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EAN : 9782374910857
152 pages
Quidam (23/08/2018)
3.66/5   19 notes
Résumé :
Coucher par écrit, est-ce que c'est tromper ? pourrait écrire Herbert puisqu'il est écrivain. Car Herbert ne couche pas avec Coline, qui ne couche pas avec Herbert. Facebook est l'univers parallèle où se joue l'aventure de leurs doubles virtuels, qui ressemble à une histoire de fesses ou à une histoire d'amour, comment savoir dans un monde où apparemment rien n'est grave. A moins que les mots eux-mêmes ne puissent donner corps à leur étreinte imaginaire...
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Critiques, Analyses et Avis (13) Voir plus Ajouter une critique
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Quand la littérature s'empare des problématiques engendrées par les réseaux sociaux... Souvenez-vous, en janvier 2016, Camille Laurens publie Celle que vous croyez. le roman met en scène une femme, Claire, 48 ans, maître de conférences, qui, pour surveiller son amant volage, Jo, se crée un faux profil Facebook et entre en contact avec Chris, un des amis de l'amant. Elle se fait passer pour une jeune brunette de 24 ans et finit par tomber amoureuse du copain qui ne désire qu'une chose : la rencontrer… EN VRAI ! Qui est Claire, au fond ? Ce qu'elle est vraiment, dans la réalité, une femme mûre sur laquelle les hommes ne se retournent plus ? ou bien ce double qu'elle s'est créé, une femme drôle, pleine de charme et complètement craquante ? Cela nous amène d'ailleurs à réfléchir à la notion d'identité : sommes-nous ce que l'on VOIT de nous ? Ce serait réducteur de penser cela, mais pour beaucoup, on en est bien là ! Que doit faire Claire? Disparaître de la toile (une façon de mourir) ? ou rencontrer cet homme qu'elle aime au risque… que leur relation prenne fin ?
Plus récemment, Fabrice Caro, dans son roman le discours, place Adrien, son personnage, dans une situation terrible : ce dernier vient d'envoyer à son ex un message qui l'obsède parce qu'il le trouve complètement stupide, d'autant qu'il s'achève sur un point d'exclamation qui, selon lui, n'a pas lieu d'être et, le temps d'un repas de famille qui dure pour lui plus d'un siècle, il attend la réponse de cette ex qu'il aime encore, en se demandant de quelle façon elle va recevoir ce message complètement décalé par rapport à ce qu'il ressent ! Et le téléphone qui ne vibre pas ! Et la discussion qui roule maintenant sur les avantages du chauffage au sol ! Une torture ! Eh oui, avec nos smartphones nous avons acquis le don d'ubiquité : nous sommes ici et là-bas, avec ceux d'ici et ceux de là-bas, dans des espaces- temps différents. La schizophrénie nous guette, j'en suis bien persuadée ! Et puis, qu'est-ce que ces petits messages - parfois déformés par les caprices de nos smartphones et ponctués de smileys ricanant ou de GIFs caricaturaux - disent de la complexité de nos sentiments ? Pas grand-chose, je le crains !
Philippe Annocque, dans Seule la nuit tombe dans ses bras s'empare, lui, d'un autre aspect du même sujet : peut-on s'aimer sans se voir, sans se toucher, sans jamais se rencontrer ? Peut-on s'aimer de mots que l'on poste ici ou là, de tchats, de mails ou d'échanges téléphoniques furtifs ? Est-ce encore de l'amour ou est-ce autre chose ?
Herbert et Coline se sont rencontrés sur la toile. Ils sont tous deux mariés, ont un ou des enfants, habitent à plus de 750 km l'un de l'autre et ne se sont jamais rencontrés, physiquement je veux dire. Herbert est professeur des écoles et écrivain (ce qui ne lui sera pas inutile, je vous laisse découvrir pourquoi...), Coline enseigne l'espagnol. Leurs dates de vacances ne sont pas les mêmes : ils n'appartiennent pas à la même zone. Ce qui signifie que lorsque que l'un doit se consacrer à sa famille, l'autre attend et trouve le temps long car les messages sont plus rares et plus courts, forcément. Peut-on parler de « double vie » ? Oui, certainement, car très vite, on a l'impression que leurs échanges les accaparent complètement, esprit et corps.
Corps ? Oui car ils font l'amour, sans le faire, je veux dire avec des mots et des images. Bel usage du performatif… quand dire, c'est faire. Évidemment, cela donne des choses un peu comiques… quand il faut par exemple continuer à taper sur les touches (et relativement vite aussi pour qu'il n'y ait pas un décalage temporel trop important...) et se caresser en même temps ! Ou bien appuyer un peu longuement sur la touche H pour mimer l'orgasme… Pas très glamour tout ça ! Ou bien encore envoyer des images pas trop nulles de son propre corps dans des contre-plongées vaguement risquées (on n'a pas tous des talents de photographe et le résultat peut être un brin décevant!) Amour et technique ne riment pas ensemble et ni l'un ni l'autre ne sont simples, alors les deux réunis…
Peut-on vraiment parler d'amour ? Ou bien, sont-ce des échanges bien dérisoires émis par deux pauvres adulescents un brin (voire franchement) ridicules ?
Ce qu'ils vivent fait-il encore partie du réel ou bien est-ce que cela appartient au virtuel, au vide, au rien ? Est-ce que les liens que nous bâtissons avec des gens que nous n'avons jamais rencontrés et que nous ne rencontrerons peut-être jamais sont de vrais liens? Est-ce qu'ils existent vraiment ?
Par ailleurs, s'ils sont de l'ordre du vide et du vent, est-ce immoral de tromper son conjoint par des mots, seulement des mots ? Cela relève-t-il même du champ de la morale puisque les corps ne se touchent pas et qu'il ne restera, au fond, aucune trace tangible de tout cela ?
Et si cette relation prend fin, est-ce que tout se passe comme si rien n'avait jamais existé ? Ce qui a eu lieu n'est-il qu'illusion, rêve, souffle de vent ?
Au fond, ne devenons-nous pas des êtres de mots, autrement dit de fiction, de littérature dès lors que nous n'existons que par des phrases ?
