Il m'a donc été permis de continuer à écrire sans que personne ne s'occupe de savoir comment j'écrivais. Ce qui comptait, c'était le film dans son achèvement. Le manuscrit était un produit semi-fini, dans le meilleur des cas il était une partition. J'ai peu à peu osé des formes d'expression qui m'étaient personnelles. Dieu soit loué, c'était pratiquement impossible à déceler et quelle volupté! Vus de l'extérieur, les manuscrits ressemblaient à ce qu'on m'avait appris qu'ils devaient être: claire répartition en scènes et en répliques, indications minutieuses concernant les décors, les lumières, les vêtements et les accessoires. Il m'a fallu attendre Persona pour oser m'échapper et avoir le courage d'écrire tout simplement une histoire. Quand on m'a demandé à quel moment je présenterais un manuscrit, j'ai répondu que c'était ça le manuscrit et qu'aucun "shooting-script", comme on dit, n'était prévu.
Un des aspects agréables de la célébrité fut qu'il y eut des éditeurs étrangers pour vouloir publier ces textes.
Le ton personnel brillait par son absence. Les éditeurs et les directeurs de théâtre se lassèrent peu à peu et je fus unanimement refusé. Au moment où cela se produisit, j'en fus bien entendu dépité, fort marri, et aujourd'hui, j'en suis plutôt reconnaissant.
Ce qui en découla fut logique. La voie en direction des nouvelles, des romans, des pièces de théâtre m'était hermétiquement fermée. Restait le cinéma.
Sourire d'une nuit d'été, extrait 1