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Didier Lamaison (Éditeur scientifique)
EAN : 9782070720538
480 pages
Gallimard (01/01/1990)
4.25/5   4 notes
Résumé :
Carlos Drummond de Andrade, le plus sédentaire des globe-trotters de la poésie contemporaine, a parcouru, sans quitter le Brésil, des contrées tropicales où le sens surabonde en excroissances luxuriantes, des territoires polaires où l'on n'entend que la cacophonie de paroles gelées, et des pays tempérés où le vocable ne dit exactement que ce qu'il signifie. Symboliste, moderniste ou néoclassique ? L'ouvre ne se laisse pas distribuer ainsi en paliers de végétation. C... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
« Quand je suis né , un ange tortu
de ceux qui vivent dans l'ombre
a dit : « Va, Carlos, sois gauche dans la vie »*


J'ai découvert très récemment le grand poète brésilien Carlos Drummond de Andrade avec la merveilleuse petite anthologie bilingue Mort dans l'Avion et autres poèmes, traduits par Ariane Witkowsky. Aussi j'étais très contente de dénicher cette volumineuse anthologie à la bibli de mon quartier. J'ai commencé pleine d'enthousiasme. Et je suis tombée sur de grosses pierres au milieu du chemin.

D'abord la quatrième de couverture :
« Carlos Drummond de Andrade, le plus sédentaire des globe-trotters de la poésie contemporaine, a parcouru, sans quitter le Brésil, des contrées tropicales où le sens surabonde en excroissances luxuriantes, des territoires polaires où l'on n'entend que la cacophonie de paroles gelées, et des pays tempérés où le vocable ne dit exactement que ce qu' il signifie. »
Quel grotesque charabia pour vanter un poète humble et populaire !

Cette édition date de 1990 et a été rééditée en poche sous le titre La machine du monde ; et autres poèmes en 2005. Il semblerait que la traduction de Didier Lamaison ait été révisée. Tant mieux car j'ai noté dans celle de 1990 quelques bizarreries dès les premiers poèmes comme ce « tortu » que plus personne n'utilise aujourd'hui.

Et puis je ne comprends pas la traduction pour le moins étrange de « Au milieu du chemin » (p 5) l'un des poèmes les plus fameux du poète brésilien :

Au milieu du chemin j'avais une pierre
j'avais une pierre au milieu du chemin
j'avais une pierre
au milieu du chemin j'avais une pierre.
Jamais je n'oublierai cet évènement
dans la vie de mes rétines tant fatiguées.
Jamais je n'oublierai qu'au milieu du chemin
j'avais une pierre
j'avais une pierre au milieu du chemin
au milieu du chemin j'avais une pierre.

Anne Witkowsky traduisait ‘No meio do caminho tinha uma pedra » par «  Au milieu du chemin il y avait une pierre » :

Au milieu du chemin il y avait une pierre
il y avait une pierre au milieu du chemin
il y avait avait une pierre
Au milieu du chemin il y avait une pierre

Jamais je n'oublierai cet événement
dans la vie de mes rétines fatiguées.
Jamais je n'oublierai qu'au milieu du chemin
il y avait une pierre
Il y avait une pierre au milieu du chemin
au milieu du chemin il y avait une pierre.

(traduction d'Ariane Witkowsky )

Cela change carrément la signification de tout le poème ! Et Je ne repère pas de première personne dans le vers de Drummond. Mais Je serai curieuse d'avoir l'opinion d'un lusophone.


No meio do caminho tinha uma pedra
tinha uma pedra no meio do caminho
tinha uma pedra
no meio do caminho tinha uma pedra.

Nunca me esquecerei desse acontecimento
na vida de minhas retinas tão fatigadas.
Nunca me esquecerei que no meio do caminho
tinha uma pedra
tinha uma pedra no meio do caminho
no meio do caminho tinha uma pedra.


Enfin voilà je suis déçue.




