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EAN : 9791090062481
80 pages
Editions iXe (23/05/2019)
4.5/5   6 notes
Résumé :
Un soir d'été, Isabelle Alentour regarde Syrie, le cri étouffé , un documentaire tourne par Manon Loiseau avec des rescapées des viols de masse perpétrés sur des prisonnières, opposantes au régime ou femmes, filles, soeurs de résistants. Un carnet sur les genoux, un stylo à la main, Isabelle note leurs paroles - ce qu'elle peut en noter. Elle y reviendra, elle complétera ces bribes et composera, par traits successifs, ce texte rare, sorte de poème de rage et d'effro... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (5) Ajouter une critique
Ainsi ne tombe pas la nuit
Isabelle Alentour
Editions iXe

Des mots qui se répètent pour créer une mélodie terrible. Les mots sont choc, les mots sont durs. le thème l'est aussi.

Le viol des femmes et le silence de ceux qui font semblant de ne pas savoir et des auteurs affreux qui sont les bourreaux.

J'ai vécu là une expérience livresque unique. Il faut lire ce livre pour comprendre. J'ai été happée par les mots, par le rythme qui m'a coupé le souffle tant c'est dur. Mais moins que la réalité de ce que vivent ces femmes nulle doute.

Les mots semblent martelés sur le papier comme dans la tête de ces femmes qui n'oublieront jamais.

Toutes ces histoires m'ont beaucoup ébranlée mais celle qui m'a le plus touchée est Des écorces frottées au sel. D'une force, d'une crudité mais tellement réaliste, sans aucun doute.

Le sentiment de honte et de culpabilité de ces femmes est si présent et si fort... et si injuste ! Pourquoi sont-ce elles qui éprouvent ces sentiments alors qu'elles sont victimes et qu'on les a tuées, au propre parfois comme au figuré toujours.

Quelle solitude d'être victime. Quel manque de compréhension, d'écoute et d'aide.

Par la parole, la nuit ne tombe jamais ni le silence. Aussi, il faut raconter.

Malgré toute l'horreur de ce qu'Isabelle rapporte, je n'ai jamais lu mots plus beaux qui racontent l'horreur. Merci Isabelle pour ce livre fort que je n'oublierai pas.

À la suite du livre, il m'a fallu regarder le film à la suite duquel Isabelle Alentour a senti le besoin d'écrire.

Vous pourrez le trouver ici https://youtu.be/djqLnSaAR6w
Il s'agit de le cri étouffé de Manon Loizeau.
C'est une plainte. Une plainte étouffée, mais assourdissante. Un cri silencieux dont les soubresauts déchirent les murs des prisons, des sous-sols, des antichambres de la mort. C'est le cri des femmes syriennes violées depuis six ans dans les geôles de Bachar al-Assad. Un crime organisé, réfléchi, car il est fondé sur l'un des tabous les mieux ancrés dans la société traditionnelle syrienne et il joue sur le silence des victimes, convaincues de risquer le rejet par leur propre famille, voire une condamnation à mort. le viol comme arme de guerre en Syrie est aussi le crime le plus tu. C'est un moyen pour détruire non seulement la femme et son identité, mais aussi pour briser sa famille, son clan, et toute forme de résistance. Comment en Syrie le corps de la femme est-il devenu territoire de guerre ? C'est la question que soulève ce film en donnant la parole à des femmes jusque-là emmurées dans la honte et le silence.

“Vous nous filmez, les gens vont regarder et continueront leur chemin.”

Citations

“Leur arrive-t-il de douter, attablés devant leur tasse vide ?
Nomment ils ce qu'ils font ?
Combien de gorgées faut-il pour arriver au mot conscience ? (...)
Ont-ils un jour connu l'amour ?
Nom de Dieu, ont-ils un jour connu l'amour ?”

“Une petite chose pointe son nez.
De la taille d'un crime contre l'humanité.”

“J'ai écouté leurs voix. (...)
Sans blessée je suis devenue chacune d'elles.
J'ai regardé autour.
Je n'ai plus su ce que je voulais toucher.”

“Écrire ne doit pas seulement décrire. Non, cela ne suffit pas. (...)
Ce qui est dit est toujours dit pour dire autre chose.
Ainsi dure l'éternité.
Ainsi vous n'êtes jamais seule.
Ainsi ne tombe pas la nuit.”
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La douleur des femmes meurtries exprimée en prose laconique.

Des phrases courtes comme pour intensifier l'atrocité de leur traumatisme.
Un enchaînement de phrases pour dénoncer les crimes commis par les hommes.
L'apposition d'adjectifs, tous aussi puissants les uns que les autres, pour décrire l'innommable.

Un livre court, percutant avec phrases brèves qui prennent aux tripes.
Un pamphlet poignant cadencé par de courts chapitres.
C'est le choix qu'a fait l'autrice pour dénoncer ce qu'elle nomme "un crime contre l'humanité".

Et c'est réussi : efficace, bouleversant, saisissant, envoûtant et incisif.
Une belle découverte, et je remercie les Editions iXe et Babelio pour l'envoi de ce livre.
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Une petite chose pointe son nez. de la taille d'un crime contre l'humanité

La nuit silencieuse, presque continue des guerres et des viols de femmes, déchirée par des mots, des phrases, des projections. La force de l'expression littéraire contre le silence. « Des mots pour le dire, le corps des femmes dans le lointain, cela n'existe pas, prétendent-ils. Alors quel besoin d'avoir des oreilles, hein, pour écouter leur récit, celui du corps des femmes devenu lointain et pour lequel il n'existe pas de mots ».