Voilà un petit aperçu des questions que soulève Seule la nuit tombe dans ses bras, une belle histoire d'amour, allais-je écrire, oui, car c'est comme ça que je l'ai lue pour finir, une belle histoire d'amour, peut-être même - et contrairement aux apparences - plus dense, plus forte, plus sincère que bien d'autres, que celles qui se passent dans la vraie vie, the real life, celle où les corps se rencontrent - pour de vrai.
Parce que, dites-moi, si les corps ne se rencontrent pas, cela signifierait-il que rien n'existe ? Étrange conception, non ?
Un livre aux questionnements insondables…
Une belle réussite !
Lien : http://lireaulit.blogspot.fr/
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Il y a des livres qui dérangent.
Seule la nuit tombe dans ses bras, fait partie de ces livres qui me chagrinent.
Herbert écrit.
Herbert est marié.
Herbert est heureux.
Via les réseaux sociaux, il discute avec Coline.
Coline est mariée.
Coline est heureuse.
Mais voilà, il leur manque peut-être un peu de piment dans leurs vies heureuses.
Alors, un jour Coline va plus loin qu'une simple conversation.
Alors Herbert est choqué.
Enfin, pas vraiment.
Je ne vais pas vous faire tout le roman.
Philippe Annocque nous raconte une liaison particulière.
Une histoire d'amour qui se cache.
Il était une fois un homme et une femme.
Il était une fois une passion.
Écrit dans la peau  du protagoniste, écrit avec la sincérité d'une histoire compliquée, écrit avec la crudité des mots.
Protégez vos chastes oreilles ou délectez -vous d'un langage châtié.
C'est brut.
Annocque n'édulcore pas.
Annocque n'enjolive pas.
Seule la nuit tombe dans ses bras est un roman d'aujourd'hui, un roman qui nous parle de nous, de nos relations, de ces réseaux qui envahissent notre quotidien et bouleversent nos vies.
Je suis rentré dans l'intimité de ces personnages, j'ai lu leurs échanges, c'est ce côté voyeur qui m'a dérangé, pendant que je lisais, j'avais l'impression qu'une caméra était braquée sur moi, épiant mes moindres gestes, enregistrant mes mots.
Ça donne des frissons.
On aime ou on n'aime pas, c'est comme dans la vraie vie...
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« Il y avait un truc qui s'était emballé en lui et qu'il ne contrôlait plus. C'était comme un cheval. C'était lui et ce n'était pas lui. Mais c'était plus fort que lui. Il se disait que peut-être ça avait été pareil pour elle, juste avant, et que ça avait tiré si fort que ça s'était rompu, et qu'elle était restée là, les yeux ouverts sur l'absurdité de la situation, à regarder leur histoire qui s'échappait au loin déjà. Bien sûr que la situation était absurde. Mais qu'est-ce qui ne l'était pas ? »
Herbert est écrivain, il tient un compte Facebook promotionnel. Il aime à y laisser des statuts cryptiques, poétiques, curieux, d'abord par goût bien sûr, ensuite pour attirer, fidéliser, animer ses lecteurs avérés ou potentiels. le livre commence par celui-ci : « Il avait tellement d'imagination qu'il n'avait pas besoin de l'avoir pour avoir peur de la perdre. » Il est content de lui, sur ce statut, il lui semble – et c'est important pour lui, en général -, qu'on peut l'interpréter de différentes manières, et il espère que Coline, elle, comprendra qu'il s'adresse secrètement à elle. Coline habite à l'autre bout de la France, elle est prof, comme lui. Ils avaient un ami virtuel commun et Facebook leur a permis de se connaitre. C'est-à-dire qu'elle a commenté intelligemment un de ses statuts, il a répondu aimablement (« aimable, il l'est toujours, par principe; il n'a pas suffisamment de lecteurs pour se permettre de mettre dans le vent ceux qui lui écrivent aimablement, même si au fond il n'aime pas trop qu'on lui écrive. ») et une chose en entraînant une autre une relation, purement virtuelle, s'est nouée entre eux.
« Les sentiments, on peut les dire à la rigueur, mais on ne peut pas en parler. »
Ils passent pourtant des heures à tchatter, de tout et de rien aussi, mais d'eux, surtout, ce ce qui se passe entre eux. Il y a eu une progression dans leur manière de se découvrir l'un-l'autre, mais peu conventionnelle. Très vite (trop vite, sans doute), ils font cet amour qu'on dit virtuel et qui consiste à exciter l'autre par des photos, des vidéos, des mots surtout, écrits, et énoncés au téléphone.
Mais ils ne se se sont jamais rencontrés « en vrai ».
Tous deux mariés et parents, ils jouent. Ça ne compte pas, c'est pour du beurre…
C'est la première fois que je lis Philippe Annocque et je ne suis pas en mesure, à ce titre, de comparer ce texte à ce qu'il écrit habituellement. Je l'ai lu comme vrai à cent pour cent, il m'a semblé en tout cas à moi parfaitement sincère, et si c'est une pure fiction c'est d'une vraisemblance étonnante. On est très loin d'une romance à la Daniel Glattauer, qui relatait pourtant déjà ces emballements issus de la communication virtuelle. Aucune idéalisation, pas de romanesque, une pointe de sordide même parfois, le Léo de cette histoire-ci analyse énormément, subit en quelque sorte beaucoup plus les choses, mais est pourtant capable d'occulter totalement le reste de sa « vraie » vie pour se focaliser sur ce qui concerne Coline. Il est en cela bien aidé par son statut d'écrivain, ah si c'est pour un roman, n'est-ce-pas, c'est différent.
Alors, tchatter est-ce tromper ? Chacun se fera sa propre réponse, aidé par les nombreuses questions soulevées au fil des pages. Un roman intelligent et réaliste.
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C'est l'histoire d'un roman qui héberge un autre roman, qui lui-même n'est que le réceptacle d'une histoire sans cesse réinventée... Une mise en abyme subtile à travers les mots, matériau de l'écrivain, matière première de l'auteur qui les sème comme des petites graines qui germeront ensuite dans l'esprit de chaque lecteur. Et pour l'illustrer, quel meilleur sujet que l'amour ?