*Poema de sete faces

Quando nasci, um anjo torto
desses que vivem na sombra
disse: Vai, Carlos ! ser gauche na vida.
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Citations et extraits (21) Voir plus Ajouter une citation
NOUVEAUX POÈMES
Novos Poemas 1948
L'ÉNIGME

Les pierres cheminaient sur la route. Voici qu'une forme
obscure leur barre le chemin. Chacune de s'interroger dans son expé-
rience propre. Elles connaissaient d'autres formes déambulantes, et
le danger de chaque objet circulant sur la terre. Celui-là, pourtant,
en rien il ne ressemble aux images triturées par l'expérience, pri-
sonnières de l'habitude ou domptées par l'instinct immémorial des
pierres. Les pierres s'arrêtent. Dans leur effort pour comprendre,
elles finissent par s'immobiliser tout à fait. Et dans la contention
de cet instant, se fixent les pierres ― pour toujours ― formant
au sol des montagnes colossales, ou bien, interdits et pitoyables,
de pauvres cailloux éperdus.

Mais la sombre chose ― démesurée, quant à elle ― est
là, à la manière des énigmes qui narguent l'effort d'interprétation.
C'est la fatalité propre des énigmes de ne pas se déchiffrer elles-
mêmes. Il leur manque une subtilité étrangère, qui les délivre de
leur damnée confusion. Et elles la rabrouent dans le même temps,
telle est la condition des énigmes. Celle-ci bloqua la progression
des pierres, troupeau pris au dépourvu, et demain figera de même
les arbres, en attendant qu'advienne le jour des vents, et celui des
oiseaux, et celui de l'air pullulant d'insectes et de vibrations, et
celui de toute vie, et celui de l'universelle capacité même de se
correspondre et de se compléter, qui survit à la conscience. L'énigme
tend à paralyser le monde.

Peut-être l'énorme Chose souffre-t-elle dans l'intimité de
ses fibres, mais elle ne s'apitoie ni sur elle-même ni sur ceux qu'elle
réduit à l'expectative congelée.

Hélas ! à quoi sert l'intelligence ― se lamentent les pierres.
Nous étions intelligentes ; cependant, penser la menace n'est pas l'éloi-
gner : c'est la créer.

Hélas ! à quoi sert la sensibilité ― pleurent les pierres. Nous
étions sensibles, et le don de miséricorde se retourne contre nous, alors
que nous comptions l'exercer envers les espèces moins favorisées.

La nuit vient, et le clair de lune, modulé de dolentes chan-
sons qui préexistent aux instruments de musique, répand dans la pro-
fondeur, déjà pleine de montagnes abruptes et de gisements ignorés,
une mélancolieuse mollesse.

Mais la Chose interceptante ne se résout pas. Elle barre le
chemin et médite, obscure.

p.101-102


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K

C'est une lettre qui cherche
la chaleur de l'alphabet.
C'est une lettre perdue
dans la pâleur de l'auberge.
Constante mathématique
dans la toile des variables,
une lettre s'évertue
à s'ériger en parole
qui jamais ne se façonne
ou s'oublie à la lecture
dans le cabinet obscur,
charbon extrait en plein jour.

Le point vient après la lettre
suivant son itinéraire.
Chien, esclave, moins que rien
pour assistant de recherche,
voué à se consumer
face à des constellations
de symboles plurivoques,
dupant lui-même son maître
en paraissant disputer
de la clé de ce mystère :
ce qui, dans l'oiseau, est vol.

K
Pourtant l'alphabet existe
en dehors de toute lettre,
en soi, pour soi, dans la grâce
d'exister, dans la misère
de n'être pas déchiffré,
quand bien même il est aimé.
Subitement le vocable
enflamme du sud au nord
l'espace neutre, et en lui
ne figure pas la lettre.
La lettre inappelée qui
exprime tout, et n'est rien.

p.184-185

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TEMPS AU SOLEIL

Assis sur leur seuil prennent le soleil
de vieux commerçants sans clients.
C'est un soleil fait pour eux : mitigé,
peu empressé de brûler. Le soleil des vieux.

Il n'entre plus personne dans la boutique obscure
ou si l'on y entre, on n'y achète rien. Tout est cher
ou bien les marchandises ont oublié
de se montrer. Les vieux commerçants
ne veulent-ils plus les vendre ? Une araignée
commence à tisser sur la pendule
murale. Et cette poussière sacrée sur les rayons.

Le soleil vient leur rendre visite. Le chapeau
sur la tête ils le reçoivent. S'il surgit
un acheteur inhabituel, quelle corvée.
Devoir se lever, prendre le mètre,
les ciseaux, déballer la pièce de toile,
répondre, informer, faire l'article.

