des attouchements sur Jacy…



Nous sommes à l’heure de la guerre du Vietnam quand ils terminent leurs études, et la date de naissance de Mickey est tirée au sort, neuvième, donc sûr de partir. Il est décidé à la faire en mémoire de son père, mais les autres notamment Jacy qui tente de le persuader de s’exiler au Canada.



En ce qui concerne Jacy, on sait peu de choses, au début, à part que, contrairement à notre trio, boursier, elle vient d’une famille huppée, et le but du roman est de nous apprendre davantage sur sa disparition et sur l’enquête de police bâclée de l’époque. Il est inutile de préciser, vous l’avez déjà compris, ils étaient tous les trois amoureux d’elle.



J’ai eu un peu de mal à entrer dans cette histoire, car le premier tiers du roman ronronne, et j’ai eu du mal à m’attacher, mais, peu à peu je me suis laissée prendre au jeu. Les surprises vont s’accumuler, Richard Russo prend un malin plaisir à nous orienter vers des fausses pistes, de lourds secrets de famille remontent, et nous remet dans l’atmosphère de l’époque : Guerre du Vietnam qui oppose les générations, références à Nixon, président plus ou moins pourri, (élu, il ne faudrait pas l’oublier, car Bobby Kennedy et Martin Luther King candidats en 1968 face à lui ont été assassinés) les hippies qui émergent, les relations dans le couple, la situation des femmes notamment.



C’est le premier roman de Richard Russo et grâce à lui j’ai passé un bon moment, mais je suis restée sur ma faim, peut-être ai-je trop attendu, et donc espéré davantage, ou était-ce compliqué d’arriver après avoir quitté l’univers si particulier de Jon Kalman Stefansson ?



Un grand merci à NetGalley et aux éditions 10/18 qui m’ont permis de découvrir ce roman et son auteur dont j’ai beaucoup entendu parler, du moins lu beaucoup de critiques enthousiastes…



#RetouràMarthasVineyard #NetGalleyFrance !
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Retour à Martha's Vineyard

Retour à Martha’s Vineyard est le dernier opus de Richard Russo, un écrivain très populaire outre-Atlantique. Plusieurs de ses romans ont été primés, notamment Le déclin de l’empire Whiting, un best-seller qui lui avait valu le prix Pulitzer, il y a une vingtaine d’années. Il est aussi l’auteur de scénarios de films et de séries adaptés de ses romans.



Martha’s Vineyard est une petite île au large de la côte Est des États-Unis. A l’instar de la presqu’île de Cape Cod et de l’île de Nantucket, toutes proches, elle se situe dans un secteur touristique très prisé.



Le titre français du roman est explicite. Trois anciens copains de fac, Lincoln, Teddy et Mickey, se retrouvent à l’âge de soixante-six ans, pour un séjour sur l’île, dans une maison appartenant à Lincoln, plus de quarante ans après y avoir déjà passé ensemble une semaine de vacances en 1971 à la fin de leurs études. Ils étaient alors accompagnés par une jeune femme, Jacy, dont ils étaient tous les trois amoureux… et dont ils avaient perdu la trace aussitôt après.



Leur amitié a survécu au nombre des années, mais l’absence de Jacy les obsède tous les trois. Qu’est-elle devenue ? Pourquoi a-t-elle disparu ? Est-elle même encore vivante ? Chacun se demande si l’un des deux autres ne porte pas la responsabilité de sa disparition. A l’époque, ils avaient supporté l’idée qu’elle fût fiancée à un garçon qu’ils ne connaissaient pas. Aucun n’aurait admis qu’elle eût choisi l’un d’eux trois. Un point sur lequel ils semblent n’avoir guère évolué avec l’âge.



Tous les ingrédients d’un polar… Mais le livre n’est pas un polar. On attend impatiemment d’en savoir plus sur Jacy, mais l’histoire de la jeune femme, poignante à plus d’un titre, est tellement indépendante du reste de la fiction, qu’elle n’en constitue pas le dénouement.



Le titre original du roman est Chances are…. Il ouvre des pistes plus profondes que le titre français. L’expression « Il y a des chances que… » ou « Il est probable que… » sous-tend les thèmes abordés par l’auteur, contemporain de ses personnages. A la fin des années soixante, la jeunesse a cru pouvoir s’émanciper, créer un monde nouveau, ouvrir à chacun le choix de tracer librement son propre parcours. Quarante-cinq ans plus tard, Lincoln, Teddy et Mickey ne sont toutefois pas devenus autre chose que ce qu’il était probable qu’ils devinssent. Ils avaient cru à leur indépendance, mais ils ne sont pas parvenus à s’affranchir de l’emprise de leurs gènes et de leur vécu familial. Et Jacy s’en était rendu compte pour elle-même bien avant eux.



Lincoln, Teddy et Michael sont originaires d’horizons géographiques lointains (c’est très vaste, les USA !). Ils ont grandi dans des milieux socio-économiques et culturels très disparates. Les parents de Lincoln et de Teddy sont des petits bourgeois plutôt étriqués, le père de Mickey était un ouvrier fort en gueule, alors que Jacy a été élevée dans une famille huppée. Physiquement, physiologiquement et psychologiquement, les trois garçons ne se ressemblent pas. A vingt ans, on croit que l’amitié permettra de gommer les différences. Quarante ans plus tard, on constate que les différences sont inchangées et qu’il fallait l’éloignement pour préserver les liens.



