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EAN : 9782729119836
125 pages
Editions de La Différence (24/05/2012)
3.92/5   6 notes
Résumé :
Adonis s'est partagé entre la Syrie, son pays d'origine, le Liban et la France. Avant tout poète, mais aussi animateur de revues, essayiste, anthologiste, enseignant, il a construit depuis plus de trois décennies une oeuvre lyrique méditative, puisant à toutes les sources, qui tentent l'osmose entre tradition et modernité, entre Orient et Occident, par d'incessantes variations sur les formes et une interrogation parée du chatoiement des sens et de l'esprit. Dans Chr... >Voir plus
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Miroir de la luge noire

Tu as dit : Mon visage est navire, mon corps est une île,
et l’eau, organes désirants.
Tu as dit : Ta poitrine est une vague,
nuit qui déferle sous mes seins.

Le soleil est ma prison ancienne,
Le soleil est ma nouvelle prison,
La mort est fête et chant.

M’as-tu entendu ? Je suis autre que cette nuit, autre
Que son lit souple et lumineux.
Mon corps est ma couverture, tissu
Dont j’ai cousu les fils avec mon sang.
Je me suis égaré et dans mon corps était mon errance…

J’ai donné les vents aux feuilles,
J’ai laissé derrière moi mes cils,
De rage j’ai joué l’énigme avec la divinité
Et j’ai habité l’évangile de l’allaitement
Pour découvrir dans mes vêtements
la pierre itinérante

M’as-tu reconnu ? Mon corps est ma couverture,
La mort est mon chant et palais de mes cahiers,
L’encre m’est tombe et antichambre,
Mappemonde clivée par la désolation
En laquelle le ciel a vieilli,
Luge noire que traînent les pleurs et la souffrance.

Me suivras-tu ? Mon corps est mon ciel,
J’ai ouvert tout grand les couloirs de l’espace
J’ai dessiné derrière moi mes cils,
Routes menant vers une idole antique.

Me suivras-tu ? Mon corps est mon chemin.

© Adonis, Chronique des branches, La Différence, 2012
Traduction de l’arabe par Anne Wade Minkowski
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Miroir du chemin,
Chronique des branches


Extrait 20
V

… une lance est tombée.
J’ai recueilli mes jours,
les ai livrés à mes paroles
dans les racines de l’ éclosion
et la tiédeur de la mort,
dans ma mort amie,
dans un lendemain vagabond qui se cabre,
dans un éclair fraternel
venant de loin.
Je ne suis que le rythme de mes paroles,
qu’un souffle qui va rôdant,
pulvérisant l’esprit de l’eau
parmi décombres et dispersions.



Mihyar,
ton visage est tour nocturne dans une barque d’encens
et le rêve se cache dans les ailes du ramier.
Le ramier est dans le four
et un canari chantait :

     « Ne reste autour de moi que mon ombre.
     Plus de chemin autour de moi que mon ombre. »

Il chantait et chantait :

      « J’avais une terre, je l’ai donnée.
      « J’avais des arbres, ils sont morts. »

Le canari chantait et chantait :

      « Toi, visage du lieu,
     ta première moitié est morte.
     l’autre moitié n’est pas née encore. »

Il chantait :

      « J’avais une ombre, je l’ai donnée.
      « J’avais des arbres, ils sont morts. »

Le canari qui a chanté la vie, prié pour la vie,
S’est envolé par désir de mort vers la mort.

Mihyar,
  ton visage est tour de lumière dans une barque d’obscurité,
  le rêve se cache dans les ailes du ramier,
  le ramier est corps, ici et là-bas,
  magicien qui explore et ouvre l’espace.

Et jour après jour, après le sommeil, le soleil me raconte :

… j’ai écouté leurs légendes,
nous avons pétri le pain et nous avons mangé
Nous nous sommes dressés devant les miroirs
et j’ai vu des visages pourchassés,
vu leurs rides et entendu la folie
sonner l’appel et mobiliser les époques.
J’ai vu les javelots s’incliner
au-dessus de nous comme des branches,
j’ai vu les branches dans nos traits,
j’ai vu les vaisseaux dans la trouée du golfe
porter le feu et les vents.
J’ai lavé les miroirs, libéré leur tornade,
j’ai mêlé les miroirs au chemin
et à son histoire
et de ce mélange j’ai fait
l’alchimie des époques nouvelles.
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Miroir du chemin,
Chronique des branches


Extrait 1
I

Non pas l’estuaire des miroirs,
non pas la rose des vents.
Toute chose est une aile
ascendante dans mon sang,
dans les champs,
nageant dans l’orbite des saisons.

