Beauté de femme au cœur plein de sagesse,
et chevaliers si nobles et armés,
et chants d’oiseaux, paroles de tendresse,
bateaux ornés qui sur la mer courez,
et l’air serein quand l’aurore apparaît,
et neige blanche qui choit sans que vent presse,
eaux ruisselantes, fleurs multiples aux prés,
or et argent, ou bleu en joliesse…
À Giovanna.
Rose ,fraîche, nouvelle,
printemps agréable,
pour pelouse et pour rivières
chantant gaiement,
votre bel honneur j'envoie aux légumes.
Votre valeur jusqu'à
moi est ravivée en
tant qu'adultes et en tant que célibataires
pour chaque chemin.
Et cantine li augelli,
chacun dans son latin,
le soir et le matin
sur les arbustes verts.
Tout le monde chante,
aussi longtemps que le temps est venu,
comme
il sied à votre taille prisée ;
parce que tu es une créature angélique.
L'apparence angélique
en toi, femme, repose.
Dieu! comme
mon malheur était aventureux !
Ta cire joyeuse,
alors que la
nature et les mœurs passent et avancent ,
c'est une chose merveilleuse.
Parmi elles, les femmes déesses
vous appellent comme vous êtes ;
tellement orne le mur
que je ne sais pas compter ;
et qui peut le mettre à penser au-delà de la nature ?
Au-delà de la nature humaine
votre belle prestance a
fait Dieu, par essence
que vous étiez souverain.
Pour que ton semblant
ne soit pas loin de
moi, maintenant c'est impoli avec moi
la douce preuve.
Et, s'il te semble que c'est un outrage de
t'aimer,
ne peut pas être blasphémé par vous, car
seul l'amour me lutte,
contre lequel ni la force ni la mesure ne vont.
AD UN AMICO.
Certe mie rime a te mandar volendo
del greve stato che lo meo cor porta,
amor m’apparve in figura morta
e disse: — non mandar ch’i’ ti riprendo;
però che, se l’amico è quel ch’intendo,
e’ non avrà già sì la mente accorta,
ch’udendo la ’ngiuliosa cosa e torta
che i’ ti fo tuttor soffrire ardendo,
temo non prenda sì gran smarrimento,
ch’avanti ch’udit’ aggia tua pesanza,
non si diparta da la vita ’l core.
E tu conosci ben ch’i’ sono amore
e ch’i’ ti lascio questa mia sembianza
e portone ciascun tuo pensamento. —
XI CHANSON
Puisqu’il faut qu’un cœur de douleur je porte
et sente du plaisir le feu ardent,
passant de vertu à avilissement,
je dirai comment j’ai perdu ma vaillance.
Et je dis que mes facultés sont mortes
et mon cœur, qui a tant lutté et vit peu ;
et si ce n’était que mourir m’est joyeux,
je ferais pleurer Amour d’indulgence.
Mais par cette folie qui m’a saisi,
voici que ma fermeté s’est changée
en état étranger,
au point que je ne montre pas mon angoisse ;
le leurre me dépasse :
car dans mon cœur m’est entrée la Passion
qui exerce sur moi sa domination.
A Giovanna.
Fresca rosa novella,
piacente primavera,
per prata e per rivera
gaiamente cantando,
vostro fin pregio mando a la verdura.
Lo vostro pregio fino
in gio’ si rinovelli
da grandi e da zitelli
per ciascuno cammino.
E cantine li augelli,
ciascuno in suo latino,
da sera e da matino
su li verdi arbuscielli.
Tutto lo mondo canti,
po’ che lo tempo vene,
si come si convene,
vostr’altezza pregiata;
chè siete angelicata criatura.
Angelica sembianza
in voi, donna, riposa.
Dio! quanto aventurosa
fue la mia disianza!
Vostra cera gioiosa,
poi che passa ed avanza
natura e costumanza,
ben è mirabil cosa.
Fra lor le donne dea
vi chiaman come siete;
tanto adorna parete
ch’eo non saccio contare;
e chi porla pensare oltr’a natura?
Oltr’a natura umana
vostra fina piagenza
fece Dio, per essenza
che voi foste sovrana.
Perchè vostra parvenza
ver me non sia lontana,
or no mi sia villana
la dolce provedenza.
E, se vi pare oltraggio
ch’ad amarvi sia dato,
non sia da voi blasmato,
chè solo amor mi sforza,
contr’a cui non vai forza nè misura.
Guido CAVALCANTI – Une Vie, une Œuvre : le Regard et la Mort (France Culture, 2001)
Émission "Une Vie, une Œuvre", par Simone Douek, diffusée le 22 avril 2001 sur France Culture. Invités : Christian Bec, Bruno Pinchard, Jacqueline Risset, Emilio Pasquini et Michel Cazenave.