Je ne peux pas juger de l’écriture de Richard Russo. J’ai trouvé le texte français heurté, la syntaxe sans finesse, le vocabulaire parfois approximatif. Certains développements m’ont paru traîner en longueur. Ma lecture n’a donc pas été fluide. Du coup, je ne me suis pas vraiment attaché ni intéressé aux personnages masculins et à leurs parcours, qui manquent d’ailleurs de romanesque. Seul celui de Jacy, tragique, a retenu mon attention.



Mes vingt ans, je les ai eus, moi aussi, en même temps que Jacy, Lincoln, Teddy et Mickey. Dans Retour à Martha’s Vineyard, j’ai apprécié de retrouver les ambiances, les tendances, les musiques du début des années soixante-dix. Et il n’est pas inutile de se rappeler les sales années de la guerre du Vietnam, lorsque les dates de naissance des appelés avaient été tirées au sort. Des appelés qui avaient deux fois plus de chances que les militaires de carrière de ne pas revenir. Chances are….


Lien : http://cavamieuxenlecrivant...
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À malin, malin et demi

Titre : À malin, malin et demi .

Auteur : Richard Russo

Année : 2018

Editeur : Quai voltaire

Résumé : Bath est une cité industrielle du New Jersey, touchée par la crise. Policier de cette bourgade, Raymer, se remet mal du décès de sa femme Becka qui s’apprêtait à le quitter. Dépressif, victime d’une haine de soi qui paralyse chacune de ses décisions, Douglas hante les rues de sa ville comme un fantôme. De l’autre côté de la cité, le vieux Sully passe ses journées et sa retraite, vissé sur un tabouret de bar. Les deux hommes sont ennemis depuis des décennies, quelle histoire rocambolesque a pu les réunir pour qu’il se retrouve cette nuit, à déterrer le cercueil d’un éminent juge récemment inhumé ?

Mon humble avis : Qu’est-ce qui différencie un bon auteur d’un excellent auteur ? Un roman lambda d’un excellent roman ? La réponse est multiple : d’aucun diront l’histoire, d’autre le style, la vision, l’imagination, la singularité peut-être. Pour ma part, et je le pense de plus en plus depuis que j’ai quelques velléités d’écriture, il s’agit de la précision, la densité, le talent de créer un monde viable, complexe, des personnages incarnés, des personnages dotés de toutes les contradictions d’un être humain véritable, des personnages habités, que l’on peut détester à la fin d’un chapitre et adorer quelques pages plus loin. A n’en pas douter, Richard Russo est un excellent auteur, je dirais même un immense écrivain. Je restais sur un souvenir ému de la lecture du déclin de l’empire Whiting il y a quelques années, et la lecture de ce texte me confirme à quel point Russo est un maître. Précises, cocasses, touchantes, cruelles, les petites histoires de cette communauté sont d’une justesse impressionnante, d’une acuité folle. Oui Russo est un maître, il décrit les petites gens comme personne, avec humanité et sans cynisme. C’est tendre, hilarant parfois, d’une tristesse infinie, empathique. C’est beau, tout simplement. À malin, malin et demi reprend les personnages d’un homme presque parfait ( que je n’ai pas encore lu ) vingt-cinq ans plus tard, mais rassurez-vous, il n’est pas nécessaire d’avoir lu le premier bouquin pour apprécier celui-ci. À malin, malin et demi est un pavé de plus de six cent pages, un roman fleuve passionnant jamais pompeux, jamais ennuyeux. Un texte subtil, pétri d’humanité, une ode à la vie et à l’être humain mais aussi une féroce satire sociale. J’en fais trop ? Lisez-le et nous en reparlerons après !

J’achète ? : Oui et de toute urgence. Rarement, en refermant un bouquin, je n’ai eu l’envie de prendre l’auteur dans mes bras. Ca à été le cas ici et pour cela, et mille autres raisons ( dont cette façon unique de magnifier les losers) , il faut découvrir Richard Russo, cet écrivain magnifique.
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Le Déclin de l'empire Whiting

Durant mon périple aux Etats-Unis, je me suis arrêtée à Empire Grill - un snack bar d'une petite ville autrefois florissante qui ne compte plus que des habitants qui n'ont pas pu ou voulu partir lorsque l'usine des Whiting a fermé. Miles Roby s'est pris d'affection pour moi et tout en me servant mon demi il m'a raconté sa vie. Sa future ex-femme, son ado de fille, sa famille, les habitués de son petit business. Rien de bien folichon dans ce coin paumé du Maine Mais tout était dans la manière de me raconter les événements avec un style bien à lui. Il a peu à peu recollé tous les morceaux épars de sa vie. En reconstituant le puzzle, tout se mettait progressivement en place. Jusqu'à l'explosion finale inattendue qui a tout fait voler. En sortant un peu triste mais indemne de l'Empire Grill, je me suis dit que je retournerai à la librairie pour rencontrer à nouveau Richard Russo.
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