Oui, mais l'amour au 21ème siècle, à l'heure des écrans, des réseaux sociaux et des messageries instantanées. Est-ce que ces outils facilitent l'adultère ? Certainement. Est-ce qu'ils modifient la nature des sentiments et des relations ? Comment ne pas le penser ? Néanmoins, la relation que met en scène Philippe Annocque est uniquement virtuelle... Alors, est-ce que cliquer c'est tromper ? Outre le fait que chaque lecteur se fera sa propre opinion, en fait, la réponse on s'en fout un peu. C'est le jeu qui ici est intéressant et le miroir qui nous est tendu à l'aune de l'auscultation de la relation entre Herbert et Coline. Tous deux enseignants mais à des centaines de kilomètres de distance. Leur relation est née sur Facebook, s'est poursuivie via messagerie et mails. S'est intensifiée par l'échange de photos plus que suggestives. Sans qu'ils ne se soient jamais rencontrés. Sans que leurs mariages et familles respectifs n'aient jamais été remis en question. Herbert écrit ici le roman de leur histoire. Mais ne l'a-t-il pas déjà écrit par les mots mêmes échangés avec Coline ?

Naviguer à travers les états d'âme et les réflexions d'Herbert a un petit goût bien savoureux. le regarder s'interroger sur le meilleur moyen de relancer l'intérêt de Coline - un texto ou un mail ? -, réagir face à l'envoi de photos de plus en plus crues de la part de Coline ou encore tenter de relater le plus fidèlement possible les différentes étapes de cette relation, voilà qui a de quoi faire sourire. Mais un peu jaune tout de même pour ce que tout ce cirque révèle de notre société.

