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Citations de Vladimir Nabokov (858)


Ecoute : je suis parfaitement heureux. Mon bonheur est une sorte de défi. Tandis que je flâne le long des rues, des places et sur les quais près du canal, sentant distraitement les lèvres de l'humidité à travers mes semelles usées, je porte fièrement mon bonheur indicible. Les siècles peuvent défiler, et les écoliers bâiller sur l'histoire de nos cataclysmes; tout passera, mais mon bonheur, ma très chère, mon bonheur restera, dans le reflet mouillé d'un lampadaire, dans la courbure prudente des marches en pierre qui descendent dans les eaux noires du canal, dans les sourires d'un couple qui danse, dans tout ce dont Dieu entoure si généreusement la solitude humaine. (Titre de la nouvelle : Lettre qui n'atteignit jamais la Russie)
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Aimer de toute son âme et, quant au reste, s'en remettre au destin, telle était la règle simple à laquelle elle obéissait. " Vot zapomni (N'oublie pas cela)", disait-elle, sur un ton de conspiratrice en attirant mon attention sur tel ou tel objet de son amour, à Vyra -- une alouette montant dans le ciel lait-caillé d'un jour couvert de printemps, des éclairs de chaleur prenant des instantanés d'une ligne d'arbres au loin dans la nuit, la palette de feuilles d'érable sur le sable brun, les empreintes cunéiformes des pas d'un petit oiseau sur la neige nouvelle. Comme si elle sentait que dans peu d'années, toute la part tangible de son univers périrait, elle cultivait un état d'attention extraordinaire...
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Quand je me reporte en arrière, à ces années d'exil, je me vois, moi, et des milliers d'autres Russes, menant une existence bizarre, mais nullement désagréable, dans l'indigence matérielle et le luxe intellectuel, parmi des étrangers parfaitement insignifiants, Allemands et Français fantomatiques, dans les villes plus ou moins illusoires desquels nous, émigrés, venions à demeurer. Ces aborigènes étaient pour l'oeil de l'esprit aussi plats et transparents que des silhouettes découpées dans de la cellophane, et bien que nous nous servions de leurs accessoires, applaudissions leurs clowns, cueillions les prunes et les pommes sur les bords de leurs routes, aucune communication réelle, riche d'humanité de cette sorte si répandue dans notre propre milieu, n'existait entre nous et eux.
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Je n'ai fait qu'obéir à la nature. Je suis le chien fidèle de la nature. Pourquoi alors ce sentiment d'horreur dont je ne puis me défaire ? Lui ai-je subtilisé sa fleur ? Sensibles dames du jury, je n'étais même pas son premier amant.
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Oui, je m’enorgueillis d’avoir discerné dès cette époque les symptômes de ce qui est si manifeste aujourd’hui, où une sorte de cercle de famille s’est peu à peu formé, unissant les représentants de toutes les nations, de gaillards bâtisseurs d’Empire dans leurs clairières de jungle, les policiers français, l’innommable produit allemand, les bons vieux faiseurs de pogromes, russes ou polonais, assidus aux offices divins, le maigre lyncheur américain, l’homme aux dents gâtées qui fait gicler des histoires chauvines au bar et aux w.-c, et, en un autre point de ce même cercle infra-humain, ces impitoyables automates aux visages de papier mâché, vêtus de pantalons curieusement larges et de vestons aux épaules carrées que l’État soviétique commença d’exporter autour de 1945, après plus de deux décennies d’élevage sélectif et de confection sur mesure durant lesquels la mode masculine à l’étranger avait eu le temps de changer…


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L’extase de son identité, placée sous le microscope de la réalité (qui est la seule réalité), révèle un système complexe de ces passerelles subtiles que traversent les sens, riants, enlacés, jetant des fleurs en l’air, entre l’âme et la chair lamellée, et qui a toujours été une forme du souvenir même à l’instant de sa perception.
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Je suis suffisamment fier de savoir quelques petites choses pour avoir la modestie de reconnaître que je ne sais pas tout [...].
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La langue russe peut exprimer au moyen d'un mot impitoyable l'idée d'un certain défaut fort répandu pour lequel les trois autres langues européennes que je me trouve connaître ne possèdent pas de terme spécial. Les aspects variés de l'idée que les Russes expriment avec concision par le terme " pochlost " (l'accent tonique est sur « poche », et le t final a une douceur mouillée que n'atteint même pas le t français dans des mots tels que : « restiez » ou « émoustillant ») sont répartis parmi plusieurs mots anglais et n'arrivent pas à former un tout défini. En y réfléchissant, je trouve préférable de transcrire comme suit cette grosse brute de mot : " pochlost ".
[…]
Nier toute valeur à un pays au moment fâcheux où l'on est en guerre avec lui — et où l'on aimerait qu'il fût détruit jusqu'à sa dernière chope et à son dernier myosotis — serait cheminer dangereusement près du bord de ce gouffre béant de " pochlost " qui s'ouvre universellement en temps de guerre ou de révolution.

