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EAN : 9782227494701
500 pages
BAYARD CULTURE (13/02/2019)
3.67/5   3 notes
Résumé :
Seize ans après la parution de son ouvrage La Bible dévoilée, immense succès, où l'archéologue Israël Finkelstein présentait ses découvertes (se rapportant à un travail de 1970 aux années 2000) qui aboutissaient à une remise en question de l'historicité de nombre de récits bibliques, il refait dans ce livre une nouvelle mise au point des découvertes les plus récentes.
Deux évolutions fondamentales dans son travail : d'abord l'utilisation des méthodes scientif... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
Eléments de la construction historique d'une tradition
« Il est donc temps que l'archéologie moderne et les sciences bibliques critiques se parlent à nouveau, les sciences bibliques cessant de considérer l'archéologie comme une « science auxiliaire » et les archéologues renonçant à imaginer l'archéologie comme étant la « cour suprême », qui pourrait définitivement trancher des questions et datations débattues par les exégètes »

Il s'agit certes d'un livre érudit. Mais les lecteurs et les lectrices ne devraient pas hésiter à arpenter ces exposés, ces tentatives d'historiciser les textes, d'imaginer ce VIIIème ou VIIème siècle avant l'ère chrétienne et « la première mise par écrit de certaines traditions fondatrices, à cette époque », d'examiner ce qu'il est possible de savoir ou au moins de tenir en hypothèses raisonnables.

Il me semble important de comprendre comment se forment les traditions (et possiblement dans l'intérêt de qui ?), d'où viennent les mythes fondateurs. Il ne peut y avoir de lecture de textes anciens, sans confrontation aux traces archéologiques, sans analyse de l'évolution des faits linguistiques dans le temps (diachronie) ou des strates qui fournissent des détails sur la construction ou l'assemblage des textes. Nous ne sommes pas ici dans le monde enchanté de la croyance, mais bien dans la production humaine de sa mythologie.

Dois-je préciser que je n'ai que peu de connaissance en archéologie et aucune en « sciences bibliques ». Ma lecture profane n'est qu'un des parcours possibles, un choix subjectif d'éléments.

Israël Finkelsteinparle, entre autres, de « la reconstruction conservatrice de l'histoire de l'Israël ancien », de méthodologie, « où et comment établir la limite entre trouvailles archéologiques sur le terrain et interprétation de ces trouvailles », de sélection de données de manière à arriver aux conclusions désirées, de point d'ancrage – la fin de la période monarchique – « une époque pour laquelle les témoignages (historiques, économiques, sociaux, ou ayant trait à la culture matérielle) sont clairement définis et, à partir de là, reconstruire pas à pas les périodes plus anciennes, en remontant dans le temps », de longue durée, des événements et processus avérés, du temps écoulé « entre les événements rapportés et le moment de leur mise par écrit », des questions de datation et des intervalles d'incertitude, des différences existantes entre « les traditions du Nord et les traditions du Sud », de l'absence de preuve d'une « compilation de textes complexes avant le début du VIIIe siècle », de ce que signifie l'« ancien », de préservation de mémoires, de récits qui « ne possèdent pas nécessairement un fond historique », de traditions accumulées et stratifiées, « Ces strates représentent non seulement des contextes historiques différents mais également des idéologies différentes » Je souligne ce dernier point, car trop de lectures, de textes religieux ou non, font l'impasse sur leur contextualisation, comme si l'hier était le présent. Les idéologues -religieux ou non – assènent comme non discutable le « de tout temps ». C'est faire fi de l'histoire au profit d'une fantasmatique « nature humaine », qui recouvre toutes les dérives réactionnaires et le refus des choix démocratiques de nos futurs.

L'auteur poursuit avec le télescopage d'éléments des siècles passés dans l'écriture d'un scribe au moment de l'écriture, la transition entre tradition orale et tradition écrite, la migration des « traditions du Nord vers Juda » et leur incorporation dans « le canon élaboré dans le royaume du Sud », l'idéologie politique et la théologie des « auteurs de la fin de la monarchie et de la période postexilique ». Il termine sur des suppositions, la mise par écrit des plus ancienne traditions sous Jéroboam II, l'influence culturelle assyrienne, les deux messages de l'idéologie pan-israélite, l'exportation des thèses, les réalités de l'époque hasmonéenne, …

Thomas Römer discute de la datation du Pentateuque, de l'affirmation de l'« autorité mosaïque de la Loi », des différences stylistiques et théologiques ou des contradictions à l'intérieur des livres, de vision globale et de formation de la Torah, de l'incorporation de Yhwh, de la différence entre question de datation et question de foi, des variations dialectales, de long processus « de rédaction et de révision », de datation « allégorique », de la formation littéraire de la tradition sur Abraham, de la place de la période perse…

Israël Finkelstein et Thomas Römer font quelques observations sur les contextes historiques de l'histoire d'Abraham, « il est bien sûr encore plus anachronique de continuer à chercher un « Abraham historique » », la différence majeure entre les traditions sudiste et nordiste dans la Bible, la révision sudiste de parties importantes de la Bible hébraïque, la « correspondance » entre les récits d'Abraham et de Jacob, la figure autochtone d'Abraham, la filiale assez tôt d'Isaac comme fils d'Abraham, la fusion des traditions, « il est plus raisonnable d'imaginer que les premiers textes furent écrits au VIIe siècle (vers la fin de ce siècle?) lorsque l'alphabétisation se propagea en Juda », l'entreprise délibérée pour imposer une nouvelle histoire des patriarches, les additions et révisions de l'époque hellénistique…