"Les gifs animés sont les oracles de notre temps. Ils nous annoncent notre avenir. En piètre aruspice qu'il a toujours été, il n'avait pas su interpréter celui-là."

C'est que, virtuelle ou pas, une femme reste une femme. Et le jeu amoureux n'en est pas pour autant débarrassé de ce qui en fait le charme. Autrefois, il fallait lire entre les lignes. Désormais, il faut interpréter les images, voire même les canaux utilisés. C'est pourtant bien avec des mots que l'écrivain Herbert choisit de raconter cette histoire et d'en faire un roman. Une raison supplémentaire de se réjouir et de jouir de cette prose maligne. Qui invite à s'interroger sur l'amour, celui qu'on idéalise comme celui du quotidien. Celui dont on a tendance à faire toute une histoire.

"Il ne croyait pas à l'idéal. Il avait admis depuis longtemps et une fois pour toutes, que la vie n'est qu'une longue succession de compromis, qui permettait de remettre la mort à plus tard. Certains compromis étaient plus avantageux que d'autres, indiscutablement. Il tentait d'aller vers ceux-là, dans une démarche consciente et sans illusions. C'est ce qu'il se disait".
Lien : http://www.motspourmots.fr/2..
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Nous ne pouvons que nous réjouir dès la lecture des premières pages : dans la préface rédigée par l'auteur, il est question d'actes performatifs, notion de pragmatique centrale décrite avec brio par AUSTIN dans son ouvrage théorique « Quand dire c'est faire ». Cela pose immédiatement la problématique centrale de l'ouvrage, qui sera servie par l'intrigue et qui cherche à questionner la place du virtuel dans le sentiment amoureux, dans l'infidélité. Est-ce que faire l'amour virtuellement a valeur d'acte concret ou alors n'est-ce pas grave puisque déconnecté du quotidien ?

Les protagonistes tentent dans un premier temps de se persuader que cela n'a pas de rapport. Herbert, écrivain (par ailleurs personnage récurrent des romans de ANNOCQUE), marié avec deux enfants, et Coline, enseignante, mariée elle aussi et mère d'une fille unique, se rencontrent sur le réseau social à la bannière bleue que nous connaissons tou-tes. Suite à un statut promotionnel concernant son roman, lui et Coline « s'ajoutent » comme « ami-es » et vont commencer une correspondance épistolaire, via Internet ou les smartphones. Leur début d'histoire est lui-même assez flou, Herbert tente de se souvenir, c'est Coline qui lui rafraîchit la mémoire. On retrouve chez ces deux-là un plaisir assez évident à se remémorer leurs débuts, leurs premiers mots, leurs premières sensations. C'est Coline qui fera un pas vers Herbert, un pas tout sauf innocent qui entraînera une dégringolade vers des sentiers interdits par l'engagement marital.