    J’ai fait de mon visage le frère de l’herbe
    et mes pas se sont livrés à la nostalgie
    des miroirs.
    J’ai vu les éléments pleurer, ouvrir
    entre nous la blessure fraternelle.
    J’ai reconnu le signe attestant
    que je suis prélude à l’annonciation,
    plante de l’Orient au jardin de la prophétie.
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Miroir du chemin,
Chronique des branches
Extrait 16
V
Mihyar descend
dans l’enclos de Qassioun (4),
dans Barada (5),
dans la clairière de l’Auvent (6),
dans la Ghouta (7) dépoitraillée,
dans la nuit,
porté par un tapis de velours.

    Les anémones, le filon de diamant,
    le lin, le grenadier,
    sont foule pressée de cavaliers
    dans le liouân (8) de Qassioun.



Le feu devient lac,
l’oiseau naît dans les feuilles du lotus,
l’eau est une barque apportant aux fils
des encensoirs en provenance des cimetières paternels.

… sous la mosaïque, nous nous sommes accroupis.
Je me suis glissé dans le brouillard du fauteuil,
dans un tourbillon, dans le giron d’une transe verte,
dans la saveur d’un paradis,
et j’ai entendu la mer pleurer ses vagues consumées.


(4) Qassioun : montagne qui domine Damas
(5) Barada : rivière qui traverse Damas
(6) Auvent : il s’agit de l’auvent qui abritait les amis du Prophète au moment de son agonie.
(7) Ghouta : la gufa, oasis irriguée par le Barada, au sud de Damas
(8) : liouân ou iouân : pièce surélevée donnant sur la cour centrale d’une maison
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Miroir du chemin,
Chronique des branches


Extrait 12
III

Toute chose est telle qu’elle était
et les rebelles, amis des vents,
blessent le jour et marchent
parmi les blessures…

  Mais j’avance, je nomme,
  je redonne à mes mots
  la magie de la création.
  Je nomme par les racines et par leur rythme.
  Je nomme l’arbre de la pulsion prophétique
  au commencement des saisons,
  quand la fumée ne sait pas encore
  qu’entre les champs et mes sources secrètes
  le cadavre du lieu est tombé.



Je nomme et je comble
mes fleuves humains
d’une colère qui tisse des liens
entre ma voix et ses vagues,
dresse les rivages en arc de flamme.
J’ai étreint l’incendie,
j’ai décortiqué l’espace,
j’ai fait de l’espace des fleurs
qui lisent le chemin
et des pas j’ai fait mes interprètes.
J’ai vu mes chants marcher,
leurs pieds tisser des filets
pour piéger les oiseaux du malheur.
J’ai vu mes chants jouer, compter la poussière,
grain par grain,
et le tourment dormir dans l’obscurité
sur la rive de l’étrange.
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Vidéo de  Adonis
http://le-semaphore.blogspot.fr/2015/... Lors de l'émission “Cultures d'Islam” diffusée sur France Culture le 04 avril 2014, Abdelwahab Meddeb s'entretenait avec le poète et critique littéraire syrien, Adonis. Adonis (en arabe : أدونيس) est le pseudonyme d'Ali Ahmed Saïd Esber (علي أحمد سعيد), poète et critique littéraire syrien d'expression arabe et française né le 1er janvier 1930. Son pseudonyme se réfère au dieu d'origine phénicienne, symbole du renouveau cyclique. À 84 ans, le doyen des poètes arabes, qui publie depuis 1947, continue de cheminer sur la voie de la rébellion et de la radicalité fondatrices de son œuvre.
Bibliographie Adonis : “Printemps arabes, Religion et Révolution”, La Différence, 2014 “Le Livre”, tome I et II, Le Seuil éd., 2010 et 2013 (ces deux oeuvres sont traduites de l'arabe) Invité : Adonis, poète
“Cultures d’Islam” participe à la levée d’une méconnaissance pour que les références islamiques circulent dans le sens commun et, d’une façon plus ouverte, moderne et polyphonique, approche l’Islam en tant que phénomène de civilisation. Abdelwahab Meddeb, le producteur de “Cultures d'Islam”, s'est éteint dans la nuit du 5 au 6 novembre 2014. Abdelwahab Meddeb était romancier, essayiste, scénariste, traducteur et poète, et il était devenu au fil des années l'une des voix marquantes de France Culture.
Thèmes : Idées| Civilisation| Poésie| Religion| Société| Printemps Arabe| Adonis
Sources : France Culture et Wikipédia
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