Changement de tonalité par rapport à ce livre que j'ai lu après le diable sortit de la salle de bains mais qu'elle a publié avant et pour ce roman écrit quelques années auparavant et beaucoup plus sombre, voire désespéré, qui prouve la capacité de l'auteur à se renouveller et proposer un univers différent et tout autant, voire même plus convaincant.
"La condition pavillonnaire" relate la vie d’une femme depuis son enfance jusqu’à sa mort des années 60 à nos jours. Une vie en apparence parfaite avec un mari aimant, des enfants, une belle petite maison. Pourtant, celle que l’on appelle tout au long du livre M.-A. en référence à Emma Bovary, si elle a tout pour être heureuse, s’ennuie profondément. Le temps passe, tous les jours se ressemblent inlassablement. Son insatisfaction est totale et va la pousser à trouver toutes sortes d’exutoires pour échapper au quotidien parmi lesquels l’adultère ou l’humanitaire.
Sorte de relecture moderne de Madame Bovary, le roman prend soin de nous peindre un personnage féminin socialement coincé, psychologiquement insatisfait et surtout, même si elle ne se l'avoue jamais vraiment, terriblement frustrée.
Le gros atout du livre, doté d'une intrigue déjà lue ici et là et d'être écrite à la deuxième personne du singulier qui apporte un trouble, un coté inéluctable au temps qui marque son sceau sur cette destinée ordinaire. Le style d’écriture original, bourré d’incises disposées ça et là renforce l’impression de ces années qui défilent à toute allure et sur lesquelles on n'a finalement peu de prise . ( Après le travail, tu te voyais en train de faire les courses, toute seule à l’hypermarché, passant devant certains rayons sans t’arrêter, reposant le panier avant la caisse, faisant toujours les mêmes gestes, à l’arrivée chemin des Pins, fermer la voiture, chercher tes clefs, ouvrir la porte de la villa. »)
A chaque moment de sa vie, le personnage dissèque son ordinaire qui en définitive est le quotidien de la grande majorité de nos contemporains. Dans le pavillon qu’elle acquiert avec un mari qu'elle n'aime qu'avec raison plus que passion, M.A. rencontra les affres de l’angoisse et de la frustration.
Prise de conscience sur le non-sens de la recherche de son bien-être dans le confort d’une petite vie rangée, analyse froide et pertinente de la routine avec ses tâches répétitives, et ; la nostalgie du passé ; l’envie d’ailleurs et d’une autre vie, d'une vie somme toute profondément ennuyeuse, l'auteur a l'intelligence de mettre ce destin de femme sans destin en parallèle avec l’évolution de la société,et de porter sa réflexion sociétale où où le bonheur à crédit est assez impossible à mettre en place.
Un roman qui peut donner le sentiment d’étouffer comme son héroine le fait entre les quatre murs de son pavillon, mais qui touche intensèment par sa justesse et son intensité
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