Car ils dépassent clairement les bornes. En plus des mots d'amour échangés et vite effacés, pour que les conjoints n'en sachent rien, s'ajoutent rapidement les photos suggestives d'une Coline généreusement pourvue par la nature qui n'hésite pas à s'afficher en soutien gorge bleu indigo (une bretelle pour démarrer, la lisière d'une dentelle dépassant négligemment, séquence voyeurisme évident), en nuisette sexy ou même carrément nue. Herbert lui emboîte le pas allègrement mais les atours masculins s'accommodent moins d'une mise en scène sensuelle, ce qui nous donne dès le départ des situations drolatiques quand on imagine, ne serait-ce que deux secondes, les ressources que l'homme va devoir trouver pour lui aussi susciter le désir chez sa partenaire. de là peut naître la passion, la vraie, celle qui assèche la gorge et fait soulever des montagnes. L'érotisme est très présent, obsédant, peut-être un peu trop, l'auteur en est d'ailleurs parfaitement conscient : « C'est trop là. Il y a trop de sexe. Si jamais ce livre est publié un jour, le lecteur va faire une overdose ». N'empêche que l'interdépendance est bien concrètisée en une fusion commune sans recul, une certaine osmose qui va déclencher une jalousie réciproque.

Tout s'enchaîne très vite : amour et désamour, sans cesse renouvelés, réécrits, rejoués à l'infini, oscillation itérative, douche suédoise en quelque sorte. Car c'est là tout le sel des relations à distance : large part au fantasme et à l'imagination, l'on donne ce que l'on veut, le meilleur de soi sans doute mais en arrière-plan, la vie suit son cours, les conjoints sont là et les vacances en famille, sorte de retour brusque à la réalité (moins de solitude, moins d'échanges adultérins) où l'on met sans cesse en perspective ce que l'on fait comme une routine et où la culpabilité peut venir nous chatouiller les doigts de pied. Remise en question de la vie parallèle.

ANNOCQUE ne répond pas à la problématique. Par choix ? À notre sens, non. Il n'y a pas de réponse autre que celle formulée par notre morale personnelle. Il est dit à de nombreuses reprises que les protagonistes jamais ne quitteraient leurs conjoints respectifs, même si le fantasme d'une vie rêvée à deux fait surface parfois, par bribes interprétées mais sur lesquelles on revient pour s'en défendre avec véhémence. Voilà un roman moderne qui utilise les outils de communication modernes pour laisser entrevoir (toujours le voyeurisme dans ce terme) une histoire d'amour moderne, mais dont pourtant la trame de fond n'est pas si éloignée des romans épistolaires du XIXe siècle. Un roman également en forme d'exploration du temps passé, du temps perdu, où deux adultes ancrés dans leur quotidien familial retombent en pleine adolescence par le biais de la séduction à tout crin. Les deux acteurs semblent embourbés dans une spirale de l'érotisme virtuel sans issue.

