Quand on commence un livre de Leo Rutra, on ne sait jamais où il va nous emmener : on sait seulement que ce sera beaucoup, beaucoup plus loin que les limites qu'on se serait autorisées. Avec Une histoire de vengeances (notez le pluriel), c'est de nouveau vrai... je suis allée au-delà des limites, mais j'en suis revenue pour vous recommander de faire, vous aussi, ce voyage.
L'histoire a l'air manichéenne. Normal : une vengeance, n'est-ce pas toujours ainsi ? Tout le début du livre est d'ailleurs ostensiblement manichéen : les méchants sont horriblement méchants, et les innocents, atrocement punis de simplement exister. Mais la suite renverse une première fois la donne. Un renversement : d'accord, on pouvait s'y attendre. Sauf qu'il ne renverse pas complètement la donne ; et en outre, il en renverse encore un élément, puis un autre... et au final, l'histoire qui s'annonçait manichéenne, donc prévisible, nous échappe et fait surgir plusieurs possibilités d'issues, y compris complètement angéliques, y compris complètement morales. Bien malin qui devinerait celle(s) que choisit l'auteur.
L'histoire a l'air de reposer sur des stéréotypes. Normal : ça va avec le manichéisme. Ça va avec le western, aussi (car le livre a un décor de western) : ambiance bons, brutes (très brutales) et truands (les mêmes que les brutes). Mais écrit par Leo Rutra, un western ne peut pas garder une forme classique bien longtemps... au fur et à mesure que le roman devient moins manichéen, les stéréotypes se brouillent, jusqu'à s'inverser, ou plus encore, se comporter d'une manière totalement inattendue. Certes, c'est un homme du 21ème siècle qui fait adopter des comportements contemporains à ses personnages placés au 19ème siècle ; mais cette considération n'épuise pas le sujet. Les personnages nous surprennent, même nous qui sommes du même siècle que l'auteur.
Alors comme d'habitude, je pardonne à Leo Rutra d'écrire des pages insoutenables, d'obliger ses lecteurs à puiser loin dans leurs ressources pour résister à l'horreur des sentiments qu'il leur fait mobiliser, de les obliger à lire fébrilement pour connaître vite le fin mot de l'histoire, à défaut d'avoir une quelconque prise pour empêcher ce déchaînement de violence… Car comme d'habitude, l'histoire est parfaitement maîtrisée, la structure du livre s'emboîte avec jubilation, et l'écriture est impeccable. Et cette fois, le petit plus réside dans la surprise du dénouement, qui détonne dans l'atmosphère pesante dont on s'extirpe à peine. Ce dénouement est particulièrement réussi car chaque lecteur pourra y voir soit un magnifique message d'optimisme, soit un retour violent de toute l'angoisse refoulée tant bien que mal. Faites-vous votre avis ! Et, inconditionnels de Leo Rutra, suivez-le encore une fois dans cette nouvelle aventure, où l'on retrouve à la fois ses obsessions littéraires, et des thèmes qui les renouvellent.
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Quelle claque ! Ce western pur et dur revisite avec un réalisme prenant les moeurs farouches de certains desperados. Dès les premières lignes, le lecteur enfourche une cavale qui file bride abattue dans un univers de pionniers austères où seuls survivront les plus durs, les plus cruels. du côté des hors la loi sévit Francis, serial killer leader d'une horde sauvage. Après son passage, non seulement l'herbe ne repousse pas, mais gorgée d'hémoglobine se creuse de tombes et de cimetières. Personne ne semble pouvoir l'arrêter, même pas lui-même, emporté dans une folie sanguinaire qui ne connait plus de limites.
Histoire de vengeances, destins brisés, enchevêtrés où chacun lutte avec ses propres armes, soleil brûlant, terre aride, où les excités de la gâchette n'auront pas à coup sûr le dernier mot. L'injustice appelle la justice, la violence la vengeance longuement mûrie puis perpétrée par ceux qu'on ne soupçonnait pas.
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Deux phrases qui résument parfaitement le contexte : Tout s'était enchaîné. La panique, la fuite, la guerre, le Sud, l'utopie, la route, la violence.
J'ai lu ce livre comme un roman post apocalyptique ; Hopetown est devenu Chaoscity… Des barbares assoiffés de sang et violence ont laissé la ville exsangue ; le « Shérif » décide de venger les morts, mais surtout et avant tout, celle de sa soeur.
On découvre un univers chaotique, des territoires, des villes « south road city », « black rock mountain »…. peuplées de gens qui survivent tant bien que mal ; des pauvres hères « les Disciples »… C'est le récit de la traque par un homme seul de cette horde de meurtriers, mais tout n'est pas si simple… on le découvre au fur et à mesure…
Honnêtement, je pense que chacun peut percevoir ce roman différemment, bien sûr il y a les bons et les méchants, mais… perso, je n'ai pas vraiment l'habitude de ces récits d'utopie ou de dystopie, et j'aurais bien du mal à classer cette « histoire de vengeances » qui réunit les deux ! je suis sortie de ma zone de confort de lecture et je ne le regrette vraiment pas ! Une petite remarque, si vous craignez l'hémoglobine et la violence, ce n'est pas le livre idéal pour découvrir cet auteur qui a écrit des romans beaucoup plus « soft » et tout aussi passionnants… de belles découvertes !
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Tu confonds le chaos et la liberté, gamin. La liberté, c'est de choisir un endroit et d'y construire la vie que l'on souhaite. La liberté, c'est d'accepter d'avoir besoin des autres et de vivre en harmonie avec eux. Pas d'arpenter les routes en semant la terreur.