L'entretien que nous sommes

Tracts de Crise (N°56) - L'Entretien que nous sommes de Pierre Assouline, du 23 Avril 2020 porte ce regard sur la toile et notre conversation nouvelle avec celle-ci dans ce confinement forcé où la solitude pèse à chacun. Cet auteur, je l'avais rencontré dans son roman Vies de Job, oeuvre complexe sur Job et son empreinte dans l'histoire et sa vie, ici la conversation, cet objet orale devenu écrit, une prose à la jetée, à la criée, une verve de haine, un exutoire impalpable, une force destructrice, mais aussi une bulle d'air, une poésie soudaine, une invitation de soi vers l'autre, un écho de notre personne, ce miroir déformant des humeurs de chacun et de sa mégalo.
Pierre Assouline décrit avec beaucoup de vérité cette forme nouvelle de parole à l'autre et l'introduit avec cette citation du Criticon de Baltasar Gracián.
« Tout bon entendeur doit y trouver salut et s'y retrouver, non sali »
Et pour lui converser c'est se mettre en société, et internet est la scène nouvelle pour parler, même si le pire côtoie le mauvais, c'est la communication de l'avenir, porter par une nouvelle technologique. C'est là où le temps s'étire, le monde est là à nos pieds, il n'y a plus de fuseaux horaires, c'est toujours en mouvement, comme la société de consommation, ce qui est nouveau devient ancien, comme la parole dans ce va et vient, la vérité devient fausse mais vice versa. Pierre Assouline se pose cette question soudaine.
« Ainsi le nouveau siècle réhabilite-t-il la conversation comme un rite. »
Et se pose cet adage connu de tous, je pense donc je suis, qui se transforme en, je commente donc je suis ou j'écris donc j'existe. Cette conversation virtuelle débarrassée de ces parasites les plus malsaines qu'ils soient, reste-t-elle une vraie conversation ludique, comme le dit Pierre Assouline de « bonne compagnie », nous pouvons discuter avec notre voisin sans le savoir et le voir tous les jours sans lui parler dans ce réel qui en devient virtuel !

C'est dans un optimiste que l'auteur nous décrit la communication à l'heure du web, qui en crise Covid augmente de façon considérable, jusqu'à en redevenir aux fondamentaux d'échanger sur ce que l'on est, et non ce que l'on fait. Pierre Assouline nuance toutefois avec les effets négatifs du web et se demande en matière de conversation, si malgré le fait qu'elle soit abondante à nouveau, est-elle toujours de "bonne compagnie" ?