Ils poursuivent sur les contextes de l'histoire de Jacob dans la Genèse, la compatibilité avec des concepts religieux mésopotamiens, la première propagation de l'activité scribale en Israël, la « révolution de Jéhu », l'union des récits sur Jacob et sur Abraham, « une tentative délibérée d'imposer une histoire nouvelle », la notion de « promesse », les douze tribus comme construction tardive, les sanctuaires du dieu El…

Israël Finkelstein interroge la tradition de l'exode et l'expérience du désert, les itinéraires, les sites, ce que pouvaient savoir les auteurs bibliques du désert du Sud, l'importance de Juda dans le commerce arabe dans le sud, l'origine de la tradition de l'Exode et de l'Errance au désert dans le royaume du Nord. Pour rappel, « toutes les tentatives pour identifier un « épisode en Egypte » au XIIIe siècle qui convienne au récit de l'Exode sont vouées à l'échec » d'ou la nécessité de s'engager sur « le terrain de la spéculation historique », les résonances avec les préoccupations de l'époque. « La tradition de l'Exode et de l'Errance au désert est par conséquent le résultat final de nombreux siècles d'accumulation et de développements, oraux et écrits, et d'une histoire rédactionnelle complexe éclairée par les diverses transformations des réalités géopolitiques et historiques ». Nous sommes ici bien loin des lectures naïves (mais idéologiquement signifiantes) du conte de la sortie d'Egypte

Le dernier texte, de Thomas Römer, concerne « La révélation du nom divin à Moïse et la construction d'une mémoire sur les origines de la rencontre entre Yhwh et Israël ». L'auteur souligne l'absence de Moïse dans le Décalogue et cette version de l'Exode, les transformations de l'Exode dans les récits sacerdotaux ou non, l'assemblage de documents, la dépendance littéraire de l'histoire de la naissance de Moïse avec la tradition de la naissance de Sargon (légendaire fondateur de l'empire assyrien), le Dieu connu en tant que « elohim », la nomination plus tardive de « Yhwh », la mémoire historique « selon laquelle Yhwh n'a pas toujours été le dieu « d'Israël » », l'origine non autochtone de Yhwh…

Des constructions de textes et de mémoires, les inventions de « cohérence », une longue histoire des transformations au gré des changements de contexte, une production humaine de « sa » mythologie…
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Ce livres est écrit à deux mains, d'une part par Israël Finkelstein, archéologue israëlien. Il travaille surtout, mais pas exclusivement, sur ce que l'archéologie peut dire au sujet de la Bible. C'est quelqu'un qui est reconnu au sein de la communauté scientifique et y tient une place très importante. Thomas Römer, quant à lui est exégète et philologue suisse, d'origine allemande, professeur d'ancien testament et titulaire de la chaire "milieux bibliques" au Collège de France. Il a une approche qui allie critique historique, analyse littéraire et philologique des textes vetero-testamentaires, parfois appuyée sur l'archéologie, cherchant à déceler les circonstances sociales, politiques ou culturelles qui sont le cadre de la pensée religieuse qu'ils génèrent (le Sitz im Leben), indépendamment de l'impact ou de lectures théologiques contemporains. Il relève que la rédaction des textes bibliques constitue une forme de synthèse entre des conceptions identitaires et des conceptions théologiques assez différentes et pense que cette approche qui parfois heurte les représentations traditionnelles, peut servir tant aux athées qu'aux croyants dans leurs réflexions sur les enjeux actuels.
Une présentation peut-être un peu longue des auteurs, mais pour bien montrer que leur angle d'approche est originale, car souvent, lorsqu'on cherche à comprendre un peu mieux la Bible, on se pose la question: vaut-il mieux se tourner vers l'archéologie ou vers l'exégèse (c'est-à-dire la science de l'interprétation des textes) pour approcher la vérité historique? En réalité, c'est une question mal posée car archéologie et exégèse sont deux sciences complémentaires qui ont tout avantage à dialoguer. C'est donc le résultat d'un échange fécond auquel nous convie ce présent ouvrage.
Il s'ouvre en délimitant le terrain de rencontre des deux sciences. Ensuite, on passe à un examen critique des deux grands récits récits fondateurs d'Israël, c'est-à-dire Abraham et les patriarches et Moïse et l'Exode. Evidemment, cet examen critique se fait à la fois sous l'angle archéologique et sous l'angle exégétique.
Il faut bien avouer que l'argumentaire est parfois un peu corsé, un peu technique. Pour bien le suivre, il faut de l'attention ou du moins une culture de base assez forte. Quoiqu'il en soit, c'est un exemple réussi d'allers-retour entre exégèse et archéologie, ces derniers pouvant très bien nourrir la vie de prière et une méditation spirituelle qui se veut lucide.
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Citations et extraits (6) Voir plus Ajouter une citation
Il est donc temps que l’archéologie moderne et les sciences bibliques critiques se parlent à nouveau, les sciences bibliques cessant de considérer l’archéologie comme une « science auxiliaire » et les archéologues renonçant à imaginer l’archéologie comme étant la « cour suprême », qui pourrait définitivement trancher des questions et datations débattues par les exégètes
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La tradition de l’Exode et de l’Errance au désert est par conséquent le résultat final de nombreux siècles d’accumulation et de développements, oraux et écrits, et d’une histoire rédactionnelle complexe éclairée par les diverses transformations des réalités géopolitiques et historiques
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une époque pour laquelle les témoignages (historiques, économiques, sociaux, ou ayant trait à la culture matérielle) sont clairement définis et, à partir de là, reconstruire pas à pas les périodes plus anciennes, en remontant dans le temps
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il est plus raisonnable d’imaginer que les premiers textes furent écrits au VIIe siècle (vers la fin de ce siècle?) lorsque l’alphabétisation se propagea en Juda
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toutes les tentatives pour identifier un « épisode en Egypte » au XIIIe siècle qui convienne au récit de l’Exode sont vouées à l’échec
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