Les chiens. le soi-disant corps sacré des femmes et leur négation en tant qu'être humaine. L'absence de mots et la violence des vocables des autres, « une bite terrible dans ce qui était leur corps pour lequel il n'existe pas de mots dans la langue officielle ». Des femmes violées et parfois tuées après. Ici aujourd'hui en Syrie, hier au Rwanda et ailleurs. le dégueulis des champs de guerre, les bites hors de toutes limites, les chiens violents, le viol comme arme d'Etat, les coups le jour et les viols la nuit, « Sous une lune suffisamment lointaine et diffuse / pour concerner tout le monde / ou personne. »…

Les cellules, la chambre des enquêtes, les pieds mous, « Ce n'est pas du domaine du dicible. / Tout ce sang pour le sol / n'a pas de mots », la perte de la mémoire, la perte de son humanité, la mémoire en morceaux, « Elle a retrouvé la mémoire de toutes les autres femmes, sur le sol, saccagée, sur le sol, en morceaux », des écorces et du sel, « Je me demande comment ils font en rentrant chez eux » et les femmes de l'ombre…

« Sur la râpe de la langue racle tout ce que la mort embarque : les copulations en chaîne dans le bourdonnement des mouches, vos ailes déchirées, les balles de paille sous vos paupières », la honte grondant sous les syllabes, « Viol est un mot. / Femme est un mot », l'inscription sur son front d'une faute qui n'est pas la sienne, « elle n'a juste rien fait », les portes de sa propre maison fermée lorsque les geôles se sont ouvertes, « Même les chiens ne peuvent aller plus loin que leur cadavre »…

Comme dans un rêve, le ventre trop gros, nue et chassée, la nuit et le désert, la torture prolongée à vie, la langue coupée et le silence, ce qui se putréfie d'être tu, « Donner un nom à ce qui échappe : le trop intime, le monstrueux », l'alphabet à remettre en ordre, les mots à désarticuler, « J'apprivoise le mot force, son féminin, sa singularité / Et vomis la barbarie que toute guerre déchaîne »

Des mots qui vous empoignent et laissent ouvertes les fractures. Un texte à faire connaître, « Ainsi ne tombe pas la nuit ».

Le texte est inspiré par le documentaire réalisé par Manon Loizeau en collaboration avec Annick Cojean, pour l'écriture, et Souad Wheidi, pour la traduction en français : Syrie, le cri étouffé.

Le film a été diffusé sur France 2 le 7 décembre 2017.

Il est disponible en ligne : https://www.youtube.com/watch?v=djqLnSaAR6w


Lien : https://entreleslignesentrel..
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Viol est un mot.
Femme est un mot.
Viol d'une femme est une combinaison meurtrière de mots.
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Ce livre est un coup de poing dans le ventre, qui nous met la rage et nous afflige. C'est la voix des femmes portée sur papier. C'est la guerre, le viol, la violence et la mort. C'est le sale. Cette obscure réalité qui est cachée, tout le temps, par tous, partout. le sang qui coule entre les cuisses, le ventre des femmes qui pourrit de l'intérieur.

Je ne peux que le recommander. Il est court. Il est intense. Il est violent. Si désespéré dans sa quête d'espoir. Si vous en avez l'occasion, lisez-le.
Lien : https://lentremonde.wordpres..
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Citations et extraits (6) Voir plus Ajouter une citation
V – Comme dans un rêve


JAMAIS D’ABORD, NI CONTRE…
Extrait 1

Jamais d’abord, ni contre, la densité d’un corps et le geste qui efface.
Qui tient au poids du silence.
Tout ce dont la langue fut coupée.
Tout ce qui se putréfie d’être tu.

Écrire.
Peu.

Donner un nom à ce qui échappe : le trop intime, le monstrueux.

Écrire avec la retenue des forêts.
Sans souffrance inutile pour les arbres manquants.

En dessous des épaules démarrent les brumes.
Coagule le sang.
Rien ne s’ouvre qui permette l’avant.
À mon poignet un autre mutisme.
Ça ne finit pas, non, ça ne finit pas.

(Ne pouvoir écrire, seconde mort)
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V – Comme dans un rêve


JAMAIS D’ABORD, NI CONTRE…
Extrait 3

Ne prononcez pas ces mots.
La seconde mort.

Celle qui se troue d’un blanc après que tout est fini.
L’oubli des victimes.

Non, ne vous fatiguez pas à prononcer ces mots.

Les égouts de l’histoire s’en chargeront.
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Des mots pour le dire, le corps des femmes dans le lointain, cela n’existe pas, prétendent-ils. Alors quel besoin d’avoir des oreilles, hein, pour écouter leur récit, celui du corps des femmes devenu lointain et pour lequel il n’existe pas de mots
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V – Comme dans un rêve


JAMAIS D’ABORD, NI CONTRE…
Extrait 2

Douleur
dédouble
chaque
minute
casse en deux chaque
sourire
ou bourgeon enivré de printemps

Nul arbre où grimper
(cabane où s’abriter)
nulle pluie où tomber
ni moineau vers le sud pour s’envoler

Dehors
le soleil (cet insouciant)
continue de tourner
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Sur la râpe de la langue racle tout ce que la mort embarque : les copulations en chaîne dans le bourdonnement des mouches, vos ailes déchirées, les balles de paille sous vos paupières
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