Un nouveau destin croisé entre de grands ados et des artistes illustres.
Le tome consacré à Camille Claudel avait déja clairement ébauché les contours d'une vie d'artiste exigeante et habitée.
"
Chien rouge, dans les rêves de Gauguin" ne dément pas l'obsession créative qui prend aux rêves et aux tripes comme un coupe-faim, les coulisses parfois dramatiques au service de la créativité et l'inspiration, une vie de bohème où l'Art est "une maîtresse" à qui l'on sacrifie la sécurité financière, le confort d'un cercle familial et parfois la santé et la raison.
Marie Sellier lève de nouveau le voile sur le mystère que taise les oeuvres qui se suffisent à elles-mêmes, pour nous évoquer une autre double-histoire entre fiction et documentaire, à hauteur d'ados.
Dans quel contexte ont été pensé, enfanté les oeuvres si connues qui sont parvenues jusqu'à nous et ont un jour fait changer notre regard sur le monde et la notion d'oeuvre d'Art?
L'auteure a crée cette fois un récit passerelle entre un trio de jeunes scolaires devant concevoir un exposé sur un peintre et la biographie de l'artiste.
Line la rousse, kira la brune et Morgane la blonde vont rencontrer l'art de Gauguin, sa vie presque familière et pourtant inconnue.
L'accident de voiture de Milo, le frère aînée de Line, une récente lettre du père de Kira, disparu du tableau familial, la révélation de la relation cachée entre Milo et Morgane, vont exacerber les sentiments.
Kira et Line partagent l'abandon du foyer par le père. Line sera surprise de trouver des similitudes entre la vie de
Paul Gauguin et la sienne, celle de son père qui s'appelle aussi Paul et qui est un artiste peintre en quête de notoriété.
Gauguin était d'ailleurs l'artiste préféré de son père, il prénomma ses enfants un peu à l'identique de ceux de Gauguin, c'est la raison personnelle du choix de l'exposé.
Tout en suivant les avancées sur l'état de santé de Milo et les états d'âmes de Line ou Kira, les lecteurs ados entreront dans la vie de Gauguin, cherchant l'inspiration de la Bretagne aux îles Marquise.
Ils suivront les jeunes héroïnes qui accrocheront, par le biais de reproductions colorées et d'écrits biographiques, une réalité artistique, une maturité qui pointera à l'horizon autour des engagements familiaux de Gauguin et de leur propre cercle.
Par leur biais et leur contemplation des peintures pour leur travail d'exposé, nous discernerons l'existence propre des oeuvres, les filles s'interrogeront, seront happés par les détails.
Et puis également, les lecteurs repérons une difficulté à distinguer l'homme de l'artiste lorsque certains choix de vie peuvent heurter personnellement et intimement.
Les lecteurs en apprendront donc sur cette route artistique qui fit partir l'artiste et s'autoproclamer inapte à la paternité, sur ces contradictions qui lui firent prirent prendre femme dans le Pacifique à plusieurs reprises, l'appel qui fit passer Gauguin de l'impressionnisme à un besoin d'authenticité, d'essentiel dans son art primitif obtenu.
Les situations inspirées des peintures par l'artiste et les récits biographiques ne nous racontent pas les mêmes histoires.
Le parallèle avec la vie de Line et Kira qui ont grandi sans père est bien intégré à la découverte du peintre et chacune apporte une réaction différente.
Tout en nous intrigant mystérieusement sur le processus artistique,
Marie Sellier parle de Gauguin sans complaisance. de quoi dégager avec une forme de justesse l'esprit humain sensible, très faillible, torturé autour du génie créatif.
Un titre tout aussi surprenant que les autres, l'auteure arrive à renouveler à chaque fois son style de narration et ses atmosphères.