Grand classique de la littérature espagnole, écrit dans une langue truculente. Sept chapitres, chacun dédié à l'un des sept maîtres successifs auprès desquels le jeune Lazare va offrir ses services, en échange du pain et du couvert. En fait, on va voir que la plupart de ses employeurs vont chercher à l'exploiter au maximum. Il va souffrir de la faim, et il nous en fait part avec sincérité, sans jamais vraiment se plaindre sur lui-même.
Petit à petit, Lazare va développer une certaine ruse pour survivre dans une société qui n'est guère tendre pour les gens de sa condition. Les portraits de ses maîtres, qu'il s'agisse du mendiant aveugle mais roublard, du retors vendeur d'indulgences, ou du gentilhomme pauvre qui prétend n'avoir jamais faim par crainte du déshonneur, forment une description incisive de la société d'alors.
Dans cette édition préfacée par
Marcel Duviols, la graphie a été modernisée, mais la langue préservée. D'autres traducteurs avaient choisi de transposer le roman dans le vocabulaire du 16ème siècle: avec des termes comme "oncques" (pour traduire jamais) ou encore "moult" (beaucoup) cela donnait une impression de lourdeur et de fausseté. Rien de tel dans cette édition, qui restitue le naturel et la simplicité du parler d'un jeune garçon pauvre, s'exprimant en langage familier.
Grâce à la préface, limpide, et aux nombreuses notes du traducteur (en français, celles-ci), même si l'on a comme moi un niveau moyen en espagnol, on profite à plein de ce petit livre séminal: on pense aux fourberies de Scapin ou aux ruses de Figaro... preuve que les bons livres défient le temps!