Quel pensum indigeste ! Il ne fait que 253 pages, qui plus est bien aérées, pourtant ça fait des semaines que je m'échine à le finir...
L'auteur y fustige la simplification extrême de PowerPoint, mais pour ce faire il tombe dans le travers inverse, la complexification extrême. J'allais écrire que ces raisonnements alambiqués et ce style lourdingue étaient peut-être la marque des ouvrages universitaires américains sur le monde de l'entreprise (car 'Les 7 habitudes' de Peter Covey m'avait semblé de la même veine stylistique) mais l'auteur est français... Oups...
Sur le fond, le livre amène quelques idées intéressantes et à mon sens justes sur les gros défauts de PowerPoint : la réduction de toute pensée à 3 bullet-points sans nuances et sans objections, le mélange des genres entre rapport objectif et argumentaire de vente, la prééminence de la forme sur le fond, le formatage de l'information pour qu'elle colle au support, l'utilisation comme 'prétexte' pour se déresponsabiliser (ne plus aller au fond des choses, ne plus prendre de notes, ne plus réfléchir à tous les aspects d'un problème).
J'ai même passé en revue et légèrement modifié mon usage professionnel du logiciel en cours de lecture : présentations au format 'portrait' (et pas 'paysage') pour montrer des données chiffrées détaillées et les analyser plus finement, vigilance pour ne pas passer de l'analyse à l'argumentaire commercial ou plaquer un PowerPoint existant à une problématique nouvelle...
Malgré tout, je ne suis pas complètement convaincue, et pas uniquement à cause du style. En fait, j'ai l'impression que l'auteur se trompe de coupable : il impute la responsabilité du monde de l'image, du paraître et des idées-choc à PowerPoint, qui n'en est pourtant qu'un outil. Ainsi, il évoque les grands shows de l'armée américaine pour justifier ses interventions, à l'aide de powerpoints chiadés et bardés de cartes, de vidéos et de graphiques parfois trompeurs. Mais, à mes yeux, l'illusion qui en résulte est le fruit d'une volonté du rédacteur ou du choix des images, pas une conséquence du format PowerPoint.
Bref, j'ai fait une critique presque aussi longue et confuse que le livre lui-même pour en arriver à une conclusion toute simple : PowerPoint n'est et ne doit rester qu'un outil, à manier avec précaution, intelligence et honnêteté... au risque sinon de tronquer, falsifier ou simplifier la réalité.
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Un livre vraiment surprenant. Etant donné le titre, j'avoue que je m'attendais à quelque chose d'assez léger. Et bien pas du tout mais l'auteur sait y faire pour nous captiver quand même. On y retrouve d'abord des informations sur la naissance du logiciel, ensuite une histoire des organisations, et l'usage de PowerPoint est abordée d'un point de vue très sociologique. Tout est très bien documenté, avec le niveau de vulgarisation nécéssaire pour tout comprendre. Personnellement, ce livre m'a beaucoup fait réfléchir et je l'ai trouvé vraiment très intéressant. Je le recommande à tous ceux qui comme moi sont amenés à utiliser PowerPoint chaque jour à leur travail, car il leur permettra de penser différement.
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Sous une forme presque pamphlétaire, l'auteur vise à démontrer la perversité du logiciel PowerPoint dont le cadre des pages et les fonctionnalités engageraient à rendre objectif, sans auteur et sans destinataire, un contenu vidé de toute cohérence, voire volontairement manipulé. Il en ressort un effacement de l'auteur du support, qui devient le simple vendeur de son produit, et une hypnose des récepteurs - ou un endormissement si l'effet est raté.
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Les contraintes de temps sont telles que parfois les entreprises sont obligées de sous-traiter leurs présentations. Certains cabinets de consultants en sont parvenus à réduire les délais en jouant sur les fuseaux horaires, et en faisant exécuter leurs slides la nuit aux Etats-Unis; commandées le soir, elles sont livrées le matin...
Le resserrement incessant délais impose également de façon assez mécanique la fusion progressive des documents remis, les livrables, entre ceux destinés à la présentation (les slides) et ceux soumis à la lecture, au rapport, à l'étude. Support d'une présentation orale, le PowerPoint devient de plus en plus l'unique "livrables". Faire des transparents demande moins de temps que la rédaction d'un rapport. Des présentations antérieures peuvent facilement être réutilisées, car il s'agit d'un ensemble de textes désarticulés qui peuvent être réagencés, recomposés à moindre coût. Le fichier de transparents a de plus un atout central; il permet une réelle économie dans la production en faisant office de support de présentation et en tenant lieu de rapport (deux en un). Sans oublier le fait qu'il s'est développé une "injonction" à faire des présentation avec transparents De façon générale, le succès de la présentation avec transparents n'est-il pas principalement lié à la recherche par les organisations d'une réactivité maximale et d'une utilisation optimisée d'une denrée précieuse, le temps?" constate la sociologue Valérie Baudoin.
Créées avec ce double objectis, les slides ne répondent cependant ni aux besoins de l'exposé oral, ni aux exigences du rapport écrit. Comme on le verra, elles contiennent soit trop de texte pour être des aides visuelles efficaces (pour soutenir, et non pas éclipser, l'orateur), soit trop peu d'éléments pour répondre aux obligations d'une rapport ou d'une étude. Mais les praticiens reconnaissent eux-mêmes l'efficacité économique de "faire d'une pierre deux coups", même si un travail d'adaptation est nécessaire pour aménager les slides sur du papier. De plus en plus de consultants "relookent" d'ailleurs leurs présentations dans ce sens pour fabriquer des documents qui deviennent des plaquettes de présentation très soignées.
Tout document PowerPoint semble ainsi n'avoir ni statut, ni destinataire, ni auteur : "il y a comme une dilution de responsabilité qui permet de ne pas trop se poser de questions dans l'enchaînement des arguments, puisque le document n'a pas de statut propre : ce n'est ni une note, ni un rapport, ni un outil d'aide à la décision" constate un fonctionnaire.
L'avantage que peut avoir PowerPoint pour le présentateur a un coût pour le public et une incidence sur le contenu.