Assis sur leur seuil, simples statues,
en savates et la barbe non rasée,
leur blanche tête ils remuent lentement
quand passe une connaissance. Qu'il ne s'arrête pas
pour parler des choses du temps. Le temps
est une chaise au soleil, et rien de plus.

p.258-259
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José

E agora, José?
A festa acabou,
a luz apagou,
o povo sumiu,
a noite esfriou,
e agora, José?
e agora, você?
você que é sem nome,
que zomba dos outros,
você que faz versos,
que ama, protesta?
e agora, José?

Está sem mulher,
está sem discurso,
está sem carinho,
já não pode beber,
já não pode fumar,
cuspir já não pode,
a noite esfriou,
o dia não veio,
o bonde não veio,
o riso não veio,
não veio a utopia
e tudo acabou
e tudo fugiu
e tudo mofou,
e agora, José?

E agora, José?
Sua doce palavra,
seu instante de febre,
sua gula e jejum,
sua biblioteca,
sua lavra de ouro,
seu terno de vidro,
sua incoerência,
seu ódio — e agora?

Com a chave na mão
quer abrir a porta,
não existe porta;
quer morrer no mar,
mas o mar secou;
quer ir para Minas,
Minas não há mais.
José, e agora?

Se você gritasse,
se você gemesse,
se você tocasse
a valsa vienense,
se você dormisse,
se você cansasse,
se você morresse...
Mas você não morre,
você é duro, José!

Sozinho no escuro
qual bicho-do-mato,
sem teogonia,
sem parede nua
para se encostar,
sem cavalo preto
que fuja a galope,
você marcha, José!
José, para onde?
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DISCOURS DE PRINTEMPS
Discurso de Primavera e Algumas Sombras 1977

LA MUSIQUE DE LA TERRE

Souffrance habite en nous, le clavier l'ignore.
La vie, une gavotte ? Est-ce pure danse,
que l'amour ? Et le menuet de Lully
contient-il la difficulté d'exister ?

Dans le chaos, angélique quintessence,
plane le grâce de Mozart sur l'abîme,
sans y pénétrer, c'est l'oiseau de la nue.
Le temps est d'autre métal, qui nous consume.

Il est urgent de rompre le goût, la norme
limpide et les éclats sanglants du moment,
passer à la noblesse de la sonate.
Extirper du piano le son dramatique.

Et susciter le dialogue pathétique
entre piano et violon, comme on entend
dans la pénombre de l'âme, et à deux voix,
une rumeur de passion s'entretissant.

Mais la musique quitte sa pureté.
Les séraphins et les elfes se séparent.
La terre est foyer des hommes , non des mythes.
Il convient de démasquer notre destin.

Incessamment tâtonnant, dans le conflit
corps à corps entre l'être et la contingence,
la nouvelle musique, ointe de tristesse
mais irradiant la force, entre dans le monde.

Lutte de l'homme dans l'aire désolée
de sa solitude ; lutte sur la scène
frémissant de contrastes, quand il perçoit
que peu à peu se referment les espaces

de la perception, et que tout se limite
à la captation interne de signaux
silencieux, impalpables, invisibles,
mais jamais aussi vifs que s'ils sont captés.

Tandis que la souffrance augmente et qu'autour
l'amour lui refuse ses baumes terrestres,
se perfectionne la fabrique sonore
qui éternise la vie brève par l'art.

Es muss sein ! Il faut ! Au cœur de l'amertume,
dans la déconvenue du corps, sublimée,
la chanson de l'héroïsme et de la joie
rédime notre misérable passage.

Alors la symphonie entrouvre ses paumes
immenses, pour contenir tout le troupeau
de frères perplexes, de tourmentés qui
sont en quête de direction et de sens

pour le bonheur de tous. L'homme se révèle
dans le torrent de la mélodie, supplante
son naître obscur, son incertaine vision
de l'au-delà, mêlée de mort et de peur.

Ô Beethoven, tu nous as montré l'aurore.

p.350-351-352
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Vidéo de Carlos Drummond de Andrade
Aporo - Lecture de Davi Arrigucci Jr. (IMS)
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