Le titre du roman fait référence à un statut F**k posté par Herbert un soir de grande mélancolie après un énième passage à vide dans cette relation à cent à l'heure, alors qu'il vient de retrouver la Coline qu'il aime tant. Les heures défilent, c'est dans la nuit qu'ils peuvent se faire face en toute liberté, grâce au chat présent sur la plateforme bleue. Ils s'endorment presque ensemble, sur cette métaphore poétique ou seul le premier terme se voit modifié par l'auteur pour le titre de ce livre : initialement « même la nuit tombe dans ses bras » devient « seule la nuit tombe dans ses bras ». Je vous laisse à votre interprétation personnelle et vous renvoie à cet ouvrage qui parle de la vie, de l'extraordinaire pourtant fort ordinaire, de cette singularité lumineuse de la relation adultérine qui reste néanmoins chaste (dans les actes) mais qui est d'une banalité notoire. Un flirt poussé très flou, à la frontière de la réalité.
À lire, pour s'identifier peut-être ?
https://deslivresrances.blogspot.fr/
Lien : https://deslivresrances.blog..
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Citations et extraits (15) Voir plus Ajouter une citation
Il avait tellement d’imagination qu’il n’avait pas besoin de l’avoir pour avoir peur de la perdre.
Il relit sa phrase. C’est une belle phrase. Elle dit bien ce qu’il ressent, là. Il va la poster sur Facebook et comme ça elle va la voir, elle va comprendre. Ce sera comme un cri murmuré, ce phénomène acoustique qui permet à deux personnes éloignées de s’entendre à l’insu de la foule qui les entoure, d’un pilastre à l’autre du Pavaglione, dans La Tenda rouge de Bologne de John Berger. Et peut-être dans la réalité. Il va la poster sur Facebook et les autres, ses contacts, ses « amis », croiront juste qu’il écrit un nouveau roman. Après tout, peut-être qu’ils ne se tromperont pas ; peut-être qu’il écrit un nouveau roman. Oui : peut-être bien après tout qu’il est en train d’écrire un nouveau roman.
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l avait tellement d’imagination qu’il n’avait pas besoin de l’avoir pour avoir peur de la perdre.
Il relit sa phrase. C’est une belle phrase. Elle dit bien ce qu’il ressent, là. Il va la poster sur Facebook et comme ça elle va la voir, elle va comprendre. Ce sera comme un cri murmuré, ce phénomène acoustique qui permet à deux personnes éloignées de s’entendre à l’insu de la foule qui les entoure, d’un pilastre à l’autre du Pavaglione, dans La Tenda rouge de Bologne de John Berger. Et peut-être dans la réalité. Il va la poster sur Facebook et les autres, ses contacts, ses « amis », croiront juste qu’il écrit un nouveau roman. Après tout, peut-être qu’ils ne se tromperont pas ; peut-être qu’il écrit un nouveau roman. Oui : peut-être bien après tout qu’il est en train d’écrire un nouveau roman.
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Il l'écrit : dans les bras l'un de l'autre. Ça lui fait plaisir d'écrire ça, alors qu'ils ne se sont jamais touchés, qu'ils ne se sont même jamais vus. N'empêche : en esprit, ils étaient dans les bras l'un de l'autre. Car l'esprit aussi a des bras.

C'est sans doute pour ça qu'il est tellement tenté de se ressouvenir. Parce que si lui ne s'en souvient pas, alors qu'en effet ils ne se sont jamais vus, jamais touchés, jamais embrassés, ce sera comme s'il ne s'était jamais rien passé. Alors qu'il s'en est tellement passé.
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Il se souvient d’un mot, quand même. Attirant. Ca le concernait. Il était attirant. Comment avait-elle formulé sa phrase ? Elle ne lui avait tout de même pas sorti « Vous êtes attirant » tout de go, comme ça. Quand même. Oui, il croit bien se rappeler avoir pensé qu’elle n’avait pas froid aux yeux, de lui dire, comme ça, qu’il était attirant. Mais comment le lui a-t-elle dit ? Le mot s’est imposé, il a effacé tout le reste de la phrase. Il a juste retenu qu’il était attirant. Il a même dû se le dire : je suis attirant.
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En écrivant « j'ai vraiment des choses à te dire », il avait le sentiment d'avoir plein de choses à lui dire. En relisant « j'ai vraiment des choses à te dire », il se demandait s'il aurait vraiment tant de choses à lui dire. Tant de choses à dire. Il se demandait s'il avait des choses à dire. Quelque part dans sa vie, quelque part dans le monde, des choses à dire.
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Vidéo de Philippe Annocque
SOIRÉE DE LANCEMENT DE LA REVUE CATASTROPHES #3
Avec Philippe Annocque, Guillaume Condello, Frédéric Forte, Julia Lepère, Cécile Riou & Pierre Vinclair
Catastrophes est une revue d'écritures sérielles, animée par Laurent Albarracin, Guillaume Condello et Pierre Vinclair. Bimestrielle en ligne (30 numéros sont parus), elle paraît tous les 18 mois en format papier, sous la forme d'une anthologie comprenant certaines des propositions poétiques les plus stimulantes de l'époque. Les quatre ensembles qui composent Catastrophes 3, « Dit impossible », « Rites rêvés », « Traduit en langue fauve » et « Mondes suspendus », présentent tous une dimension des rapports du poème, dans son essentielle étrangeté, à un monde qui ne fut pas toujours là et qui disparaîtra peut-être : assumer l'impossible, rêver d'une parole rituelle, articuler dans la langue commune une parole fauve, penser dans le vertige de la disparition, sont autant de promesses, fragiles, de faire de l'écriture le lieu d'une création radicale, à même d'exorciser la fatalité du néant.
À lire – Revue Catastrophes 3, coll. « S!NG », éd. le corridor bleu, 2021.
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