Notre représentant M. Tchitchikov, II.
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Partir c’est mourir un peu, et mourir c’est partir un peu trop.
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La bourgeoisie, pour Flaubert, est un état d'esprit, pas un état de finances. Dans une célèbre scène de notre livre, où l'on voit une vieille femme, qui a travaillé dur toute sa vie, recevoir une médaille, pour avoir trimé comme une esclave pour son fermier-patron, sous le regard béat d'un aéropage de bourgeois épanouis, faites-y bien attention, il y a philistinisme des deux côtés, politiciens épanouis et vieille paysanne superstitieuse sont également bourgeois au sens flaubertien du terme.
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Au cas où je me livrerais entièrement à lui [l'art], c'est une vie non pas tranquille et mesurée, avec une quantité limitée de chagrins, une quantité limitée de plaisirs, avec des règles précises sans lesquelles tout jeu perd son charme, ce n'est pas cette vie là qui m'attend, mais la confusion totale ou dieu sait quoi ! Je serai tourmenté jusqu'à ma tombe.
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Le sens moral, mortels, est en nous la gabelle
Qui taxe notre sens de la beauté mortelle.
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Il existait entre une terre et l'autre un décalage d'une bonne centaine d'années, décalage rendu sensible par une confusion bizarre de signalisation aux carrefours de Temps-Qui-Passe ou les "pas encore" d'un monde ne correspondaient pas tous aux "plus jamais" de l'autre
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La nuit, on perçoit avec une intensité particulière l'immobilité des choses : la lampe, les meubles, les photographies encadrées sur le bureau. De temps à autre, l'eau déglutit et gargouille dans ses invisibles tuyaux comme si des sanglots montaient à la gorge de la maison. (Titre de la nouvelle : Lettre qui n'atteignit jamais la Russie)
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Pourquoi imaginais-je que nous serions heureux à l'étranger ? Parce qu'un changement de cadre est la fiction traditionnelle à quoi se raccrochent les amants, et les poumons, condamnés.
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Une fois, à la tombée de la nuit, j'ai sauté dans une clairière et j'ai vu des gens allongés, certains face contre terre, d'autres face vers le haut. Je me dis : je vais les réveiller, je vais les émouvoir ! Je commence à les secouer avec les branches, je leur lance des pommes de pin, je chuchote, je crie… J'ai été occupé pendant une heure entière, mais c'était inutile. Et quand j'ai regardé de plus près, j'ai haleté. La tête de l'un pendait comme un fil rouge, un autre au lieu d'un ventre avait un tas de gros vers... Je ne pouvais pas le supporter. J'ai commencé à hurler, j'ai sauté et je me suis enfui... 
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Et Simpson, après avoir profondément respiré, partit vers elle et entra sans effort dans le tableau. Aussitôt il fut pris de tournis à cause de la fraîcheur délicieuse. Il y avait une odeur de myrte et de cire, avec une touche de citron. Il se trouvait dans une pièce nue et noire, près d'une fenêtre ouverte sur le soir, et juste à côté de lui se tenait la véritable Vénitienne, Maureen, grande, charmante, tout illuminée de l'intérieur. Il comprit que le miracle s'était produit et il fut lentement attiré vers elle. La Vénitienne lui sourit du coin de l’œil, arrangea doucement sa fourrure et, ayant laissé la main dans son panier, elle lui tendit un petit citron.
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Un garçonnet de dix ans connait bien, connait jusque dans le détail chacun de ses genoux - l'ampoule grattée jusqu'au sang, les raies blanches laissées par les ongles sur la peau hâlée et toutes ces égratignures qui sont comme les signatures des grains de sable, du gravier et des brindilles pointues.
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"La pleine lune brille sur les forêts et les ruisseaux,
Vois leurs rides... de quel éclat elles luisent !"
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La consommation d'un aliment tripoté par un de mes semblables m'est, comme je l'expliquai aux convives rubiconds, aussi répugnante que l'idée de manger une créature humaine, y compris -je baissais la voix- la plantureuse étudiante à queue de cheval qui prenait notre commande et léchait son crayon.
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