Le choix des libraires vous invite à la rencontre de Florence Veyrié, la propriétaire de la librairie « La Maison Jaune » à Neuville sur Saône. Avec elle, partagez ses coups de c?urs et ses auteurs favoris comme Andreï Kourkov, Sophie Daull ou encore Sophie van der Linden.
En exergue de l'ouvrage, ce proverbe chinois.
Tu ne peux pas empêcher les oiseaux
de la tristesse de voler au-dessus de ta
tête, mais tu peux les empêcher de faire
leur nid dans tes cheveux.
Camille est morte lundi. Camille est morte lundi. Camille est morte lundi. On est tout au fond d'un puits, mais des visages à la surface se penchent vers notre gouffre, crient, lancent des cordes, des échelles, des lianes de survie.
On les saisit, on se brûle les paumes, on se griffe les ongles à la douleur des autres, on s'emplit les poumons de leur chagrin pour que l'air soit respirable. On roule sans autre paysage que notre cataclysme du dedans...
Tu ne peux pas empêcher les oiseaux de la tristesse de voler au-dessus de ta tête, mais tu peux les empêcher de faire leur nid dans tes cheveux.
(Proverbe chinois)
Quand je vois ce qui attend ce monde de merde, entre trahison politique, catastrophe écologique et pauvreté de masse, je me dis que oui, on peut se dire que tu as été bien inspirée de quitter le navire ; mais quand je vois n'importe quel soleil sur n'importe quel pétale, ou n'importe quel gars qui tient la main de n'importe quelle fille, je me dis que non, franchement, fallait rester dans la vie.
Je voulais aller nulle part. Mais il n'y a pas de nulle part. Je le savais déjà mais, depuis que tu es morte, ça me manque vraiment, un endroit où disparaître.
Les livres de deuil, et il y en a beaucoup, sont inattaquables quand il s’agit de faire un être de papier autour d’une personne disparue. Il faut qu’il y ait une honnêteté indiscutable. Au-delà de la petite histoire personnelle, il faut toucher l’universel, ce qui nous tracasse tous.
Le progrès, novembre 2016
Écrire, c'est te prolonger.
Une autre chose : nous n'avons pas de nom. Nous ne sommes ni veufs ni orphelins. Il n'existe pas de mot pour celui ou celle qui a perdu son enfant. Je viens de faire le tour sur Internet : pas d'occurrence dans le dictionnaire, ailleurs on propose des suggestions toutes aussi farfelues les unes que les autres....un papa répond sur un forum : "si, j'ai un nom : je suis un mort-vivant."
Ce que sont les meilleures mères, une seule phrase peut le dire : elles se donnent et elles s'en vont.
Christian Bobin
La plus que vive
Au réveil, il faut s'étonner encore, comme à chaque réveil, d'être en état de continuer de vivre, d'exister.